MANIFESTE DES CHRÉTIENS INDIGNÉS, par Serge Lellouche

Billet invité. Le projet décrit dans le « Manifeste des chrétiens indignés » est distinct de celui que nous élaborons collectivement ici. Il m’a semblé cependant qu’une convergence suffisante existait entre les deux pour qu’une discussion de ce manifeste, ici sur le blog, constitue un exercice utile et, espérons-le, fructueux.

En rédigeant le manifeste des chrétiens indignés, nous avons voulu exprimer l’incompatibilité profonde entre l’ordre libéral en vigueur et notre espérance évangélique.

Celle-ci, avant tout dans la conversion personnelle, et en prolongement par la transformation progressive de nos modes de vie, nous appelle à faire le choix radical de la sobriété et du partage, contre celui de l’avidité et de la compétitivité entre les hommes qui caractérise intrinsèquement l’ordre capitaliste.

Nous nous positionnons dans la continuité de Benoit XVI qui souligne cette incompatibilité de plus en plus fermement dans ses discours, tout comme la conférence des Evêques de France, encore récemment dans un petit livret intitulé « grandir dans la crise ».

C’est un choix de vie qui appelle à sortir de l’illusion mortifère de la croissance économique, qui sous-couvert d’une prospérité qui de fait ne profite qu’à un tout petit nombre, a engendré la division, l’appauvrissement et une destruction dramatique de l’ensemble des écosystèmes. A moins de s’obstiner dans le déni du réel, qui peut aujourd’hui contester cela ? Le combat catholique pour la vie se joue bien évidemment ici aussi.

Par ce positionnement, qui entend établir un lien entre la Doctrine Sociale de l’Eglise et les mouvements d’objecteurs de croissance, nous ne nous trompons pas de combat : nous ne croyons pas au paradis terrestre, l’espérance chrétienne n’est pas de nature politique, notre engagement politique au cœur des débats qui agitent la cité, ne peut donc qu’être relatif, subordonné à notre foi.

Mais entre l’illusion du paradis terrestre et la défense complaisante du statu quo libéral, il y a heureusement un vaste espace, vers lequel Benoit XVI, encore dans sa récente homélie de Noël, nous invite prophétiquement à converger : « si nous voulons trouver le Dieu apparu comme un enfant, alors nous devons descendre du cheval de notre raison libérale.

Manifeste des chrétiens indignés

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392 réponses à “MANIFESTE DES CHRÉTIENS INDIGNÉS, par Serge Lellouche”

  1. Avatar de OLIVIER
    OLIVIER

    @Yogi
    Deux remarques. D’abord, il ne semble pas que je m’adresse à un texan, chinois ou Français du XVIIIe, je m’adresse à la personne cachée derrière le pseudo de Yogi, a priori douée de raison et capable de penser par elle-même. Tout m’incite en effet à penser qu’il s’agit d’un occidental né au XXième siècle. Ensuite, il ne vous a pas échappé, je pense, que ce blog s’attache à remettre l’homme au centre de l’économie, c’est pourquoi je trouve votre remarque: « anthropocentrisme forcené du XXe siècle », tout a fait cohérente avec les objectifs de ce blog.
    Si pour vous « Il n’y a aucune différence de traitement », merci de dire où est l’erreur et de motiver VOTRE avis.

  2. Avatar de Yogi
    Yogi

    @ OLIVIER : A la relecture, je ne suis pas sûr de bien comprendre votre question, d’autant que les objectifs de ce blog sont une chose, mais la discussion en cours sur le caractère de l’homme comme étant « sacré » et « à part du règne animal » en sont une autre.

    Donc si la question est : « Y a-t-il une différence fondamentale entre le comportement animal et le comportement humain » ma réponse est non, il y a continuité, il y a « perfectionnement », mais les animaux comparables aux hommes (en termes de physiologie, vie sociale, facteurs de survie) ont une « morale naturelle » comparable aux hommes. Penser l’homme unique de ce point de vue c’est faire preuve d’anthropocentrisme.

    Si la question est : « Pourquoi acceptons-nous de faire subir aux animaux des traitements que nous n’acceptons pas pour les autres humains » ma réponse est que cette différence est purement culturelle et conjoncturelle. Sur ce sujet les réponses qui paraissent aller de soi à un occidental du XXème siècle n’ont rien d’absolu, ni dans d’autres temps ni sous d’autres cieux. Les penser incontestables c’est faire preuve d’occidentalisme.

    Pour ma part, étant humain et étant le fruit de ma culture, je considère en effet qu’un humain a plus de « valeur » qu’un animal, et je ne suis pas trop sûr de savoir « où est l’erreur » que vous me sommez d’expliquer.

  3. Avatar de OLIVIER
    OLIVIER

    @Yogi
    Euh, vous ne pouviez pas comprendre ma question, puisqu’il manque un paragraphe (je pense qu’il a été censuré), qui décrivait les traitements (que vous avez jugé égaux quelques posts plus haut) que vous accepteriez pour les animaux et pas pour l’homme.
    Vous dites: »Pour ma part, étant humain et étant le fruit de ma culture, je considère en effet qu’un humain a plus de « valeur » qu’un animal ». Bien, nous sommes parfaitement d’accord. Mais la question, à laquelle je vous demande VOTRE réponse est: Pourquoi?

  4. Avatar de OLIVIER
    OLIVIER

    @Flavien
    Je comprends (je crois) votre questionnement. Mais le problème est mal posé.
    Nous avons tous des croyances. Ainsi le fait de penser que notre monde, et l’homme lui-même, est un pur fruit du hasard est une croyance. Le matérialiste athée est aussi une croyance. Certains pensent et adhèrent à une volonté créatrice continue (foi), c’est encore une croyance, n’est-ce pas ?
    Oui, ces croyances séparent indubitablement (plutôt que divisent) sur certains sujets de société, mais peuvent rapprocher sur d’autres. Ainsi en est-il de la place de l’homme dans l’économie que beaucoup, c’est le projet de ce blog, souhaitent centrale. Si on commence à penser ou dire, a priori, que l’on va se compromettre avec des croyants d’un autre bord en collaborant à cet idéal assez élevé, comment lèvera-t-on les troupes ?

  5. Avatar de Yogi
    Yogi

    @ OLIVIER :

    je considère en effet qu’un humain a plus de « valeur » qu’un animal […] Mais la question, à laquelle je vous demande VOTRE réponse est: Pourquoi? »

    C’est une bonne question. Je pense qu’au fond c’est une pure convention, confortable et à laquelle il nous plaît donc d’adhérer, et basée sur notre perception du « niveau de conscience » des autres êtres vivants.

    Mais outre le fait que pour certains peuples la vie animale est sacrée, même pour notre civilisation si nous parvenons un jour à établir un dialogue suffisamment étayé avec des dauphins par exemple, nous serons sûrement amenés à réviser notre vision anthropocentrique.

    Nous avons tous des croyances.[…] Le matérialiste athée est aussi une croyance.

    Disons que certaines « croyances » sont confirmées par des expériences qui peuvent être menées par tout être humain qui s’en donne la peine, et d’autres non. On notera que les seules à être confirmées sont celles relevant du « matérialisme athée », les autres croyances sont soit invalidées soit indistinguables d’une hallucination.

    Quant à la question de la place de l’homme dans l’économie, ce n’est pas une question philosophique (cette place est centrale, personne n’en doute, l’économie est faite « par » et « pour » l’homme) c’est une question politique : entre tous les hommes, quelle répartition entre le « par » et le « pour » ?

    1. Avatar de kercoz
      kercoz

      @YOGI:
      //// Quant à la question de la place de l’homme dans l’économie, ce n’est pas une question philosophique (cette place est centrale, personne n’en doute, l’économie est faite « par » et « pour » l’homme) ////
      En etes vous si sur ?
      N’ y aurait il pas place pour la thèse « organiciste » ou l’émergence d’ un système prend une autonomie suffisante pour privilègier ses interets meme s’ils divergent des notres ?
      La thèse de la perte de controle me semble défendable.

      1. Avatar de Jean Saurat
        Jean Saurat

        L’organicisme est une orientation philosophique qui affirme que la réalité est mieux comprise comme un tout organique. Par définition, il est proche de holisme, et le terme d’organicisme est préféré en ce qui concerne la biologie. Platon, Thomas Hobbes ou Constantin Brunner sont des exemples de cette pensée philosophique.

        L’organicisme est également une doctrine biologique qui met l’accent sur l’organisation, plutôt que sur la composition, des organismes. Le terme, qui a été repris par William Emerson Ritter en 1919, a été inventé par le médecin français Léon Rostan dans une publication parue en 1846, Exposition du principe de l’organicisme1. Il est devenu bien accepté au XXe siècle.

        L’organicisme a également été utilisé pour caractériser les notions de sciences sociales assimilant la société humaine à un organisme, et les humains à ses cellules. Ce type d’organicisme a été théorisé par Alfred Espinas, Paul von Lilienfeld, Jacques Novicow, Albert Schäffle, Herbert Spencer, et René Worms, entre autres

      2. Avatar de kercoz
        kercoz

        @Jean Saurat :
        Le rapprochement est troublant qd on constate que les cellules , pour former un etre complexe, doivent se spécialiser, et que ce faisant , elles perdent autonomie, liberté et immortalité.
        On peut aussi , au constat qu’en se spécialisant progressivement et donc en se fragilisant, l’espece essaie d’occuper une place du vivant quitte a accepter une entropie augmentée.

      3. Avatar de Yogi
        Yogi

        @ kercoz :

        N’ y aurait il pas place pour la thèse « organiciste » ou l’émergence d’ un système prend une autonomie suffisante pour privilègier ses interets meme s’ils divergent des notres ?

        Hmm, vous avez raison. Mais ce débat me paraît différent de celui engagé avec Olivier qui porte plutôt, me semble-t-il, sur la place de l’Homme dans la Création.

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  1. La partie n’est pas finie, ça ne passe pas (provisoirement ?) au niveau de la Chambre des Représentants (5 défections…

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