Ce texte est un « article presslib’ » (*)
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Deux émissions obligataires aujourd’hui, l’une en Espagne, l’autre au Danemark, qui nous permettront un intéressant petit calcul de la prime de risque exigée aujourd’hui de l’Espagne quand elle emprunte sur le marché des capitaux.
Le Trésor espagnol a émis tout à l’heure un peu plus de 3 milliards d’euros de dette pour des titres à 12 et à 18 mois.
Parce qu’il faut toujours envisager le bon côté des choses, on nous signale qu’en face de cette offre de 3 milliards se trouvait une demande s’élevant à 8 milliards, ce qui est toujours sympathique à savoir mais ne présente pas grand intérêt puisque ce qui compte aujourd’hui (dans le contexte d’un taux dépassant les 7% pour la dette espagnole à 10 ans), c’est le coupon que ces gentils prêteurs potentiels exigent pour se passer de leurs capitaux pendant un an ou un an et demi. Et là, la situation est beaucoup moins rose : l’Espagne a dû consentir du 5,074% pour le un an, et du 5,107% pour le 18 mois. C’est raide, pas seulement si on compare à ce que ce même marché des capitaux exige en ce moment de l’Allemagne, par exemple, mais avec ce qui était exigé de la même Espagne il y a seulement un peu plus d’un mois : le 14 mai en effet, l’Espagne empruntait pour un an à du 2,985% et pour 18 mois, à du 3,302%.
Augmentation donc en un mois et 5 jours de la prime de risque pour un emprunt d’un an en Espagne : 2,089%, et pour un emprunt d’un an et demi, 1,805%. C’est très raide en soi. Cela augure très mal de ce qui se passera après-demain jeudi, quand l’Espagne tentera d’émettre de la dette à deux, trois et cinq ans pour un montant de 2 à 3 milliards d’euros. La demande potentielle sera (je peux déjà vous l’affirmer) d’environ 5 milliards, ce qui sera présenté comme une excellente nouvelle (je peux également vous en assurer) mais ce que l’on attend de savoir avec un très grand intérêt, c’est à quel taux, comprenant quelle prime de risque, que les marchés des capitaux, dans leur grande magnanimité, seront disposés à prêter à l’Espagne.
Maintenant, pour décourager un peu plus les Espagnols : les Danois ont eux aussi émis de la dette aujourd’hui, de la dette à 2 ans, pour un montant plus modeste bien sûr, de 1,55 milliards de couronnes, soit de l’ordre de 208 millions d’euros. Quel coupon les prêteurs ont-ils obtenu comme compensation de la privation qui sera la leur pendant deux ans ? -0,08%. Je vais le répéter, en toutes lettres : moins zéro virgule zéro huit pour cent.
Pour prêter sans risque (c’est cela que cela veut dire en ce moment, prêter au Danemark) pendant deux ans, le marché des capitaux est disposé aujourd’hui à y être de sa poche. C’est dire, mes amis, si la confiance règne dans la zone euro !
Allez, pour finir : le petit calcul promis, si le taux sans risque aujourd’hui pour de la dette à deux ans, c’est -0,08%, la prime de risque exigée de l’Espagne pour du 1 an, c’est (au moins, puisque c’est pour une durée plus courte) 5,074% + 0,08 % = 5,154% et pour du 18 mois, (au moins) 5,107% + 0,08% = 5,187%.
Bonne fin d’après-midi quand même !
(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction numérique en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.
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