Trois exoplanètes potentiellement habitables, par Bertrand Rouziès-Léonardi

Billet invité. AFP : « Trois exoplanètes potentiellement habitables, voici la trouvaille des astronomes de l’Observatoire européen austral (ESO). Ces scientifiques ont découvert dans la constellation du Scorpion un système solaire « doté d’une zone habitable bien remplie », avec trois « super-Terres » et possiblement de l’eau à l’état liquide. […] Le système de trois étoiles auquel appartient Gliese 667C est abondamment étudié par les scientifiques. Non seulement il est dans le voisinage immédiat de notre système solaire (22 années-lumière) mais il est aussi étonnamment similaire. »

A la place des futurs visités, je me ferais du souci de n’être qu’à 22 années lumières de notre autocuiseur. Un astrophysicien de mes amis m’expliquait que de deux choses l’une, ou bien la vie consciente n’est apparue que chez nous, comme il le croit, par accident ou par plaisanterie, si Dieu est dans le coup, ou bien la vie existe ailleurs et il se trouve forcément des créatures plus développées qui ont eu vent de notre existence et préfèrent bizarrement passer au large, voiles carguées et tous feux éteints. Dans le premier cas, il serait trop con de gâcher la chance qu’on a, dans le second, il serait trop con de confirmer la réputation qu’on a en continuant à parler de conquête spatiale et en pillant déjà en imagination les ressources des eldorados extraterrestres. Retour de l’aléa moral : la quête des exoplanètes, surtout des grosses, bien juteuses, celles qui nous laissent augurer un champ d’exercice plus vaste pour nos petitesses ambitieuses, nous accoutume à l’idée qu’on peut jouir sans entraves de la nôtre, qu’on peut la consommer. Elle s’use trop vite ? Pas de problème ! Le SAV intergalactique, au prix modique de quelques crises systémiques, nous en procurera illico une autre d’un meilleur rapport, une Terre 5 G (5 fois Gaïa) équipée des dernières ressources à la mode (terres rares en abondance, donc moins rares, gaz de schiste à gogo, etc.). Quand un doigt me montre la lune, je regarde celui qui le tend, par peur qu’il me fasse les poches avec sa main libre. L’espace aussi me fait rêver, mais vierge, si possible, de l’empreinte de nos « exploits » sublunaires. Villiers de l’Isle-Adam imaginait qu’un jour les publicitaires profaneraient jusqu’à l’azur. C’est fait. Deux sondes Voyager sont parties fouailler les entrailles de l’infini avec, à leur bord, un tableau édulcoré de ce que nous sommes. Voilà tout ce que nous avons à offrir, un mensonge qui prépare une invasion de doryphores. Survie de l’espèce ? Glas dans l’espace.

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