Stromae, vous connaissez ? Moi, c’est très récent…, par Pierre-Yves Dambrine

Billet invité.

J’ai un peu honte de l’avouer, jusqu’aux fêtes toutes récentes passées en famille quelque part dans le Nord tout près de Lille je n’avais jamais entendu parler de ce Belge auteur-composteur-interprète de 29 ans (encore un !) au talent fou, chanteur de langue française le plus connu depuis la sortie de Racine carrée l’été dernier, rien que ça.

Son langage, sa sonorité, ses paroles touchent toutes les générations. Ma nièce de 12 ans connaissait la plupart de ses chansons par coeur. Quant à mon beau frère, moi même et quelques autres dans la famille nous étions unanimes pour reconnaître que Stromae c’est tout simplement phénoménal. Spontanément il m’a rappelé Brel, pas pour son phrasé, chose tout à fait accessoire, mais pour son originalité, pour la force impétueuse et légère de sa musique et de ses paroles. De retour à Paris j’apprends qu’on a dansé tout l’été dernier dans les boites sur ses airs et que ses CD se vendent comme des petits pains.

Stromae cela se danse, cela s’écoute, cela se déguste. C’est du « commercial », et pourtant c’est une sensibilité à fleur de peau, des mots qui résonnent en nous, et font mouche.

Il n’a pas abordé jusqu’ici les sujets franchement politiques à l’exception notable de Tous les mêmes (*), mais on sent bien qu’il pourrait faire des ravages s’il s’aventurait sur ce terrain.

Pour le dire vite Stromae ce sont des textes avec des mots simples, des trouvailles, qui permettent des raccourcis magnifiques. D’évoquer des sujets très sérieux sans tomber dans le lugubre et l’ennui.

Les grincheux diront que sa musique est un amalgame de world music et de rap. Peut-être, mais ça vibre et il y a cette voix incroyable.

Que disai-je ? mais si, c’est déjà de la politique, que d’arriver par des chansons à transformer nos affects meurtris par les aléas douloureux de la vie avec ce rythme inouï qui nous transporte dans une nouvelle harmonie.

D’une certaine façon, grâce à son génie, Stromae nous met déjà au diapason d’une sensiblité nouvelle qui prend tout de l’époque et dans le même temps la transcende. N’est-pas ainsi aussi que se mettent en place les nouveaux paradigmes ? Que s’amorcent les grandes transformations ? Stromae ne nous offre-t-il pas un avant goût de ce que pourrait être la vie après le grand tournant ? Une vie où nos affects, malgré la tristesse et les souffrances passées, se trouveraient pacifiés, parce que le monde nouveau qui surgira ne sera plus ce monde pesant que nous connaissons où les affects nous tirent trop souvent vers le bas ! Parce que les règles qui gouvernent notre monde ne seraient plus celles qui jettent les hommes, les nations, les uns contre les autres, les unes contre les autres.

(*) Tous les mêmes (adaptation libre proposée par zébu)

Vous les hommes politiques vous êtes tous les mêmes
Macho mais cheap
Bande de mauviettes infidèles
Si prévisibles
Non je ne suis pas certaine
Que tu l’mérites
Vous avez de la chance que vous soyez tous les mêmes
Dis-moi merci

Rendez-vous, rendez-vous,
Rendez-vous aux prochaines élections
Rendez-vous, rendez-vous,
Rendez-vous sûrement aux prochaines abstentions

Cette fois c’était la dernière
Tu peux croire que c’est qu’une crise
Matte une dernière fois mon bulletin
Il est à côté de mes valises
Tu diras au revoir à ta République
Elle qui t’idéalise
Tu n’vois même pas tout c’que tu perds
Avec « L’autre », ce serait pire

Quoi toi aussi tu veux finir maintenant ?
C’est la politique à l’envers
Moi je l’disais pour t’faire réagir, seulement
Toi t’y pensais

Rendez-vous, rendez-vous,
Rendez-vous aux prochaines élections
Rendez-vous, rendez-vous,
Rendez-vous sûrement aux prochaines abstentions

Facile à dire, je suis gnan-gnan
et que j’aime trop les bla-bla-bla
Mais non non non, c’est révoltant
Ce que t’appelles les di-ri-geants
Tu sais la vie politique c’est des instants
Mais comme toujours c’est pas l’bon choix
Ah oui pour les faire, là, tu es présent,
Mais pour les renier y’aura des absents
Lorsque je n’serai plus là,
Ou du moins à l’élection,
Arrête je sais que tu mens,
Il n’y a pas que Marianne qui fasse la révolution

Pioche ou pelle, c’est jamais long
Bête ou pelle, c’est jamais long
Pelle ou moi, c’est jamais long
Moi ou « Elle » … c’est jamais bon

Rendez-vous, rendez-vous,
Rendez-vous aux prochaines élections
Rendez-vous, rendez-vous,
Rendez-vous sûrement aux prochaines abstentions

Tous les mêmes, tous les mêmes, tous les mêmes, et y’en a marre
Tous les mêmes, tous les mêmes, tous les mêmes, et y’en a marre
Tous les mêmes, tous les mêmes, tous les mêmes, et y’en a marre
Tous les mêmes, tous les mêmes, tous les mêmes …
Choix.

Partager :

Contact

Contactez Paul Jorion

Commentaires récents

Articles récents

Catégories

Archives

Tags

Allemagne Aristote bancor BCE Bourse Brexit capitalisme centrale nucléaire de Fukushima ChatGPT Chine Confinement Coronavirus Covid-19 dette dette publique Donald Trump Emmanuel Macron Espagne Etats-Unis Europe extinction du genre humain FMI France Grèce intelligence artificielle interdiction des paris sur les fluctuations de prix Italie Japon John Maynard Keynes Karl Marx pandémie Portugal psychanalyse robotisation Royaume-Uni Russie réchauffement climatique Réfugiés spéculation Thomas Piketty Ukraine ultralibéralisme Vladimir Poutine zone euro « Le dernier qui s'en va éteint la lumière »

Meta