LE DOGMATISME DES AUTORITÉS ALLEMANDES EST-IL SANS FAILLE ? par François Leclerc

Billet invité.

Qui faut-il croire, le président sortant de l’Eurogroupe ou le successeur de Wolfgang Schäuble à la tête du ministère des finances ? Pour Jeroen Dijsselbloem, « bon nombre des ministres ont le sentiment que compléter notre boîte à outils d’une capacité budgétaire comme outil de stabilisation serait utile », une perspective qui quoique restreinte est ignorée par Peter Altmaier lorsqu’il déclare « j’assurerai la continuité de la politique allemande et j’appelle à travailler ensemble pour la stabilité de l’euro et le respect des règles ».

La période transitoire actuelle n’aide pas à la clarification, les compromis préalables à la constitution de la coalition gouvernementale étant loin d’être passés. Car il y a un nouveau larron avec lequel Angela Merkel doit compter, Christian Lindner du FDP, à qui elle reproche déjà de trop parler d’un retour devant les électeurs faute d’accord de gouvernement, comme s’il favorisait cette perspective.

Jeroen Dijsselbloem s’est voulu positif en sortant de la réunion de l’Eurogroupe : « le débat d’aujourd’hui nous a permis d’avoir les idées beaucoup plus claires, mais du travail est encore nécessaire ». Pas plus crédible, Pierre Moscovici a ensuite cherché à faire partager son optimisme : « on a vraiment une fenêtre d’opportunité dans laquelle tout le monde aujourd’hui est prêt à s’engouffrer ».

Décidément, on ne peut pas croire à ces propos convenus, d’autant que tout se joue à Berlin et non à Bruxelles. Certes, Angela Merkel, qui voudrait garder les coudées franches, aurait dit-on l’intention de dissocier la responsabilité des finances – dont le FDP pourrait hériter – de celle de la politique européenne dans le gouvernement de coalition auquel elle travaille le dos au mur. Mais elle rencontre d’ores et déjà une ferme opposition à tout ce qui pourrait s’apparenter à du laxisme exposant les réserves financières du pays. Et, il ne faut pas s’y tromper, le FDP ne se contente pas de chevaucher des thèmes électoralement payants à court terme, il exprime l’ancrage au sein d’une population vieillissante d’une profonde inquiétude sur l’avenir.

La réunion de l’Eurogroupe de lundi était élargie aux 25 pays européens engagés dans le pacte budgétaire européen, ainsi qu’à la Croatie et à la République Tchèque, invités comme observateurs. Elle avait comme objectif de préparer le sommet de chefs d’État et de gouvernement spécifiquement consacré au futur de la zone euro, le 15 décembre prochain. En réalité, les ministres n’ont eu d’autre ressource que de lire dans le marc de café.

Un franc-tireur a soulevé un lièvre dans la presse allemande. Norbert Röttgen, un député ancien membre du cabinet d’Angela Merkel, a proposé d’émettre des obligations franco-allemandes destinées à financer des projets décidés d’un commun accord, chacun des deux pays conservant la responsabilité de ses dettes passées. Malgré ce luxe de précaution, sa proposition a été rejetée, au prétexte que toute mutualisation l’était par principe, car cette porte ne devait être ouverte d’aucune manière.

La conclusion ne va-t-elle pas finir par s’imposer ? Au jeu des coopérations partagées proposées par Emmanuel Macron pour malgré tout avancer, c’est l’Allemagne qui n’a pas sa place !

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