Les conclusions auxquelles les Démocrates aimeraient que nous arrivions… sans qu’ils aient à les formuler…

Adoncques, la commission du Congrès ayant lancé la procédure d’impeachment a, dans un premier temps, entendu les dépositions d’une série de protagonistes et de témoins effarés du chantage exercé par Trump sur l’Ukraine, pour déterminer si, oui ou non, il y avait matière à impeachment et, ayant tranché en ce sens, a, dans un second temps, rappelé les mêmes témoins à revenir dans les jours qui viennent, non plus déposer à huis-clos, mais témoigner cette fois en séance publique.

Il n’était donc absolument pas nécessaire que les retranscriptions des dépositions soient rendues publiques, puisque nous entendrons les mêmes témoins-clé redire publiquement ce qu’ils avaient déjà dit en privé.

Pourquoi la commission d’impeachment diffuse-t-elle alors au compte-goutte ces retranscriptions ?

J’ai déjà mentionné une raison : les Républicains clament « Ces dépositions à huis-clos visent à cacher à l’opinion ce qui se trame dans ce coup Démocrate ! », et ceci en dépit du fait qu’à chacune de ces séances, la moitié des congressistes, des députés, présents, sont réglementairement des Républicains. En diffusant les retranscriptions, les Démocrates vident ce reproche de son contenu. Bénéfice additionnel : tous les témoignages sont accablants pour Trump et contribuent ainsi à démoraliser le camp Républicain.

Mais il y a peut-être plus ! Chacune de ces dépositions a duré plusieurs heures, et sa retranscription fait plusieurs centaines de pages (par exemple, 317 pages pour Masha Yovanovitch, ambassadrice en Ukraine évincée par Trump à la suite d’une campagne de dénigrement orchestrée par le Président en personne). Il faut donc les lire d’un bout à l’autre pour en extraire la substantifique moelle. Et qu’en émerge-t-il, qui n’ait pas déjà été dit explicitement ? Que Trump ne se contente pas de faire chanter l’Ukraine, mais aussi qu’il s’efforce, apparemment délibérément, et avec une belle constance, de l’affaiblir dans le bras de fer engagé entre la Russie et elle. Et il en va de même, au fil de sa carrière, pour Mick Mulvaney, qui se trouve opportunément être l’actuel chef de cabinet de Trump à la Maison-Blanche.

S’éclaire ainsi d’un jour nouveau la question posée autrefois par Bill Taylor, actuel ambassadeur américain en Ukraine : et si l’Ukraine passait sous toutes les fourches caudines de Trump & Co. et que le Président ne débloque pourtant pas l’aide militaire ? (bloquée à sa seule initiative alors que les fonds avaient été votés par le Congrès et le Sénat). Inquiétude de sa part venant en écho à des propos dont on affirme maintenant qu’on les aurait entendus dans la bouche de Trump à plusieurs reprises : « L’Ukraine, ça n’est pas un vrai pays : ça a toujours fait partie de la Russie ! ».

D’où la question que je me pose – mauvais esprit comme vous me connaissez – n’est-ce pas là aussi la conclusion que les Démocrates de la commission aimeraient que nous tirions, sans qu’ils aient eux à la formuler explicitement ?

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