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Ce que nous entreprenons aujourd’hui ne s’est jamais fait ? Détrompez-vous !
Un discours assez répandu dans le débat politique est d’affirmer que nous sommes démunis face à la crise climatique actuelle : l’humanité n’aurait jamais fait face à un tel défi dans toute son histoire. Il semble que pour beaucoup, la seule solution serait d’accepter la réalité du changement climatique, de s’y adapter et de réaliser les transformations nécessaires de notre économie au rythme des politiques conventionnelles. Ce serait là ignorer la gravité de la situation que nous connaîtrons d’ici 20 à 30 ans.
Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, en termes de défis pour l’humanité, nous en avons déjà relevé du même ordre de grandeur. Pensons à la crise civilisationnelle de la Seconde Guerre mondiale : l’effort fourni par les États et les populations dans l’effort de guerre était d’une ampleur sans précédent. À titre d’exemple, dans Guerre, économie et fiscalité (2016), ouvrage collectif dirigé par Jean Baechler et Georges-Henri Soutou, l’historien Michel-Pierre Chélini mesure l’effort financier réalisé par les principaux États belligérants de la Seconde Guerre mondiale :
Les dépenses de la Seconde Guerre mondiale auraient représenté quatre fois celles de la Première et leur poids dans le PIB serait de l’ordre de 35% en 1939-1945 pour les principaux belligérants, alors que les dépenses militaires constituent actuellement 2 à 3% du PIB en moyenne planétaire. […]
En chiffres absolus, les cinq principaux belligérants (USA, URSS, Allemagne, Grande-Bretagne, Japon), qui assurent entre 75% et 80% de toutes les dépenses militaires planétaires, totalisent près de 600 milliards de dollars de dépenses (valeur 1940). États-Unis et Allemagne affichent les chiffres les plus élevés. […] Que représentent de telles sommes ? En convertissant les dollars 1940 en dollar 2014, les 600 milliards de 1940 vaudraient un peu plus de 10 billions de dollars soit un septième du PIB planétaire actuel. […] L’importance des dépenses militaires est telle qu’elle absorbe entre 2/3 et 4/5 des dépenses budgétaires et para-budgétaires totales, avec même un pic de 87% aux USA.
Par rapport à cette période historique, les besoins de financement et l’effort demandé pour la transition écologique ne représentent pas grand-chose. À titre de point de comparaison, rappelons que, selon Jeremy Rifkin, dans Le New Deal vert mondial (2019), pour que les États-Unis atteignent les objectifs de Paris, il s’agit d’investir 2,3% supplémentaires du PIB dans les infrastructures vertes par rapport aux 2,3% actuellement investis pour réparer et entretenir les vieilles infrastructures du XXe siècle. Au passage, on note que la Chine a dépensé en moyenne 8,3% de son PIB pour son infrastructure entre 2010 et 2015 (Jonathan Woetzel et al. Pour McKinsey, Bridging Infrastructure Gaps : Has the World Made Progress ?, Octobre 2017)
Plus que de simples dépenses budgétaires, un effort de guerre, comme celui à mener contre le dérèglement climatique, demande un type particulier de mobilisation. Du capitalisme « à la française » dans l’après-guerre où le plan était indicatif, au communisme soviétique, en passant par les économies de guerre britannique et américaine durant la Seconde Guerre mondiale, l’économie dirigée recouvre un large spectre. Il s’agit ici de proposer des pistes pour l’économie dirigée de la transition écologique et sociale du XXIe siècle en passant en revue différents exemples historiques.
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