J’ai voulu voir ce que disaient les commentateurs avant de rendre mes conclusions.
Willam Barr s’en est bien sorti. De son point de vue en tout cas.
Il a répondu avec assurance à toutes les questions sauf une, répétant qu’il ne faisait que son métier et qu’il le faisait correctement.
Là où il s’est empatouillé c’est dans une question piège où il ne pouvait que s’empatouiller, pour la raison que je vais dire : « Le président a-t-il le droit de solliciter ou d’accepter l’aide d’une puissance étrangère lors d’une élection ? »
Sa première réponse a été : « Ça dépend des circonstances. » Le député Démocrate a alors répété sa question en ajoutant à la fin : « … quelles que soient les circonstances ». À quoi Barr a alors répondu : « Non ! ».
La question était une question piège parce que c’est la loi, mais que par ailleurs, lors du procès d’impeachment au niveau du Sénat, les sénateurs Républicains ont exonéré Trump sur ce plan là. C’est-à-dire que, pour prendre un équivalent aux échecs, il y avait avec cette question, du point de vue des Démocrates, l’équivalent d’un déplacement de pièce à six coups d’avance : qui ne portera ses fruits que six coups plus tard. Quand ? Quand Trump aura perdu l’élection présidentielle et qu’il sera exposé à des poursuites pénales, et qu’on pourra ajouter au dossier que même un toutou du président comme William Barr a reconnu que c’était bien ça la loi, et que dans sa fatidique conversation du 25 juillet 2019 avec le président ukrainien Zelinsky, Trump avait bel et bien enfreint la loi.
Cela étant dit, Barr ne s’est pas conduit du tout comme quelqu’un craignant personnellement d’être inculpé un jour, ce qui signale sa conviction que Trump sera réélu. Il faut dire qu’en tant que ministre de la Justice, il est bien placé pour peser de son propre poids sur le résultat des élections, répétant après son maître que les votes par correspondance lors de la présidentielle sont d’ores et déjà, et par définition, entachés de fraude. Un élément clé dans le décompte du vote, comme j’ai déjà eu l’occasion de vous le signaler.
En résumé, Trump a extrêmement bien joué en mettant Barr à la tête du ministère de la Justice : il est d’ores et déjà la personne qui remet en liberté (Roger Stone) ou exonère de poursuites (Michael Flynn) les acolytes du président, mais qui entérine tous ses abus de pouvoir en disant : « Mais je ne fais que faire mon métier ! ». Et il a su montrer hier qu’il était loin d’être un imbécile : à chaque question qu’on lui posait il faisait indéfiniment répéter la question, avant de souligner que pour chacun des mots de la phrase il y avait plusieurs sens et qu’il n’était pas sûr lequel était le bon, etc. Au point qu’une députée Démocrate, excédée, lui a lancé : « Cessez de bouffer mon temps de parole : c’est le mien ! ».
La personne qui a compris l’enjeu, et comment prendre à revers l’anguille William Barr, c’est la sénatrice Démocrate Elizabeth Warren, dont le nom est sur la liste des six candidates possibles à la vice-présidence sur le « ticket » Joe Biden, qui a lancé aujourd’hui une pétition visant l’impeachment (la destitution) de William Barr.
(On m’a demandé de signer. Ai-je le droit ? La responsabilité en incombe à celui qui m’envoie la pétition, n’est-il pas vrai ? Devrais-je être le seul à refuser de m’ingérer dans les affaires d’une puissance étrangère, je vous le demande 😉 ?).
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