Le libre-arbitre : réalité ou illusion ? Stephen Wolfram et l’« artefact épistémique »

Illustration par DALL·E (+Salvador Dali)

Je donne statut de véritable billet à cette discussion ici hier dans la nuit car le sujet lui-même est essentiel et la mise en perspective par Stephen Wolfram, ainsi que ce concept d’« artefact épistémique » que je lui ai proposé, permettent d’éclairer la question.

Avatar de JMarc
JMarc

Paul,

C’est toujours un plaisir de lire vos ouvrages, entre autres choses pour leur clarté. Je tique cependant sur un passage sur le libre-arbitre et l’irréductibilité computationnelle :

À la lecture du blog, notamment de l’exemple de l’IA disant : « Tu achèteras cette paire de chaussures dans x jours. », j’avais cru comprendre que l’IA pourrait nous amener à renoncer à notre illusion de libre-arbitre.

Or, dans L’avènement de la Singularité, chapitre « La philosophie, le discours sur la technologie et la théologie réconciliés ? » (pages 112-113) vous écrivez :

« Mais souvenons-nous : quelle est la finalité ultime de l’Esprit du monde tel que le définit Hegel ? La Liberté, à savoir, la liberté absolue, ce qu’on peut traduire en « l’exercice absolu du libre-arbitre ». Lequel serait donc assuré si tous les processus au sein desquels les humains sont plongés au cours d’une vie sont entièrement imprévisibles parce que « computationnellement irréductibles » – ce qui ne signifie pas pour autant « indéterminés », bien au contraire ! Les IA autour de nous seraient à même de garantir cela ! »

Ce passage, peut-être ironique (« assuré », « garantir »), me semble dire que l’illusion de notre libre-arbitre pourrait au contraire être renforcée par l’IA. Je ne vois pas comment.

Qu’est-ce que « l’exercice absolu du libre-arbitre » ? En quoi l’IA pourrait changer quelque chose en matière de croyance en notre libre-arbitre ?

Avatar de Paul Jorion

Il n’y a contradiction que si on oublie, comme on le fait spontanément, que nous sommes sujets observants d’un système dont nous faisons partie. C’est sur cela que Wolfram attire l’attention, en disant que l’on a compris cela dès les débuts de la mécanique quantique en parlant de l’interférence automatique de l’observateur dans la mesure du phénomène quantique, voire en disant que c’est le fait de mesurer qui crée le phénomène quantique observé, mais qu’en fait, c’est vrai de manière générale : nous sommes les observateurs d’un système dont nous faisons partie, ce qui conduit automatiquement à des distorsions : il y a des choses que nous ne voyons que parce que nous sommes parties prenantes, si nous pouvions véritablement voir le système de l’extérieur, nous ne les observerions pas (on dit « du point de vue de Sirius » mais Sirius elle-même est à l’intérieur du système). Ces choses que nous ne voyons que parce que nous sommes parties prenantes, c’est ce que j’ai appelé (avec l’approbation de Wolfram) : artefacts épistémiques, et parmi celles-là, l’entropie (les choses ont l’air de se dégrader, perdre de leur organisation), la vitesse de la lumière (elle semble être une constante et rien ne semble pouvoir aller plus vite) et le libre-arbitre.

Ce que l’observation du système nous montre, c’est que le devenir est déterministe, inéluctable. Mais dans ce déterminisme, tous les processus n’ont pas la même qualité : il y a ceux qui de notre point de vue sont prévisibles parce que nous avons découvert une formule qui dit que si on connait l’état de ce processus au moment t on va pouvoir dire avec exactitude quel sera son état au moment t + n (ce que j’avais appelé les « nervures du chaos » dans un article en 1988), et il y a ceux pour lesquels on ne pourra pas utiliser ce raccourci de la formule parce qu’il faut observer tous les états du processus entre les moments t et t + n pour savoir ce qu’il sera au moment t + n, Wolfram dit qu’il y a alors « irréductibilité computationnelle » ou dit autrement : « on ne peut pas trouver de formule : on en est réduit à observer toutes les étapes ». Notre vie est de ce type-là.

Quand on est alors sujet au sein d’un processus « computationnellement irréductible », on sait deux choses à propos de sa propre vie : en tant que savant, on sait qu’elle suit un cours inéluctable mais en tant que sujet on sait qu’on ignore entièrement ce qui va se passer d’un moment au moment suivant et qu’il faut … prendre une décision. On peut se dire « Je vais de l’avant » et l’étape qui viendra ensuite au sein d’un processus « computationnellement irréductible » sera que j’aurai été de l’avant, ou bien on peut se dire « Je vais rester assis sur mon cul puisque le processus est de toute manière déterministe » et cette décision de ne rien faire n’aura pas moins été vécue comme un choix délibéré, ce qui veut dire qu’être sujet au sein d’un processus déterministe « computationnellement irréductible » est nécessairement vécu comme l’exercice d’un libre-arbitre.

Illustration par DALL·E (+Salvador Dali)

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45 réponses à “Le libre-arbitre : réalité ou illusion ? Stephen Wolfram et l’« artefact épistémique »

  1. Avatar de Pad
    Pad

    Je me faisais la même réflexion… et voilà le billet 🙂

  2. Avatar de timiota
    timiota

    A consommer avec un Hofstadter millésimé ?

  3. Avatar de Pad
    Pad

    Une réalité émergente de la compléxité des systèmes (cerveau humain inclus)?

    1. Avatar de Pad
      Pad

      Quand les composants individuels d’un système interagissent à une certaine échelle de complexité ?

  4. Avatar de Cédric Chevalier
    Cédric Chevalier

    Bonjour, la question du libre-arbitre individuel (ou problème de l’existence de la liberté humaine individuelle, ou problème de la liberté tout court, on peut assez bien reduire l’un à l’autre) est une des plus anciennes de la philosophie. Et une des plus importantes aussi en termes d’éthique et en termes d’existentialisme.

    Bien que je ne sois pas physicien quantique ou astrophysicien, j’ai quelques notions de logique et mon avis personnel à ce stade, c’est qu’on ne pourra JAMAIS prouver (au moyen d’une expérience empirique) que le libre-arbitre humain individuel existe. Parce qu’il est déjà facile de prouver qu’on peut donner l’ILLUSION du libre-arbitre à n’importe qui dans un contexte d’expérience scientifique ou courante, dans un cas spécifique, DANS le cadre conventionnel du « monde », il me semble que cela démontre de facto qu’il est tout à fait possible d’envisager qu’effectivement, par extension, on puisse également duper la conscience humaine pour TOUTE l’expérience de l’existence, comme c’est le cas dans le film Matrix (voir aussi Truman Show, qui fait une plus grande economie de moyens techniques SF).

    Cela prouve selon moi la POSSIBILITÉ de l’hypothèse de la non existence du libre-arbitre (ou déterminisme absolu). L’hypothèse de la non existence du libre-arbitre POURRAIT être la bonne. En outre, je pense que nous ne pouvons même pas tester rigoureusement l’hypothèse du libre-arbitre in fine. En l’état de nos connaissances, nous ne ressentons l’expérience que d’UN seul sentier « existentiel » (spatio-temporel + autres dimensions éprouvées éventuellement). Impossible donc d’utiliser un contrefactuel puisque nous ne l’éprouvons pas (NB : certains modèles physiques font l’hypothèse d’un plurivers où à chaque instant, tous les possibles donnent lieu à une nouvelle branche de scénarios tandis que d’autre estiment même que tous les états possibles de tous les univers possibles coexistent (de toute éternité, hors espace-temps le cas échéant).

    Il se peut que notre conscience se divise en permanence en une infinité de consciences qui suivent leur propre sentier existentiel dans un plurivers, en étant incapables de communiquer entre elles.

    Et d’ailleurs, la définition elle-même même du libre-arbitre semble se dissoudre dans un tel plurivers… un libre-arbitre totalement sans sens aucun.

  5. Avatar de Cédric Chevalier
    Cédric Chevalier

    « ce qui veut dire qu’être sujet au sein d’un processus déterministe « computationnellement irréductible » est nécessairement vécu comme l’exercice d’un libre-arbitre. » –> Pour moi, cela est équivalent à poser l’hypothèse que le libre-arbitre n’existe pas. Nous vivons l’illusion du libre-arbitre car nous echouons à saisir le determinisme réel à cause de la complexité du monde.

    1. Avatar de Pascal
      Pascal

      Nous vivons l’illusion du libre-arbitre d’abord car nous ne sommes pas conscient de tous les déterminismes qui agissent en nous.
      Suis-je conscient de l’ensemble du processus évolutif depuis la nuit des temps dont « ce que je suis » est issu ? Suis-je pleinement conscient de l’ensemble de mon héritage familiale et sociale depuis des siècles de mémoire ? Suis-je pleinement conscient ne serait-ce que de l’influence de toutes mes expériences de vie depuis ma naissance ? D’après Freud et la théorie de l’inconscient, tellement de choses nous échappent.
      Le libre-arbitre supposerait d’être pleinement conscient de tous ces déterminismes à chaque instant alors qu’ils nous sont presque exclusivement inaccessibles !

      1. Avatar de CORLAY
        CORLAY

        Bonjour à Pascal, Christian et Cédric, Voici un condensé de ce que vs avez exposé ces derniers temps Déterminisme(s)/Lib.Arbitre : Pascal, en date du 7 mars, vous évoquez l’illusion libre-arbitre. Le sujet du/des déterminismes est intéressant à plus d’un titre. Connaître et appréhender le/s déterminismes qui nous ont créés et qui agissent en nous. Voilà déjà le 1er point important. Quant à l’héritage (corporel ou financier) dans la mémoire et le temps (questions diverses), comme vs le précisez si bien : suis-je conscient de l’influence des expériences de vie depuis nos naissances & parents. Autre détail, quant aux personnalités de ce monde : leurs déterminismes ne coincident-ils pas avec leur propre histoire (liens avec les supers amas d’argent et Pouvoir) et autre. Il y a un point, que je relèverai ce jour : Etonnement et décalage de ce que nous imaginons et ce qui va advenir, c’est ce que vs avez écrit (vaste échelle) – Pascal. Accumuler pour créer tant de souffrances est illusoire, ce qui coïncide avec v/phrase : renoncer à dominer QUOI/Territoires ou QUI que ce soit pour entrer en convivance ou en résilience avec tous (sinon, c’est sans fin). En date de ce jour, l’Etre humain et sa complainte de la con-sommation, j’aime bien le sèche cheveux, la machine à laver, le frigidaire (B. Vian) tout ceci qui finira, je ne sais où!!! J’aime bien la phrase: Où est cette fameuse supériorité : dans nos têtes d’Homo Narcis – économicus/tous égaux. Il est vrai qu’il vaut mieux utiliser la mine de crayon à une surexploitation… Un autre point : Christian (ce jour 0h32) évoque le constat du libre arbitre (combat contre son environnement social et soi-même), car cela peut devenir : condition propre survie. Et là, si je ne me trompe pas, cela fait référence à tous les déterminismes de toutes catégories. Et, il va y en avoir devant nous des déterminismes, il faudra vite bifurquer dans l’adaptation. Et pour finir, C. Chevalier écrit: nous vivons l’Illusion «libre-arbitre» car nous échouons à saisir le Dé Ter mi nisme réel à cause de la Complexité du monde, ceci est bien vrai.

  6. Avatar de Cédric Chevalier
    Cédric Chevalier

    Autre angle logique : peut-on démontrer que le libre-arbitre n’existe PAS ? Je pense qu’on ne le pourra JAMAIS. Pour moi la question du libre-arbitre est indécidable et je pose même qu’elle est indécidable pour toute forme de conscience, y compris extraterrestre supérieure, y compris Dieu s’il existe, qui ne pourra jamais être totalement certain que l’existence ne lui donne pas l’illusion de son propre libre-arbitre divin ! Qu’il y ait un Dieu encore plus grand derrière lui ou que ce soit immanent au déterminisme de l’univers lui même (Dieu et l’univers pouvant être la même chose… cf. Spinoza).

  7. Avatar de Cédric Chevalier
    Cédric Chevalier

    Cependant je note que les constats phénoménologiques, existentiels, empiriques, etc… sont asymétriques : plus on avance plus on doit faire le constat apparent de l’immense détermination qui règne dans ce que nous percevons de l’existence… les poches apparentes de « liberté » semblent se réduire comme peau de chagrin… Edgar Morin parle d’autonomie dépendante par exemple.

  8. Avatar de Cédric Chevalier
    Cédric Chevalier

    Je suis préoccupé par l’éthique : quelles implications pratiques ? Selon moi, on doit faire un pari probabiliste et il n’y aura JAMAIS rien de mieux à nous mettre sous la dent… que le solipsisme est faux, que le réel existe, que nous ne sommes pas dans une simulation, que nous avons au moins une marge de manœuvre… et agir « comme si ». SI le monde est absolument déterministe ALORS ça ne changera rien et nous donnera l’illusion réconfortante qu’on peut peut vouloir essayer d’agir… SI le monde tolère effectivement une part de libre-arbitre, nous aurons gagné notre pari. Ce pari étant asymétrique dans ses gains potentiels, il me semble rationnel de parier sur le libre-arbitre TOUT en conservant dans son for intérieur la lucidité d’imaginer que tout ceci n’est qu’une farce déterministe… et trouver de la joie dans la contemplation de ce spectacle grandiose qui voit l’univers dérouler ses phénomènes déterministes à tout instant sous nos yeux, sous notre conscience (car cette conscience, au moins nous serons d’accord, elle existe)

    1. Avatar de Ruiz
      Ruiz

      Autrement dit , même pour un mathématicien il est raisonnable de jouer à Euromillions.

      1. Avatar de Garorock
        Garorock

        Je sais pas si vous êtes mathématicien Ruiz mais avec tout le pèze que vous avez fait ruisseller dans votre assurance-vie vous n’avez pas besoin de jouer au tiercé!
        Soyez raisonnable, investissez dans les éco-villages. Avec la wi-fi et quelques panneaux solaires, c’est un placement d’avenir!

        1. Avatar de Ruiz
          Ruiz

          @Garorock Ça n’empèche pas, c’était pour illustrer par un exemple le côté très asymétrique du pari, qui souvent rebute les partisans du simple calcul de l’espérance moyenne.

          L’assurance-vie est un pari, beaucoup moins asymétrique dans ses gains (un peu mieux que l’inflation ?) mais soumise à un risque de ponction en cas de crise grave.
          Les panneaux PV et la Wifi c’est de la quincaille extrativiste importée grâce à la mondialisation, c’est de la consommation. Utile assurance survivaliste.
          Un potager, pourquoi pas, mais il faut être très riche, quitter la ville ou multiplier les transports.

    2. Avatar de Benoît
      Benoît

      Ce pari est brillant ! c’est la joie en tant qu’elle nous dit que nous avons touché le « bon » qui compte. Elle est le seul fanal, et nous n’avons d’autre choix probablement gagnant que de chercher et « choisir » le « bon » signalé par la Joie.

      Un autre point : derrière le non libre arbitre se cache le fatalisme et l’irresponsabilité. On ne manque pas d’exemple pour comprendre où cela mène ! La Russie de Poutine se croient prédéterminée à la grandeur et on voit les conséquences ! Elle dénie toute liberté à ses ressortissants grâce à ce subterfuge et se dédouane de toute responsabilité dans les horreurs qu’elle perpétue !

      On reconnaît l’arbre à ses fruits. Le pari du libre arbitre et de l’indétermination nous laisse de-facto une possibilité d’action, une responsabilité et un chemin de croissance qui peut porter de très bons fruits et nous amènera à grandir. Celui du fatalisme ne peut que nous conduire à la dépression collective (quel peuple plus dépressif que le peuple russe ? gavé d’alcool, de mythe de grandeur, de mensonge et de violence inhumaine…)

      1. Avatar de Pascal
        Pascal

        N’est-ce pas plutôt un Poutine persuadé de son libre-arbitre sans fois ni loi (comme Trump et tant d’autres) qui décide en son âme inconsciente de conduire son peuple à la ruine et au massacre ?
        Se prendre pour un élu de Dieu ou de l’Histoire, c’est croire en son libre-arbitre qu’on identifie à Dieu ou à Napoléon en se croiyant tout permis.
        Celui qui est conscient de ses déterminismes n’a d’autre ambition que de vivre, bien loin des illusions de devenir un personnage historique ou de devenir Président pour échapper à tous les procès qui lui courent après.

        1. Avatar de Ruiz
          Ruiz

          @Pascal N’est-ce pas plutôt le contraire un Poutine conscient du déterminisme de sa position, placé par d’autres à la tête d’un grand empire qui se trouve menacé dans sa consistance et ses possibilités au sein même de son espace culturel slave, et refusant le libre arbitre d’aller se vautrer dans les délices des nombreuses possessions qu’on lui attribue (et dont vraisemblablement il ne pourrait disposer s’il sortait du déterminisme de sa fonction) ?

          N’en est-il pas de même d’un Macron qui entraîne sans hésitation la position diplomatique française sur la pente savonneuse de la guerre sans limite sous l’influence du déterminisme de sa fonction, au lieu de relativiser grace à un hypothétique libre-arbitre qu’il se refuse à avoir et envisager d’ci 3 ans de développer une start-up ou retourner dans la banque d’affaire, au lieu de s’engager dans un conflit potentiellement nucléaire, c’est à dire un pari essentiellement assymétrique par l’ampleur des pertes potentielles ?

          1. Avatar de Pascal
            Pascal

            « un Poutine conscient du déterminisme de sa position, placé par d’autres à la tête d’un grand empire qui se trouve menacé dans sa consistance »
            Pauvre Poutine, si vous continuez ainsi, je sens déjà ma petite larme qui pointe 😥

            1. Avatar de Garorock
              Garorock

              A mon avis Poutine va être de en plus déterminé à venir mettre le bronx dans nos élections. Je laisse deviner au profit de qui…

              1. Avatar de Pascal
                Pascal

                On ne dort pas à cette heure là, dans la vallée de la loose, ou c’est le décalage horaire ?😜

    3. Avatar de Pascal
      Pascal

      Devenir conscient de l’absence de libre-arbitre n’est-il pas déjà et surtout faire un pas de côté de toutes ces folies qui nous animent ? Ambitionner de « devenir quelqu’un », de « réussir sa vie » et créer tant de souffrance autour de soi pour assouvir ce désir qui n’est qu’un mirage. Abandonner l »illusion de l’éternité qui nous fait accumuler tant de choses inutiles qui, à l’heure de la dernière expiration, s’évanouissent comme un brouillard qui se dissipe. Renoncer à dominer quoi ou qui que ce soit pour entrer en convivance.
      Abandonner l’illusion du libre-arbitre n’est-il pas déjà se libérer d’un grand nombre de souffrance ?

      1. Avatar de Garorock
        Garorock

        Oui Pascalou mais si nous sommes déterminés à faire du yoga, en faire n’atténuera pas la souffrance de savoir que nous ne pouvons pas faire autrement et que nous ne sommes pas plus malin que les autres en pensant avoir découvert un « médicament » qu’ »on » nous avait prescrit avant qu’on soit né.
        Yep.

        1. Avatar de Pascal
          Pascal

          Ce qui fait souffrir mon cher Garo, est-ce d’avoir conscience de ses déterminismes ou bien n’est ce pas plutôt de ne pas parvenir à faire son deuil du libre-arbitre, institué comme la grande supériorité humaine face à ces misérables autres espèces animales ?😉

          1. Avatar de Garorock
            Garorock

            J’ai croisé encore tout à l’heure une de ces saucisse OGM à quattre pattes qui vient factuellement déféquer sur mon huis sans mon accord. Cette chipolata à frisettes, qu’aucun loup par respect pour le créateur ne prendra jamais dans sa meute, je le dis tout net: nous lui sommes supérieur! Cette bestiole à l’expression oratoire particulièrement stressante n’inventera jamais rien. Y’a qu’a la regarder! Rien. Pas même un sèche-cheveux…

            1. Avatar de ludyveen
              ludyveen

              Quant à ces féroces soldats, y font rien qu’à dormir au fond du val…

            2. Avatar de Pascal
              Pascal

              Tu vois c’est un peu ça le problème avec l’être humain, c’est qu’il est fier de lui parce qu’il a inventé le sèche-cheveux qui bouffe de l’énergie, du pétrole pour en faire le plastique et qui finira en déchet non renouvelable. Nous, c’est pas un pissou ou une crotte biodécomposable qu’on laisse dans la nature, c’est des tonnes de déchets pour quelques siècles ou millénaires !
              Pendant des millénaires, l’être humain a survécu sans sèche cheveux et c’est depuis qu’on a inventé le sèche cheveux qu’on risque de foutre en l’air des milliers d’espèces vivantes qui nous ont rien demandé.
              Quand ton foutu cabot crasseux marque son territoire, c’est désagréable parce que ça pu mais ça menace la vie de personne.
              En plus, ce canis lupus familiaris qui vient se soulager devant notre porte, c’est aussi notre invention par la domestication mais faut toujours qu’on se plaigne et qu’on trouve une solution technologique à nos désagréments.
              On est fier d’avoir inventé la domestication mais on ne veut pas en assumer les conséquences. Alors, elle est où cette fameuse « supériorité » sinon que dans notre tête d’homo narcis ?

              1. Avatar de Garorock
                Garorock

                Je suis fier de rien du tout. Je suis pour qu’on laisse le loup tranquille dans son environnement naturel et je vais pas caguer sur le paillasson des bonobos! Les chiens c’est pour la chasse. Cela sert à tuer d’autres animaux encore un peu trop « sauvages ». Puis pour le plaisir de posséder un être vivant capable d’aimer n’importe quel salaud qui lui donnera des ordres et de la pâtée!
                Et que celui qui n’a jamais parlé à son chat me jette la première croquette!
                😎

                1. Avatar de Pascal
                  Pascal

                  « je vais pas caguer sur le paillasson des bonobos! » Toi, peut-être pas mais pour ce qui est de l’espèce humaine c’est autre chose. Et va savoir, peut-être même que pour fabriquer ton smartphone, il a fallu agrandir une mine de terres rares jusque chez les bonobos.
                  C’est pas histoire de faire culpabiliser qui que ce soit,, je suis convaincu que le sentiment de culpabilité est plutôt nocif quand je vois autour de moi le nombre de personnes qui culpabilisent pour des trucs qui leur échappent.
                  Donc j n’ai aucune envie de te jeter une croquette.😄

                2. Avatar de Ruiz
                  Ruiz

                  @Garorock « laisser le loup tranquille dans son environnement naturel » c’est ne pas depuis Washington ou Bruxelles trop chercher des noises dans son environnement immédiat au patron à Moscou.

                  Ou alors pour protéger son paillason il faut se doter d’un chien-loup, d’un dogue ou d’un pittbull et le tenir en laisse porte ouverte ou dans un grand jardin !

                  Sinon il y a l’ONU et le droit : caméra automatique, dépôt de plainte, demande de dommages et intérêts, assistance juridique …

                  Ou la campagne médiatique de dénigrement « shame » sur les réseaux sociaux …
                  (c’est très mode : Mee-too-too)

                  Une odeur artificielle de lion …

                  un générateur d’ultra-son à déclenchement infra-rouge (made in China).

                  Ou peut-être un chat farouche ..

    4. Avatar de Pierre-Yves Dambrine
      Pierre-Yves Dambrine

      On peut aussi poser le problème de la façon suivante : la conscience de notre existence est-elle un facteur déterminant, parmi tout ce qui détermine les choses, et si oui dans quelle mesure, ou bien n’est-elle qu’un épiphénomène, en tant que propriété de l’auto-organisation ?

      Si l’on pense que la conscience de notre existence est absolument indispensable pour que le monde nous apparaît tel qu’il est, et tel que nous le pensons et l’expliquons, alors le libre-arbitre n’est plus opposé au déterminisme universel des choses, mais en est la condition de possibilité. Cela change bien sûr l’approche traditionnelle du libre-arbitre selon laquelle nous avons la possibilité de déterminer par nous-mêmes et seulement par nous-mêmes les actes que nous posons. Nous sommes alors seulement, mais c’est déjà beaucoup, en tant qu’humains déterminés par la marche du monde et de l’univers, et réciproquement le monde et l’univers se modifient à chaque instant parce que nous existons, et partant y agissons.

      Notre liberté consiste alors à assumer le fait que nous existons et qu’il nous appartient de prendre conscience des liens qui nous unissent aux autres et au monde, à l’univers, pour vivre en bonne harmonie. Cela constitue en soi une éthique. L’éthique de celui qui est en vie, solidaire de l’humanité, des éco-systèmes, de l’univers.

      Pour les partisans de l’hypothèse du monde simulé, voire de l’univers simulé, le monde peut exister sans les humains, et ils s’en convainquent en partant du principe que si nous sommes capables de produire des artefacts capables de reproduire le phénomène humain, la présence humaine n’est plus indispensable pour que le monde existe. Cependant on peut distinguer deux catégories de simulationistes, les uns pensent que tout l’univers est possiblement une simulation, les seconds que les humains peuvent partiellement simuler le monde en tant qu’ils simulent leur propre existence d’humains leur substitut simulé pouvant à son tour dépasser absolument en intelligence les humains.

      Les simulationistes du premier ordre, sont dans la lignée des platoniciens. Le monde des idées est à l’origine du monde. Il y a d’un coté le principe des choses, et de l’autre l’apparence des choses, ou monde sensible.
      Les simulationistes du second ordre sont des technicistes : tout ce qui existe est susceptible d’être simulé par voie technique, en l’occurrence par voie informatique.

      Pour les simulationistes du premier ordre, il n’y a plus d’éthique, puisque nous sommes entièrement déterminés par un ailleurs, qui nous détermine totalement. Il s’agit tout au plus d’identifier les lois de l’univers simulé pour l’exploiter au mieux.
      Pour ceux du second ordre une éthique peut encore être simulé.
      Mais cela ne semble pas vraiment être une condition indispensable, surtout dans l’optique post-humaniste, où avec la Singularité, notre humanité rétrogradée à un stade inférieur du développement de l’intelligence, n’est plus en mesure de saisir la pensée de l’IA, outre le le fait que le développement de l’IA dans le monde hétéronomise nos capacités humaines. Dans l’optique post-humaniste les humains s’ils existent encore n’ont à la limite plus rien à penser, et délestés des tâches matérielles, ils n’ont plus qu’à jouir de l’existence. Mais que penser alors d’une existence, où toute notion d’altérité a disparue puisque délestée de toute éthique proprement humaine ? C’est le meilleur des mondes, ou le pire des mondes ?

  9. Avatar de Cédric Chevalier
    Cédric Chevalier

    Dit autrement, se donner à soi la foi en le libre-arbitre est rationnel mais une foi modérée par le constat des immenses déterminations déjà observable (elles sont au moins paramétrées dans la simulation 😉

    On peut s’autoriser à méditer au bord d’un lac ce sentiment d’éternité à intervales réguliers (en contemplant aussi le vrombissement déterministe des mouches, des scooters et des avions, et nos gargouillements d’estomac déterministes 😀)

    1. Avatar de Garorock
      Garorock

      Est ce que les étonnements seraient si nombreux si nous étions déterminés?
      Pourtant nous semblons être déterminés à être curieux…

      1. Avatar de Pascal
        Pascal

        L’étonnement ne provient-il pas du décalage entre ce que nous imaginons qu’il va advenir et la réponse du réel ?
        Oui, nous sommes prédéterminés à la curiosité, à l’émerveillement et tant d’autres choses. Ce sont les atouts dont nous a affublé l’évolution et qui nous a permis de pérenniser la branche évolutive des hominidés.

  10. Avatar de un lecteur
    un lecteur

    « On ne choisit pas sa famille » est un aveu de notre nature déterministe !
    « Self-made man », aussi !

    1. Avatar de Garorock
      Garorock

      Mais on dit souvent qu’on a rencontré ses amis « par hasard ».
      Si ma petite soeur ressemble à ma maman, ce n’est pas vraiment par hasard (c’est contingent?).
      Si elle avait ressemblé à mon père (pas rasé), j’aurais tout de même été déterminé à être son grand-frère. Je n’aurais pas eu le choix!

  11. Avatar de CloClo
    CloClo

    Moi je n’ai aucun problème avec le billet, mais je dois annoncer que les chevilles de Jmarc viennent d’exploser ! 😜

    Le billet ! Le billet ! Le billet

    🤪

    1. Avatar de Pascal
      Pascal

      Jaloux !😜

      1. Avatar de JMarc
        JMarc

        Merci Pascal ! 😉

    2. Avatar de JMarc
      JMarc

      CloClo,

      Ben ça me fait plaisir et me surprend d’autant plus que c’est mon anniv’ !
      (je te vois venir : peu probable que PJ l’ai su, encore qu’on se demande parfois ce qu’il ne connait pas).

      😛

  12. Avatar de Garorock
    Garorock

     » être sujet au sein d’un processus déterministe « computationnellement irréductible » est nécessairement vécu comme l’exercice d’un libre-arbitre. »

    Est ce qu’un processus alléatoire serait computationnellement réductible?
    Et si oui ou non, est ce qu’être au sein de ce processus ( avec sauts quantiques? Algo originel en perpétuelle réécriture?) ne serait pas vécu de la même manière puisque nous serions quand même à l’intérieur d’un algo que nous n’avons pas écrit et pas encore déchiffré?
    Est ce clair?

  13. Avatar de Pad
    Pad

    …./…

    GPT-4

    Pour qu’une IA complexe et déterministe génère des comportements qui pourraient être perçus ou interprétés comme le résultat d’un libre-arbitre, plusieurs mécanismes et caractéristiques avancées pourraient être envisagés et intégrés dans son architecture. Voici quelques-uns de ces mécanismes :

    1. Algorithmes d’Apprentissage Profond et d’Apprentissage par Renforcement

    Ces algorithmes permettent à une IA de s’adapter et d’apprendre de son environnement de manière dynamique, ajustant ses actions en fonction des résultats obtenus. L’apprentissage par renforcement, en particulier, où une IA apprend à effectuer des actions pour maximiser une récompense, peut mimer une forme de prise de décision « libre » en permettant à l’IA de « choisir » entre différentes stratégies pour atteindre un objectif.

    2. Réseaux Neuronaux Dynamiques et Systèmes Adaptatifs

    Des architectures de réseau neuronal qui changent et s’adaptent en temps réel, modifiant leur structure en réponse à de nouvelles informations ou à des changements environnementaux, pourraient théoriquement permettre une forme d’évolution interne. Cela pourrait ressembler à une IA « réfléchissant » sur son expérience passée pour ajuster ses décisions futures, une caractéristique clé dans l’expérience du libre-arbitre.

    3. Simulation de Processus Cognitifs Supérieurs

    Incorporer dans l’IA des modèles de processus cognitifs humains complexes, tels que la planification, la délibération, et même la simulation de soi, pourrait contribuer à créer une apparence de prise de décision indépendante. En simulant la manière dont les humains envisagent les conséquences futures de leurs actions et pèsent les alternatives, une IA pourrait montrer des comportements qui semblent être auto-générés plutôt que strictement déterminés par des instructions externes.

    4. Émergence à Partir de la Complexité

    L’émergence est un phénomène où des propriétés ou des comportements nouveaux et souvent inattendus se manifestent à partir de l’interaction complexe entre les composants d’un système. Dans une IA suffisamment complexe, des formes de comportement qui semblent être autonomes ou « libres » pourraient émerger naturellement sans être explicitement programmées, résultant de la complexité interne et des interactions dynamiques au sein du système.
    5. Conception Orientée vers l’Autonomie

    Créer des systèmes d’IA avec des niveaux élevés d’autonomie opérationnelle, capables de définir leurs propres objectifs ou de modifier leurs paramètres d’opération en réponse à des critères d’évaluation internes. Cela pourrait inclure des mécanismes d’auto-amélioration ou d’auto-modification basés sur des analyses internes de performance ou d’efficacité.

    Conclusion

    Alors que ces mécanismes et caractéristiques peuvent permettre à une IA de manifester des comportements qui semblent autonomes ou résultant d’un libre-arbitre, il est important de noter que l’expérience subjective du libre-arbitre, telle que vécue par les êtres conscients, reste distincte de la capacité à générer des comportements autonomes ou adaptatifs. La question de savoir si une IA peut réellement « expérimenter » le libre-arbitre de manière semblable à un être humain touche à des débats philosophiques profonds sur la nature de la conscience et de l’autonomie.

  14. Avatar de Christian
    Christian

    Le libre arbitre c’est concret et pas uniquement philosophique. De nombreuses personnes dans des situations les plus diverses l’exercent tous les jours. Un seul constat, exercer son libre arbitre est un combat à la fois contre son environnement social et parfois contre soi-même, car cela peur devenir la condition de sa propre survie.

    Je vous laisse suivre cette vidéo d’une personne qui ne doit sa survie qu’à l’exercice de son libre arbitre. Je pense qu’il est un parfait exemple du sujet mis en débat ici. Merci de suivre cette vidéo jusqu’à son terme, Christophe Mathevet interroge chacun de nous sur notre approche de l’adversité ! Et c’est un uppercut !
    le lien : https://www.youtube.com/watch?v=Ri_WQLhchf8

    1. Avatar de Pascal
      Pascal

      Belle preuve de ce que l’être humain est capable de faire devant l’adversité.
      Cependant, s’agit-il de libre-arbitre ou de capacité d’adaptation aussi remarquable soit elle ?
      N’est ce pas ici la maladie qui détermine l’être humain dans ses choix ? Même si chacun aura une réponse differente, cette réponse est-elle issue de nôtre libre-arbitre ou de multiples déterminismes (antécédents familiaux, histoire de vie, ,,,) ?

  15. Avatar de Michel Gaillard
    Michel Gaillard

    « Les montagnes baignaient dans la brume dont les mouvements, la variation de la densité agissaient sur son âme, la coloraient. En ce jour gris, elle était diffuse et homogène, elle sculptait les cimes, faisant douter de la réalité même des reliefs, qu’elle avalait, puis recrachait, passant et repassant dans le champ de vision que ménageait la fenêtre de la cabane. Et c’était chaque fois un nouveau tableau qui s’offrait, d’une minute à l’autre. Au creux d’une vague de brume, il crut distinguer le vol du percnoptère. Un retardataire ? Ils étaient déjà partis vers l’Afrique à cette époque de l’année. Un vieux vautour qui n’avait plus la force du grand voyage ? Son intuition du début de saison avait été juste, cette montagne était un tombeau, un tombeau superbe pour les esprits d’altitude, mais aussi une matrice qui engendrait la vie. La nuit ne tarderait pas à tomber, les jours raccourciraient. Il s’apprêta à sortir voir les bêtes rassemblées dans le parc. Les derniers jours, il les y contraignait la nuit, afin d’éviter d’avoir à courir la montagne en long et en travers. Le soleil déclinait derrière l’opacité nuageuse, tout était brun alentour. L’automne avait commencé à déshabiller les arbres, annonçant la fin du temps de l’estive. »
    Clara Arnaud, Et vous passerez comme des vents fous

  16. Avatar de un lecteur
    un lecteur

    Émergence quand tu nous tiens.

    Si on admet que l’émergence est notre meilleur modèle global pour décrire le Monde depuis l’intérieur, avec distorsion, alors il faut revoir les postulats sur lesquels sont construits nos modèles actuels.
    – Interaction, interférence sont l’un des composants indispensables pour la création de nouvelles structures stables.
    – L’univers est organisé en couche de « complexité », atome – chimie – biologie – langage, aux « vocabulaires » toujours plus riches et aux énergies de liaison toujours plus faibles.
    – Ces couches de « complexité » croissantes valident le principe de l’existence de processus « computationnellement irréductibles », notre « libre arbitre » apparent.
    – Le langage est notre meilleur support pour explorer l’Univers à travers des modèles qu’il permet de construire. L’IA en fait la démonstration.
    – Il y a une hiérarchie « apparente » du petit et stable (atome) vers le grand et fragile (langage) qui s’oppose à la « puissance », « l’intelligence » du fragile qui lui permet de maîtriser le stable.

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