L’actualité de la crise : ATTENDRE N’EST PLUS UNE POLITIQUE, par François Leclerc

Billet invité

Une nouvelle fois, les marchés boursiers et obligataire européens sonnent l’alarme. La chute des valeurs financières accompagne la hausse des taux obligataires des pays dans la ligne de mire : c’est bien la capacité des banques et de ces États de faire face à leurs engagements qui est simultanément mise en cause.

Dans l’immédiat, les moyens permettant de soutenir les uns et les autres font défaut, en espérant que l’Italie ne prenne pas le même chemin : il faut faire patienter car le MES n’est pas près d’être opérationnel. Sans que l’on puisse affirmer que des décisions ont déjà été prises afin de tenter de faire la part du feu pour l’arrêter, ou si ce sont simplement l’indécision et le désarroi qui prévalent. En Allemagne, les déclarations publiques soufflent le chaud et le froid, plutôt le froid ces toutes dernières heures. Quoi qu’il en soit, attendre n’est pas une politique, tout juste un expédient.

Pour faire face à son échéance du 20 août, date à laquelle des obligations détenues par la BCE arrivent à échéance, et en attendant que la délégation de la Troïka qui arrivera jeudi à Athènes fasse son rapport et qu’une décision soit prise à propos du versement de la seconde tranche d’aide financière, il est question d’autoriser le gouvernement grec à émettre des obligations à moins d’un an qui seraient achetées par les banques grecques et acceptées comme collatéral par la BCE.

Une solution d’attente est également envisageable pour les Espagnols, le ministre Luis de Guindos se rendant mercredi à Berlin pour essayer de l’obtenir. Il s’agirait de pouvoir utiliser une partie des 100 milliards d’euros promis pour sauver les banques à d’autres usages, ce que les Allemands refusent pour l’instant. Par exemple pour financer le fonds destiné à renflouer les régions espagnoles, des interprétations du mémorandum adopté par les ministres européens rendant cet assouplissement possible selon ceux qui le préconisent, les Espagnols en tête.

A mots couverts, le ministre appelle également la BCE à reprendre ses achats obligataires de titres espagnols sur le second marché, car les banques espagnoles peinent à souscrire à des émissions qui ne peuvent pas être éternellement repoussées. Très utilisé en Espagne et en Italie, ce mécanisme rencontre ses limites. Car même si les banques peuvent apporter ces titres en garantie à la BCE, qui les accepte, celle-ci pratique une décote afin de se prémunir contre une dépréciation résultant de la poursuite de la hausse des taux. Celle-là même qui touche sans ce recours les banques.

Mario Monti ne reste pas de son côté inactif et tente de trouver auprès de Vladimir Poutine à Moscou des appuis qui lui font défaut en Europe. Son objectif est de monter des joint ventures entre entreprises italiennes et russes dans les secteurs les plus variés, afin d’éviter à l’Italie de sombrer dans la dépression économique, vu l’inconsistance des projets européens de soutien à la croissance. De même que les régions espagnoles, les municipalités italiennes connaissent une crise financière. Plus d’une dizaine de villes italiennes de plus de 50.000 habitants, dont Palerme, Turin, Milan et Naples envisagent de demander à la Corte dei Conti l’autorisation de faire défaut de manière ordonnée. Alesandria est déjà passé à l’acte. Silvio Berlusconi, qui continue d’œuvrer à son retour sur la scène politique, défend l’idée d’un système à deux monnaies, la lire à l’intérieur et l’euro destiné aux échanges avec l’extérieur.

En proclamant que « l’Europe n’est pas en danger », l’interview accordée en fin de semaine par Mario Draghi au journal Le Monde laissait toutes les portes ouvertes. Elle était aussi l’occasion d’affirmer que « nous sommes très ouvert et n’avons pas de tabou », afin de rassurer. Le FMI se plaçant délibérément en retrait, en raison des pressions internes qui s’y manifestent, la BCE reste le sauveur de dernière instance dont l’intervention est espérée. Mais cela non plus n’est pas encore décidé.

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87 réponses à “L’actualité de la crise : ATTENDRE N’EST PLUS UNE POLITIQUE, par François Leclerc”

  1. Avatar de rahane
    rahane

    où ça des dettes?
    quand il n’y a que des dettes et rien d’autres c’est que les dettes c’est le bateau lui-même
    ya que les rats qui ne le savent pas

    les dettes c’est comme le bois faut les couper à la bonne lune pour avoir de la bonne poutre

  2. Avatar de BA
    BA

    Pour pouvoir sauver la Grèce, l’Espagne et l’Italie, le Mécanisme Européen de Stabilité, MES, sera doté d’un capital de 700 milliards d’euros.

    Je recopie Wikipedia :

    « Le MES sera doté d’un capital autorisé fixé à 700 milliards d’euros dont 80 milliards à verser par tranche de 20% sur cinq ans. »

    Quels sont les cinq pays qui donneront le plus d’argent au capital du MES ?

    1- L’Allemagne versera au capital du MES la somme de 190,024 milliards d’euros.

    2- La France versera au capital du MES la somme de 142,701 milliards d’euros.

    3- L’Italie versera au capital du MES la somme de 125,395 milliards d’euros.

    4- L’Espagne versera au capital du MES la somme de 83,325 milliards d’euros.

    5- Les Pays-Bas verseront au capital du MES la somme de 40,019 milliards d’euros.

    http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9canisme_europ%C3%A9en_de_stabilit%C3%A9#Contributions

    En clair :

    La Grèce, l’Espagne et l’Italie sont en faillite.

    La Grèce, l’Espagne et l’Italie sont en train de se noyer, et ils entraînent les autres Etats de la zone euro vers le fond de l’océan.

  3. Avatar de casque à pointe
    casque à pointe

    L’Allemagne, saint graal de toutes nos pseudo élites (gauche de droite au pouvoir et droite maréchal-nous-voilà réunies), vient de se faire taper sur les doigts par Moody’s avec la mise en perspective négative de sa note.

    Y’a pas de justice.

  4. Avatar de Lisztfr
    Lisztfr

    Il y a deux individus dans une maison, un riche et un pauvre. On a cru (ou fait semblant) qu’en donnant tous les pouvoirs au riche, ce serait également bénéfique pour le pauvre. Or à chaque fois que l’on donne plus de pouvoir au capital, on lui permet d’aller plus loin dans sa logique propre, qui se situe entre épargne et investissement, mais sa fin étant l’accumulation, peu importe les moyens.

    La mobilité est un pouvoir, les paradis fiscaux, la façon dont l’argent est prêté aux états par des marchés, etc. Tous ces pouvoirs renforcent la capacité du capital d’aller au bout de sa téléologie, de son essence qui est en priorité de croître, car elle n’est jamais le contraire. Entre investissement et croissance, la priorité est cette dernière. J’ai déjà écrit ici que la façon de prêter de l’argent aux États est contraire au préambule de la Constitution (parce qu’elle constitue très probablement un asservissement), et ce n’est pas pour des raisons économiques qu’il faut agir mais des raisons politiques.

    Donc le pouvoir du capital ne bénéficie pas à la grande majorité. Toute mesure de régulation n’est non pas nécessaire pour que l’économie redémarre, mais pour que la démocratie soit plus saine. Il faut rembobiner le film comme on dit aujourd’hui, interdire tout au capital, interdire sa mobilité, interdire toute transaction non surveillée, etc.

    Il y a un conflit entre capital et démocratie, entre capital et travail non pas parce que le travailleur est exploité bêtement, et parce qu’on ne lui paye pas le sur-travail comme disait Marx, mais parce que l’essence du capital est de croître au détriment de son milieu. Au temps de Marx, on pensait encore que le capital allait éviter l’épargne et se réinvestir, à ce compte la les keynésiens ont un avantage de lucidité.

    Donc il ne s’agit pas de réguler le système pour qu’il redevienne efficace, mais de le réguler parce que toute portion de pouvoir détenue par le capital sert des intérêts contraires aux peuples.

    On pourrait m’objecter le problème des loyer parisiens. C’est pourquoi ma solution, la seule moralement acceptable est d’abolir le capitalisme. Aucun pouvoir n’a le droit de s’autonomiser par rapport à la démocratie, le plus simple est de les interdire.

    Le problème est que l’on préfère une oligarchie toute-puissante à une majorité toute-puissante. On règle son sort sociologiquement à l’oligarchie, pour mieux la laisser faire ensuite. A se demander si l’Ancien Régime ne survit pas de façon élusive.

  5. Avatar de Youbati
    Youbati

    Une petite question : ces fameux retraités allemands – les actuels et les prochains, qu’il faut absolument choyer, que consomment-ils ? Et que consommeront-ils ?

    A part des voyages et des maisons passives chez eux, ils font comme tout le monde et amassent du chinois, j’imagine ? Ou alors le marché allemand pour des produits de consommation courante est-il moins inondé que le marché français, disons ?

    C’est pas de la fausse naïveté, je suis vraiment curieux là-dessus.

  6. Avatar de Cassiopée
    Cassiopée

    Il y a des dettes qui sont financières, et qui ne sont pas citoyennes. Il est mathématiquement impossible de rembourser ses dettes, la Grèce ne peut pas les rembourser pas plus que l’ Angleterre ou le Japon qui sont surendettés.

    Alors qu’en Islande, le peuple a pu voter la fin des dettes sur son territoire car elles allaient détruire leur niveau de vie sur des années avec après une situation très difficile à remonter, dans l’Europe des banques, c’est réduction des budgets, socialisation des dettes et nouveau traité avec 0,5 % au lieu de 3% pour le pacte d’ (in)stabilibité.

    Celà fait des années que les banques sont renfloués avec 300 milliards en France, encore plus à l’étranger, avec de nouveau plan encore en milliards d’euros ou dollars qui ont réalisés, et cette privatisation des gains (dont une partie de l’argent ne va pas dans l’économie) aboutit à une socialisation des dettes et une hausse des prix par la spéculation. C’est un enrichissement minoritaire, et un appauvrissement des classes moyennes et populaires.

    La dette des collectivités locales sont très importantes dans de nombreux pays comme la Chine, les Etats-Unis ou l’Inde, c’est un phénomène mondial. La hausse des revenus des citoyens est économiquement ou financièrement, théoriser ou libéraliser, comme un danger économique, ce qui est faux. C’est une concentration des richesses qui génèrent un mécontement populaire, lorsque les capacités de vivre en société diminuent par le revenu obligatoire pour y vivre, et que les services publics et le marché du travail sont cassés.

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