La Saint–Nicolas des emprunteurs subprime

Le Président Bush a annoncé aujourd’hui son grand plan de renflouement des prêts subprime, s’appliquant à tous ceux dont le taux flottant sera réajusté – à la hausse, bien entendu – entre janvier 2008 et juillet 2010. Le ministre des finances Henry Paulson avait tant insisté ces jours–ci sur le fait que le plan n’impliquait aucune intervention financière de la part du gouvernement et qu’il n’avait personnellement joué – aux côtés d’Alphonso Jackson, le ministre au logement – qu’un simple rôle de catalyseur entre les partenaires du secteur privé, que le Wall Street Journal en était arrivé à l’appeler le « Plan non–Paulson ».

La bourse américaine ne se sentait plus de joie mais à part ça rien de bien neuf par rapport à ce qu’annonçait déjà Paulson la semaine dernière et que je vous rapportais dans Bonne journée pour la bourse, mauvaise pour les investisseurs. Le Président déclarait qu’on allait sauver la mise à 1,2 millions d’Américains, chiffre qui doit être comparé à celui des 1,5 millions de ménages ayant un prêt subprime à taux variable. Son ministre des finances expliquait l’autre jour qu’on ne viendrait en aide ni aux ménages qui ont les moyens de rembourser leur emprunt au taux plein – une fois passée la période (de deux ou trois ans) de taux promotionnel –, ni aux cas désespérés, mais uniquement à ceux qui pourraient bénéficier d’un gel du taux promotionnel pour cinq ans. Les chiffres varient quant au nombre de ces derniers : de 250.000 à 400.000 ménages, selon les commentateurs, soit, à peu de choses près les 1,2 millions d’Américains qu’évoquait le Président. Le régulateur en chef des caisses d’épargne américaines (l’Office of Thrift Supervision), John Reich, était lui plus pessimiste, qui parlait cette semaine des « dizaines de milliers de ménages » à qui l’on pourrait venir en aide.

Les plus durs à convaincre ont été – on s’en doutait – les investisseurs, dont le manque–à–gagner est entériné par l’accord. Ils auraient bien sûr tout à perdre d’une situation se détériorant encore davantage mais ils soulignent que dans les tentatives passées de venir en aide aux consommateurs au bord de la saisie, 40 % d’entre eux finissaient par déchoir de toute manière après une longue agonie – coûteuse pour les investisseurs. Seuls les plus gros d’entre eux bien sûr ont été entendus et on peut déjà prévoir que certains des autres ne résisteront pas à la tentation d’entamer des poursuites judiciaires.

Parlant sans doute également au nom des autres agences de notation, Standard & Poor’s a déclaré : « Très bien : nous sommes prêts à dégrader toutes les obligations dont le plan Paulson augmente le risque de crédit ». Les investisseurs qui faisaient déjà la grimace ont dû s’étouffer ! Les indices ABX qui expriment le sentiment du marché quant au risque de crédit présenté par les Asset–Backed Securities (ABS) adossées à des prêts subprime, n’ont eux pas bronché, signifiant à leur manière : « Beaucoup de bruit pour rien ! »

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