Edmond Jorion (1917 – 2002)

Le petit rentier dit : « Les conséquences collectives de ce que je fais ne m’intéressent pas », et je lui réponds : « Et moi, elles m’intéressent beaucoup : je suis anthropologue et sociologue de formation, et c’est de cela que je m’occupe ». « Cela fait de vous quelqu’un de gauche ! », me répond-il et cela me rappelle ce que le chapelain de mon collège à Cambridge m’avait un jour dit : « C’est bien vous qui vous occupez de nos étudiants qui ont choisi l’anthropologie ? … ‘Anthropologie’ ? Est-ce que ce n’est pas le nom que l’on donne au communisme quand on cherche à l’enseigner dans une université ? »

J’ai évoqué quelquefois la difficulté que j’avais à communiquer avec mon père. J’ai dit aussi qu’il venait du pays de Charleroi et que la culture de la mine était la sienne de manière viscérale, même si personne dans notre famille n’y a jamais travaillé. Ce qui le caractérisait surtout, c’était une droiture que les membres de notre famille qui étaient dans les affaires appelaient en souriant : « un peu caricaturale ». Il m’arrive quelquefois, quand je termine un billet de me dire : « Tiens ! Il serait fier de moi ! » Ceux où je m’intéresse aux conséquences collectives de ce que font les petits rentiers font partie de ceux-là.

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74 réponses à “Edmond Jorion (1917 – 2002)”

  1. Avatar de Alain A
    Alain A

    @ Et alors
    D’après la page 139 de « La nature et la pensée » de Bateson, la ‘fierté’ comme l’ ‘agressivité’ ou la ‘dépendance’ sont des sentiments qui ne sont pas instinctifs, ne se produisent pas à l’intérieur d’une personne, mais ne sont que le produit de relations interpersonnelles. Quand Paul dit « Mon père serait fier de moi », je crois qu’on ne peut pas trouver plus interpersonnel.
    @Paul
    Mon père est né à Charleroi en 1916 et j’avais là un grand-père mineur et un autre sidérurgiste, tous 2 morts de maladies «professionnelles». Je comprends donc votre fierté et la joie que l’on a rester fidèle à ses racines sans rester dans son patelin (« Heureux qui comme Ulysse… »)
    @ Loïc
    Ma première réaction à vos billets est de me dire : « Quel égoïste celui-là!». Et puis je pense : « Il a bien fait d’écrire ça : il fait remonter encore en moi le goût de me battre contre les « petits » rentiers pour les «p’tites djins»* qui n’ont que leurs mains et leur courage de travailleurs à opposer à la méchanceté du monde. Et enfin je relis vos lignes «Je n’ai strictement aucun état d’âme et aucun complexe à faire mon possible pour accumuler suffisamment de patrimoine pour me protéger, par tous les moyens légaux disponibles… Parce que personne ne me fera de cadeaux !» et je me dit qu’elles traduisent à la fois beaucoup de tristesse, de solitude et cachent une profonde culpabilité. J’espère que le Noël de Capra** vous fera un peu comprendre que ce qu’il nous faut c’est « Plus de liens et moins de biens ».
    * Petit peuple en wallon de Charleroi.
    ** Dites, Mme « Chien fantôme », vous ne seriez pas née assez près du Pays noir ?

  2. Avatar de Dav

    @moi,

    Merci pour ce conte que vous m’offrez gratuitement.

  3. Avatar de Paul Jorion

    Encore une précision : si j’ai dit « petit rentier » au lieu de « rentier », c’est parce que « petit » n’est pas utilisé innocemment par ceux qui parlent de « petit soldat », de « petit spéculateur », de « petit escroc ». « Petit » est là précisément pour détourner l’attention de la dimension collective du comportement de tous ces petits : un « petit soldat » ne peut pas avoir commis de crimes de guerre : il faut toute une armée derrière lui pour que des crimes de guerre puissent être commis, de même, la victime d’un « petit escroc » ne doit s’en prendre qu’à lui-même, quant au « petit spéculateur », il n’a aucune responsabilité dans la crise actuelle. Autrement dit, le « petit » affirme qu’il est trop petit pour que son action ait des conséquences à l’échelle de l’histoire – on peut abstraire du coup son comportement de toute évaluation morale, ce qui est précisément le but recherché par celui qui invoque sa « petitesse » : « je ne suis qu’un petit soldat ! », explique toujours le criminel de guerre.

  4. Avatar de et alors
    et alors

    @ Alain A… heureux d’une réponse…mais et la droiture ? en terme d’interpersonnalité… d’interaction ? qui ? « se dresse » ? ou se re-dresse ? face à quoi à qui ? référentiel ? Ca s’enseigne, s’apprend ? Comment ?

  5. Avatar de Alain A
    Alain A

    @Et alors
    La droiture? Définition purement personelle et donc subjective: c’est préférer rester en accord avec ses principes (chacun les siens, évidement, mais on constate bien des similitudes dans les morales et les ethiques de par le vaste monde…) plutôt que de passer par les mille compromis plus ou moins médiocres qu’impose la vie en société. Peut-être donc rester quelqu’un de bien plutôt que de devenir « quelqu’un »… Donc, « réussir » dans une société cynique, individualiste et utilitariste n’est guère possible en s’encombrant de « droiture »…

  6. Avatar de ghostdog
    ghostdog

    @Alain A,

  7. Avatar de Jean-Baptiste

    En tout cas Mr Edmond Jorion fut professeur de la sociologie du droit à L’ULB (Université Libre de Bruxelles) et fut aussi conseiller au cabinet de plusieurs ministres belges. Il était d’une famille de comptables par sa mère et son oncle très à cheval sur l’honnêteté intellectuelle qui dans certains cas concrets et commerciaux le faisaient parfois passer pour naïf. Je pense qu’il a transmis cette idée d’honnêteté intellectuelle qui prévaut dans la famille sur la richesse matérielle. Le savoir n’est pas utilisé pour s’enrichir au détriment d’autrui qui serait ignorant. La guerre l’avait par ailleurs beaucoup marqué et parfois aujourd’hui je trouve que les relents nationalistes ont fait oublier l’horreur de celle ci.

  8. Avatar de Steve
    Steve

    Bonjour à tous

    techniquement une retraite est bien une rente! mais il était certainement difficile pour les syndicats marxistes de défiler en criant nos rentes nos rentes! il a donc fallu inventer un autre mot. la rente par répartition fonctionne un peu comme le système pyramidal Ponzi: ce sont les entrants qui payent les sortants il n’y a pas d’interêts ce qui protège certainement le système des avides . Il ya en plus la belle idée de solidarité mais comme l’a dit Loïc si la pyramide des âges s’inverse le système ne fonctionne plus!
    Notamment quand le système industriel et l’augmentation de profit génère des produits empoisonnants qui rendent les gens stériles.
    On ne peut dissocier ce qui se passe des fondamentaux de notre système ce ne sont ni les petits ni les financiers ni les industriels mais bien nous tous de par notre modèle de civilisation qui avons abouti là où nous sommes.
    la question » Quelle est ma part de responsabilité dans ce qui arrive, quelles illusions ai je cautionné, quelles idéologies ai je véhiculé? » Une chanson par Graeme Allwright: Qui a tué Davy More?

    Bonne journée à tous.

  9. Avatar de Le fils d'Ariane
    Le fils d’Ariane

    @Steve
    Passons plutôt au financement par une TVA Sociale pour financer les retraites (et pourquoi pas la branche maladie de la Sécurité Sociale)… nous sortirons ainsi de ce dilemme de la « pyramide des âges » tout en protégeant notre production nationale ou européenne des pays à bas coûts de main d’oeuvre.

  10. Avatar de A.
    A.

    @ tous (et plus particulièrement à Dav) :
    Pour ceux qui sont nouveaux sur le blog de Paul, comme moi, pourrait-on résumer la pensée de Loïc Abadie ?

    On ne peut pas démontrer à Loïc ABAdie qu’il a tort, c’est à dire qu’il est dans l’erreur d’un point de vue scientifique. On peut simplement lui répondre que, d’un point de vue moral, il est inadmissible que des gens paient les erreurs d’une multitude de « petits rentiers » irresponsables d’un fonctionnement systémique. On ne peut pas se contenter de dire que c’est triste et qu’il faut qu’ils comptent sur eux-mêmes et non sur l’Etat. Ce discours est valable pour un individu mais ne peut constituer une politique : c’est ce discours qui a mené à la situation que nous connaissons avec une idéologie anti- Etat Providence et anti redistribution.

  11. Avatar de ghostdog
    ghostdog

    @Steve,

    Comparer les système de retraite par répartition à une pyramide de Ponzi…quelle drôle d’idée ! Vous semblez oublier un peu vite que le but du bon vieux Ponzi est de s’enrichir…au détriment des contributeurs !

    La retraite par répartition ne participe pas de la justice sociale, simplement parce qu’on l’énonce, c’est un fait.

    Chaque actif crée une sacrée masse de richesse lors de sa vie professionnelle, la véritable arnaque (actuelle) consiste a ponctionner au maximum une part de cette richesse créée au détriment du salarié et en faveur de l’investisseur ou de l’entrepreneur.
    Comme l’a très justement souligné maquis29 dans son post (hilarant), la démographie est un faux problème car ce qui compte c’est la quantité de richesse créée par un actif. En 1960, 3 actifs créaient autant de richesse qu’1 actif de 2008…cette donnée est systèmatiquement passée sous silence par les tenants de l’idéologie néo-libérale…Pourquoi ?

    Mais tout simplement parce que pour vous faire abandonner un système qui vous est favorable, il vaut mieux vous persuader que celui-ci est à bout de souffle, qu’il ne peut plus fonctionner…Nous sommes ici non pas face à un problème réel, un nombre insuffisant d’actifs, mais face à une idéologie dont la voracité en capitauxn’a aucune limite…

  12. Avatar de Dav

    @A.

    Encore une fois, je n’ai pas parlé morale; j’ai pris l’habitude de ne jamais parler morale avec les penseurs libéraux. C’est comme discuter football avec la femme de sa vie. La plupart du temps, la meilleure chose qu’on puisse obtenir, c’est une moue amusée.

    En l’occurrence, j’ai parlé d’erreur d’analyse sur un point précis : l’analyse des origines de la crise de 29.

    Par ailleurs, autant je milite bec et ongle pour la défense des plus faibles, la protection sociale et la répartition, et j’essaie d’appliquer ça dans mon « petit » quotidien… autant je trouve qu’il y a du bon dans le principe de responsabilité individuelle sur lequel les penseurs libéraux et les personnes comme Loïc Abadie s’appuient pour expliquer leur position. Il y a une part de liberté bonne à préserver.
    Il s’agit à mon avis, de trouver le bon curseur, et cela se fait en comprenant aussi ce qu’il y a de juste dans ce que dit celui qui se trompe.

    Et d’ailleurs, si je suis honnête avec moi, je suis aussi un petit rentier, puisque j’ai pu m’acheter un petit appartement dans lequel je vis, que j’ai quelques sous sur un livret A et que j’ai globalement une vie cinquante fois plus confortable que 85% des gens de cette planète.

    Ce qui n’empêche nullement de questionner :
    – la consommation à outrance
    – la destruction de la planète
    – les écarts de richesse
    – etc, etc…
    – et la part de petit rentier qu’il y a en moi, et qui rêve de pouvoir se contenter d’écrire… forcément un peu au frais de la princesse.

    Amicalement.

  13. Avatar de Dav

    Sinon, pour répondre à votre question que j’ai mal lue de prime abord, Loïc s’inscrit globalement dans la tradition libérale de l’école autrichienne, plutôt libertarienne que libérale, d’ailleurs.

    Ce qui explique à la fois son rejet de l’école de Chicago et des monétaristes, mais aussi son rejet de l’Etat et son analyse des causes de la crise qui sont assez similaires au regard que pose Rothbard sur 29.

    Loïc, vous me démentez si je vous ai mal compris.

  14. Avatar de Jean-François
    Jean-François

    @ maquis29

    “Personne ne semble se poser ici la question de la confiance.”
    a) Faites-vous confiance à la justice et aux force de l’ordre pour protéger la propriété privée? Ne serait-il pas plus efficace de privatiser ces fonctions? Un rendement plus important que celui actuel ne pourrait-il pas être obtenu par la privatisation? »

    D’autres y pensent : voir ici

  15. Avatar de A.
    A.

    @ Dav

    Je sais que vous avez évité de parler de morale. Je dis que pour contrer les arguments des gens qui ne pensent pas comme nous, il est inutile de parler théorie : nous dirons que le manque de régulation est la cause des maux actuels et il répondront que davantage de dérégulation serait la réponse.

    Il faut leur montrer une lecture cohérente de leurs( et de nos) sources : pour Locke, l’appropriation privée est conditionnée. La propriété privée, dont le bien fondé est incontestable, peut faire l’objet d’abus par le non respect des règles posées par Locke.
    Au final, on peut même évoquer ( je peux me tromper) Ayn Rand pour qui le désir de posséder et le désir de voler sont égaux en dignité. Si tel est le cas, alors on peut prendre les libertariens à leur propre jeu : la redistribution est spoliation et alors ?

    Que dit Rothbard sur 29 ?

  16. Avatar de Dav

    Grosso modo, Rothbard explique que la crise de 29 n’est pas une crise du capitalisme dérégulé, mais une crise due à la politique monétaire laxiste de l’Etat américain.

    C’est la raison pour laquelle j’utilise l’image de l’allumette (le crédit) et des pyromanes (spéculateurs).
    Rothbard analyse la crise de 29 en se concentrant sur le rôle de l’allumette, et il en déduit que ce n’est pas la faute des pyromanes.
    Alors que, jusqu’à Rothbard (1969), la crise de 29 est universellement considérée comme une crise du « laissez-faire ».
    C’est lui qui rouvre la boite de Pandore en somme.

  17. Avatar de Alain A
    Alain A

    @Steve
    L’alimentation des pensions de retraite par la répartition fut créée selon la logique de solidarité entre générations, ce qui se concrétisa par des prélèvements sur les salaires des actifs. Certes, si la l’évolution démographique se met à la baisse ET les salaires à diminuer, l’alimentation du système se met à défaillir. Mais plutôt que d’abandonner la solidarité, ne suffirait-il pas d’alimenter les pensions par des prélèvements sur la richesse produite par les mêmes actifs (de plus en plus inégalement rétribués mais pas collectivment moins efficaces, comme le dit justement Ghostdog) et pas sur les salaires ? C’est d’ailleurs ce qui se fait dans certains pays (B) où la sécurité sociale est partiellement alimentée par l’Etat, c’est-à-dire par la fiscalité générale qui n’a pas comme seule source l’impôt sur les salaires.
    Puisque le capital a confisqué une part croissante de la plus-value, il faudra bien que l’Etat alimente les retraites par une récupération de ce hold-up…, c’est-à-dire par exemple par l’impôt sur le patrimoine (ou les grosses fortunes comme disent certains).
    @Ghostdog
    J’adore Maxime (coïncidence?) et c’est bien le hasard qui a fait se rencontrer une paire de gamètes à un certain endroit. Mais au-delà de ce hasard initial, de grandir sur les trottoir de Manille, de Paris ou d’Alger, ça ne donne pas la même échelle de valeurs (acquises). Alors, gente (j’imagine) mystérieuse, pourquoi avons-nous la même sensibilité sur la question du financement de la sécu ?

  18. Avatar de Loïc Abadie
    Loïc Abadie

    A Dav : Je m’inscris effectivement dans la tradition libérale de l’école autrichienne (Hayek, Rothbard…), favorable à un état limité au strict nécessaire, et non interventionniste dans l’économie. Tout le contraire de la situation actuelle, et des dérives observables depuis plusieurs décennies, caractérisées par des interventions massives des états qui déresponsabilisent les acteurs et perturbent gravement le fonctionnement du système économique. Les chiffres d’évolution de la part des dépenses publiques dans le PIB sont là pour le montrer, et ils ne sont pas contestables.

    Du point de vue philosophique, comme tous les libéraux, je suis empiriste et pragmatique. Je déteste les grandes théories et utopies non étayées par du concret.
    J’ai beaucoup aimé le dernier livre de Nassim Taleb (« le cygne noir »), un vrai plaidoyer pour l’empirisme et contre les grands discours philosophico-moralistes déconnectés du monde réel, incapables de prendre en compte la complexité de notre monde.

  19. Avatar de Le fils d'Ariane
    Le fils d’Ariane

    Loïc Abadie dit : « chacun pour soi » (et Dieu pour tous ?)

  20. Avatar de A.
    A.

    Antoine a écrit :

    « L’anthropologie comme la sociologie sont muettes. Une fois qu’on a décrit ce qui se passe, il faut encore trancher sur ce qu’il convient de faire. Ceci est du ressort de la philosophie pratique, non de la sociologie. La plupart essaient de s’en sortir en étant soit eux-même relativistes (ce qui les condamne au silence) soit décisionnistes (ce qui les condamne devant n’importe quel Socrate avisé). Par définition cette discipline n’est pas plus marxiste qu’elle n’est libérale.
    En revanche, quand l’anthropologie essaie d’abstraire des travaux des différents ethnologues une “théorie de l’homme” (c’est la spécialité de ceux qui versent dans la “sociologie de la religion”), elle doit se préparer à rencontrer et à affronter la philosophie et la religion sur son propre terrain (de là découleront alors des désaccords fondamentaux sur la valeur et la signification de la théorie de l’évolution, sur la possibilité de l’intelligence artificielle et sur la valeur des conclusions de la neurobiologie). En effet, je ne connais pas d’anthropologie qui ne soit pas en même temps un matérialisme (soit le plus vulgaire qui soit, comme celui de Bourdieu, soit le plus évolué comme celui de Levi-Strauss), ou qui ne soit pas un brouillon plus ou moins incohérent de positions philosophiques plus fondamentales. »

    Je trouve le post d’antoine très intéressant et il m’inspire ce commentaire : qu’est-ce qui différencie la littérature des sciences humaines, ou formulée autrement, qu’est-ce qui constitue la scientificité des sciences humaines ?

    Le caractère scientifique des sciences humaines est nécessairement emprunté aux sciences physiques et/ou à la biologie. Si ce n’était pas le cas, elles n’auraient pas émergé de la philosophie. La sociologie de Durkheim s’opposait ainsi à celle de Spencer et de Comte qui relevaient de ce que Durkheim appelait l’analyse idéologique et qui consistait en une réflexion sur les sociétés de leur temps sans fondement empirique. La sociologie, en tant que science, apparaît vraiment lorsque Durkheim pose la nécessité non de l’expérimentation, impossible, mais du raisonnement expérimental. Il voulait faire de la sociologie une sorte de physique et il y a chez lui une analogie, plus ou moins explicite, avec le corps humain (le normal et le pathologique).
    En arrière plan, l’individualisme méthodologique et le holisme recouvrent la distinction entre l’interprétation du phénomène social comme chose et une herméneutique que l’on peut définir en tant que démarche compréhensive. Pour faire bref, quand on fait de la science, dure ou humaine, on fait de la métaphysique par inadvertance, plus ou moins consciemment.

  21. Avatar de A.
    A.

    @ Loïc Abadie :

    Etes-vous plutôt hayekien ou plutôt libertarien ?

    Pensez-vous que Hayek a testé empiriquement la notion d’odre spontané ? (fausse question, bien entendu, mais qui attend néanmoins une réponse)

  22. Avatar de Ton vieux copain Michel
    Ton vieux copain Michel

    J’ai souvent l’un sentiment d’étrangeté en écoutant les idéologues libéraux, même si je partage certains de leurs principes. La société qu’ils décrivent se présente comme une sorte d’univers de Bisounours où règnent la responsabilité, l’auto-responsabilisation des individus, le respect des lois, les relations contractuelles harmonieuses, bref, l’équilibre général. J’ai le sentiment qu’ils restent englués dans un mythe d’origine rédigé du temps des petites manufactures, celui d’Adam Smith, celui de la concurrence parfaite et de la circulation parfaite de l’information. Sous la plume d’Adam Smith, c’était une esquissse, un modèle, un expérience mentale mais sous celle de ses épigones, c’est devenu la réalité. Or la réalité, on le constate, est tout le contraire: une jungle impitoyable où règne la loi du plus fort, une sorte de guerre de tous contre tous. L’appât du gain et la voracité sont ravageurs. Les inégalités ne font que se creuser. La surconsommation est en train de détruire la planète. L’homme déploie une ingéniosité rare pour faire du profit à tout prix sans tenir compte des conséquences, qui ne vont pas dans le sens de « l’équilibre général » tant espéré. Comme dirait l’autre, il y a un blème quelque part, il y a quelque chose qui ne colle pas.

  23. Avatar de Loïc Abadie
    Loïc Abadie

    Je ne suis pas libertarien au sens d’absence d’état (c’est une utopie et je n’aime pas les utopies).
    Je suis simplement pour un état de petite taille, bien géré, ne vivant pas au dessus de ses moyens, dont la part des dépenses ne dépasse pas 1/3 du PIB, et surtout qui n’intervient pas directement dans l’économie.

    Je m’explique : proposer un filet de secours minimal mais universel du type « revenu d’existence » d’alternative libérale me paraît être une bonne chose. C’est de la solidarité qui ne deresponsabilise pas (ceux qui veulent plus que ce revenu d’existence de « survie » devront être prévoyants et se prendre en main, ce qui devrait être un comportement normal).

    Imposer un système de retraite obligatoire dont la viabilité à long terme est plus que douteuse, donner des subventions à certains secteurs plutôt qu’à d’autres, soutenir à bout de bras des unités obsolètes et dépassées, redistribuer en fonction des corporatismes, pratiquer une fuite en avant dans le crédit et inciter les agents économiques à le faire, me paraît par contre être une mauvaise chose. C’est précisément ce que font nos états boulimiques d’aujourd’hui : Ils gaspillent des ressources en pure perte et crééent du « désordre non spontané » par leurs actions inadaptées.

  24. Avatar de Jean-François
    Jean-François

    Loïc, pouvez-vous développer ce que vous entendez par « devront être prévoyants et se prendre en main, ce qui devrait être un comportement normal », concernant la population qui toucherait le revenue minimum de « survie » (le terme est bien choisi) ? sous-entendez-vous que les bénéficiaires d’aides sociales ne sont pas prévoyants et ne se prennent pas en main pour gagner plus ? dit autrement, que c’est de leur responsabilité, et que donc c’est LEUR problème s’ils ont une vie de m.. ?
    Excusez-moi, mais finalement je ne comprends pas bien : s’il suffit d’être prévoyant et de se prendre en main pour gagner plus, alors à quoi sert donc ce revenu minimum de « survie » ? N’est-ce pas finalement qu’une aumône, un acte de charité pour se donner bonne conscience ?

    Dernier point : vous dites être empirique, pragmatique, connecté au monde réel, conscient de la complexité de ce monde, ce que ne sont pas les « utopistes ».
    Pouvez-vous me dire qu’est-ce qui est le plus pragmatique, le plus complexe et le plus connecté au réel : se demander comment organiser la société pour que personne ne soit pauvre, ou se demander quand il faut racheter des BX4 (pour les non initiés, j’ai cru comprendre que ce sont des produits financiers pour spéculer sur des marchés baissiers) ?

  25. Avatar de A.
    A.

    @ Loïc Abadie

    Le problème est qu’un salaire minimum ne permet pas de vivre bien. Le marché pourrait fonctionner en maintenant dans la misère un nombre important de personnes sans que ces dernières voient leur sort s’améliorer.

    C’est l’idée même d’information comme processus de découverte dans un ordre spontané qui pose problème. L’information engendrée par un ordre complexe semble revêtir un aspect naturel, au sens de phénomène produit par la Nature selon moi, en raison d’une analogie plus ou moins implicite entre l’économie et les sciences naturelles.

  26. Avatar de Bertrand
    Bertrand

    @A
    « C’est l’idée même d’information comme processus de découverte dans un ordre spontané qui pose problème. L’information engendrée par un ordre complexe semble revêtir un aspect naturel, au sens de phénomène produit par la Nature selon moi, en raison d’une analogie plus ou moins implicite entre l’économie et les sciences naturelles. »

    C’est surtout que l’ordre spontané dont parle Hayek est un à priori qui ne se démontre pas (apriorisme extrême). En limitant l’observation de l’être humain à sa fonction d’agent économique, l’économiste est obligé d’utiliser les « analogies implicites » pour confondre son modèle à un schéma qui va de soi, « naturel ».
    La réalité est que « l’ordre spontané » (qui n’a rien de spontané) est un « moindre mal ». Ce « moindre mal » n’est pas pragmatique (au sens d’absence d’idée) puisqu’il dépend entièrement de l’idéologie et de la morale liée à l’exercice du pouvoir …

  27. Avatar de bernard
    bernard

    @ Loïc Abadie

    “Le retraité par répartition”…qui peut encore y croire aujourd’hui (en tout cas dans des conditions correctes et à un âge raisonnable) quand on voit l’évolution actuelle de la démographie et de l’économie, et la façon dont les états gèrent leurs dépenses ?
    Ainsi ceux qui croient à la retraite par répartition sont donc de doux rêveurs.

    Je pense au contraire que ce sont ceux ne jurent que par la capitalisation qui le sont.

    Essayons d’utiliser un langage plus moderne.

    1 CAPITALISATION

    Les gens qui croient à la capitalisation sont des gens qui vivent en BUT FUTUR, qui font des PARIS sur le FUTUR rendement de leurs actifs à l’âge où ils puiseront dedans, supposant que ces actifs seront TOUJOURS DISPONIBLES, ce qui suppose de remplir les deux conditions :
    – ces actifs subsisteront
    – la jouissance en sera garantie au légitime propriétaire.

    Et là, deux cas de figure:

    ou ce sont des actifs immobiliers
    ou ce sont des actifs réels, avec des revenus de type loyer.

    Pour le premier cas, on voit bien, avec la crise, que le danger de disparition existe: il faudra faire partie des investisseurs informés, ou même des investisseurs capable de triompher de la désinformation dont on voit bien qu’elle est la règle du genre dans le struggle for life capitaliste.
    Et là votre état non interventionniste entérinera simplement les défaites, car la bataille capitalistique ne peut faire que de plus en plus de perdants.

    Pour le scond cas, il reste à espérer que ce même état minimaliste, dédié uniquement au maintien de la paix civile, soit en mesure de garantir cette jouissance. Et dans le monde fini et toujours plus peuplé dans lequel nous vivons, cela me paraît un PARI à la fois DETESTABLE et HASARDEUX car, dans le cas souhaitable de réussite, il peut que déboucher sur un monde totalitaire.

    Ce raisonnement vaut pour vous, qui avez déjà vécu (j’allais dire « survécu ») à votre jeunesse, première « retraite » au sens de la dépendance sociale qu’elle induit.

    Car c’est bien de SURVIE de JEUNESSE qu’il faudra parler pour les enfants de la population d’actifs nomades que vous appelez de vos voeux.

    2 REVEURS

    Le rêveur, lui, vit en TEMPS REEL.

    Dans son monde s’active la génération productive du monde réel, dont les REVENUS sont ECORNES par l’impôt destiné aux redistributions, mais les redistributions dans le même exercice fiscal ou le suivant aux générations à la retraite bien sûr mais aussi aux générations montantes, sont GARANTIES par l’absence de minipulations financières.

    Le temps réel supprime le phénomène d’accumulation et permet de réaliser une autorégulation sur le cycle des saisons.
    Ce n’est pas un long fleuve tranquille bien sûr, mais les arbitrages relèvent de la vie démocratique qui est largement apaisée lorsque n’existe plus la nécessité de rémunérer le capital.

    Cette non rémunération permet en effet d’ignorer les exigences des investisseurs, et en particulier de ceux venant de l’étranger dont l’implication et les exigences sont la source principale de l’inefficacité politique des états européens actuellement, qui ne peuvent gouverner efficacement des citoyens et des agents économiques dont les populations ne se recoupent pas, et dont les intérêts divergent.

    Ainsi le rêveur vit, non seulement en TEMPS REEL, mais aussi en ESPACE POLITIQUE REEL, conditions nécessaires pour garantir un fonctionnement démocratique normal.

    Et c’est précisément ce système qui permet la meilleure adaptation aux évolutions, heureuses jusqu’ici, de la durée de la vie.

  28. Avatar de ghostdog
    ghostdog

    La société salariale n’existe plus depuis belle lurette, facile pour Abadie qui est fonctionnaire de l’état est à donc un emploi garantie à vie de nous parler de pragmatisme et de prévoyance alors qu’en France en 1993 40% de l’emploi étaient constitués de petits boulots (CDD,Intérim), avec ça accroche toi pour te constituer un patrimoine…( si quelqu’un a les chiffres de 2008)

    Le fond de ma pensée se résume en fait à cela :

    « le réalisme, c’est la bonne conscience des salauds »

  29. Avatar de antoine
    antoine

    Vous êtes libertarien et minarchiste, Loic. Les libertariens sont soit minarchistes soit anarchistes.

    Qui plus est vous êtes real-libertarien, d’après votre point de vue sur une rente minimum garantie, à ceci près que cette rente n’est pas justifiée par « compassion ». Elle purement et simplement un dû, qui se justifie du point de vue libertarien pour des tas d’autres motifs que celui que vous évoquez (liées en partie au problème de l’acquisition originelle des ressources naturelles), et elle excède donc le « minimum vital nécessaire » puisqu’elle n’est pas indexée sur une quelconque évaluation de ce que seraient des besoins vitaux.
    Ceci étant, il a une différence entre les libertariens et démocrates libéraux (libéralisme politique). Dans les deux cas il y a rejet de l’état-providence au nom du maintien de la justice procédurale pure du contexte social. Toutefois l’Etat se mêle d’économie dans le second cas (les règles du commerce doivent garantir le meilleur arbitrage entre efficience et équité)!
    Notez qu’il faut bien sûr interdire l’héritage et le don sous toutes ses formes, sans quoi le marché est faussé. Autant que l’intervention de l’Etat, les dons et l’héritage faussent le marché. Autrement il faut justifier les raisons pour lesquelles vous ne le faites pas tout en restant cohérent (personne à ma connaissance n’y a réussi mais vous allez peut être trouver quelque chose).
    Autre chose:
    Si l’Etat n’était pas intervenu, les 15 premières banques US auraient mis la clé sous la porte, ce serait la guerre civile aux US, qui seraient au FMI. Là encore il va falloir nous expliquer pourquoi l’Etat peut il bien se permettre de favoriser certains citoyens plutôt que tels autres… parce que c’est de celà dont il s’agit.
    Bref le marché tout seul ne fonctionne pas. C’est un rêve, une utopie (JAMAIS soutenue par A. Smith ni par personne de sensé du reste).

    Reste que je suis d’accord avec vous: l’Etat n a pas à se mêler d’économie. La question est: de quoi l’économie a t-elle le droit de se mêler? Qu’est ce qui relève à juste titre de la sphère marchande? Qu’est ce qui n’en relève pas? C’est à partir d’ici que les questions deviennent plus serrées. Les libertariens disent « tout ». Les marxistes disent « rien ». Entre les deux des tonnes d’options possibles.
    Les organes? Les soins médicaux? Le sexe? Les emplois? Les ressources naturelles? Les votes? L’éducation des citoyens? La masse monétaire? Pour chacune de ces choses il y a encore des tas de modèles d’organisation possibles qui peuvent ne rien avoir à voir avec le marché pur ou la collectivisation pure et simple.
    Deuxieme problème: les externalités à l’intérieur même de la sphère marchande. Ex type: la pollution. L’Etat n’intervient pas?????

  30. Avatar de Moi
    Moi

    Ce qui me fait rire (jaune) avec les libéraux genre Loic Abadie c’est leur manque de cohérence. On n’aime pas l’état et on aime l’ordre spontané, sauf quand cet ordre spontané s’appelle « mutuelle » ou « syndicat » ou « corporation ». Là on aime la répression étatique à la Thatcher.
    Actuellement, et dans le même ordre d’idées, il est du plus grand comique de voir la commission européenne lutter de toutes ses forces libérales et étatiques pour essayer d’imposer une libre concurrence que l’ordre spontané s’acharne à détruire aussitôt.
    Et ils osent encore nous sortir des phrases du genre « comme tous les libéraux, je suis empiriste et pragmatique. Je déteste les grandes théories et utopies non étayées par du concret. ». En fait, ils confondent réalisme et amoralisme. Ils s’imaginent qu’être rationnel (et non pas raisonnable) et se passer de la morale rapproche forcément du réel. C’est là leur grande croyance.

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