L’autorégulation des marchés : le retour !

Ce texte est un « article presslib’ » (*)

Aux États–Unis, j’étais au cœur du système financier – du moins jusqu’en octobre 2007 – et j’avais donc un accès direct à l’information sur ce que l’on pensait dans le milieu. J’ai travaillé dans une banque française mais c’était il y a bien longtemps : en 1990-1991. C’est ce qui m’oblige, quand je parle du secteur bancaire en France, de travailler à l’intuition – une situation qui est très loin d’être idéale.

J’ai récemment eu la chance de parler à un banquier français qui a accepté de parler « off the record », hors-micro, et sous le sceau de la confidentialité.

Moi : J’ai le sentiment que si la situation a l’air meilleure dans le secteur bancaire français, c’est à cause d’une certaine tradition de dissimulation en France. Est-ce que je me trompe ?

Lui : Vous ne vous trompez pas.

Cela veut donc dire que les mauvais résultats vont continuer d’apparaître. A-t-on pris la pleine mesure des dégâts ?

Non : il y a encore en France, beaucoup de très mauvais résultats à venir. Et ce n’est pas seulement la France : c’est vrai pour l’Europe en général.

Peut-on dire – comme on l’entend répéter ces jours-ci – que la situation s’améliore dans le domaine financier ou est-elle encore en train de s’aggraver ?

La situation s’aggrave encore.

Pour quelle raison ?

Parce qu’aucune des mesures qui auraient pu être prises pour endiguer la crise n’a été prise. La crise s’est répandue comme une pandémie : il y a eu des phases de développement. À chacune de ces phases, des mesures auraient pu être prises. Aucune ne l’a été.

Comment est-ce possible ?

La peur ! On finira – vous verrez – par adopter partout la formule des « bad bank », des banques de mauvais aloi, où l’on isole du reste de l’économie les produits financiers toxiques. C’est la seule solution raisonnable. Et elle est connue depuis le début de la crise : on l’a envisagée un moment, puis l’on s’en est détourné. La raison, c’est tout simplement la peur : la peur devant les chiffres gigantesques qui étaient apparus.

Les suggestions sur ce qu’il conviendrait de faire ne manquent pas parmi des gens qui sont en-dehors du circuit traditionnel – venant même de certains Prix Nobel d’économie. Pourquoi les éléments de solutions proposés par ces gens-là sont-ils ignorés ?

Parce qu’il existe un cadre traditionnel pour résoudre ces problèmes : celui du milieu financier et de ses superviseurs – c’est-à-dire l’État – et l’on persiste à vouloir résoudre les difficultés au sein de ce cadre traditionnel. Or, comme vous le savez, c’est le monde financier qui est à l’origine des difficultés actuelles mais c’est de lui que l’on exige de les résoudre. Le monde politique ne remet pas en question que ce soit là le cadre au sein duquel il faille opérer.

Que va-t-il se passer ?

Il y aura de nouvelles phases dans la pandémie et on s’abstiendra à nouveau de prendre les mesures qui devraient être prises. Encore une fois, par peur.

On ne fera jamais appel à ceux qui proposent au moins des bouts de solution ?

Si, le moment viendra.

Qu’attend-on ?

Que la situation soit encore beaucoup plus grave.

Et à quel moment s’adressera-t-on à eux ?

Paradoxalement, c’est le marché qui en décidera : quand la situation sera si grave qu’il faille absolument sortir du cadre de référence habituel, les marchés l’imposeront alors.

Moi (un peu désarçonné, il faut bien le dire) : La solution viendra donc de l’autorégulation des marchés !

Si vous voulez.

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

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112 réponses à “L’autorégulation des marchés : le retour !”

  1. Avatar de François Leclerc
    François Leclerc

    Cela serait effectivement un vrai paradoxe, si cela devait in fine se passer ainsi ! Dont la conséquence, toute aussi paradoxale, serait alors de souhaiter que les choses empirent, pour que, en dernière instance, l’autorégulation fasse son oeuvre. Ceux que l’on appelle « les politiques » en étant incapables, alors que ce serait beaucoup demander aux mouvements sociaux de parvenir à leur imposer.

    L’éditorial du Monde d’hier est révélateur de l’impasse dans laquelle nous sommes (ils sont), consacré à une sorte d’incantation en direction des politiques, dont tout est attendu, à propos des mesures de régulation qui s’imposent et pour lesquelles l’Europe traîne des pieds. Avec cette appréciation déroutante sur les Etats-Unis qui, eux, prépareraient activement la régulation.

    Aux Etats-Unis, il a été relevé que les mesures concernant les produits dérivés et envisagées par le Trésor, reprennent des propositions faites dans un memorandum des grandes banques à l’administration, en février dernier. Que faut-il penser, faute de connaître dans le détail ce qui sera adopté plus tard, que l’autorégulation y est déjà à l’oeuvre ou que l’administration Obama se soumet aux désiderata des banques ?

    Mais avons-nous besoin de souhaiter quoique ce soit, spectateurs que nous sommes, qui allons assister à cette dégradation annoncée de la situation ?

    Dernière remarque, si la finance devait être, comme elle le proclame très ouvertement aux Etats-Unis, pas seulement le problème mais aussi sa solution, quelles contreparties devront-elles lui être par gratitude accordées ?

  2. Avatar de enzobreizh
    enzobreizh

    Natixis est donc notre Bad Bank en gestation?

  3. Avatar de Mikael EON
    Mikael EON

    Ça parle.

  4. Avatar de A.
    A.

    JK Galbraith écrit dans « la crise économique de 1929 » que la FED avait essayé au cours du premier trimestre 1929 de calmer le marché des actions qui s’était envolé. Elle fut ignorée et n’insista pas par ailleurs.

    Ce que Paul révèle de son entretien n’est guère surprenant. La catastrophe est là mais on ne la voit pas car on n’y croit pas.

  5. Avatar de H.Giraudon
    H.Giraudon

    La finance a inventé la titrisation pour diluer sur d’autres les risques de ses goinfreries spéculatives et le politique s’est porté garant de la finance en diluant cette garantie sur les dettes publiques. Un trafic en réseau.
    Alors que voulez-vous?
    Des armes parbleu, des armes!

  6. Avatar de tof
    tof

    La mise en place de cette autorégulation passe t-elle par les groupes militaires côtés en bourse? Il en dit trop peu pour relancer un nouvelle bulle de psychose politique et financière.

  7. Avatar de grizzly27
    grizzly27

    depuis longtemps je ne crois pas au retex (retours d’expérience) dont on fait beaucoup d’étalage dans les entreprises aujourd’hui mais que l’on se dépêche d’oublier quand les enjeux (financiers à court terme souvent) sont trop importants.
    les comportements de nos décideurs dans cette crise en sont encore une illustration

  8. Avatar de JJJ
    JJJ

    Si l’on attend que tous les établissements deviennent ostensiblement des « bad banks », il ne sera plus nécessaire d’en créer. Ce n’est plus la posture D, mais la débandade Z. Voilà qui conforte mon sentiment exprimé hier au papier de François : le scénario à venir sera pire que son sombre tableau…

  9. Avatar de Oppossùm
    Oppossùm

    Effectivement, lorsqu’on regarde sans à-priori les choses, on constate que ce sont les vilains marchés qui sont objectivement le révélateur de la crise. Les ajustements nécessaires du système passent par la marchés . Et d’ailleurs, pas mal de critiques assez trapues passent par son analyse.

    D’ici à penser que c’est le marché lui même qui imposerait son correctif fondamental , la régulation, donc que ce serait l’autorégulation qui déterminerait la ‘régulation’ , il y a là une coquetterie dans le paradoxal.

    La marché aurait-il un cerveau ‘invisible’ ?

  10. Avatar de Ton vieux copain Michel
    Ton vieux copain Michel

    Si cette crise a montré quelque chose, c’est bien l’inanité de la thèse de l’auto-régulation des marchés. Qu’on ne nous en parle plus, c’est une imposture intellectuelle. Les Etats sont intervenus massivement pour renflouer les banques et d’autres entreprises défaillantes (ce week-end, l’Etat américain deviendra probablement actionnaire à 70% de GM). Il serait également utile que les universitaires cessent d’écrire des articles devisant doctement sur la notion d’aléa moral. Le soutien des Etats au secteur financier est un gigantesque aléa moral, les grands banques « to big to fail » et les « champions nationaux » sachant pertinemment depuis un an que les Etats feront tout pour les maintenir à flot, le coût de leur faillite éventuelle étant trop lourd à porter. Par conséquent, le mérite de cette crise est d’avoir définitivement montré que cette notion d’auto-régulation est une chimère. Une autre chimère à dégommer est celle du juste prix d’un actif financier. A partir du moment où l’Etat apporte son obole, se porte garant, offre des incitations diverses ou permet de changer les normes comptables, il n’y a plus de marché véritable si tant est qu’il en existait un. Il ne faut donc plus parler de marché. On a désormais affaire à une sorte d’hybride, un monstre à deux têtes « public et privé » qui s’épaulent ou se bouffent entre elles, selon le gré des circonstances.

  11. Avatar de Oppossùm
    Oppossùm

    Ceci étant la ‘Bad Bank’ est-elle d’emblée la meilleure solution ? Qui en supportera le coût in fine ?

    Finalement la crise c’est quoi ? Un jeu d’ attitude, positionnement et stratégie pour faire ‘financer’ par un autre que soi-même, la nécessaire ‘perte’ de la montagne de dettes qui ne peuvent plus être honorées .

    La perte de la valeur imaginaire que le système des bulles a généré, tourne en rond dans le ciel comme une nuée de vautours cherchant leur nécessaire et irrémédiables victimes.

    Une des stratégies pour l’acteur central qu’est le système bancaire, est de ne pas révélé sa perte car celui qui la révèle l’endossera fatalement : il faut donc la cacher, soit pour s’en débarrasser peu à peu, soit pour la révéler au moment où sa gravité sera telle que le « collectif » acceptera alors d’en endosser une bonne partie dans l’urgence.
    Mais la bonté du « collectif » a des limites.

  12. Avatar de EOMENOS
    EOMENOS

    Le bon Cardinal de Mazarin avait coutume de dire « Donnez moi trois lignes d’un homme et j’y trouve de quoi le faire prendre ».

    Dans son genre ce billet de PJ n’est pas triste non plus . J’ignore si le banquier n’était pas aussi Français qu’annoncé ou si l’humour est involontaire en raison d’un long séjour aux USA mais c’est en tout cas très plaisant.

    Je m’explique, il s’agit de l’emploi du mot « stage » dans le présent billet…

    En français, écrire que la crise à connu différents stages de développement c’est assez drôle (sauf si l’on soutien résolument la thèse du complot). A moins que l’on imagine, ce qui est la thèse majoritaire sur ce blog, que les princes qui nous gouvernent sont eux aussi des stagiaires….

    En anglais (étape), on revient plus dans le style du blog, sauf à savoir qu’une des acceptions de « Stage » c’est : échafaud.

    CQFD.

  13. Avatar de Moi
    Moi

    Ce qu’ils font, c’est mutualiser les pertes au maximum en les faisant endosser par les Etats. En annonçant d’un coup l’ampleur des dettes, cela n’aurait pas été possible.
    Ce qu’ils attendent en fait de réaction du marché, c’est un signal que les Etats ne peuvent plus continuer à avaler ces dettes.

  14. Avatar de Oppossùm
    Oppossùm

    Il n’y a pas d’alternative au marché.
    Ceci dit, le marché est un concept difficile à mettre en oeuvre, qui dépasse le simple domaine économique dans lequel on a voulu le cantonner bien qu’il en soi une des expressions . Le système démocratique est également un marché, un espace où la demande et l’offre s’ajustent le plus librement possible.

    Bien sûr la question de l’organisation matérielle de ce « librement » est une partie énorme de la question. Car effectivement le marché ne fonctionne jamais idéalement comme par la magie de sa propre essence car le marché est une institution et son efficience ne peut être optimisée que par une série de règles, donc une régulation forcément contraignante, qui sont concrètement à retravailler sans cesse.
    C’est à ce prix que le marché peut-être une sorte de cerveau collectif d’une nature très différente de l’idéal de l’Etat, mais complémentaire : l’un a la vérité d’une sorte d’inconscient, l’autre est l’expression consciente d’une volonté qui peut toutefois se ‘tromper’ sur elle même .

    De même que les constitutions des pays évoluent pour adapter et faire fonctionner un certain idéal démocratique , dans un environnement concret.

    J’ai pas fumé ma moquette , hein.

  15. Avatar de Philémon
    Philémon

    En doctorat de sciences économiques , j’avais fait une thèse sur  » l’action des pouvoirs publics sur la politique des banques » , cette action étant considérée comme un boulet .45 ans après , j’en ferais bien une autre sur  » l’action des banques sur la politique des pouvoirs publics ».Et d’ailleurs , à part les PDG des quelques grandes banques qui dictent leur stratégie , il reste très peu de banquiers : ces derniers ont le titre , mais sont très bien payés pour n’être que des suiveurs zélés , à la liberté de penser et au rayonnement d’action très limités . dans le cadre de leur entreprise . Et , ils parlent rarement « off  » au cas où…

  16. Avatar de Alain Soler
    Alain Soler

    Pour Eomenos dont je n’avais pa lu le commentaire, cette étape en bon franglais devenant « Stage » nous rappelle la scène du grand guignol. Ne sommes nous pas tous en représentation?

  17. Avatar de Moi
    Moi

    @Oppossum: « Il n’y a pas d’alternative au marché.
    Ceci dit, le marché est un concept difficile à mettre en oeuvre »

    Vous vous contredisez. Cela ressemble à « la révolution inéluctable mais pour laquelle il faut lutter » des communistes.

    Dans l’ensemble, tout votre post est truffé de contradictions.
    Ex:
    s’ajustent le plus librement possible une régulation forcément contraignante
    d’une nature très différente de l’idéal de l’Etat le marché est une institution
    le marché ne fonctionne jamais idéalement a la vérité d’une sorte d’inconscient

    Etc. Un salmigondi proche de la mystique à mon avis.

  18. Avatar de Alain Soler
    Alain Soler

    (v2) Faut rigoler disait Salves d’Or
    “Off the record”, hors micro et sous le sceau de la confidentialité ! Après avoir lu ces confidences hautement confidentielles et exclusives j’ai envie de dire : « tout cela pour ça ! »
    Une tradition de dissimulation ? L’autre mot pour discrétion ou confidentialité, non?
    Les mauvais résultats vont continuer d’apparaitre ? Oui n’est-ce pas, un scoop même le FMI et le nouveau PDG de la Générale le déclaraient récemment !
    Pour quelle raison la situation s’aggrave ? A chaque « stage » les décisions à prendre n’auraient pas été prise ! Ben voyons tous les banquiers, leurs conseils et les autorités de tutelle sont rien que de fieffés imbéciles. Ce banquier « français » aurait-il une expérience de vieux français belge ou québécois pour utiliser « stage » là ou j’utiliserais « étape, stade.. ».
    Les suggestions ne manquent pas ….pourquoi sont-elles ignorées ? Parce que le problème est financier, le politique ne veut pas s’en occuper, ma tante non plus. Ah ! Que c’est beau l’analyse ! Mais vous verrez la solution des bad banks, vous savez ces CDRs cette solution à laquelle tout le monde avait pensé, ben j’y pense aussi!
    « Si vous voulez » il est pas contrariant avec vous votre copain cher PJ, ah ça non, il ne vous ressemble pas, mais pas du tout, n’est-ce pas ?
    Faut rigoler…

  19. Avatar de yann
    yann

    En gros, les financiers, les banquiers, les traders, les spéculateurs, les investisseurs, les nantis (…) se sont bien goinfrés, bien amusés, bien vautrés dans le luxe et le stupre jusqu’à la faillite.

    Et maintenant qu’ils ne peuvent plus jouer parce qu’ils ont cassé leur jouet, ils prennent les états en otage et leur impose de faire reprendre le jouet cassé par le peuple et de leur en donner un tout neuf.

    Et bien sur, les politiques, par peur autant que copinage, diront oui.
    La socialisation des pertes et la privatisation des gains, c’est le nouvel adage de la haute-finance, le nouvel ordre mondial.

    A quand les armes pour sauver nos enfants de cet hydre de cupidité?

  20. Avatar de WB

    Juste incroyable…mais ça correspond à la réalité…
    A ceux qui s’indignent, je dirais quand même ceci : ne faut-il pas respecter l’autorité du suffrage universel ? Les électeurs ont placé Sarkozy et ses idées au pouvoir, je suis un peu choqué de la mauvaise foi de toute une partie de la population (ouvriers en première ligne), qui s’étonne du système qu’elle a cautionné dans les urnes. Les français ont choisi de rompre avec leur modèle, je crois qu’il faut respecter ce choix et accepter le déclin de cette nation comme un fait. Les forces politiques actuelles montrent bien qu’il n’y a rien à faire… Les français ayant la tête sur l’épaule, ceux qui voient à quel point l’équipe au pouvoir est incompétente, ceux-là dis-je, devraient émigrer au plus vite. Pas la peine de s’acharner à vivre dans un pays où l’on ne promeut que les régressions en tout genre…dans la recherche, l’économie, l’armée , les libertés etc. Il faut parfois savoir s’arracher à la médiocrité, c’est si dommage de devoir vivre sa vie dans un pays en déclin.

  21. Avatar de JJJ
    JJJ

    @ Opposùm

    Bonne question que de se demander si la bad bank est une bonne solution : elle le serait, en fait, pour les banquiers eux-mêmes, qui seraient officiellement déchargés du fardeau des toxines… sur le dos du contribuable. Mais vu les montants en cause, pas étonnant que la peur ait dominé : même le contribuable n’a pas les moyens de supporter la charge ! Il est donc compréhensible que banquiers et pouvoirs publics serrent les fesses et fassent des prières la tête dans le sable, dans l’attente de la dislocation inévitable.

  22. Avatar de A.N.Onyme
    A.N.Onyme

    Est-ce que la solution idéale ne serait pas la nationalisation des banques (de TOUTES les banques) pour un euro (ou un dollar) symbolique par banque ? L’état pourrait alors garantir les dépôts des banques et se défaire plus rapidement des actifs toxiques et des équipes dirigeantes qui ont conduit ces établissements à la faillite.

    J’ai un peu l’impression – naïve, peut-être ? – que nous avons le choix entre faire payer la note aux contribuables, ou faire payer la note aux actionnaires. À tout prendre, je préférerais que ce soit les actionnaires qui payent…

    Notez bien que ce qui est écrit ci-dessus provient d’un débutant total en matière de finance, même si je garde un oeuil sur ce blog, et sur d’autres, depuis longtemps…

  23. Avatar de Paul Jorion

    Je remplace « stage » par « phase », à la demande générale. Je note cependant les débordements de violence verbale immédiats contre les usages belge et québécois du français.

    Je lisais hier dans le train « L’argent » d’Émile Zola, et je ne pouvais pas m’empêcher de noter tous les mots, toutes les expressions qui – parfaitement correctes sous la plume de Zola – seraient considérées aujourd’hui comme d’abominables belgicismes.

  24. Avatar de Jean-Pierre
    Jean-Pierre

    Il est quasiment impossible de résoudre cette crise bancaire par la simple autorégulation des marchés. Le fardeau est trop pharaonique. L’ampleur de ce marasme représente près de cinq fois le PIB estimé de la terre entière. Cela signifierait, abstraitement, qu’il faudrait cinq années au monde entier de labeur gratuit pour résorber ce fardeau.

    L’idée de la Bad Bank s’imposera, mais pas sous la forme qu’on tente de nous faire avaler. Ce n’est pas en déplaçant le problème d’un point A (les banques) vers un point B (la bad bank) qu’on le résoudra. L’implosion qui nous affectera prochainement fera voler en éclat tous ces beaux modèles économico-financiers, ces fameux « paradigmes ». La solution qui s’impose est une annulation pure et simple de ces dettes, généralement inexistantes à part dans les livres comptables des intéressés. Que cette solution ne soit toujours pas envisagée – hormis chez les détenteurs de CDS qui ont, paraît-il, déjà résorbé la moitié de leurs contrats de cette manière – est compréhensible car elle désignerait les banques comme coupables de malversations frauduleuses à grande échelle, les instances tutélaires et de supervision pour leur incompétence notoire, les agences de notation pour leur myopie, les académiciens pour leurs modèles inadaptés, et les gouvernants pour leur indécision atavique.

    On peut comprendre que dans ces conditions, cette élite-là préfère que l’écroulement entraîne tout le monde plutôt qu’eux seuls.

    Plus on attend, moins la piste de la bad bank sera réalisable, car plus les problèmes deviendront insurmontables. Au fur et à mesure que des parties ayant joué ce jeu démoniaque disparaissent, il sera de plus en plus difficile d’annuler à l’amiable des contrats les impliquant. C’est que chaque partie concernée assume une parcelle du contrat et chacune reste dépendante de toutes les autres. Il faut absolument éviter que ces acteurs ne disparaissent dans la nature. Si au moins les états avec leurs interventions veillaient à cet aspect-là, on pourrait effectivement parler de gain de temps. Mais il n’en est rien. Plutôt que de parler de « peur », on ferait mieux de parler de « panique ». C’est du sauve-qui-peut à l’échelle planétaire auquel on assiste.

  25. Avatar de Samuel
    Samuel

    @Moi

    Je ne sait pas si vous avez lu ces articles de la Chronique Agora

    http://www.la-chronique-agora.com/articles/20090525-1833.html
    http://www.la-chronique-agora.com/articles/20090526-1836.html

    Plusieurs articles (dont recement sur Contre Info) font mention de l’incapacite de la FED et du Tresor et des invest (chine,moyen-orient…) a absorbe les deficits et les besoins de financement futurs.
    Lorsque, plein a ras bord, la Fed va vendre ses obligations, la digue aura ceder.

    Ma parade depuis fin 2007 est d’avoir investi dans des lingots d’or physiques.
    J’espere avoir parier sur le bon cheval (dore)

  26. Avatar de Karluss
    Karluss

    d’un côté des actifs toxiques, de l’autre, en passif, une dette publique qui explose pour soutenir l’édifice ; il faut privatiser cette dette, la responsabiliser. Le système de la bad bank, n’est-ce pas un peu le grand pardon, tout effacer pour éventuellement recommencer ?
    les emprunts obligataires vont-ils tous devenir des junk bonds ?
    merci

  27. Avatar de il professore
    il professore

    J’espère que je suis le premier à sortir la vanne. Je ne sais pas qui est l’interviewer et l’interviewé… c’est bien paul jorion qui répond aux questions du banquier n’est-ce pas? 🙂

  28. Avatar de Un chômeur
    Un chômeur

    Où est la vérité ?

    * AFP le 27/05/2009 à 11:11

    France : les actifs toxiques des banques ont été « bien identifiés » (Noyer)

    Les actifs toxiques des banques françaises ont été « bien identifiés », a estimé mercredi le gouverneur de la Banque de France Christian Noyer, pour qui « l’essentiel des provisions qui étaient à passer » sur ces produits l’ont été.

    « Aujourd’hui, ce qu’on appelait traditionnellement les actifs toxiques ont été bien identifiés », a déclaré M. Noyer lors de son audition devant la commission des Finances du Sénat.

    « L’essentiel des provisions qui étaient à passer sur des actifs complexes sont derrière nous », a-t-il ajouté.

    Le gouverneur a néanmoins admis que les banques françaises pourraient devoir passer d’autres provisions dans les trimestres à venir, mais que celles-ci seront « les conséquences de la crise économique » et non des perturbations des marchés financiers.

    Le « principal risque » est ainsi « lié à l’activité traditionnelle de crédit », et se traduit par la hausse des impayés, pour les particuliers comme pour les entreprises, selon M. Noyer. Une notion appréhendée par les banques sous l’appelation de coût du risque.

    Pour le gouverneur, les banques françaises sont « solides et bien capitalisées » et ont, dès lors, « tout à fait les moyens de passer les provisions qui pourraient être nécessaires » en cas de poursuite de la hausse des impayés.

  29. Avatar de Oppossùm
    Oppossùm

    @ Moi

    Oui, il me semble (subjectivement) qu’il n’y a pas d’alternative réelle, vraiment meilleure , au marché (Maintenant, plein de pays à divers moment ont essayé autre chose c’est vrai ) : mais ce n’est pas une loi -donc aucune inéluctabilité- , c’est un choix .

    Oui, pour autant ce concept n’est pas facile à mettre en oeuvre (Mais comme pas mal de choses : démocratie/liberté etc …)
    La contradiction que vous voyiez dans mes propos (Même si je ne suis pas très clair ok) est en fait dans la réalité des choses : le marché, pour avoir une réelle utilité, doit avoir une certaine liberté , condition indispensable pour que l’addition des analyses individuelles dégage un point de vue traduisant objectivement une certaine subjectivité (rien n’est simple) . Mais l’absence de règles et donc l’idiotie de l’auto-régulation n’amène que manipulation et distortion : c’est réglé comme du papier à musique.
    L’intérêt d’un marché ‘sincère’ est d’obliger aux ajustements . L’absence de marché ou le marché manipulé ne peut qu’amener à une situation où la ‘contradiction’ (Dans tout ce qui bouge il y a une faille, une contradiction) a emmaganiser une somme de tensions telle que le système pète : il s’agit alors d’un super ajustement mal anticipé ou préparé où la loi du plus fort s’exercera de façon plus éclatante.

    Bref le marché est quelque chose qui se construit. Et se régule donc, d’une certaine façon : donc tout ne doit pas relever du marché et le marché ne doit pas tout envahir , puiqu’il y a des domaines où il ne peut pas fonctionner correctement (soit par choix, nature de l’objet, ou bien pour des raisons stritement historiques ou conjoncturelles …)

    De la confusion peut-être , mais aucune mystique dans ce que je dis (Ni aucun a-priori -enfin j’essaie-)

    PS/ Attention de ne pas confondre marché / libéralisme / Capitalisme / Globalisation

  30. Avatar de Auguste
    Auguste

    à Paul Jorion (billet)

    PJ: Et à quel moment s’adressera-t-on à eux ?
    BA : Paradoxalement, c’est le marché qui en décidera : quand la situation sera si grave qu’il faille absolument sortir du cadre de référence habituel, les marchés l’imposeront alors.

    Tout paraît en bonne cohérence avec ma représentation du réel.
    Touefois, dans cette réponse,
    un segment de propos s’exhale bizarrement (l’habitude) à travers les fils de trame de l’OpaqVoile :
    (…) c’est « le marché » (…)
    (…) les marchés l’imposeront » (…)

    Mais c’est quoi « le marché » ou « les marchés » ?
    Le banquier anonyme estime t-il que c’est une entité relativement « unique-et-pas-si-heterogene-que-ça »
    ou bien qu’il y aurait deux (ou trois) megablocs qui sont dans l’incapacité de se partager le « gâteau reformaté »
    (exempt d’impôt) [BRI+BCE+33LibStreet+…] sur une même table avec un unique couteau.

    Les Creanciers-maîtres ou maîtres-créanciers des TopBanques et (par voie de conséquence) des Etats endettés,
    auraient-ils (a) Peur comme le dit le billet … et/ou (b) la Rage de ne pas pouvoir ENCORE obtenir une plus large part du topGâteau ?
    Pour moi, en Haute Finance, le mot « marché » n’a aucun sens (n’existe pas) … dès que l’on s’élève de quelques étages, au-dessus des ruches de traders qui s’activent ou s’affolent dans leurs « OpenSpaces de MoneyMarkets » ou leurs « salles-des-marchés » (boîtes de Petri)

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