Augmenter les salaires en Europe, le plus rapidement possible

Ce texte est un « article presslib’ » (*)

Je me pose deux questions ce matin. La première, c’est celle-ci : la hausse récente des taux longs américains (3,53 % pour le 10 ans qui décolle, contre 0,95 % pour le 2 ans) signifie-t-elle que « les marchés » (= ceux qui achètent et vendent des Bons du Trésor) anticipent une reprise solide de l’économie justifiant une rémunération bonifiée des investisseurs, ou bien est-ce la prime de risque comprise dans un taux qui fait que les taux longs grimpent, les investisseurs anticipant une rétrogradation de la notation du risque de crédit de l’État américain ?

La réponse à cette première question est simple : la seconde hypothèse est la bonne.

La deuxième question, c’est la semi-nationalisation aujourd’hui de General Motors qui oblige à la poser (60 % pour le gouvernement US, 17,5 % pour le fonds de gestion syndical des employés, 12 % pour l’État canadien et la province d’Ontario). J’écris « semi-nationalisation » puisqu’on l’a compris, jusqu’à nouvel ordre, les US ne nationaliseront rien, continuant de communiquer au monde le message TINA (There Is No Alternative) : ceux qui sont à l’origine du problème demeurent les plus qualifiés à les résoudre. Pourquoi maintient-on en place une équipe qui perd ? parce qu’il n’y en a pas d’autre, mon bon Monsieur ! La question, c’est celle-ci : assiste-t-on – simplement – à la fin de l’empire américain ou – plus dramatiquement – à la fin du capitalisme ? la deuxième branche de l’alternative ayant pour conséquence qu’un corollaire habituel resterait d’application : quand l’Amérique est malade, le temps d’incubation de l’Europe est de six mois environ.

Là aussi, sur la deuxième question, si rien n’est fait, je penche pour la seconde hypothèse. On a cru un instant, il y a un an ou deux, que la finance d’Europe de l’Est s’en tirerait mieux d’affaire que celle d’Europe Occidentale, jusqu’à ce qu’on se rende compte qu’il s’agissait simplement d’une question de temps de latence. Il en sera de même pour l’Europe par rapport aux États–Unis. Ceci dit, la meilleure couverture sociale des ménages européens amortira mieux le choc qu’en Amérique, et ça c’est une excellente nouvelle pour les Européens.

Autre aspect de la question : si les États–Unis devaient redémarrer rapidement (on le leur souhaite de tout cœur, même si rien ne porte à le croire), ce serait à nouveau sur le mode de la bulle financière : parce que les consommateurs s’endetteraient à nouveau comme des bêtes, dans le même contexte de salaires déprimés qui a conduit à la crise. Ce qui suggère, sinon une solution à la crise (le système est très, très fatigué !) en tout cas un moyen excellent de la contenir (c’est la raison de mon « si rien n’est fait », un peu plus haut) : augmenter les salaires le plus rapidement possible.

Comme vous le voyez, je ne suis pas partisan de la politique du pire : je suggère de manière constructive le moyen pour le système capitaliste de retrouver un second souffle. Je suis certain que ceux qui ont à cœur sa survie entendront mon appel. À moins bien sûr qu’ils ne croient vraiment qu’il n’existe pas d’alternative. Je veux dire en leur for intérieur et pas uniquement à des fins de propagande.

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

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