Les chansons pour ceux qui n’aiment pas la musique

Je viens souvent vous faire partager ici mes goûts musicaux. Des gens à qui je ne pense jamais, il faut bien le dire, ce sont ceux qui n’aiment pas la musique. Certains de ces anti-mélomanes ne dédaignent pas pour autant l’atmosphère conviviale et chaleureuse des concerts mais préfèrent de loin y faire autre chose qu’écouter des notes égrénées par un orchestre. Chaque culture a heureusement pris soin de ne pas les ignorer complètement.

Ce qui m’y a fait penser, c’est Hansi Hinterseer, le skieur autrichien et chanteur de charme que le journal Le Monde m’a fait découvrir tout à l’heure. Si comme moi vous ne connaissiez pas Hände zum Himmel, l’erreur sera réparée dans quelques instants.

Germanique : Hände zum Himmel

Anglo-saxon : The Hokey Pokey

Francophone : La danse des canards.

La version la plus enthousiasmante se trouve ici, mais on n’a pas le droit de la déplacer, alors en voici une autre, plus idiosyncratique sans doute mais non dénuée d’intérêt.

Prochain billet dans la série : « Une interprétation sur instruments anciens de la Sinfonia Spirituosa en Ré majeur de Georg Philipp Telemann ».

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90 réponses à “Les chansons pour ceux qui n’aiment pas la musique”

  1. Avatar de juan nessy
    juan nessy

    En tous cas , dans ce monde révolutionné , nouveau , idéal auquel ce blog semble parfois aspirer , je revendique qu’il y ait des Hansi , des danses de canards , du fou , du « vulgaire » , du « divin » , du « nombre » , de l’intuitif , du rythme , du popotin , du jus de cervelle …

    L’interdiction des paris sur les variations de prix doit être compatible avec ça .

    J’ai même le sentiment que c’est cette anarchie dans la musique ( et si possible tous les « arts » ) qui peut rendre trop risqué le pari sur la variation des prix de la musique .

    Tout du moins la musique qui peut s’affranchir d’un support fourni par le capital .

    C’est pour ça que je préfère encore le chant ( on a tout sur soi ) et la musique folklorique .

  2. Avatar de Senec
    Senec

    Ce qu’il y a de sûr est l’ambiance de « franche camaraderie » de bon aloi et le fait que ce skieur ait déjà trouvé une reconversion. Cela ne semble, apparemment, pas à la portée de tous ceux qui n’envisagent qu’un emploi de salarié et rien d’autre ! Place au dynamisme !

  3. Avatar de AER

    Moulou 1975… Quel bonheur.


    TOUT FOUT LE CAMP MOULOUDJI
    envoyé par Kashuc. – Clip, interview et concert.

    À 1min44, on entend : « Il n’y a plus que les banques ». lol

    Un petit pour la route :

    Bon mois d’août à tous.

  4. Avatar de Jean-Luc
    Jean-Luc

    Des gens à qui je ne pense jamais, il faut bien le dire, ce sont ceux qui n’aiment pas la musique. Certains de ces anti-mélomanes ne dédaignent pas pour autant l’atmosphère conviviale et chaleureuse des concerts mais préfèrent de loin y faire autre chose qu’écouter des notes égrénées par un orchestre.

    Suis-je un de ceux-là?
    Il existe des tas de gens qui peuvent vivre sans musique des mois entiers, des années. Je suis dans ce cas. Je n’ai pas de problème d’ordre auditif. Ce n’est pas non plus pour moi un problème d’imprégnation culturelle puisque, bien que nous n’avions pas de tourne-disque chez mes parents, j’ai baigné dans la musique qu’écoutaient mes amis, on m’a traîné dans des boumes, je suis allé à des concerts.

    J’ai entendu il y a peu à la radio un entretien avec Jean-Christophe Rufin, médecin, romancier et ancien ambassadeur de France. Interrogé sur ses goûts musicaux, il a expliqué qu’il n’en avait pas, car il n’avait pas de goût pour la musique et qu’il pouvait totalement s’en passer. Il a précisé que s’il devait choisir un jour de se priver d’un des cinq sens, il choisirait l’ouïe.
    Je repense à un jeu auquel j’avais participé un jour. Tout les participants devaient faire la liste des choses (livres, disques, films, oeuvres d’art plastique, etc.) qu’ils emporteraient sur une île déserte. Pour ma liste de disques j’avais écrit « aucun ». Devant l’étonnement des autres participants, je leur ai dit que je ne voudrais surtout pas polluer le son du vent dans les feuilles ou celui de la houle, ou les chants des oiseaux. Ils ont compris.

    Est-ce que je n’aime pas la musique?
    Je prends du plaisir à écouter une musique que le hasard m’amène à l’oreille. Ici par exemple, sur le blog de Paul Jorion, je clique systématiquement sur les liens musicaux, et presque tout me plaît sur l’instant. J’aime ces ponctuations musicales, comme j’aime les images qui parsèment parfois les fils de commentaires.

    Je n’ai jamais eu besoin de musique. Sans besoin de musique, je suis passé à côté de la culture musicale. Malgré toutes mes tentatives de rattrapage, je ne sais pas faire la différence entre un musicien de jazz et un autre, je ne reconnais pas Vivaldi de Chopin, je peux confondre un air des Beatles avec un autre de Génésis. Si j’en parle ici ce n’est pas pour faire le malin ou l’original. Si j’en parle, c’est parce que le billet me donne l’occasion d’évoquer le cas des gens qui vivent comme moi hors de la musique.
    Je fini même par considérer la chose comme un handicap. C’est peu dire que nous vivons en occident dans des sociétés excessivement musicales, et ne pas être à l’aise dans cette culture amène une forme d’exclusion. Je suis sûrement non-mélomane. Et il arrive assez souvent que les mélomanes soient anti-non-mélomane …ou qu’ils ne pense jamais à ces derniers.
    Toute chose égale par ailleurs, il m’arrive de me sentir comme l’analphabète dans une société de l’écrit.

    Le jour de la Fête de la Musique, j’essaie de me trouver en pleine campagne ou sur la grève bretonne, pour éviter de me sentir Martien sur Terre.
    Mais je crois que ce jour-là même les mélomanes se cloîtrent, non?

    1. Avatar de Paul Jorion

      Votre explication suggère que votre manque d’intérêt pour la musique n’est que l’un des aspects d’une misanthropie plus générale.

    2. Avatar de Jean-Luc
      Jean-Luc

      @ Paul Jorion,

      Merci docteur. Je vais rejoindre l’île déserte pour réfléchir aux autres aspects de cette misanthropie …avec une bonne connection Internet pour continuer à l’entretenir 🙂

      « Tout homme qui, à quarante ans, n’est pas misanthrope, n’a jamais aimé les hommes. »
      Nicolas de Chamfort

    3. Avatar de juan nessy
      juan nessy

      Jean Luc , votre texte est touchant et comme Paul Jorion , j’ai un petit grelot qui s’est mis à tintinabuler dans la tête pour me dire : attention souffrance .

      Il est d’ailleurs un peu contradictoire , car , comment peut on nier la musique quand on aime le chant des oiseaux et le bruit du vent ou des vagues qui sont la musique ?

      S’agissant du sens dont on accepterait de se priver le plus facilement , j’ai toujours personnellement constaté que les sourds ( souvent sourds -muets ) avaient presque toujours une expression triste , alors que des aveugles , par exemple , étaient très fréquemment gais , enjoués et plaisantins .

      Je vous souhaite que votre musique intérieure reste assez riche et vivace pour ne pas être en manque de la beauté du monde .

      PS : personnellement , si je devais n’emporter qu’une chose sur une île déserte , ce serait un bâteau .

    4. Avatar de Jean-Luc D.
      Jean-Luc D.

      Vous êtes dur, Mr Jorion. (lol)

      Il faut faire une distinction entre « détester la musique » et « ne pas y être sensible ». Dans le 1er cas, votre présomption de misanthropie peut s’avérer être juste, dans le 2ème cas, non, et ce pour la simple raison qu’entre 5% et 10% de la population souffre d’amusie, d’absence de sens musical.

      Dans le cas de Jean-Luc, je pencherais plus volontiers pour la 2ème hypothèse. L’amusie ne vous empêche pas d’aimer l’atmosphère de la musique, par contre, vous êtes dans l’incapacité de reconnaître un morceau, d’en comprendre la structure ou d’en saisir la globalité. Néanmoins, cela n’altère pas vos qualités philanthropiques. J’ai une excellente amie, amusique totale, et qui malgré cela, incarne la bonté même.

    5. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Jean-Luc

      Moi, par contre, je crois que vous êtes normal. Il y a des gens qui ont un très bon odorat et d’autres presque pas (c’est mon cas). Il y a des gastronomes et des gens qui mangent n’importe quoi. Il y a des gens avec une sensibilité spéciale aux couleurs (certains peintres et écrivains) et d’autres totalement indifférents. On peut naître avec des sens plus ou moins développés, comme on peut être plus ou moins grand, ou plus ou moins fort, ou plus ou moins beau.

      Et cela indépendamment de la sensibilité à la beauté en général, comme le montrent les cas d’un Rilke, un Unamuno, un Pessoa ou un Borges, qui étaient insensibles à la musique.

    6. Avatar de pablo75
      pablo75

      Peut-être aimerez-vous cette très belle chanson du groupe portugais Madredeus (qui appartient à leur deuxième et meilleur disque, « Existir » -1990-)

      http://www.youtube.com/watch?v=zl-7OGoVlkc

      (Leur site: http://www.madredeus.com/ )

    7. Avatar de Paul Jorion

      @ Jean-Luc D.

      Non, c’est qu’il dit par ailleurs : ce qu’il ajoute.

    8. Avatar de Jean-Luc
      Jean-Luc

      @ juan nessy,

      Si il y a une souffrance derrière ce que j’ai voulu exprimer, juan, c’est celle que j’ai écrite, c’est-à-dire le sentiment d’exclusion que peut ressentir celui qui n’a pas de culture musicale dans une société excessivement musicale (je devrais même dire musicalisée à échelle industrielle).
      Quant à la misanthropie que suggère à Paul Jorion mon explication, je crois que c’est une suggestion de premier degré -d’où mon « Merci docteur » (quoique …Paul Jorion étant certainement un des seuls à lire TOUS les commentaires de chacun d’entre nous, je ne serais pas étonné qu’il ait déjà repéré depuis longtemps chez moi la misanthropie qu’il a choisi de pointer ici!).
      Vous comprenez, juan, il serait trop simple de dire que celui qui n’a pas de goût pour la musique éprouve un quelconque mal de vivre, et bien plus simpliste d’affirmer que « celui qui n’aime pas la musique n’aime pas les humains » (pardon de cet aphorisme pour midinette).
      – Comment?! tu n’as pas de goût pour la musique?
      – …oui…je ne sais plus quoi faire…je suis au bout du rouleau ma chérie…
      – Tu dois absolument aller « en parler »!

      Comprenez-moi, je ne veux pas pousser le bouchon trop loin et essayer de trouver des circonstances atténuantes à mon inculture musicale (ma fainéantise y a sa part), et encore moins dénigrer cette culture.
      Oui, il y a des gens qui ne comprennent pas la musique, et qui aiment les sons de la nature; ce n’est pas contradictoire.
      Il existe de la même manière des gens qui ne comprennent pas les images -peintures ou photographies- et qui se régalent d’un visage qu’ils rencontrent, d’un paysage ou d’un ciel coloré.

      J’utilise cette dernière comparaison pour me faire comprendre.
      Commentaire après commentaire, vous avez pu décrypter que je suis quelqu’un qui baigne depuis très longtemps dans l’image, au sens large, et que cela me passionne plus que de raison. Publicité -papier et film-, illustration, graphisme, décoration, dessin animé, bande dessinée, peinture, j’ai touché à tout cela avec bonheur, et en cherchant à chaque fois à m’y cultiver profondément.
      Il m’arrive très souvent de croiser des gens qui n’ont aucun goût pour l’image. Certaines de ces personnes aiment malgré tout les stimuli visuels que notre société leur met devant les yeux, mais se contentent pour leur plaisir personnel d’une jolie photographie de leurs enfants posée sur leur bureau, d’un ou deux chromos pré-encadrés achetés dans un magasin de meuble, ou de choisir une fois l’an quelques cartes-postales en couleurs.
      Je ne crois pas faire un excès de philanthropie en ne concluant pas que ces personnes sont en souffrance. Si elles n’aiment pas les images, je ne diagnostique pas non plus qu’elles ont un manque d’intérêt pour la vie, ou qu’elles signent là leur misanthropie cachée.
      Je me dit que les centres d’intérêt sont divers, et que tous ne sont pas partagés.
      Je me dis que si la culture visuelle était, dans notre société, développée et valorisée au même point que la culture musicale, ces gens-là se sentiraient souvent exclus. Heureusement ils ne le sont pas.

      N’êtes-vous pas troublé, juan, du fait qu’énormément de personnes de tous âges et de toutes conditions, peuvent citer des dizaines de noms de chanteurs ou de musiciens, connaissent des centaines d’airs ou de chansons, et sont incapables de citer dix aquarellistes, de faire la différence entre un tableau de Sisley et un de Pissaro, ou de sentir (même pas dire) pourquoi telle image, telle typographie, tel cadrage sont meilleurs que tels autres?
      Lorsque, dans une conversation avec des amis divers, je constate que tous peuvent dire de quel instrument jouait Stan Getz (Saxophone ténor! -merci Wikipédia), alors qu’ils sont incapables de savoir quels instruments utilisaient Gerard ter Borch, Jan Lenica ou Milton Caniff (trois maîtres incontestés de leurs arts respectifs), je me dis qu’il y a des cultures valorisées et d’autres non.

      Tout cela n’est pas très grave, et je comprends parfaitement Paul Jorion. Etant mélomane, il a voulu s’amuser. Si sur ce blog nous commentions aussi souvent des images que des musiques, il aurait été aussi amusant de publier un billet à l’attention de « ceux qui n’aiment pas les images » et d’y montrer une croûte figurant des biches dans un sous-bois!

      —————

      @ Jean-Luc D.,

      Merci beaucoup!
      Comme me disait un ami médecin: « Lorsque je mets un nom sur un symptôme, mes patients souffrent moins ». J’ai appris grâce à vous ce terme d’ »amusie ». Me voilà armé face à mes futurs contradicteurs (je m’en « amuse » déjà!).

      —————

      @ pablo75,

      Nous nous comprenons encore une fois. J’ai pu constater au fil du temps que, en plus d’un goût sûr pour d’autres arts, vous êtes mélomane, comme Jean-Luc D. que j’ai lu plus haut (et avec lequel vous n’avez pas les même horizons « boulezien » -je me rappelle de vos réflexions sur la musique dite « concrète » il y a quelques mois). Comme lui, vous n’avez lu chez moi aucune négation de la musique mais le constat d’une forme de léger handicap, qui n’a rien à voir avec une tare.
      Merci de la musique que vous m’avez offert. Je l’écoute plusieurs fois en écrivant ces lignes au milieu de la nuit.

      —————

      @ Paul Jorion,

      Non, c’est qu’il dit par ailleurs : ce qu’il ajoute.

      Moi y en a pas comprendre. Peut-être mon ultime réflexion de comptoir sur la Fête de la Musique? Je voudrais la retirer tellement elle est stupidement hors sujet, mais il est vrai que le 21 juin ne corrige pas ma misanthropie. Ou bien ce que je dis « par ailleurs »? Dans ce cas, ce que je soupçonnais au début de ma réponse à juan nessy est confirmé!

    9. Avatar de juan nessy
      juan nessy

      Pour Jean – Luc :

      Où Prévert associe la musique à un tableau réussi :

      http://www.wat.tv/video/prevert-pour-faire-portrait-llwt_2fgqp_.html

      Cordialement et bonne journée , juan nessy .

    10. Avatar de juan nessy
      juan nessy

      PS : ce petit poème de Prévert sera aussi mon cadeau d’anniversaire pour le petit Théodore et sa maman .

    11. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Jean-Luc

      J’ai remarqué souvent qu’il y a une espèce de compensation dans les sens chez les gens cultivés. De la même façon qu’on sait que les aveugles développent un ouï très fin, j’ai vu souvent des gens très « visuels », fascinés par les images et très sensibles à elles, qui faisaient l’impasse, si on peut dire, sur la musique. C’est le cas de pas mal de peintres, mais aussi des poètes comme Rilke (hypersensible à la peinture) ou V.Hugo (qui dessinait très bien) ou des écrivains comme Roger Caillois (fasciné par la beauté des minéraux au point d’avoir écrit l’un de livres de « poésie » les plus étonnants du XXe siècle: « Pierres »). C’est le cas aussi de Freud (grand amateur d’art ancien) qui a écrit à Romain Rolland : «Combien me sont étrangers les mondes dans lesquels vous évoluez ! La mystique m’est aussi fermée que la musique».

      Ça ne m’étonne donc pas que vous soyez dans ce cas vous aussi, ce qui vous rend encore plus normal, si l’on peut dire.

    12. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Jean-Luc encore

      Et puisqu’au fond vous aimez bien la musique quand même, voilà « In my garage » du magnifique Esbjorn Svensson Trio (arrêté en pleine ascension en 2008 après la mort de son leader et pianiste, noyé dans un accident de plongée à 44 ans).

    13. Avatar de vigneron
      vigneron

      C’est pas Nietzsche qui disait quelque chose comme, « L’existence et le monde ne sont éternellement justifiés que par l’esthétique. »

      Alors, quel que soit le canal emprunté, auditif, oculaire, olfactif, gustatif ou épidermique, du moment que ça passe… Vu ce que ça passe.

    14. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Vigneron

      Nietzsche a dit surtout: « Comme il faut peu de chose pour être heureux! Le son d’une cornemuse… Sans la musique, la vie serait une erreur. » (Fragments posthumes)

    15. Avatar de vigneron
      vigneron

      @pablo75

      Là vous êtes cruel. J’ai volontairement pas voulu citer cette outrance nietzschéenne, pour en choisir une plus charitable envers Jean-Luc et bang! Abattu à bout portant!
      Marche funèbre… 🙂

    16. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Vigneron

      Celle de la 3e symphonie de Beethoven, celle de la 2e sonate de Chopin, celle du Crépuscule des Dieux de Wagner ou celle du 2e mouv. de la 7e de Bruckner écrit à la mémoire de Wagner et qu’on a joué à l’enterrement de Bruckner lui-même? 😉

    17. Avatar de Jean-Luc
      Jean-Luc

      @ vigneron,
      🙂
      in cauda venenum

      @ juan nessy,
      Merci juan pour ce poème. Je l’avais appris à l’école et tout m’est revenu! (mystère du merveilleux exercice de récitation)
      Votre interprétation du poème ne m’a surpris qu’à moitié car elle est le résultat de la magie de Jacques Prévert.

      @ pablo75,
      J’aime la musique, c’est sûr, puisque je prends du plaisir quand on me guide vers elle, quand je suis accompagné sur la voie du beau à écouter. Merci aussi pour ce morceau du Esbjorn Svensson Trio.
      J’évoque la voie vers le beau et, en écoutant « In my garage », il y a quelque chose qui me frappe; au début du morceau, la ponctuation régulière et lancinante d’une des caisses de la batterie est un train lancé sur une voie (j’entends le « tchouf-tchouf » régulier des pistons de la machine), et ce train va peu à peu, mouvement de roue après mouvement de roue, me faire pénétrer dans un paysage musical de plus en plus complexe. Un grand plaisir.
      Vous avez bien fait d’insister sur la normalité, pablo. Je n’ai pas toujours très bien vécu la situation que j’ai décrite dans mon premier commentaire. Profitant du billet de Jorion, j’ai voulu y parler ouvertement de ce point de faiblesse, de cette zone de difficulté d’intégration au monde qui m’entoure. Tout le monde a compris que la demi-boutade de Paul Jorion ensuite m’a un peu sonné, me renvoyant dans mes cordes. Le sourire que je lui ai renvoyé était aussi pour moi, pour m’enlever du poids.
      Après avoir lu les explications de Jean-Luc D., les exemples multiples que vous donnez me conforte dans l’idée que j’ai eu raison d’évoquer cette faible acuité naturelle à la musique chez certaines personnes. Je ne savais pas pour tous les auteurs que vous citez qu’ils étaient dans ce cas. Vous avez parlé de l’odorat et du goût également, et j’ai compris avec vous qu’il pouvait y avoir une plus ou moins grande sensibilité innée de certains de nos sens à la complexité. Je n’ai pas renoncé à améliorer cette sensibilité faible à la musique.
      Je disais ne pas avoir « besoin » de la musique car, en plus du défaut de départ, j’ai certainement réussis très jeune à remplacer par encore plus d’autre chose (de l’ordre du visuel) le besoin musical qui arrive vers l’adolescence. Cependant, je pense ne pas avoir fait complètement basculer le désir d’harmonie et de plaisir artistique du sens auditif vers le sens visuel (votre exemple inverse de l’ouïe fine des aveugles est parfait). Même si je pense qu’il me faudra toujours des guides musicaux, l’art peut encore m’atteindre par l’oreille, c’est certain!

    18. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Jean-Luc

      L’oreille se travaille, c’est sûr. Quand j’avais 15 ans ça m’épatait les gens qui reconnaissaient Chopin. Aujourd’hui ça me paraît banale de le reconnaître au bout de 2-3 notes. Entre temps j’ai écouté ses oeuvres des centaines de fois. Si vous faites la même chose, vous arriverez au même résultat.

      Plus vous écoutez de la belle musique et plus l’oreille s’affine – pas celle de Boulez, qui n’affine que la patience (j’ai réussi l’autre jour à écouter sur France Musique la moitié de son « Répons » – 20 minutes !!! – sans m’énerver devant tant d’impuissance arbitraire), mais la vraie musique, celle qui obéit à la Forme comme tout ce qui existe dans la vie.

      La musique est une drogue: plus elle vous fait de l’effet et plus vous l’aimez; et plus vous l’aimez et plus vous avez besoin d’elle. Donc, « shootez »-vous à la musique jusqu’à devenir accroc…

      (« La musique de Scriabin: un bain de glace, cocaïne et arc-en-ciel » – Henry Miller)

      http://www.youtube.com/watch?v=62ZydQYiCAk

  5. Avatar de vigneron
    vigneron

    merci jorion . paponat

  6. Avatar de vigneron
    vigneron

    paponat « la chérie de vigneron « , votre danse m’a enivrée , je vais finir par vous aimer ….

  7. Avatar de vigneron
    vigneron

    quand au coup de canif et le coup du bout de bois …il a bien reçu le message….

  8. Avatar de Franz Biber
    Franz Biber

    Désolé pour cette intervention tardive.

    Rassuré par l’éclectisme des goûts des participants. J’ai bien compris que l’on s’intéressait en l’occurrence à la chanson et ses meilleurs ou pires aspects. Jusqu’à me demander ce que la chanson avait pu faire au chant pour être ainsi traitée.

    Puis-je me permettre une réflexion plus générale ? Il s’agit de cette tendance culturelle à habiller tout ce qui peut ressembler à de la musique (chant ou instrumental), d’un son assourdissant enveloppé par des basses hyper amplifiées. Ainsi l’autre jour, assistant à un concert de Didier Lockwood, excellent violoniste par ailleurs, je fut terrifié par la présence d’un mur du son (ou du çon ?). Crainte justifiée quand je dû protéger ce qui tentait de battre dans ma poitrine de peur qu’il ne soit écrabouillé par un tapis de bombes sonores.

    Partout dans la moindre kermesse de maternelle, on installe des sonos qui secouent les tympans des enfants. Pas de fête ou de manifestation sans cette présence totalitaire. Cette obligation qui s’invite même sur de la bonne musique me fait penser à une nouvelle mode qui imposerait pour n’importe quel plat, même pour des coquilles saint Jacques avec un coulis de poireaux ou un pot de caviar, le nappage abondant de Ketch-up. Un chateaubriand ? Avec ketchup, bien entendu ?

    Ce qui m’embête un peu est que cela semble être admis par le plus grand nombre comme une nécessité inévitable. Le signe de l’animation qui rassure parce qu’elle atteste qu’il reste encore un fil du lien social. Il semblerait que ce soit une tendance lourde que chacun subi sans voir qu’elle participe d’une acculturation collective sournoise. Suis-je un affreux asocial ?

    Amicalement
    Franz

    1. Avatar de Jean-Luc
      Jean-Luc

      @ Franz Biber,

      J’ai envie de poursuivre vos observations.
      (Certains vont se demander de quoi se mêle le Jean-Luc, après ce qu’il a raconté plus haut.)

      Vous parlez d’une acculturation musicale collective à grand coups de tapis de bombes sonores, comme en cuisine un nappage de ketchup sur tous les plats.

      Il s’agit à mon sens d’une modification culturelle, d’une nouvelle « culturation », plutôt que d’une acculturation. L’acculturation viendrait si la culture musicale disparaissait, or elle n’a jamais autant été vivace. Au point de vue de la vivacité culturelle musicale, le niveau monte (et pas seulement le niveau sonore).
      On se rappelle de la polémique qui avait suivi la publication du livre « Le niveau monte » de Baudelot et Establet en 1990, sous-titré : « Réfutation d’une vieille idée concernant la prétendue décadence de nos écoles ». Les auteurs démontraient que le niveau scolaire général en France n’avait cessé de progresser depuis la seconde guerre mondiale. Leurs contradicteurs répliquant que la quantité de savoir (et de diplômés) ne présumait pas de la qualité du savoir.
      Je me demande s’il n’en va pas de même concernant la culture musicale.
      Je racontais plus haut que la plupart des gens autour de moi ont une masse de connaissances très grande concernant la musique (ils savent reconnaître beaucoup d’airs, connaissent des noms de compositeurs ou d’interprètes, etc.), mais cela de préjuge pas de leur connaissance profonde. Bizarrement, la culture est devenue affaire de quantité. La qualité est suspecte d’élitisme anti-démocratique, alors qu’élitisme et démocratie n’ont pas à être opposés. J’ai entendu récemment des amis parents d’élèves, désireux que leurs enfants se cultivent musicalement, se plaindre que le Conservatoire de musique de leur ville dégoûtait les enfants de la musique par une approche trop élitiste (des musiques trop « savantes » qui manquaient de rythme). Ils souhaitaient une approche musicale « démocratisée », c’est à dire cherchant le plus grand dénominateur commun (le rythme sûrement), afin qu’aucun enfant ne soit oublié en chemin. De lieu de formation à la qualité musicale, ces parents préféraient que le Conservatoire devienne un lieu de fabrication de citoyens « musicalisés ».

      La qualité est rare dans bien des domaines ; faut-il la bannir au nom de la défense de la démocratie? La démocratie exige-t-elle que tous les citoyens soient « musicalisés »? (Et pourquoi ne pas exiger la même « culturation » de masse de TOUS les autres arts?)
      Je ne sais pas si la démocratie y gagne quelque chose, mais en tout cas, en « culturation » musicale, le niveau monte.

      Pour ce qui est du niveau sonore, il me paraît que l’imprégnation quotidienne de la « culturation » musicale y trouve son compte. Ce niveau sonore permet que tout le monde soit atteint par le plus grand dénominateur commun musical – ou que le moins possible de monde y échappe. Le fait que les basses rythmiques soient le plus amplifiées assure que le « viscéral » sera touché davantage que le mental qui, lui, a plus de défenses proprement culturelles (au vrai sens du terme). Dans « Le Capitalisme de la séduction », le sociologue Michel Clouscard avait écrit sur ce « pathos machinal » du son, autrement dit ce moyen propre à émouvoir l’auditeur globalisé. Pour lui le concert de Woodstock, « la première internationale de l’animation machinale », était un des aboutissements de la globalisation marchande. Sujet vaste.

      Ceci dit, le mur de son, ce puissant bombardement sonore, n’est pas seulement un moyen de sidération des foules sentimentales. Il fait parfois partie de la musique elle-même, comme la taille d’un tableau fait partie du tableau.
      Vous parlez, Franz, de Didier Lockwood ; ce violoniste est justement un des éléments du petit vernis de culture musicale que j’ai réussis à me faire au fil du temps. J’ai le souvenir de l’avoir écouté la première fois en 1976 au Théâtre de la Renaissance à Paris, lors d’un concert du groupe Magma, dont il était alors membre. Un moment important pour moi, une sorte de grand dégoupillage, de dépucelage de mes oreilles d’adolescent ! …Didier Lockwood, un des premiers violonistes « plugged » (branché à l’électrique!) envoyant du son avec Klaus blasquiz et Jannick Top dans une salle de théâtre, le tout porté à ébullition par la rythmique pulvérisante de Christian Vander… et mon coeur a tenu!

      (Je viens de lire plus bas ce que vous répond Jean-Luc D. J’apprends beaucoup par ici.)

  9. Avatar de Jean-Luc D.
    Jean-Luc D.

    à Franz Biber,

    Avec un tel pseudo (à moins que ce soit votre vrai nom), seriez-vous amateur de musique baroque? Si oui, je comprends votre agacement face au déluge de décibels.

    Récemment sur France Culture, j’écoutais une émission consacrée à Françoise Sagan dans laquelle, à un moment donné, elle parlait du fétichisme du son et s’en étonnait, trouvant curieux que l’on s’intéresse davantage à lui qu’à la musique elle-même.

    Je suppose que, tout comme moi, vous avez déjà assisté à des conversations au cours desquelles de prétendus mélomanes dissertaient pendant des heures sur la qualité du son de leur chaine hi-fi high tech, avec ampli nucléaire et pré-ampli à triple injection truc-machin-chose et des hauts-parleurs de 4,50 mètres de haut avec quadruple boosters turbo restituant un son tellement pur que plus pur, ça ne se trouve pas, etc… Par contre sur la musique, pas un mot… le vide sidéral.

    Les décibels ont peut-être vocation à remplir ce vide, à donner l’illusion d’exister dans et par le bruit? Triste illusion en vérité, car quand le bruit s’arrête, le vide réapparaît encore plus terrifiant. Comme vous dites, cela procède d’une acculturation, voire d’une aliénation, collective sournoise par le biais d’un gavage sonore. Peut-être est-ce le signe aussi d’une société qui a peur du silence, d’un silence qui vous oblige à vous retrouver face à vous-même et à vous confronter à vos démons intérieurs ou à votre propre vide intérieur. Peut-être est-ce aussi une question de lâcheté comme le propose Cioran quand il écrit : « Le mutisme cosmique enseigne tant de choses, que seule la lâcheté nous pousse dans les bras de ce monde. » (Le crépuscule des Pensées). Et pourtant que le silence est bon, même en musique. Comme le dit si poétiquement Jankélévitch dans « la musique et l’ineffable » : « Le silence est le désert où fleurit la musique, et la musique, cette fleur du désert, est elle-même une sorte de mystérieux silence. »

    C’est vrai aussi que l’abondance de décibels, plus proche du bruit que de la musique, peut rassurer, sécuriser, créer cette illusion de lien social dont vous parlez, mais elle nous enlève aussi à nous-même, nous obligeant à nous fondre dans une masse informe, pour au final anéantir nos singularités. C’est le pouvoir sombre de la musique, et savamment manipulé, à des fins peu morales.

    Je mettrais presque à niveau égal, même si cela dénote un degré supérieur de culture musicale, les discussions interminables sur les interprétations des uns ou des autres.
    D’un côté, idolâtre du son, de l’autre idolâtre de l’interprète. Mais où est la musique dans tout cela, le ressenti personnel, l’expérience que l’on en retire, voire même l’enseignement philosophique?…

    Tout cela, à mon sens, est symptomatique d’une époque qui privilégie le contenant au contenu, l’apparence à la profondeur, la simplicité à la complexité.

    Heureusement qu’un blog comme celui de Paul Jorion nous permet de renouer avec cette culture du contenu, de la profondeur et de la complexité.

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