Billet invité
Ingénieur de formation, j’écoute et je lis le blog depuis quelques semaines, espérant arriver à comprendre au moins les grandes lignes de « comment marche le grand Monopoly de l’économie et de la finance ». Or plus j’avance et moins je comprends (sinon que lorsque toutes les cases sont couvertes d’hôtels au Monopoly, on recommence à zéro avec redistribution des cartes).
Je vous livre ces quelques réflexions de candide que tout ce fourbi m’inspire :
1) L’imbrication entre un système dérégulé et sans véritable patron (la finance mondiale) et des politiques élus ayant délégué une partie de leurs pouvoirs à des bureaucrates, ne permet pas d’espérer une réforme du système de l’intérieur ni par l’un ni par l’autre camp, malgré les belles paroles (discours de Toulon par exemple).
2) Puisqu’il est exclu que le changement vienne de l’intérieur du système et que, comme de nombreux intervenants l’ont à juste titre souligné, le changement ne viendra pas non plus de l’extérieur tant que les ventres seront encore suffisamment remplis, la voie du changement la plus probable est un collapse « naturel » du système (un peu comme en 1929 ?). Mais comme le monde a « légèrement » changé depuis (triplement de la population mondiale, concentration citadine, dépendance généralisée à l’énergie, émergence de la Chine et des autres pays du BRIC, transfert rapide de technologies, vitesse de l’information et des échanges tendant vers une égalisation des savoirs et des aspirations etc. etc.), quelle forme peut prendre un tel collapse aujourd’hui ?
3) Que se passera-t-il si la Grèce fait défaut demain ? A l’intérieur du pays on voit bien que ce ne serait pas la fin du monde pour les gens actifs. Le troc (déjà largement utilisé) se généraliserait et la drachme ou je ne sais quel coquillage servant de monnaie de remplacement prendrait rapidement le relai de l’euro. Quant à l’État qui a trahi la confiance de ses créanciers, il n’aurait plus rien à perdre à annuler totalement la dette publique. La situation pour une grande partie de la population (jeunes, inactifs, malades, retraités…) serait très difficile mais (c’est sans doute le mon côté optimiste), je suis convaincu qu’un grand mouvement de solidarité est alors tout à fait possible.
4) Ensuite la défaillance d’un premier pays provoquant la défaillance du pays le plus faible suivant, chaque pays tombé déclarerait son incapacité à rembourser la dette et, plus radicalement, sa décision unilatérale de ne pas l’honorer ni en partie ni plus tard. Incapable de ce fait d’emprunter à nouveau, chacun de ces pays n’aurait d’autre choix que de vivre de ses ressources propres, c’est-à-dire à un niveau de vie auquel il aurait dû descendre petit à petit depuis 25 ans dans un monde de vases communicants (Occident baissant beaucoup / pays émergeants montant un peu) s’il n’avait eu accès au crédit facile qui n’a permis que de « reculer pour mieux sauter ».
5) A la fin du processus, toutes les dettes publiques des pays seraient annulées (libérant ainsi les générations futures de leur poids insupportable) et l’on n’aurait d’autre choix que de repartir de cette nouvelle situation, sans doute sur les mêmes bases de l’offre et de la demande des produits et services, mais à l’exception de la finance qui devrait être traitée à part (au moins une banque publique de dépôts, séparation des banques de dépôts et d’affaires, etc.), l’argent, simple outil facilitant les échanges, ne pouvant et ne devant pas être considéré comme un produit ou un service comme un autre.
6) Concernant la focalisation sur le monde politico-financier considéré comme principale cause de la débâcle actuelle pour avoir permis la formation d’une méga-bulle de crédits publics et privés qui a caché depuis plus de 20 ans la réalité de la baisse inévitable de niveau de vie de nos sociétés « riches » (car il est évident que 7 milliards d’habitants ne pourront jamais vivre comme nos sociétés occidentales l’ont fait au siècle dernier en exploitant la plupart des ressources de la planète à notre seul profit), ne nous trompons-nous pas de cause du mal ? Et si ladite débâcle n’était que la traduction naturelle et inéluctable de la tendance au rééquilibrage mondial en cours à laquelle nous tentons de résister par tous les moyens ?
7) En conclusion, et comme je ne crois pas à une réhabilitation raisonnée du système avant sa chute, les réflexions ci-dessus, dont je n’ignore pas le côté simpliste, se résument en une question :
Que va-t-il se passer concrètement quand tout ça va casser ?
355 réponses à “QUE VA-T-IL SE PASSER CONCRÈTEMENT QUAND TOUT ÇA VA CASSER ?, par Pierredev”
L’oligarchie financière et les gouvernements de la zone euro les plus proches d’eux , de droite, Merkel, Sarkozy, Berlusconi, le président de la Commission Barroso disent RIGUEUR mais ne veulent surtout pas érafler les intérêts des riches: pas touche aux revenus supérieurs à cinq cent mille euros (40 fois le SMIC net annuel), ni aux hotels cinq étoiles qui facturent une nuit au dessus de 2000 € etc.
Aucune réforme des banques dénationalisées par le RPR-UMP en 1986, autre que cosmétique. L’argent des déposants peut toujours être joué à la Bourse et mis dans les paradis fiscaux sans aucun contrôle ni sanction.
On est loin des débats sur la décroissance pour qui? du retour au troc pour qui et pour combien?
Cessons de les NOURRIR !
@ Mianne
Notamment en votant contre eux pour leur retirer le pouvoir politique et mettre la Finance au service des citoyens travailleurs (95% de la population).
LA SOLUTION EST SOUS NOS YEUX!
Y’a qu’un peuple DIGNE en ce moment! ils ont la tête haute en Islande! :
« D’après un récent rapport du Fonds Monétaire International (FMI), l’Islande est sur la voie d’un désendettement rapide.
Plus encore : elle demande des comptes :
le président islandais Olafur Ragnar Grimsson a demandé dimanche à l’Union européenne de mener une enquête pour déterminer comment elle a pu permettre à la Grande-Bretagne et aux Pays-Bas d’exercer une telle pression sur l’Islande pour tenter de transférer sur le contribuable islandais les sommes dues par la banque Icesave en faillite.
Nous applaudirons sans modération le gouvernement islandais pour sa fermeté et son patriotisme, et nous ferons observer que le remboursement de dettes privées par le contribuable, cela s’appelle du détournement de fonds publics et, là où la justice fonctionne normalement, cela mérite la paille humide des cachots… »
AGORAVOX.
REFUSEZ LA DETTE! DIFFUSEZ!
Ouais, pour que je fasse plus qu´un léger sourire un poil désabusé, il seraient inspirés de retirer le mot patriotisme dans leurs louanges.
Vous ne trouvez pas que mettre cela sur le patriotisme revient à dire « tous les anglais et tous les hollandais sont des fumiers de salops qui ont essayé de voler les gentils islandais dont aucun n´a jamais tiré aucun profit de la situation ». Pas mal comme sophisme, je trouve.
« Allez, foutez vous sur la gueule les prolos, nous on compte nos milliards » ça ! ça aurait un accent de sincérité comme pétition de riches.
@djea,
si vous diffusez de l’information sur la dispute Icesave entre l’Islande et le Royaume Uni et les Pays Bas , il s’agirait peut être de donner l’information, et non pas seulement la vue forcément biaisée du président Islandais.
Puisque vous faites référence au récent rapport du FMI, il suffit d’aller le lire et voir ce qui s’y trouve à ce sujet :
Notamment :
1. Dans une lettre signée par le gouvernement islandais à Mme Lagarde datée du 16 Août 2011 (voir p.47):
16. We still attach high importance to resolving the Icesave issue. The law authorizing
the Minister of Finance to confirm the agreements reached between the Icelandic
Government a, respectively, the Dutch and U.K. authorities on the Icesave issue was revoked
following a national referendum in April last. We had negotiated these agreements in spite of
our view that the reimbursement of the Icesave deposit payout is not a sovereign obligation
and that Iceland´s deposit guarantee scheme was set up in full compliance with the respective
European directives. This is still our view. Consequently, it is likely that the dispute
regarding the deposit guarantees will be settled through legal channels. We are ready to fully
engage in such a process. We have already affirmed that should a competent court come to the conclusion that Iceland has a sovereign obligation stemming from the Icesave deposits, we will honor that obligation.
2. Dans ce même rapport publié par le FMI, p23:
Litigation risks related to the resolution of Icesave and challenges to the Emergency
Law remain.
 On Icesave, the EFTA Surveillance Authority (ESA) issued its reasoned opinion
in June, finding that Iceland is in breach of the EU Directive on Deposit
Insurance. Given the authorities’ longstanding position on the issue, it is likely
that the matter will be brought before the EFTA Court. Should the EFTA Court
also find Iceland to be in breach of the EU Directive, it remains unclear what the
actual sovereign liability would be and on what terms–interest and maturity–
Iceland would have to discharge such a liability. These risks are mitigated by the
significant asset recovery from Landsbanki’s estate, which are estimated to cover
94–99 percent of Icesave deposits. Stress tests suggest that, while fiscal costs
would rise substantially in some possible outcomes, public debt would remain on
a downward path (Appendix I)
Conclusion : cette affaire est encore loin d’être terminée et, quoi qu’en dise Mr Grmisson, se terminera devant la cour de justice de l’EFTA suivant la procédure en cours.
Pour conjecturer l’ avenir ..il y a un facteur important (entendu ce matin sur Fr Cult . ) : L’ individu balance toujours entre sécurité et liberté , en privilégiant bien sur la sécurité …..Et du point de vue « sécurité » /peur , il y a eu récemment un changement radical de paradigme : de global et virtuel (incertain et onirique / bombe atomique , péril rouge ou jaune …on est passé a une peur diffuse qui peut vous frapper et frappe souvent pres de vous : le voisin cadre -piscine quasi SDF et divorcé etc …. Ce ne sont plus des régions ou des pays qui sont menacé de pauvreté ou de souffrance , mais chacun de nous …
Ce qui est inquiétant ce sont les réactions sociétales résultantes de ce basculement et les considérations humanistes révisées a la baisse …. qui rendent la conjecturation délicate .
QUE VA-T-IL SE PASSER CONCRÈTEMENT QUAND TOUT ÇA VA CASSER ?
C’est simple, et les débats sur ce blog le démontrent en grande partie:
Libération de la parole et donc une émergence d’une intelligence collective insoupçonnée, qui mettra sur pieds les prémices de la grande révolution post néolithique.
Le pire crime du capitalisme (et dieu sait qu’il en est riche) c’est d’avoir tuer l’intelligence collective.
Le problème n’est pas de trouver les solutions de demain, le problème est le système d’aujourd’hui.
(bon!! c’est vrai, je suis un indécrottable optimiste!!!!)
Modeste Pierredev, voilà une excellente synthèse, pour quelqu’un qui n’y comprend rien !
François de Closets était l’autre jour sur France Culture pour parler de son dernier livre, il a une vision assez proche.
Je partage votre point de vue, et je crains qu’il ne faille tous nous adapter à une baisse de la consommation (dans les pays développés). Cela va être un sacré changement culturel ! Comment faire pour que ça ne se passe pas trop mal ? Il va falloir trouver du plaisir dans autre chose que dans la consommation, quel tristesse…
Je vous recommande les pistes de François Flahault dans son petit livre « Le paradoxe de Robinson ». A mon avis un grand petit livre, qui aide à imaginer une société autrement.
« Que va-t-il se passer concrètement quand tout ça va casser ? »
Bientôt deux ans que je lis ce blog, j’en tire un grand plaisir intellectuelle, au même titre que de lire M.Mac Luhan, P.Bourdieu, N.Klein ou Annah Arendt etc. J’ai acheté le capitalisme à l’agonie mais je n’ai jamais donné un kopeck pour ce blog (il me tarde).
Pour mon premier commentaire je vais me présenter « un poil » pour répondre en partie à cette question. J’ai presque trente ans et toujours vécu en dessous de 900 euros par mois tout en conjuguant mon M2 de droit et mon activité d’artiste peintre. J’appartiens donc à ces 8 millions de français qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, pourtant je ne me sens pas pauvre, loin de là. j’ai du temps pour lire, pour peindre, restaurer des meubles, faire des échanges, réparer/embellir des objets ou du matériel, voire mes amis et entretenir ma vie sociale, trouver des expositions et vendre mes peintures. je suis très heureux et n’ai pas besoin de plus.
De mon humble avis la réponse à la question de l’auteur de ce billet est fort simple
Quand tout sera « foutu » les peuples occidentaux vont s’apercevoir que les plus grand plaisirs sont les plus modestes. il s’agit tout bonnement des besoins primaires.
Ils vont constater que de se réunir plusieurs fois par semaine autour d’une table et de faire la fête entre amis ou en famille permet de rire, de discuter et de refaire le monde pour une grande quantité de bonheur à moindre frais.
Que de s’acheter un pull, des chaussures, un pantalons de bonne facture de temps en temps est moins aliénant et largement plus agréable que de suivre les dictâtes de la société qui font consommer des fringues pourris et moches faites à l’autre bout du monde.
Que de manger des fruits et légumes au file des saisons créent des redécouvertes culinaires, de gout, et quel plaisir de manger un énorme steak lorsqu’on en mange qu’une seule fois par semaine.
Que de façonner son intérieur comme on a envie, en construisant ces meubles, en faisant un beau jardin, un potager etc. Des loisirs simple qui créent une immense satisfaction et un épanouissement personnel.
Que de voire ces enfants grandir, les éduquer, s’occuper d’eux est moins « relou » que d’avoir deux « bagnoles », deux places de parking, une crèche, une nourrice etc.
et dieux sait qu’il y en a moult autres.
En conclusion il est d’ores et déjà plus possible de vivre comme on le fait depuis 6O ans, notre rythme de conso est d’une planète et demie, nous avons pris un gros crédit sur notre amie la Terre. Plus on est modeste, plus on a de temps, moins on consomme, plus on profite des plaisirs de la vie, moins on fait de mal et plus on se prépare au changement.
j’attends avec impatience cette grande remise à plat
@Anthelme
Attention à l’infinitif « voir », votre « e » final pourrait faire croire que vous réparez ou embellissez vos amis.
@Anthelme
Bienvenu(e), au plaisir d´en lire davantage 🙂
////// j’attends avec impatience cette grande remise à plat /////
Me too ; mais je crains que vous ne soyez obligé de lacher l’ art et le pinceau pour la binette (le meilleur instrument pour attraper les figues en ce moment )
Anthelme,
Bienvenu au club ! La grande remise à plat (un buffet…) a commencé ici depuis un bon moment ! Quelques exemples récents :
http://www.pauljorion.com/blog/?p=28250#comment-222885 (+réponses+liens internes)
http://www.pauljorion.com/blog/?p=28196#comment-222506 (…)
http://www.pauljorion.com/blog/?p=28112#comment-222135 (…)
Bonne lecture 🙂 !
Voici une histoire intéressante comme outil pédagogique pour animation dans nos soirées ou la crise financière fait débat sans experts disponibles …..
Un homme portant cravate se présenta un jour dans un village.
… Monté sur une caisse, il cria à qui voulait l’entendre qu’il achèterait cash 100 euros l’unité tous les ânes qu’on lui proposerait. Les paysans le trouvaient bien peu étrange mais son prix était très intéressant et ceux qui topaient avec lui repartaient le portefeuille rebondi, la mine réjouie. Il revint le lendemain et offrit cette fois 150 € par tête, et là encore une grande partie des habitants lui vendirent leurs bêtes. Les jours suivants, il offrit 300 € et ceux qui ne l’avaient pas encore fait vendirent les derniers ânes existants. Constatant qu’il n’en restait plus un seul, il fit savoir qu’il reviendrait les acheter 500 € dans huit jours et il quitta le village.
Le lendemain, il confia à son associé le troupeau qu’il venait d’acheter et l’envoya dans ce même village avec ordre de revendre les bêtes 400 € l’unité. Face à la possibilité de faire un bénéfice de 100 € dès la semaine suivante, tous les villageois rachetèrent leur âne quatre fois le prix qu’ils l’avaient vendu et pour ce faire, tous empruntèrent
Comme il fallait s’y attendre, les deux hommes d’affaire s’en allèrent prendre des vacances méritées dans un paradis fiscal et tous les villageois se retrouvèrent avec des ânes sans valeur, endettés jusqu’au cou, ruinés.
Les malheureux tentèrent vainement de les revendre pour rembourser leur emprunt. Le cours de l’âne s’effondra. Les animaux furent saisis puis loués à leurs précédents propriétaires par le banquier. Celui-ci pourtant s’en alla pleurer auprès du maire en expliquant que s’il ne rentrait pas dans ses fonds, il serait ruiné lui aussi et devrait exiger le remboursement immédiat de tous les prêts accordés à la commune.
Pour éviter ce désastre, le Maire, au lieu de donner de l’argent aux habitants du village pour qu’ils paient leurs dettes, le donna au banquier, ami intime et premier adjoint, soit dit en passant. Or celui-ci, après avoir rétabli sa trésorerie, ne fit pas pour autant un trait sur les dettes des villageois ni sur celles de la commune et tous se trouvèrent proches du surendettement.
Voyant sa note en passe d’être dégradée et pris à la gorge par les taux d’intérêts, la commune demanda l’aide des communes voisines, mais ces dernières lui répondirent qu’elles ne pouvaient en aucun cas l’aider car elles avaient connu les mêmes infortunes.
Sur les conseils avisés et désintéressés du banquier, toutes décidèrent de réduire leurs dépenses : moins d’argent pour les écoles, pour les programmes sociaux, la voirie, la police municipale… On repoussa l’âge de départ à la retraite, on supprima des postes d’employés communaux, on baissa les salaires et parallèlement on augmenta les impôts. C’était, disait-on, inévitable mais on promit de moraliser ce scandaleux commerce des ânes.
Cette bien triste histoire prend tout son sel, quand on sait que le banquier et les deux escrocs sont frères et vivent ensemble sur une île des Bermudes, achetée à la sueur de leur front. On les appelle les frères Marchés.
Très généreusement, ils ont promis de subventionner la campagne électorale des maires sortants.
Cette histoire n’est toutefois pas finie car on ignore ce que firent les villageois. Et vous, qu’auriez-vous fait à leur place ? Que ferez-vous ?
Pour nous retrouver tous sur la place du village le samedi 15 octobre 2011 (Journée internationale des indignés)
[…] la foule des impies, dehors, commence à s’interroger et à s’inquiéter. Pierredev, ingénieur de formation sur le « trottoir » de Paul Jorion : « J’écoute et je lis le […]