LA RELANCE EUROPÉENNE PETITE MAIN, par François Leclerc

Billet invité.

Une autre version des petites pousses vertes que l’on croit voir au loin fait fureur. Prenant leur désir du retour à la normalité pour réalité, les ECB-watchers – sur le mode des China-watchers – croient percevoir les signaux du tapering de la Banque centrale européenne, qui suivrait l’exemple de la Fed. La BCE se préparerait – à petit pas de bébé selon l’un d’entre eux – à entamer la décrue de ses mesures monétaires non-conventionnelles en procédant à la hausse de ses taux directeurs ou à la diminution de ses achats obligataires.

L’exposé de Mario Draghi lors de sa dernière conférence de presse du 8 juin ne l’annonce pourtant pas. Car le président de la BCE, qui a précisé que le programme d’achat de titres n’avait pas fait l’objet d’une discussion lors de la dernière réunion du conseil des gouverneurs, ne manque pas une occasion de faire référence au critère de l’emploi qui lui tient à cœur pour en conclure que le job n’est pas terminé. Sa mauvaise qualité, ainsi que la pression qui continue de s’exercer sur les salaires, font selon lui obstacle à la transmission de la politique monétaire de la BCE et contrarient ses efforts de renouer de manière durable avec sa cible d’inflation.

Le président de la BCE va-t-il jusqu’au bout de sa pensée ? Sans pouvoir le dire, considère-t-il qu’il est temps d’améliorer la rémunération du travail pour favoriser la consommation et ainsi la croissance, ou bien que la BCE devrait ajouter à sa panoplie d’instruments monétaires d’autres outils qu’il n’identifie pas ? En investissant dans des obligations destinées à la relance des investissements par exemple ? Ce serait dans les deux cas bien audacieux, faute d’un quelconque signe d’ouverture politique. Ceux qui attendent que l’élection allemande soit passée pour les voir apparaître risquent à ce propos d’en être pour leurs frais, au vu de la façon dont le terrain est déjà balisé par Wolfgang Schäuble et sa garde rapprochée.

Les lignes de la politique européenne vont-elles bouger et comment ? Grande question ! Le sort réservé à la Grèce ne permet pas d’être très optimiste. Le FMI a proposé de repousser à on ne sait quand les modalités de réaménagement de la dette grecque, car d’une restructuration il n’est même plus question. Mais ce compromis destiné à éviter un défaut grec sur sa dette doit encore être accepté, et cela ne va visiblement pas de soi. Car d’autres gouvernements européens attendent qu’il soit accepté et espèrent bénéficier d’un appel d’air. C’est le cas du portugais, devenu le bon élève de la classe, qui souhaite ouvertement négocier une telle formule.

Mesurées car contraintes, les ambitions des plus aventureux ne bouleverseront pas la donne si elles se concrétisent. En dépit d’opérations de relance européenne petite main, la détérioration sociale va se poursuivre. L’OCDE a prévenu : la légère amélioration de la croissance mondiale enregistrée demeure insuffisante pour réduire les « inégalités persistantes », l’objectif étant que la mondialisation « incluse tout le monde ».

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