« Comment changer le monde ? Réfléchissons ! », le 17 mai 2020 – Retranscription

Retranscription de « Comment changer le monde ? Réfléchissons ! », le 17 mai 2020. Ouvert aux commentaires.

Bonjour, nous sommes le dimanche 17 mai 2020 et ma vidéo s’intitulera : « Comment changer le monde ? Réfléchissons ! ».

Le point de départ, c’est deux choses : d’abord, c’est toutes les pétitions que je vois passer, voilà, 3 000 intellectuels, 2 000 chercheurs, parfois c’est moins, mais ce sont des gens qui ont trouvé une raison pour se rassembler et tous ces gens disent à peu près, je dirais, la même chose.

Souvent, c’est un peu insipide, incolore. Ça se limite à de bons sentiments sans proposer rien de particulier mais enfin bon… Alors, à quoi ça sert ? Je ne sais pas. 

Je ne sais pas  : ça permet aux gens de se compter, il y en a 3 000 ici, etc. Et puis, puisque ça dit à peu près la même chose même si ce n’est pas très révolutionnaire, ce serait pas mal que tout le monde le dise en même temps plutôt que ça ne parte toujours des mêmes endroits, c’est-à-dire d’endroits qui sont déjà balisés comme étant tel groupuscule. Ou alors, on voit parfois… on a vu récemment une alliance apparemment faite entre deux groupuscules mais ce n’est pas comme ça, je ne crois pas que ce soit comme ça qu’on changera le monde. Ce n’est pas en tapant simplement du poing sur la table. Ça  ne suffit pas. Bon, si tout le monde tapait du poing sur la table en même temps, à l’échelle du monde, ça serait peut-être détectable sur le plan sismologique. Ça pourrait même produire quelque chose mais ça ne me semble pas être le bon point d’accroche parce que, vous le voyez, déclaration du Medef, déclaration de l’Institut Montaigne, ça souligne le fait que, manifestement, c’est pisser dans un violon : c’est complètement ignoré. Enfin, ces efforts collectifs à répétition sont complètement ignorés à l’endroit où les choses se décident. Et çà, c’est une chose sur laquelle j’attire souvent l’attention. Quand on me pose la question, cette question rituelle, dans les entretiens, les interviews, pourquoi n’a-t-on pas tiré les leçons de 2008 ? Et je réponds toujours la même chose. Si ! on a tiré les leçons. On peut réunir un grand nombre de gens qui ont tiré les leçons. Les leçons sont écrites-là mais les gens qui prennent les décisions ne sont pas ceux qui ont tiré les leçons. Ce sont deux populations distinctes et, dans nos sociétés, il n’y a pas de mécanisme qui fasse automatiquement communiquer de l’un vers l’autre. Quand il y a des tentatives, ce sont des feux de paille.

Souvenez-vous, si vous avez une mémoire d’éléphant, vous vous souviendrez de l’époque où le gouvernement français prenait l’avis de scientifiques, puis on a parlé de frictions, puis il y a eu une protestation de la part du comité scientifique en disant qu’on avait mal représenté sa position et puis, du coup, on n’en parle plus.

Aussitôt qu’il y a des tentatives d’essayer de faire venir le savoir à l’intérieur des décisions qui sont prises, la déconnexion se fait un jour ou l’autre. M. Sarkozy dit, dans le discours de Toulon : « On va tout changer, etc. ». Les décisions qui sont prises ensuite ne portent aucune trace de ça. M. Macron, dans deux allocutions au début de la crise, au moment où on annonce le confinement, dit : « On va tout changer ! » et puis, les décisions qui sont prises dans les jours suivants montrent que, là aussi, c’est lettre morte. Ce sont des effets de rhétorique. Ça n’a pas d’implication véritable.

Alors, que faire ? Que faire ? Et c’est pour ça que je vous demande qu’on réfléchisse ensemble.

Je suis en train de rassembler tout ce que j’ai déjà écrit depuis le début de la crise, sur la crise en tant que telle : la crise du Covid-19, le coronavirus. Pourquoi ? Parce que je commence à préparer les leçons que je donnerai à la rentrée à Lille, à l’Université catholique de Lille, et je regardais un petit peu… Je suis en train de regarder ce que j’ai déjà écrit.

Je fais ça depuis quelques jours et ce matin, il y a deux éléments déclencheurs : il y a un mail qui m’est envoyé et il y a un commentaire. Ce commentaire, je commence par y répondre dans la liste des commentaires et je me dis : « Non, ça peut intéresser tout le monde. Je vais y répondre de manière… devant tout le monde ». C’est la question : « Faut-il taxer les transactions financières ? » Et le mail que je reçois, que je vois en premier, attire mon attention sur le fait qu’une personne très respectable continue à faire des déclarations sur la création monétaire par les banques commerciales, ce type de raisonnement qui conduit souvent des personnes, je dirais dont même on pourrait imaginer qu’elles ont un peu de connaissances sur le sujet, à dire : « Ah, on veut une transition verte ? Eh bien, qu’on imprime des billets de banque, qu’on les distribue au bon endroit ! », des choses de cet ordre-là, alors que c’est plus compliqué.

Il y a la personne qui me dit : « Oui, mais, regardez cette personne que tout le monde respecte, elle dit que les banques commerciales peuvent créer de l’argent ! » et là, je réponds… c’est ce que j’avais fait d’ailleurs dans mon livre L’argent, mode d’emploi, aux gens qui imaginent ça, je dis : « Regardez, si on réfléchit un tout petit peu… » et alors, je montre une contradiction immédiate qui découle de cette position. Et là, je me suis aperçu, avec la personne dont on me parle et avec une autre récemment, là aussi, une personne tout à fait respectable que, là, c’est là que ça achoppe. Quand je dis : « Si on y réfléchissait un tout petit peu… », parce que ça cale, je n’avance pas, parce qu’au moment où je dis « Si on y réfléchissait un tout petit peu », qu’est-ce que je fais ? Je convoque le mécanisme global. Je dis : « Puisque le mécanisme global est ceci et que si on faisait cela, on aurait immédiatement une contradiction », etc. Et là, pourquoi ça ne passe pas ? C’est parce que mon interlocuteur ne connaît pas le mécanisme global. Il n’en a même pas une représentation approximative. Il y a une naïveté de ma part.

Il y a une naïveté de ma part et je la remets en évidence quand je parle de la taxation des transactions financières. Je dis : « Non, il faudrait… je dis non : je ne suis pas pour le fait de bombarder, de tapisser de bombes la région pour essayer de voir s’il va se passer quelque chose. Non, de toute façon, ce seront les consommateurs qui paieront à l’arrivée si on met une taxe sur les banques à un endroit quelconque ».

Je dis : « Non, il faut distinguer les transactions financières qui sont utiles et celles qui sont nuisibles ! » : il faut décourager les nuisibles et encourager celles qui sont positives, qui sont utiles, et surtout pas les taxer à ce moment-là, mais que l’on taxe deux fois celles qui sont nuisibles, qui sont nocives.

Et là, je repense du coup immédiatement à la réponse que j’ai donnée à la personne qui me parlait de cette personne qui croit à la création monétaire par les banques commerciales et je me dis : « Ça accroche de la même manière parce que, pour distinguer une opération, ma tendance est de dire : ‘Si on y réfléchit un tout petit peu’, on comprend toute de suite quelles sont les transactions ou les opérations financières qui sont utiles et celles qui sont nuisibles ».

Eh bien non, eh bien non ! Pourquoi ? Parce qu’il faut comprendre déjà, il faut comprendre comment ça marche. Il faut avoir une vue générale, une vue du système, du système financier : comment c’est interconnecté, comment telle chose fonctionne.

Et vous le savez, je reviens toujours là-dessus, les gens disent : « Oui, écoutez, quand les taux augmentent, le prix des obligations baisse et l’inverse ». C’est présenté comme une formule, comme un truc, comme une astuce, voilà, « il faut le savoir », etc. Et chaque fois, je reviens avec le mécanisme en disant : « Oui, mais c’est pour telle et telle raison. Et ça ne porte que sur les obligations qui sont déjà en circulation, pas sur celles qu’on va créer, puisque c’est parce qu’on va les créer à un certain taux que le prix des autres monte, etc. ».

Et là, bon, je fais encore un pas en arrière. Au moment où je me dis ça, je me dis : « Où est-ce que, toi, tu as appris ça ? Pourquoi est-ce que tu sais comment tout ça marche ? ». Et là, la réponse, elle est immédiate  : ce n’est pas en ayant lu des livres ni même des articles, c’est parce que je l’ai trouvé sur le tas, sur le terrain et que j’avais une formation… voilà, on m’avait appris d’autres domaines  : on m’a appris la sociologie, on m’a appris l’anthropologie, j’avais appris les mathématiques appliquées et voilà…

Et quand je me trouve dans la banque et que je me trouve devant un savoir oral des gens qui travaillent dans la banque, qui est un savoir tout à fait incomplet parce que la plupart des gens dans la banque, aussi, travaillent simplement sur des formules apprises par cœur, avec aucune notion de la manière dont le système fonctionne.

Et là, c’est une série, je dirais, d’ébahissements de ma part, de perplexité. Voilà un type, pour qui j’ai beaucoup de respect, un type qui travaille chez Wells Fargo [à San Francisco], il dirige la section de gestion du risque. C’est un type brillant, etc., etc. Et puis, il me dit un truc sur les taux à terme, les taux forward et je dis : « Non, non ! ». Et là, voilà, il me débite, il me sort, comment on appelle ça ? la doxa, l’opinion toute faite, l’opinion toute prête. Je dis : « Oui, mais imagine bien : si c’est un prêt pour 3 ans dans 2 ans, donc, etc., etc. donc ce n’est pas une représentation de l’avenir. C’est la représentation simplement, c’est une décomposition des taux tels qu’ils sont maintenant ». « Non, non, il y a une prévision là-dedans ». Je dis : « Quoi ? Où est-ce qu’elle est ? ». « Ouais, ouais … Non… ». Bon, à l’infini : « Il y a une prévision ». Et ça retombe toujours finalement sur « Tout le monde le sait… » mais… tout le monde se trompe.

C’est l’expérience que j’ai aussi dans les banques. Quand je dis : « Oui, mais écoutez, voilà » à un type de KPMG, l’auditeur, « Ecoutez, vous savez bien, nous, on se trompe entièrement sur ce modèle-là : il ne permet pas de prévoir que les prix des maisons pourraient baisser ». Et il me dit : « Je vais aller voir dans les autres banques » et puis, il revient. Il dit : « Non, ne vous inquiétez pas ». Je dis : « Quoi ? Ce n’est quand même pas qu’il n’est pas faux le modèle ! ». « Non, non, mais tout le monde utilise le même. Ne vous inquiétez pas ». J’insiste encore un peu. Je dis : « Oui, mais c’est un modèle de gestion du risque. Il faudrait quand même qu’il marche ! ». « Non, non, tout le monde… La concurrence parfaite joue. Vous êtes tous au même point ». Vous êtes tous au même point avec un modèle faux. Voilà, c’est comme ça. C’est comme ça que les gens raisonnent [dans la finance].

Alors, qu’est-ce qu’on fait ? A ce moment là, je dirais – sur le plan individuel – on écrit un livre. On écrit un livre en expliquant comment ça marche vraiment de l’intérieur. Alors, le livre, il se vend, allez, à 5.000 exemplaires…. vous essayez depuis 10 ans de le faire traduire en anglais… ça n’intéresse absolument personne. Comment est-ce qu’on fait ?

Comment est-ce qu’on fait pour que le savoir, que le savoir augmente, d’abord ? Et après, je vous l’ai dit, une fois que tout le monde le sait, tout le monde comprend comment ça marche, on n’est encore nulle part parce qu’on est dans notre petit groupe, je dirais, de lecteurs, de spectateurs et de lecteurs du blog de Paul Jorion, c’est-à-dire de gens qui sont tous, voilà, des ingénieurs, des médecins, des juristes de haut niveau, des informaticiens. J’en passe et des meilleurs. Et on est là, et on discute. Est-ce que la moindre personne qui décide de quelque chose en tirera la moindre conséquence ? Il n’y a aucune garantie. Il faudrait effectivement qu’il y ait… ce n’est pas une question tellement de rapports de force puisque je l’ai déjà évoqué avec toutes ces pétitions, etc. Ce qu’il faudrait trouver, c’est le moyen, il faudrait trouver un chenal qui fasse – et il y a peut-être du rapport de force nécessaire derrière ça, mais en arrière-plan -, qui fasse que les leçons tirées, les choses comprises, informent les décisions qui vont être prises par la suite.

Et, si on regarde l’histoire, si on regarde l’histoire, on voit que ça se fait mais ça se fait très très lentement. Ce sont les grands changements de paradigmes. Quand on regarde, MM. Copernic, Tycho Brahe, Kepler, ça ne se fait pas du jour au lendemain.

Ça ne se fait pas du jour au lendemain. Or, pour les trucs dont on parle ici, vu les catastrophes qui se profilent à l’horizon et qui sont même déjà là, il faudrait qu’on aille beaucoup plus vite que ça, qu’on aille beaucoup plus vite. Il faudrait que le savoir commence véritablement à informer les décisions qui sont prises et, comme vous le savez, il y a toute une extrême-droite, une extrême-droite qui mélange des positions politiques xénophobes avec un mépris affiché pour la science ou pour la partie de la science qui ne les intéresse pas et qui est liée à un climato-scepticisme, etc., un raisonnement que j’avais dit qui est le suivant : pourquoi est-ce que l’extrême-droite rejette tout discours scientifique, de preuves scientifiques ? Ou quand il y a des gens d’extrême-droite qui font de la science, ils le font à leur manière : à l’emporte-pièce ? Parce que les gens d’extrême-droite disent : « Les scientifiques disent la même chose que les gens d’en face : les scientifiques disent la même chose que les gens de gauche » et ce n’est pas considéré comme un argument en faveur des gens de gauche. Non, ça veut dire qu’ils sont tous dans le même sac. Ils sont tous dans le même sac, scientifiques et gens de gauche, c’est la même affaire : c’est des gens qui ne comprennent pas comment ça marche vraiment, que ce sont les Untels ou les Unetelles, qui tirent les ficelles, qui sont responsables de tout, et ainsi de suite.

Alors, quand je dis : « Réfléchissons », tout ce que je viens de dire, c’est… vous le savez déjà, la partie « Réfléchissons », c’est lançons une discussion sur ce qu’on peut voir comme étant le point critique.

Ça ne sert à rien qu’on accumule du savoir. C’est pas mal, tant qu’à savoir comment ça marche, autant que le maximum de gens le comprennent et le sachent mais la question n’est pas là. La question, c’est : comment faire que ces feux de paille qui disent « Voilà, maintenant, on va faire ce que les scientifiques nous disent ! » et que ça ne dure que trois semaines.

Et encore, quand je dis trois semaines, c’était peut-être encore moins. Pourquoi ? Que faudrait-il faire pour que ça tienne ? On connaît les obstacles. Les obstacles, c’est souvent simplement que les gens qui ont été élus veulent être réélus la prochaine fois et, pour être réélu, on le sait bien, il ne faut pas faire de vagues, etc., sinon ça ne passe pas. Ou alors, on gueule mais on gueule dans une opposition qui est une opposition systématique et dont on sait que le rapport de force est nul et ne permettrait pas que ces idées communiquent avec les décisions qui sont prises.

Comment faire, comment faire pour que ça passe ? Ça passe parfois. Bon, je vais prendre une année : l’année 2009, l’année 2009. Pourquoi 2009 ? J’ai dit ça comme ça mais durant 2009, on me demande mon avis. On me demande mon avis sur toutes les questions d’ordre financier, économique et voilà.

Le problème n’est pas là : pour le moment aussi, on me demande beaucoup mon avis. Bon, c’est sympathique, c’est très bien ! Mais je ne suis pas plus confiant cette fois-ci quant au fait qu’on tiendra compte de ce que je dis : ça paraît intéressant, on peut même se dire ici ou là que ça peut faire vendre des livres… mais ça ne fera pas encore changer le monde.

Voilà la question que je pose : changer le monde, mais comment faire ? Réfléchissons ! Je lance le débat. J’ai mis des éléments un peu disparates sur la table mais je crois que j’ai rassemblé un certain nombre de choses qui me sont passées par la tête depuis ce matin et même ça a commencé hier dans la soirée.

Voilà, allez, allons-y mais soyons pratiques, pragmatiques et… pas des pétitions (enfin, continuez à faire des pétitions et à les signer mais ce n’est pas là, ce n’est pas là que ça va se passer.)

Allez, à bientôt !

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22 réponses à “« Comment changer le monde ? Réfléchissons ! », le 17 mai 2020 – Retranscription”

    1. Avatar de Paul Jorion

      Sur cela aussi, comme d’habitude, la France aura 10 ans de retard sur les États-Unis.

      1. Avatar de Lucas
        Lucas

        Ne sous-estimez pas trop le pays que vous squattez 😀 :
        . Sur France Inter ce matin le PDG de Danone parle d’écosystème de bilan carbone de résiliance et de agriculture durable.

        Yahhouuuu

      2. Avatar de Lucas
        Lucas

        Et cette fois-ci c’est ça Ça sonne tellement vrai qu’On devrait l’inviter. PUB

  1. Avatar de Dominique-e
    Dominique-e

    https://qg.media/
    ou
    https://www.youtube.com/watch?v=3rf-8M6zxAY
    Quartier Libre – Gérard Mordillat : « Le moment covid du néolibéralisme » 19/05/20
    Aude Lancelin reçoit Gérard Mordillat, romancier et cinéaste, coauteur de la grande série documentaire « Travail, Salaire, Profit » sur ARTE, pour évoquer le changement de nos vies depuis le confinement, les actions à mener pour retrouver le contrôle de nos vies, et les recompositions politiques en cours

    1. Avatar de Otromeros
      Otromeros

      Mordillat… un passé tranchant.
      Mordillat… un présent.. co-souscripteur ( créateur ou , au moins sollicité.. ) de l’ « appel » lancé last week par le « nouveau conseil de la résistance française » dont question/interrogation sur ce blog.
      Lien (pas encore vu) en général de qualité , permettant sans doute d’en apprendre plus.

      1. Avatar de Otromeros
        Otromeros

        En particulier pour les pressés :
        minute 17+ : « écologie et politique » …et… minute 39+ : « Conseil Résistance new look »

  2. Avatar de Hervey

    Avec le Decameron, Boccace interrogeait déjà « le monde d’après » en confinant sept jeunes femmes et trois jouvenceaux… suite à la peste noire qui avait ravagé Florence 1346 (et toutes les cités italiennes)…

    Dans le collectif Histoire Mondiale de la France sous la direction de Patrick Boucheron l’ouvrage a retenu plus de 150 dates qui ont fait la France. L’année 1347 s’interroge sur l’origine de la peste : « Vient-elle d’Asie centrale, du Kurdistan ou de la Volga ?… » puis l’année 1357 questionne : « Un monde nouveau émergera-t-il après la peste ? Partout en Europe grondent les contestations politiques… »

    Entendez-vous l’écho ?
    https://www.youtube.com/watch?v=Ugc8R50IP68

    1. Avatar de arkao

      https://actuelmoyenage.wordpress.com/2020/04/24/episode-27-apres-la-peste-fixer-des-salaires-maximum/
      Bon dossier sur l’histoire de la peste en relation avec ce que nous vivons, et pas dénué d’humour.

  3. Avatar de chabian
    chabian

    « Après 1981, je demandais à François Mitterrand :
    – Pourquoi maintenant que tu en as le pouvoir ne fais-tu pas ce que tu avais promis ? Il me répondait qu’il n’avait pas le pouvoir d’affronter la Banque Mondiale, le capitalisme, le néolibéralisme. Qu’il avait gagné un gouvernement mais non pas le pouvoir. J’appris ainsi qu’être le gouvernement, être président, ne sert pas à grand-chose dans ces sociétés sujettes, soumises au capitalisme. J’ai vécu l’expérience directement durant quatorze ans. En France, on élit, et les élus font des lois qu’ils n’ont jamais proposées et dont nous n’avons jamais voulu. La France est-elle une démocratie ? Une puissance mondiale ? Je le dis en tant que Française : cela ne veut rien dire. »
    Danielle Mitterrand. (trouvé sur le web…)

    1. Avatar de Paul Jorion

      On en parlera vendredi, Clémentine Autain et moi.

  4. Avatar de chabian
    chabian

    De l’intérêt d’une démarche prospective au regard de la pandémie de 2020

    Nous avons tous une forte curiosité, angoissée, pour le futur immédiat, qu’il nous est difficile d’entrevoir : crise sanitaire, crise financière, crise économique, crise énergétique, crise climatique, que va donner ce cocktail ? Et notre regard, jadis confortable mais vaguement inquiet, est profondément modifié par le surgissement de la pandémie. Pour autant nos outils sont très limités, nous touchons plusieurs domaines où les compétences sont dispersées. Nous cherchons à nous documenter, à critiquer cette documentation, à recevoir des appels à agir, des programmes, des analyses d’ensemble – mais cela ne réduit pas vraiment la part d’incertitude que nous essayons de gérer en nous. Compensant cela, nous nous attachons à des vérités plus simples, principes dont la complexité serait dépendante. Et nous sommes –parfois– rétifs à la discussion.

    Nous avions un calendrier de long terme, mais singulièrement en train de se raccourcir : l’horizon des perturbations climatiques était celui des années 2100 (rapport Meadows Halte à la croissance, 1972), puis des années 2050 (rapports GIEC), enfin des années 2030 (indicateurs d’irréversibilité). La pandémie perturbe cette vision linéaire en rétrécissement : il faut mieux intégrer des improbables événements dans la perspective. Il faut étudier des scénarios moins évidents, plus diversifiés, et pourtant conclure à des décisions d’action à effet rapide !

    C’est là qu’une étude prospective, collective, aurait tout son sens et sa pertinence. Mais cela demande un processus intégrant les acteurs concernés, avec des méthodes et des outils, explorant une multitude de thématiques. Autant dire d’abord que la forme d’un blog et d’un forum n’est pas le cadre pertinent. Et que ce processus demanderait une conduite, un mandat, une attente formulée par un groupe porteur ou même une autorité politique.

    Il y a bien longtemps (jusque vers 1995?), la Commission Européenne avait bâti une Cellule de prospective qui avait proposé quatre scénarios contrastés pour le XXIe siècle, en réunissant des hauts fonctionnaires, experts et représentants externes (on ne parlait pas encore de lobbys), et le résultat était passionnant – mais il ne débouchait pas sur un programme de décisions d’actions : il ne faisait que démontrer des risques et opportunités et l’intérêt de faire des choix. Pour autant que je m’en souvienne.
    Malheureusement, le document résultant de ce processus ne paraît plus disponible.

    Pour en savoir plus sur la prospective, je vous renvoie à un powerpoint de Pierre CHAPUY, en 2012, avec des exemples, qui permet d’entrevoir de quoi il s’agirait : http://als.univ-lorraine.fr/files/conferences/2012/Dupuy-Prospective.pdf . (C’est le premier document apparu pertinent après une recherche internet – nul doute que d’autres idées et approches doivent faire l’objet d’une discussion). Et on trouvera par exemple un exercice de prospective, encore incomplet, à court terme (fin 2021) prenant en compte la pandémie, avec des scénarios, dans un document à télécharger de 75 pages (je ne l’ai pas approfondi — je n’y ai pas vu d’approches par des parties prenantes, il est plutôt « en surplomb » mais fouillé quand même).

    Ce qui me paraît utile à poser à l’origine, est la nécessité de définir un territoire pertinent, avec un système de parties concernées accessible et gérable. On aurait envie de prendre l’Europe, mais ce n’est sans doute pas tenable au vu des variations nationales et régionales : trop de points de vue seraient à rassembler et synthétiser. Au contraire, du point de vue citoyen, pour limiter le poids étatique-administratif, on pourrait prendre une échelle très limitée, un département par exemple ou une Région pour atteindre un niveau d’autorité politique suffisant (en Belgique, une Région de l’État fédéral pourrait constituer une échelle acceptable).

    Ensuite, j’aime bien une approche rétro-prospective qui prendrait la forme suivante (c’est une suggestion) : « Nous sommes en 2050, et nous sommes assez contents de nous ; les mesures essentielles pour éviter un réchauffement de plus d’1,5° ont été installées et les effets positifs en sont mesurables et nous encouragent à continuer l’effort. Quelles mesures avons-nous adoptées par étapes depuis 2020 ? ». Une telle formulation est déjà problématique, puisqu’une action unilatérale d’une seule région du monde n’aurait aucun effet global ! Mais on peut penser à agréger des plans proches et gagner ainsi l’échelle d’un continent à tout le moins. Bien sur, on peut penser qu’il serait plus facile de prendre une perspective pessimiste : « nous avons échoué en 2050, tout est foutu car voici ce que nous avons été incapables de décider, avec quels blocages, depuis 2020 – ou avant ». Le résultat en serait pauvre, car il ne serait pas indexé sur les décisions d’action à prendre. A contrario, l’approche optimiste pourrait être un leurre, et il ne serait pas inutile de tenir ensemble les deux perspectives, avec l’effet recherché d’un « avocat du diable ».

    Il faut ensuite définir une série de thématiques et s’entendre sur des contraintes et des opportunités probables à prévoir : en énergie, en ressources extractives, en air et eau, en alimentation/agriculture, en démographie, etc. Avec de nombreuses interactions entre ces domaines.

    Il faut ensuite construire des scénarios ayant une cohérence d’intention, par exemple : le scénario « local, éthique, décroissant, ‘anarchiste’ », le scénario « étatique volontariste contraignant », le scénario « ‘libéral’, prédominance des entreprises industrielles et de la finance », le scénario « étatique ‘populiste’ aventurier ». Encore une fois, ce n’est qu’une proposition illustrative ; les acteurs pourraient valider des scénarios plus clivants ou plus accrocheurs…

    Il faut ensuite passer en revue une série de « secteurs d’influence » sur les mentalités, tels les religions, les arts et la culture, les visions militaires, les ressentis nationaux, les sciences et les tecnologies, les médias, réseaux sociaux et les jeux de partis et mouvements structurant la société. Car il faut toujours garder à l’esprit la question de l’acceptation sociale des mesures prises. Nous avons été surpris par l’acceptation presque mondiale de mesures de confinement. Mais pour combien de temps ? Avec quelle approche sociale ? Cette question ne peut être négligée.

    Il peut sembler gratuit d’énoncer un tel projet de processus. Qui le portera ? Mais l’idée est aussi de réduire à leur juste mesure les divers « appels » qui sont annoncés ces jours derniers et qui paraissent dans les médias, dans lesquels ils ne faut pas négliger les appels puissants à rejoindre au plus vite le « monde d’avant ». Certains portent davantage sur des programmes « de principe », d’autres portent davantage sur des regroupements institutionnels nouveaux (tel le Conseil national de la Nouvelle résistance »). Ces appels et regroupements veulent motiver, orienter, construire. Mais leur socle de pensée est faible. La force d’un réseau spontanément réuni par l’appel est encourageante, mais elle n’est pas durable. Ni par la quantité, ni par la qualité. Parfois elle est purement symbolique, et symbolise même un ancien monde décrié.

    Il peut se trouver des indications très pertinentes dans ces appels ou dans des livres récemment parus (tel Comment sauver le genre humain de Paul Jorion et Vincent Burnand-Galpin).

    Mais nous devons bâtir une perspective collective, structurée, portée par plusieurs secteurs de l’opinion des acteurs concernés et pouvant rassembler avec force et pour longtemps. La Prospective est sans doute l’exercice qui nous mettra sur le bon chemin !

    1. Avatar de Paul Jorion

      C’est en effet ce que nous recommandons dans Comment sauver le genre humain.

      1. Avatar de chabian
        chabian

        Il me reste 100 pages à lire. Cela doit y être alors…

      2. Avatar de juannessy
        juannessy

        C’est comme dans les bons polars . On ne livre le nom de l’assassin que dans les trois dernières pages .

        ( j’ai enfin récupéré ma carte bleue )

  5. Avatar de Hadrien
    Hadrien

    « ..La France est-elle une démocratie ? Une puissance mondiale ? Je le dis en tant que Française : cela ne veut rien dire. »
    Danielle Mitterrand. .. ».
    Comme quoi, les politiques ne sont pas tous stupides.
    En fait tout est question de taille (et d’autarcie). Roosevelt a pu révolutionner les USA. Par contre, la France et les autres européens « ne font pas le poids » nécessaire à l’exercice d’une réelle souveraineté. Si les européens le veulent, ils peuvent retrouver leur souveraineté en s’unissant , renvoyant les cornichons de type Lepen ou Mélenchon aux oubliettes de l’histoire.
    Les Trump, Poutine et Xi l’ont bien compris qui flattent les nationalismes pour éviter le retour des européens parmi les puissances.

  6. Avatar de Hadrien
    Hadrien

    Comment changer le monde ?
    Je serai pour une fois un tout tout petit peu nanoptimiste, ça pourrait être en cours:
    https://www.youtube.com/watch?v=Cf1dcqDUOHY

    1. Avatar de Otromeros
      Otromeros

      Comme toujours avec JMJ .. ne pas oublier de consulter les commentaires ( pour se faire une idée du suivi )

      Entre autres , peut-être celui-ci d’intérêt « général » , relié à la polémique de l’autre jour :

       » J’aimerais l’avis de mr jancovici sur la centrale jupiter 1000
      Le power to gaz une solution concrète pour stocker l’électricité des renouvelables*
      https://youtu.be/yYbfbP3gsfo
      Projet concrétisé à fos sur mer
      https://www.jupiter1000.eu/actu

      (Premiere installation fonctionnelle le 20 février 2020)
      https://m.actu-environnement.com/actualites/jupiter-1000-grt-gaz-hydrogene-35040.html … « 

  7. Avatar de Schellens Jean-Luc
    Schellens Jean-Luc

    Voici ma modeste contribution aux réflexions de l’après Covid-19, fruit de mes lectures de ces derniers mois et années souvent alimentées par le blog de Paul et ses livres.
    Merci déjà pour vos commentaires !

    Après le Covid-19

    Après les plans d’urgences qui ont fait le maximum – “quoiqu’il en coûte” – pour aider les services de santé à endiguer la crise sanitaire et permettre à chaque ménage de disposer de revenus de remplacement pour tenir financièrement jusqu’à la reprise des activés économiques, l’Union Européenne et chaque État membre doivent définir des plans de reconstruction économiques, budgétaires, fiscales et monétaires audacieux et non dogmatiques – comme expliqué par exemple dans le livre “La monnaie écologique” de Alain Grandjean et Nicolas Dufrêne ou par Michel Aglietta dans Le Monde https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/05/15/michel-aglietta-la-vraie-richesse-des-nations-est-leur-capital-public_6039727_3232.html pour la politique monétaire – pour développer une économie, un capitalisme, des organisations et des entreprises
    * qui créent de la valeur non plus pour les seuls actionnaires mais pour l’ensemble des parties prenantes (cf. Infra et comme défini par le “Stakeholders Capitalism” cher au World Economic Forum), grâce à la “valeur immatérielle” liée surtout à la qualité de leurs produits et services
    * qui assurent le développement des biens communs que sont la santé, l’éducation et la culture et donc d’un monde co-habité par tous les êtres vivants et aligné réellement sur les Objectifs de Développements Durables (ODD) définis par les Nations Unies pour 2030.

    Demain, et comme l’écrivait déjà Philippe de Woot, le capitalisme et les entreprises ne doivent plus être le problème mais (re)devenir la solution ! Comme le décrit le livre “Capitalisme et progrès social” d’Anton Brender. Ou comme l’écrit Muhammad Yunus dans Le Monde, pour faire en sorte que l’économie soit un moyen, “un outil que nous devons penser et repenser sans cesse jusqu’à ce qu’il nous conduise au plus grand bien-être commun possible”. Après les “quarante piteuses” de la période d’ultra-libéralisme, il y a donc lieu de réguler à nouveau le capitalisme pour en modifier radicalement les principaux rapports de force !

    Pour cela il faut tout d’abord, sans doute au niveau des Constitutions de l’Union Européenne et des États membres, (re)définir par rapport aux valeurs universelles que sont l’égalité, la solidarité (qui justement a retrouvé toute sa valeur depuis la crise) et la liberté, ce qui constitue la propriété, à savoir :
    * La propriété “commune” pour tout ce qui relève du bien commun – qu’il soit universel comme l’eau, l’air, les autres êtres vivants et les ressources naturelles comme les hydrocarbures et les forêts mais aussi la santé (on pense à la polémique suscitée par le vaccin de Sanofi contre le Covid-19), l’éducation et la culture ; collectif comme les monnaies ou les infrastructures, voire même individuel comme les données personnelles (cf. infra) et l’expertise de chacun – se définit par sa fonction sociale, doit être garanti comme étant “inaliénable” parce que sa valeur est inestimable et que donc sa propriété ne peut être transférée, doit au contraire être partagée et utilisée dans le respect des valeurs universelles de solidarité et d’égalité entre tous les membres des différents écosystèmes et être organisée dans ce qui est appelé plus loin des “organisations gouvernementales sans but lucratif” (“Nonprofit Governmental Organisation”) associant des capitaux publics et privés ;
    * La propriété “privée” pour tout ce qui relève de ce qu’un individu ou une organisation peut s’approprier, privatiser, (“abuser”), pour produire, vendre ou louer et recycler – à son profit mais sous sa responsabilité individuelle ou collective – un bien ou un service qui cherche à répondre aux besoins d’autrui, mais en privilégiant la valeur d’usage sur celle d’échange dans le marché, tout ce qui en définitive relève traditionnellement des valeurs universelles de liberté et parfois de solidarité, comme dans le cas des entreprises sociales, propre au capitalisme ;
    * La propriété “personnelle” pour tout ce qui relève des données personnelles de chacun telles qu’elles sont définies par le RGPD et qui sont aussi “inaliénables” puisque leur échange et leur usage doivent se faire sans “abus”, sans appropriation, dans le respect de la valeur universelle de solidarité (qui par exemple justifie que les données de santé soient rendues accessibles au monde médical)

    Plus concrètement il faut :
    * Obliger les organisations (quel que soit leur forme et statut) – avant tout appel aux crédits, aux marchés financiers ou aux aides privées ou publiques – à “penser et repenser sans cesse”, démocratiquement et statutairement, leurs missions qualitatives et quantitatives par rapport à toutes leurs parties prenantes :
    * Les actionnaires, qui sont en droit de récupérer leurs investissements et de couvrir leurs risques initiaux sans pour autant accaparer à tout jamais les bénéfices
    * Les collaborateurs, qui ne sont pas de simples variables d’ajustement ou des ressources comme défini dans https://democratizingwork.org/#francais, parce qu’ils doivent pouvoir donner du sens, de la valeur à leur travail et éviter ce qu’on appelle aujourd’hui les “jobs à la con”
    * Les fournisseurs et partenaires qui doivent pouvoir être aussi rentables que leurs clients
    * Les clients/consommateurs qui en définitive sont ceux qui paient les rémunérations de tous les autres
    * Les collectivités dont les coûts d’infrastructures et de services doivent aussi être rentabilisés
    * La Terre (qui contrairement à l’humanité ne risque pas de s’effondrer !), dont toutes les formes de vie et les ressources doivent être valorisées – et non plus externalisées – pour leur assurer une co-habitabilité et un renouvellement
    * Et donc en définitive par rapport aux ODDs des Nations Unies qui définissent les échéances communes pour 2030
    Pour en synthèse, indiquer que le profit à réaliser est un moyen au service de ces missions et non plus la fin première, qu’en définitive les missions de l’entreprise l’emportent sur ses profits et ses rendements !
    * Obliger les organisations à publier dans leurs bilans et comptes de résultats, leurs réalisations en matière d’ODDs et à appliquer un système de notation démontrant que leurs produits et services ont un impact sociétal et environnemental, sont sans nuisance pour l’humanité et la Terre
    * Définir des règles de répartition des bénéfices de l’entreprise en fonction d’un ratio entre d’une part la valeur de l’entreprise et d’autre part son rendement pour limiter le rendement annuel autorisé à maximum 8% de la valeur et distribuer ce rendement en trois parties égales pour
    * les dividendes aux actionnaires,
    * les réserves et en priorité celles qui permettent de couvrir le passif social de l’entreprise en suivant l’exemple du Fonds de solidarité de Solvay pour ses employés et leurs familles suite au Covid-19 https://www.solvay.com/fr/fonds-de-solidarite-solvay
    * et les investissements durables, internes ou externes à l’entreprise qui s’appuient sur la taxonomie verte de l’Union Européenne
    * Instaurer le “patient capital”
    * En taxant les dividendes à 20% et les plus values à 80% si les actions sont vendues dans l’année de leur achat et à 10% de moins pour chaque année supplémentaire pour qu’elles ne soient pas taxées si les actions sont conservées 8 ans (on pourrait même imaginer de taxer à 100% la première année pour arrêter toute spéculation…)
    * En interdisant les opérations boursières à découvert
    * Stopper le principe de privatisation des profits et de socialisation des pertes
    * En utilisant la technique d’Albert Frère qui a été appliquée pour le rachat de la banque Fortis par BNP Paribas : l’Etat devient un des actionnaires de l’entreprise – grande, petite ou start-up – lorsqu’il lui fait une aide – investissement qui sera amorti dans la durée dans la comptabilité publique et non plus dans l’année – et serait soumise aux mêmes règles du “patient capital” défini plus haut
    * En interdisant le rachat d’actions, l’inscription dans les paradis fiscaux et les dividendes tant qu’une entreprise bénéficie d’aides publiques – puisque son statut serait provisoirement celui d’une “organisation gouvernementale sans but lucratif” (“Nonprofit Governmental Organisation”) – mais en conservant les obligations de réserves et d’investissements durables lorsque l’entreprise redevient profitable.
    * Définir des règles relatives aux rémunérations des différentes parties prenantes en réduisant au maximum l’écart et la hiérarchie entre les rémunérations d’une part, et celles de l’utilité sociale d’autre part, puisqu’il est clair aujourd’hui que nous avons d’avantage besoin de personnel médical que de cambiste (qui en définitive ne fait que faire monter ou descendre des montants de monnaies scripturales sur base de paris!) et qu’il faut donc rééquilibrer l’utilité sociale et la valeur ajoutée dans le travail rémunéré pour revenir à des ratios de l’ordre de 1 à 20 maximum
    * Interdire les primes et commissions sur les ventes et les remplacer par des primes basées sur la fidélité des clients et la pérennité de l’entreprise, ce qui rééquilibreraient les rémunérations des commerciaux et des services après vente
    * Obliger les organisations à auto-financer leurs investissements à 33% au moins
    * Interdire les pratiques d’évasion fiscale comme les paiements de management fees, de brevets ou de licences dans un autre pays – et en particulier dans les paradis fiscaux – que celui où sont réalisé les ventes des produits ou services et imposer à toutes les organisations une déclaration annuelle de tous leurs résultats pays par pays pour que les États puissent jouer, de facto, le rôle de percepteur fiscal de dernier ressort comme le propose Gabriel Zucman

    Parallèlement, il faudrait chercher à mettre en place un revenu universel pour chacun à partir de 18 ans, financé en partie par une taxe sur les robots et les algorithmes de l’intelligence artificielle utilisés par les entreprises

    La gouvernance des banques privées doit faire l’objet de règles spécifiques mais il faudrait retrouver les dispositions qui avaient été définies après la crise de 1929.

    Encore une fois merci à tous pour vos éventuels commentaires

    Jean-Luc Schellens

    1. Avatar de Hadrien
      Hadrien

      Si vous visez à améliorer nos sociétés consuméristes et capitalistes, dans un monde infini, vos propositions font sens.
      Si vous visez à éviter l’effondrement de notre civilisation démocratique et consommatrice, vous êtes à coté de la plaque. Car:
      1) Les  » Objectifs de Développements Durables (ODD) définis par les Nations Unies » ne sont qu’un ramassis de voeux pieux et contradictoires dégoulinant de bonté et de bêtise. Il s’agit d’avoir le beurre, l’argent du beurre, le sourire de la fermière et le lait.
      Lisez: https://jancovici.com/transition-energetique/choix-de-societe/a-quoi-sert-le-developpement-durable/
      2) On apprend à l’école qu’un problème mal posé ne peut se résoudre. Or notre problème est PHYSIQUE, pas politique ni économique ni social. Très simplement, notre consommation de ressources toujours croissante est impossible dans un monde FINI.
      Cette consommation, nous pouvons la nommer aussi richesse ou destruction, nous la mesurons par le PIB. La croissance du PIB que tous espèrent n’est autre que la croissance des destructions et pollutions.
      On peut écrire (math élémentaire): PIB = POPulation * PIB / POPulation.
      Le facteur PIB/POPulation n’est autre que la richesse moyenne par habitant, cad le niveau de vie, cad le pouvoir d’achat.
      Donc, éviter l’effondrement implique de diminuer , soit la population, soit le niveau de vie, soit les deux.

      1. Avatar de Otromeros
        Otromeros

        (Uniquement) sur votre 1) : dans le lien JMJ on retrouve tout ce qui lui est rédhibitoirement reproché sous couvert de « nucléaro-philie »… hélas.
        …  » Tout ou presque de ce qui est présenté aujourd’hui comme permettant le « développement durable » pèche par l’ignorance du nombre de zéros avant la virgule : au niveau actuel de consommation , il est physiquement impossible de remplacer le pétrole par du biocarburant, les centrales électriques classiques par des éoliennes, la pêche par l’aquaculture de carnivores (que sont les bars, les turbots et les saumons, pour ne citer qu’eux), le charbon par du bois, le plastique par des fibres de lin ou des résidus de culture…  »
        …(…)…
        …  » Mais il ne faut pas se voiler la face : la traduction concrète la plus fréquente du développement durable, aujourd’hui, est selon les cas de figure, une auberge espagnole, où chacun met très exactement ce qui l’arrange, un voeu pieu, une escroquerie intellectuelle, un parfait exemple de schizophrénie, ou…un dialogue de sourds.

        Cette absence d’intérêt pratique de la définition de ce concept signifie-t-elle qu’il faille se désintéresser des limites ? Sûrement pas, car dans un monde fini les arbres ne grimpent pas jusqu’au ciel, et contrairement à ce que l’on a l’habitude de présenter comme alternatives, le choix n’est pas entre « se priver pour toujours » et « se goberger pour toujours » : pour toute ressource limitée – ou capacité d’épuration ou de recyclage limitée – dont nous sommes actuellement dépendants, le choix est hélas uniquement entre gérer nous mêmes une inéluctable décroissance, dont nous pouvons éventuellement choisir le rythme pour que cela soit le plus agréable possible, ou attendre que la régulation arrive « toute seule », l’histoire nous enseignant que le deuxième cas de figure est généralement fort peu plaisant.  »

        Quant au point 2) : POP est univoquement numériquement défini. Par contre PIB… M’est avis qu’il y aura d’autres interventions.

      2. Avatar de timiota
        timiota

        Un peu comme dans l’affaire du « R0 » qui étant distribué ne situe pas du tout les seuils au même endroit,
        dès qu’on fait des moyennes sur le PIB, on fait disparaitre une énorme hétérogénéité.

        Tenter de résoudre la question en disant qu’il faut limiter la population fait fi de cette hétérogénéité.
        Certes sur les 7 milliards de gens, on pourrait choisir « le milliard le plus écolo (meilleur compromis PIB/durabilité)
        qui n’est pas le milliard le plus pauvre (qui « coupe trop de bois » pour faire court, lire la suite), mais sans sans doute
        le 2ème ou 3ème milliard en partant du bas (des plus pauvres), et dire « on généralise », et on coupe les bords de la distribution, notamment les 3 à 5 milliards trop peu durables parmi les riches.

        Mais ce serait un faux calcul car tant la richesse (« ruissellement », ahem) que la pauvreté (extractivisme, aie aie) affectent le milliard « optimal » en question, et changeraient donc beaucoup si on coupe les flux (exemple : Piketty rappelle que vis à vis des pays de l’Est de l’Europe qu’on ne trouve pas assez rapide dans la transition écolo, par exemple, les flux d’aides publiques sont très très largement SURcompensés par les bénéfices extraits par les fabricants d’automobiles et autres multinationales qui font une part de bénéfice sur de l’activité faite là-bas, mais dont la couleur n’y est pas vue du tout).

        Le simplisme de « trop de POP » est donc bien trompeur.

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