Ce texte est un « article presslib’ » (*)
Dans les écrits que je vais consulter en marge de notre débat sur la monnaie, il est souvent fait mention du fait qu’Aristote condamne les intérêts. J’ai voulu en savoir un peu plus et je suis allé lire le passage du Politique où est mentionnée cette condamnation. Il s’agit en fait de la conclusion assez lapidaire d’une discussion plus générale sur l’argent. Le texte dont nous disposons ne paraît pas de première main et on devine pas mal d’interpolations faites par des commentateurs de bonne volonté qui, dans leurs efforts de clarifier les choses font plus de tort que de bien, mais un peu de familiarité avec les écrits du philosophe permet de s’y retrouver sans trop de peine. Je vous fais part du fruit de ma lecture.
Quand on va voir ce que pensait Aristote sur une question particulière, on est rarement déçu. D’abord parce que le philosophe grec avait sur toutes une opinion. Ensuite, parce que celles-ci ayant rarement été retenues, elles nous apparaissent du coup souvent encore originales, voire même extraordinairement neuves.
Sur l’argent, Aristote commence par dire que sa destination naturelle, dans des conditions ordinaires, est d’être un moyen d’échange. Pour expliquer ce qu’il entend par destination naturelle, il prend l’exemple d’une paire de chaussures, dont l’usage évident est d’être porté aux pieds, et il ajoute que certains fabriqueront des souliers pour un autre usage que celui de les porter : celui d’en disposer. On constate du coup deux usages à des souliers : les utiliser ou les échanger, contre un autre objet dans le troc et contre de l’argent dans la vente, et l’usage naturel est celui de les porter.
Or, quand il s’agit de l’argent, son usage naturel est de l’échanger. Autrement dit, et à l’inverse des chaussures, pour qui l’usage naturel est de les garder pour soi, pour l’argent, l’utiliser comme il convient, c’est s’en défaire : l’échanger contre autre chose. D’où l’on comprend aussi que pour l’argent, le garder pour soi est un usage qui n’est pas naturel. Ce qui n’empêche pas, ajoute-t-il que cela soit précisément ce qu’en font certains : ils sont à la recherche de l’argent pour l’argent, ce qu’il appelle l’« art de faire fortune ». En langage moderne on pourrait traduire cela en disant qu’il existe pour l’argent deux usages : l’utiliser comme un moyen, ce qui est effectivement sa destination naturelle, et l’utiliser comme une fin, ce qui n’est pas sa destination naturelle. Et il attribue ces deux usages à deux grandes catégories de citoyens, respectivement les chefs de famille, pour qui l’argent est un moyen dans la gestion de leur ménage, et les marchands pour qui il est une fin dans leur activité de négoce.
Ayant ainsi distingué ces deux usages de l’argent et les ayant attribués à deux catégories de citoyens, Aristote note que celui qui utilise uniquement l’argent pour l’échanger, c’est–à–dire celui qui recherche le bien-être de sa famille, n’en aura jamais besoin que d’une quantité limitée, alors que celui qui le recherche pour soi dans l’art de faire fortune, n’en a pas un besoin limité mais potentiellement infini :
La forme d’obtention d’argent associée à la gestion d’une famille possède une limite ; l’acquisition illimitée de la fortune n’est pas son affaire » (Aristote, Le Politique, IX).
Jusqu’ici, Aristote s’en est donc tenu à ce que l’on pourrait considérer comme une simple description. Il va alors un peu plus loin, en introduisant maintenant un jugement moral.
Du fait que ce sont les mêmes pièces de monnaie qui servent à la fois à assurer le bien-être d’une famille en étant échangées et l’objectif du marchand en étant accumulées, il existe, dit-il, dans l’esprit de certains chefs de famille, une erreur de jugement qui leur fait confondre les deux usages de l’argent, et qui leur fait croire que le bien-être des leurs consiste à s’assigner le but du marchand, c’est–à–dire à faire fortune. Cette confusion, il la condamne : il souligne que l’homme vertueux comprend que le désir illimité que l’on peut ressentir pour les choses ne reflète pas des besoins réels et qu’une quantité limitée d’argent peut en réalité satisfaire ceux-ci :
… certains sont conduits à penser que gagner une fortune est l’objectif du chef de famille, et que ce qui donne sens à leur vie est d’augmenter leur fortune de manière illimitée, ou en tout cas de ne pas la perdre. La source de cette manière de voir est qu’ils se préoccupent uniquement de vivre et non pas de vivre bien, et comme ils constatent que leurs désirs sont illimités, ils veulent aussi que les moyens dont ils disposent pour les satisfaire soient eux aussi illimités » (ibid.).
Aristote termine alors sur la question de l’argent en notant que les intérêts que certains collectent en prêtant l’argent qu’ils possèdent résultent d’un usage non naturel de celui-ci : c’est utiliser l’argent qui a pour destination naturelle d’être un moyen d’échange, d’une manière que je qualifierais personnellement d’« incestueuse » (bien qu’Aristote n’utilise pas ce terme), à savoir en faisant produire de l’argent par de l’argent. Ce qui, à ses yeux, constitue un véritable détournement de l’usage pour lequel l’argent fut inventé.
Et donc, comme je le disais, lorsque l’on fait référence à la conception de l’argent chez Aristote, c’est en général pour mentionner cette simple notion : que le philosophe condamne la collecte d’intérêts, or, comme on vient de le voir, sa conception va en réalité beaucoup plus loin : elle condamne la recherche de l’argent pour l’argent et considère que l’art de faire fortune constitue un dévoiement, je dirais « prévisible », chez le marchand, mais une confusion parfaitement condamnable quand il s’agit du simple chef de famille.
(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.
69 réponses à “Aristote et l’argent”
Grand Aristote, le commerçant est effectivement celui qui fait de l’échange…un métier. La dissociation de l’échange en achat et vente, moments indifférents l’un à l’autre, crée la possibilité d’acheter sans vendre (accumulation de marchandises) et de vendre sans acheter (accumulation d’argent). Elle permet la spéculation, l’accumulation, c’est-à-dire le pillage marchand.
Comme unité de compte et intermédiaire de l’échange, la monnaie contemporaine n’est pas différente de celle d’Aristote. Mais pour la thésaurisation, c’est une autre affaire. La monnaie d’Athènes n’est pas seulement l’expression d’un système public organisé et réglementé (expression du nomos, la règle), elle est également représentée par des pièces métalliques, principalement en argent. Lesquelles ont une matérialité, une valeur intrinsèque, liée au métal précieux.
Dans un tel système, les « dévaluations » se font par réduction de l’aloi des nouvelles pièces émises au même pouvoir libératoire (ou par utilisation de métaux plus communs), ce qui revient à conférer aux anciennes pièces une « valeur » supérieure : la thésaurisation n’expose donc pas son auteur au risque d’euthanasie keynésienne, à la perte du pouvoir d’achat (au moins Aristote était-il fondé à le croire, en l’absence de découverte de nouveaux gisements importants de minerai).
Une gestion en « bon père de famille » n’exigeait donc pas de faire produire cet argent pour assurer la protection des proches. Le pecunia pecuniam non parit aristotélicien (l’argent ne fait pas des petits) était ainsi d’autant plus défendable d’un point de vue philosophique qu’il était cohérent d’un point de vue « économique ».
Au contraire, il n’existe aucune monnaie fiduciaire qui ait conservé sa valeur dans le temps. Aucune. Si bien que la « gestion d’une famille » impose de faire « produire » l’argent, sans pour autant que son chef soit suspect de vouloir « augmenter sa fortune de manière illimitée ». Mais bien entendu, le fait de pouvoir faire de l’argent avec de l’argent ouvre la voie à bien des dérives collatérales…
De mon point de vue, le prêt à intérêts (qui est en effet très critiquable, et dont le droit canonique n’a reconnu que tardivement la licéité) ne pourrait être interdit que sous réserve d’une garantie institutionnelle de la préservation de la valeur de la monnaie. Un scénario très improbable…
Quelle différence faites vous entre l’argent et la monnaie ?
En 2300 ans l’homme n’a pas beaucoup changé. La cupidité doit être en nous. Au temps préhistorique on devait déjà convoiter la caverne du voisin plus spacieuse et mieux décorée.
Seules des règles peuvent nous contraindre à ne pas user de nos mauvais penchants, encore faudrait-il une réelle volonté de les instaurer.
Pour limiter notre vitesse : code de la route (imaginez le bazar sans feu, sans limitation de vitesse…….)
Pour freiner notre amour du ++++++++++++++++++ : code de la finance.
L’ analogie faite par Aristote entre les soulier et l’ argent ne prouve pas que la destination NATURELLE de l’ argent est celle qu’ il affirme etre. Existe-t-il une telle DEMONSTRATION dans les ecrits de Aristote? Si non alors il ne fait qu’ affirmer un point de vue destine a porter les jugements moraux qui suivent. C’ est irrecevable. Il s’ agirait il me semble d’ un sophisme. Que ces idees nous plaisent soit, mais pas avec des demonstrations bidons.
@ Anne.J
La monnaie comme concept; l’argent comme instrument (au sens commun)
@ scaringella
Certes. Mais la monnaie est une création humaine, une abstraction (pour moi une fiction). Elle n’a pas d’autre destination « naturelle » que celle que lui confère son créateur.
Je suis apparemment un des rares à avoir réussi à me procurer une version pirate (les subtilités de l’informatique ne sont pourtant pas mon fort…) du livre «Le Prix », cet ouvrage dans lequel Paul Jorion nous parle beaucoup d’Aristote et de sandales, portées à vendre ou vendues…
Si un éditeur intelligent ne se décide pas à publier rapidement cet opus majeur de l’œuvre jorionesque, je sens que je vais faire fortune en diffusant, toujours illégalement, ce brûlot qui contester l’économie classique au point de remettre en question la sacro-sainte loi de l’offre et de la demande…
@ Alain A
En fait « Le prix » est disponible sur le site de Paul à l’adresse http://www.pauljorion.com/index-page-8.html soit sur http://www.pauljorion.com menu -> »Economie » -> « Le prix »
Excellent billet, comme toujours… A titre personnel, cela me permettra d’argumenter – citer Aristote, wouah ! – lors des conversations portant sur l’envie (à mon avis étrange) de devenir « riche », qui débouchent en général sur une incompréhension totale de ce que je veux exprimer. Et puis, re-wouah, être aristotélicien sans le savoir, la classe…
@scaringella
Existe-t-il une DEMONSTRATION qui prouve que la destination naturelle d’une chaussure est d’être mise au pied ? A priori non, deux contre-exemple :
– la destination naturelle des chaussures de ma compagne est d’être dans une boîte, parmi un nombre indéfini d’autres boîtes, dans un placard.
– une autre destination naturelle de la chaussure est d’être un projectile à lancer à la face des dirigeants qui nous déplaisent. Tout le monde devrait en avoir une dans sa poche au cas où une occasion de présenterait.
@ Alain A
Vous ne pourrez donc pas spéculer sur « Le Prix »…
@ Alain A
… et donc enfreindre l’interdit jorionien !
@Jean-Baptiste
Vous avez vendu la mèche: c’est bien là que je l’ai trouvé mais j’ai poussé le vice jusqu’à rassembler les 17 morceaux séparés, à les mettre en forme et à les impriimer: j’ai danc mon exemplaire sur ma table de nuit…
@ JJJ
Je ne vais évidemment pas voler les idées de Paul pour en faire du fric. Mais si je le faisais, ce ne serait pas de la spéculation mais une simple escroquerie. Au-delà de votre jeu de mot que j’apprécie, je crois que nous devons faire attention à la définition de la « spéculation ». En effet, les libertariens qui rodent sur ce blog défendent l’idée que nous spéculons tous (acheter un objet au moment des soldes serait de la spéculation, tout comme acheter sa maison au moment où le taux des emprunts est bas et le marché déprimé). Cela n’est pas de la spéculation mais une gestion en « bon père de faille ». Réservons les terme spéculation aux paris sur les prix: acheter à un cours supposé bas avec la feme intention de revendre avec profit dans un délais aussi court que possible (et ne parlons pas des paris sur la baisse en des ventes à découvert).
La formule économie-casino n’est pas un excès de langage et c’est sur elle que nous devons concentrer nos critiques.
@Scaringella
Votre remarque est intéressante.
Mais, il faut évaluer les propos du philosophe dans leur contexte.
Aristote ne connaissait pas les produits dérivés, mais il connaissait la fonction “d’ appropriation pour moi”, de l’ argent , c est a dire de la monnaie de son époque . Il ne faisait que lever un énorme lièvre, ce même lièvre est toujours présent : le modèle décrivant la monnaie comme ayant uniquement des fonctions de “quantification des richesses”, mène a une impasse logique si l on reste dans le cadre quantitatif et en même temps dans le carcan de la
logique bivalente (soit naturel soit non-naturel) d’ aristote, qui interdit toute
saut ontologique vers une autre forme d’ être de l’ argent.
Cette autre forme d’ être, cet énorme lièvre, est a chercher dans le “non naturel” d’ aristote.
La monnaie a surtout aujourd hui comme principale fonction “l appropriation pour moi” et les conséquences qualitatives qui en découlent (le pouvoir)
L’usage « naturel » , quel naturel ?, celui-ci n’existe pas.
On vit en société, et si celle-ci est de pure concurrence néolibérale on a peut de l’avenir et on entasse, parce qu’on n’a confiance en personne, parce que ça permet d’entretenir des flatteurs qui permettent à la conscience de tenir le coup, …
En fait, on n’échange plus du tout, tout devient contrat…
Et si celle-ci est solidaire, on échange,…
Et si on échange, on se moque bien des intérêts…
Bonjour à tous
le besoin illimité d’accumulation s’apparente au tonneau des Danaïdes: la raison du » jamais satisfait » résulte du manque de « fond ».
Il conviendrait donc, plutôt que de les fustiger, d’aider les individus à tendance accumulatrice sans fond à:
– prendre conscience de ce manque de fond qui les rends esclaves de leur « besoin insatiable, infini »
– se mettre en chemin pour résoudre ce problème de manque de « fond ».
pour ce , l’étude d’aristote est un des moyens possibles entre autres…. du même tonneau!
Cordiales salutations…..
Aristote ou Pétaouchnoque qu’importe ? c’est une simple évidence de faire cette distinction et de constater que nos sociétés qui se fondent sur le principe « non naturel » de : la planète , les autres, l’argent sont des marchandises au service du buiseness sont rentrées dans la crise finale ; la nature et ses lois étant c’est certain plus tenaces que nos dénis de réalité.
@ Alain A
D’accord pour éliminer les achats de la vie courante du champ de la spéculation dangereuse. Mais je crois que ce qui distingue la notion de « pari sur les prix » à limiter ou à éradiquer, c’est l’effet de levier : soit qu’il y ait recours à l’emprunt (comme les opérations boursières « classiques » du RM), soit que les conséquences défavorables de l’opération soient potentiellement (très) supérieures aux sommes engagées, comme les CDS par exemple. Car après tout, il n’y a aucune raison d’interdire au pékin de jouer au Loto, au PMU ou à la roulette, dès lors que ses pertes potentielles ne dépassent pas sa mise.
Aristote serait-il le prédécesseur de Say selon qui la monnaie n’est qu’un voile ?
Cet article est trés intéressant car il s’inscrit dans une réflexion concernant l’histoire des idées économiques et à ce propos je souhaiterais savoir si l’on peut faire un rapprochement avec l’histoire espagnole au moyen-âge. Si vous pouviez éclairer ma lanterne.
J’ai un vrai problème avec « Le prix » dès le chapitre d’introduction
Il est lié à ce paragraphe, qui est, pour moi, purement tautologique dans le passage concernant la vérité
« Nul à moins d’être fou ne met en question qu’une affirmation se situe par rapport à la vérité en étant soit vraie soit fausse, ni non plus qu’une chose ait un prix ; l’existence de la vérité et du prix sont donc « transcendantes » à notre culture, comme l’étaient autrefois Dieu ou la Loi. »
Diable, voilà qui est de nature bien totalitaire!
On apprend ensuite heureusement que tout celà se passe entre deux interlocuteurs seulement qui, soit se mettent d’accord sur un concept, soit fixent un prix lors d’un échange.
« Dans la constitution de la vérité, des mots sont échangés et si un accord a pu être atteint sur la même phrase en sorte que les interlocuteurs puissent dire chacun séparément « je le crois », et les deux ensemble, « nous le savons », alors ils se seront constitués un savoir partagé ; celui-ci a forgé un lien entre eux et il y a désormais un peu de la personne de l’un dans la personne de l’autre. Ils pourront se rencontrer plusieurs années plus tard sans s’être vus entre-temps et seront étonnés de constater que leurs pensées se sont poursuivies pendant tout ce temps en parallèle comme s’ils avaient continué de créer de la vérité ensemble ; c’est ce que les physiciens appellent le principe de non-séparabilité lorsqu’il s’agit de particules élémentaires. Dans la constitution du prix, des nombres sont échangés et si un accord a pu être atteint sur un même nombre, alors de l’argent est échangé contre une marchandise (matérielle ou immatérielle) ; celui qui disposait de la marchandise se retrouve désormais avec de l’argent, celui qui possédait l’argent se retrouve désormais avec la marchandise ; l’échange a créé un lien entre ceux qui ont constitué un prix ensemble et ils auront à coeur de recommencer. »
J’en déduis naturellement que soit ces deux « particules élémentaires » ont pu créer un dialogue qui leur permet de partager une « vérité » sur un sujet, ou ont pu fixer un prix qui leur semble acceptable, le mot qui convient pour qualifier cet accord est celui de « consensus » et non celui de « vérité ».
Au niveau « local » où celà se passe, celà n’a que peu d’importance!
Le remplacement de « consensus » par « vérité » prend tout son poids au § suivant:
« Le système de vérité de notre culture est appelé la Science, le système de prix de notre culture est appelé l’Économie. Nos sociétés modernes sont entièrement subordonnées à leur action conjointe. Il y a très peu de choses dans nos sociétés qui ne s’expliquent aisément par la Science ou par l’Economie ou par les deux ensemble. Le savant qui produit la science a pris l’ancienne place du Sage, l’homme d’affaires qui produit le prix, celle du Guerrier ; quant à la place du Saint, il ne reste pas grand monde à vouloir l’occuper. »
C’est cette généralisation que je refuse absolument!
Le système de « consensus » de notre culture est notre Système Politique et non pas la Science.
Et celà change complètement le statut de l’économiste, maintenant pris sous l’aile, (la main invisible?) de la Science, donc de la Sagesse.
Et par analogie, celui de l’homme d’affaires, devenu guerrier indépendant!
Bien vu, c’est la thèse néo libérale.
A Alain A : évidemment que nous spéculons tous !
En quoi par exemple mon choix actuel de ne pas acheter de maison (alors que j’en ai les moyens) et de rester locataire pour profiter de prix plus bas dans quelques années n’est-il pas un pari sur les prix ? J’aimerais comprendre.
Je fais un choix qui sera gagnant ou perdant selon l’évolution à venir du marché immobilier, cela correspond exactement à la définition d’un pari.
En quoi ma décision éventuelle d’acheter dans quelques années une maison sera-t-elle autre chose qu’un « pari sur un prix »…En faisant cet achat, si j’y arrive, j’espèrerai évidemment que mon actif prendra de la valeur et que je pourrai ensuite éventuellement le revendre avec une plus-value (ou alors que je pourrait le louer avec un bon rendement). Ce sera là aussi un choix qui sera gagnant ou perdant face à d’autres choix…donc un pari.
Tout achat d’un actif patrimonial (maison, assurance-vie, action…etc) est un pari sur un prix. Le reste n’est qu’une nuance de temps : il y a des paris de quelques minutes (scalp-trading de contrats sur indices), de quelques semaines (comme les swings à la baisse que je fais sur le CAC depuis 2007), de plusieurs années (comme des contrats d’assurance-vie multisupport), ou encore plus longs (maisons).
Voilà pourquoi l’idée d’ »interdire » les paris sur les prix n’a aucun sens dans le monde réel.
Est-ce que je dois rappeller que dans des ecrits philosophiques il y a these, antithese, synthese. Ou est l’ antithese a l’ affirmation de Aristote??? L’ usage naturel n’ existe pas pour les humains. L’ usage est culturel, meme pour notre propre physiologie. C’ est donc les hommes qui decident de l’usage qu’ ils font de ce qu’ils inventent. L’argent ou la monnaie est un produit culturel complexe, mariant concept+outil+echange+code . Dire que l’ argent aurait un usage et/ou une essence naturelle est obsolete et ne fait pas avancer le debat. L’ argent est aussi une marchandise de facto et parceque les hommes ont decide de le considerer aussi comme tel. Que ce soit une perversion est ce que sous-entend le propos de Aristote. Ce non dit, cet implicite, vous fait grimper aux rideaux quand je critique un raisonnement faiblard. En fait l’implicte que vous n’avez pas lu dans mon post c’ est que ces references obsoletes (2500 ans qd meme …) j’aimerais bien qu’elles disparaissent des ecrits, ou au moins remises en perspectives pour ce qu’elles sont, faiblardes et obsoletes.
Moi j’dis ca, jdis rien, hein 😉
Je rajouterais que chaque fois que le mot naturel est accole a un domaine quelconque de l’ activite humaine on fait le jeu des neo-liberaux pour qui le marche est NATUREL et l’ expression NATURELLE des echanges entre humains.
Cela peut sembler à première vue paradoxal que le philosophe traite question de l’argent sous l’angle naturel-non naturel. Mais, en l’espèce, si Aristote n’apporte pas de démonstration c’est aussi parce que son système philosophique constitue une explication : éthique, politique et métaphysique forment chez Aristote un tout cohérent. Les liens qui unissent ces différents thèmes abordés par Aristote ont des liens logiques intrinsèques. La description du monde empirique que fait Aristote se fait dans un langage métaphysique du nécessaire et du contingent, de l’acte et de la puissance, selon le modèle (culturel, anthropologique ?) essentiel que l’on retrouve partout dans son oeuvre, celui de la techné, cet acte par lequel l’artisan produit un objet matériel préconçu. La cosmologie aristétolicienne est calquée sur ce modèle. Le mouvement du monde résulte du déplacement d’un mobile initial.
Entre parenthèses, et cela pour mieux indiquer la singularité du monde aristotélicien, la métaphysique chinoise, par opposition, serait tout autre : le modèle n’est plus celui du but à atteindre selon un plan établi d’avance, mais celui d’une saisie de configurations toujours changeantes desquelles on exploite un potentiel de situation. J’ajoute, c’est important pour la suite, que cela induit une conception du politique très différente. Il s’agit pas de convaincre une assemblée, mais en priorité d »avoir une influence sur le prince quand on est son ministre ou son conseiller, autant dire qu’il n’existe pas dans cet univers de conception de la citoyenneté. L’univers chinois antique est bien plus naturaliste que celui d’Aristote. Il s’intéresse plus à la dynamique, aux phases du changement, mais le politique en tant que tel n’est pas constitué.
AInsi, par dérivation, le modèle aristotélicien de la techné est appliqué au domaine éthique : toute action existe en puissance chez celui qui la produit. La naturalité supposée des choses humaines nous apparaît problématique à nous modernes car le monde de la nature appartient au monde physique. Il manque une démonstration, une « preuve scientifique » de la naturalité d’une chose. Mais c’est ne pas voir là que la visée essentielle de la philosophie d’Aristote n’est pas la description scientifique du monde, même s’il l’a poussée très loin pour son époque. Sa préoccupation première est le bien vivre dans la Cité. Or la Cité s’inscrit dans le Cosmos et son ordre architectonique. Il s’agit donc de déterminer la place exacte des humains dans ce cosmos pour en déduire une morale et une politique, l’économie quant à elle jouant elle aussi son rôle de régulateur, de la vie matérielle. La bonne gestion des affaires de la Cité est calquée sur le modèle de la bonne gestion du domaine familial.
Le citoyen agit selon l’ordre d’une raison en vue de l’action individuelle et responsable : la philia, ou amitié est ce lien par lequel nous sommes reliés à une communauté politique, basée sur la parole donnée qui fait de nous des êtres engagés parmi nos semblables. Cette raison politique ne résulte pas comme chez Platon de la contemplation des idées ou d’une dialectique autonome, mais forme un mixte de logique (cohérence du discours) et d’ouverture sur un réel possible, celui de la vie dans la Cité. La logique aristotélicienne intègre l’action, et donc l’accident, le contingent, par lesquels est offert une place au virtuel, aux autres possibles (Voir à ce propos le syllogisme aristotélicien expliqué par Paul Jorion dans son billet-article « Ce qu’il est raisonnable de comprendre et partant d’expliquer », très éclairant ).
Aristote fait un usage de l’ontologie bien particulier, il dit ainsi de l’être que celui-ci est ce qui se dit de différentes manières. Cette idée traduit l’idée que la communauté politique athénienne est constituée de citoyens aux opinions diverses, que cela est un fait, une doxa, et que c’est de cette réalité qu’il faut partir. On place la métaphysique aristotélicienne souvent en amont de toute sa pensée, mais on pourrait très bien aussi analyser le discours d’Aristote en faisant intervenir la spécificité du politique en Grèce dans la cité pour expliquer la métaphysique de l’acte et de la puissance, du nécessaire et du contingent, du naturel et du non naturel. L’idée du caractère virtuel des choses est à rapprocher du vivre ensemble possible en vue de différents projets possibles. Le thème est prégnant dans toute l’oeuvre d’Aristote. Par exemple, dans le domaine esthétique, Aristote affirme que la poésie est supérieure à l’épopée : en histoire on rapporte des choses qui ont été tandis que la poésie rapporte des choses qui pourraient être. Un autre monde possible y est inscrit en filigrane.
Au cinquième jour Dieu dit:
Il y aura des forts et des malins.
Les malins prendront les biens des forts et des idiots.
Les forts prendront les biens des malins avec violence.
Les malins prendront les biens des riches avec ruse.
Les riches étaient déjà riches avec l’aide de Dieu.
Le pire c’est que ce sont les riches qui sont les plus forts ce qui leur permet de s’offrir les malins et réciproquement.
Tout çà n’a rien à voir avec la morale.
La morale est faite pour les idiots…?
Une démonstration utilise des hypothèses qu’il faut démontrer à leurs tour et ainsi de suite. De sorte qu’il sera à jamais impossible d’affirmer qu’une chose est absolument vrai ou absolument fausse.
Pour ma part, j’accepte volontier que l’usage définie comme « naturel » d’une chaussure soit d’être porté.
Il me semble d’ailleurs ridicule de devoir démontrer que l’usage « naturel » d’une chaussure soit d’être porté. C’est plus une définition qu’un résultat logique. C’est comme vouloir démontrer qu’un stylo bleu est bleu. Ben il est bleu quoi. C’est tout.
Dès lors, je ne vois pas en quoi il est différent d’accepter que l’usage définie comme « naturel » de l’argent soit d’être échangé. C’est une invention humaine dont le but est justement d’être échangé contre autre chose. Qui affirmera que l’usage naturel de l’argent est d’être peint en bleu ? ou d’être utiliser comme papier à origami ?
On peut évidement définir que l’usage naturel de l’argent est d’être prêté, ou investie contre intérêt. L’échange devient alors l’usage non naturel. Il n’y a pas une définition qui soit plus démontrable qu’une autre. Ce sont juste des définition. En revanche il y en a une des deux bien sûre qui correspond à notre propre expérience de l’argent au jour le jour. L’autre pas. Pour ma part, je prend la définition qui correspond à ma propre expérience (il m’est déjà arrivé de prêtter quelques centaine d’euros ici ou là pour dépaner, mais jamais asser pour lancer un business 😉 ).
Ce qui est je trouve extraordinaire, (et qui est exposé de manière différente dans le texte) c’est que l’argent puisse servir à s’acheter lui-même. Vu sous cet angle, le prêt me parait être un usage naturel bien compliqué. Evidement, ce n’est qu’une impression. désolé pour le manque de rigueur …
@ Loïc et Alain A
Sur l’interdiction de paris sur les prix :
Je crois que cette expression signifie l’interdiction pour ceux qui cherchent à tirer seulement une plus-value d’un tel pari. L’objet de l’achat n’est pas la propriété de la chose mais l’anticipation du gain futur. La nuance de temps n’est donc pas secondaire, elle est essentielle.
@Alain A
Les libertariens sincères comme Loic nous aident a comprendre ce qui se passe.
Quand vous pardonnez la spéculation des petits et condamnez celle des grands, vous ratez votre cible en cherchant a la préciser.
Alors que les libertariens touchent dans le mille en pointant nos mauvais penchants (cupidité, égoïsme, psychologie des foules…).
Il est vrai toutefois que cette dernière conception rate un point crucial de l ‘ humain qui est capable de changer, d’ émerger, sur de longues périodes et de contrecarer ses réflexes animaux en intereagissant avec la société.
Sur la destination « naturelle » de l’argent et d ela chaussure :
Il faut recontextualiser l’extrait commenté par Paul.
Dans la Grèce d’Aristote, toute chose, toute individu a une finalité. Celle de l’homme, selon le stagirite, n’est pas dans l’enrichissement. En tant tant qu’animal politique, ce dernier cherche la vie bonne que l’on pourrait (?) définir par la réalisation de son essence par l’homme.
Par conséquent, Aristote ne peut que condamner la recherche démesurée de richesse car elle détourne celui qui s’y consacre des choses bonnes.
@ Tigue
Il y a des biens qui ne doivent pas faire l’objet de paris au sens où ce qui est recherché est uniquement le gain. Je prends comme exemple les matières premières et plus particulièrement les matières premières alimentaires. Ceux qui les achètent sans intention d’en prendre possession mais à seule fin de les revendre plus tard pour en tirer profit font un usage illégitime de la spéculation.
@Loïc Abadie,
Assez curieux votre raisonnement :
1 / Nous avons tous besoin d’une maison, alors si je choisi d’attendre que les prix baissent, je suis un spéculateur et c’est normal. (Vous)
2/ A vous de nous préciser les outils du spéculateur moderne : « il y a des paris de quelques minutes (scalp-trading de contrats sur indices), de quelques semaines (comme les swings à la baisse que je fais sur le CAC depuis 2007), de plusieurs années (comme des contrats d’assurance-vie multisupport), ou encore plus longs (maisons). »
3/ Donc moi, si je spécule sur les prix du blé alors que je n’ai manifestement pas besoin de tonnes de blé pour mon bien être personnel, c’est aussi de la spéculation et c’est donc normal, vous êtes mon professeur.
Cela ne vous dit rien ?
Vous venez de défendre les paris sur les prix en mélangeant torchons et serviettes, alors j’achève votre « libéralisme » avec un syllogisme, et c’est « normal ». Le syllogisme est décidément l’outil réthorique parfait pour nous faire avaler une théorie en forme de couleuvre de plusieurs kilomètres.
@ Loïc Abadie
Non : un pari implique deux parties. « Parier avec soi-même » est une image.
Pourquoi le spéculateur veut-il absolument nous convaincre qu’il ne spécule que parce que tous le font (quitte à mettre la définition de « spéculer » à toutes les sauces pour nous en convaincre) ? Pourquoi ne peut-il être spéculateur et fier de l’être ?
@ Pierre Yves D
Votre post est brillant.
On a du mal à comprendre Aristote car l’idée qu’une finalité objective s’impose aux individus nous est devenue totalement étrangère et même suspecte.
Comme le montre Michéa, le marché n’est pas simplement qu’un moyen de pourvoir à nos besoins comme le pensait Aristote à propos de l’ échange. Il est une technique voulue comme neutre pour aboutir à une harmonisation des intérêt sans que prévale une finalité étrangère aux échangeurs.
L’idée de marché repose sur la croyance que l’accès au réel est immédiat par la science. L’homme, vu comme un calculateur, se confronte aux autres par l’échange et le résultat aggloméré des différents échanges est neutre au sens où il n’atteint pas une finalité voulue par l’un des échangeurs mais une réalité potentielle que l’échange permet de réaliser.
Quelle est la définition de la spéculation ?
En quoi elle diverge du simple pari ?
Dans quelles conditions une assurance relève de la spéculation et non plus de la couverture de l’aléa ?
La spéculation est un projet, à court ou moyen ou long terme qui consiste à espérer un avantage quand il exsiste des incertitudes sur son occurrence. Le pari c’est la même chose avec un niveau d’incertitude plus important, mais en liaison avec l’avantage espéré.
Très jolies ces définitions. Mais qui ne correspondent pas à l’usage courant.
Il y a quand même une grande différence entre spéculer et faire un pari. Même si le principe sous-jacent reste le même c’est à dire espérer un profit entre aujourd’hui et demain. Par contre il y a aussi une grande différence morale et éthique. Dans le pari on prend une position fixée au niveau du montant et du temps, alors que la spéculation implique que l’on puisse en fait piper les dés. Car si dans un pari il y a une notion de probabilité et de division des gains en fonction des risques pris, la spéculation elle est plutôt basée sur la quantité de pari et la possibilité de faire varier la probabilité. En quelque sorte le parieur prend une position ferme tandis que le spéculateur va tenter de modifier la cote des paris.
Exemple concret boursier :
Je me positionne sur une baisse, le parieur achète les actions et attend de voir s’il a gagné ou non. Tandis que le spéculateur n’hésitera pas à faire baisser le cours de l’actions qui a en vendre un grand nombre. Il faut faire toujours très attention aux manipulations des idées et de leur sens. Assimiler un parieur a un spéculateur c’est comme assimiler un chef d’entreprise et un financier. Le premier connaît le marché, les outils de production et les technologies, le second n’y connait rien mais peut influencer le cours de l’entreprise en réduisant de moitié le personnel. Certes cela fait monter le prix de l’entreprise mais cela n’améliore surement pas les produits fabriqués.
A Paul Jorion :
« Non : un pari implique deux parties. « Parier avec soi-même » est une image. »
A partir du moment où j’achète un actif patrimonial, quel qu’il soit et quelque soit l’horizon de temps, il y a un vendeur en face, donc nous sommes deux.
Mon achat (ou ma vente) est bien un pari sur un prix.
« Pourquoi le spéculateur veut-il absolument nous convaincre qu’il ne spécule que parce que tous le font (quitte à mettre la définition de « spéculer » à toutes les sauces pour nous en convaincre) ? Pourquoi ne peut-il être spéculateur et fier de l’être ? »
Pour ma part, je ne cherche pas à convaincre que je spécule parce que tous le font. Ce n’était qu’une observation que je faisais. Je ne cherche en aucun cas à justifier ma démarche, elle est pour moi normale, n’a aucun besoin d’une quelconque justification, et je n’ai aucun état d’âme à faire tous les paris sur les prix qu’il faudra pour me défendre face à un environnement que je juge menaçant pour mon avenir et mon patrimoine.
Je n’en suis ni « fier », ni « honteux ». Faire des paris sur les prix n’est pour moi ni « bien », ni « mal », il s’agit d’un droit, et si on me retire ce droit sous prétexte d’une quelconque « morale »…Disons que j’irai simplement voir ailleurs et beaucoup feront comme moi, laissant les « moralistes » refaire le monde entre eux. Mais il risque d’y avoir vraiment très peu d’habitants dans leur monde « idéal » 😉
@ logique
C est exactement l’argument d’Aristote
Si pour lui le commerce constitue l’activité humaine la plus dégradée/dégradante, c’est justement parce que le marchand n’a rien besoin de savoir faire. Il est incapable de fabriquer une paire de soulier ou quoique ce soit d’autre. Tout ce qu’il a besoin de connaître c’est le cours de la paire de soulier à un instant donné. Il n’a la maitrise d’aucun art (de fabrication). Il ne produit pas de biens utiles… ce qui ne veut pas dire que son activité ne soit pas nécessaire…
A partir de maintenant j’interpole un peu, pour « rendre l’idée »:
Mais l’activité du marchand est seconde, dérivée, au sens ou l’activité commerciale présuppose l’existence de toutes les autres (et ce en cas de paix, parce qu’en cas de guerre l’économie de guerre rend de toute façon nulle l’utilité du marchand). La dignité du marchand en tant que marchand (on ne parle pas de la personne, même si ce n’est pas sans conséquence) est ainsi inférieure à celle du technicien de surface en tant que technicien de surface. Un des critère de reconnaissance sociale dans ce cas, c’est donc la façon dont l’activité s’intègre dans l’économie des activités de la communauté, et non pas le niveau de maîtrise intellectuelle/manuelle nécessaire à l’éxécution de l’activité en question ou encore la rareté relative des personnes capables de la mener à bien.
Aujourd hui le critère de la reconnaissance sociale du travailleur en tant que tel c’est non pas la manière dont il profite à la communauté mais la richesse qu’il acquiert avec le fruit de son « travail »… à quelques exceptions symboliques près (comme le pompier, le médecin, le chercheur, l’artiste… qui jouissent encore d’un capital symbolique)
Cette perspective qui consiste à attribuer un statut moral à la richesse en fonction de son mode d’acquisition était encore très présente dans la France du XIXe, qui a opposé dans de grandes batailles doctrinales sur le droit de propriété les propriétaires terriens à la bourgeoisie industrielle. La question était alors de savoir laquelle des deux activités était moins noble que sa rivale.
Cette façon de voir, réactualisée par les communautariens et la tradition républicaine, est clairement anti-libérale.
Ce qui est intéressant, c’est qu’on fustige souvent les français pour leur « suspicion vis à vis de l’argent », de leur « haine de la réussite », mais en cela, ils ne font que témoigner de leur attachement à une conception de la vie bonne qui s’enracine tant dans la tradition judéo-chrétienne que dans la pensée classique, d’Aristote à Rousseau.
L’argument d’Artistote n’est pas une simple pétition de principe. C’est juste que Paul, pour aller à l’essentiel, a présenté un élément frappant de l’analyse sous une forme rapide et facilement accessible. Outre son ouvrage Le prix, qui présente d’autres dimensions importantes de la question non reprises ici, je conseille la présentation qu’en fait M. Henaff dans « le prix de la vérité », la première partie du livre étant consacrée à Aristote, et traitant de ce point en particulier.
« Pourquoi ne peut-il pas être spéculateur et fier de l’être? »
Vous avez la réponse juste au dessus. Parce que les autres membres de la communauté politique n’ont pas à être fièrs de lui 😉 (je vous rappelle que c’est un sentiment transitif, la fierté…)
Du reste vous confondez manifestement l’ordre de ce qui est « nécessaire/expédient » avec celui de ce qui est « vil/noble ».
Par ailleurs il n’a jamais été question d’interdire tous les paris sur l’évolution des prix. Je crois que vous faites expres de ne pas comprendre. Ce n’est pas ça le problème.
@ Loïc Abadie
C’est incroyable comme vous ne voulez pas comprendre, ou à quel point vous êtes de mauvaise foi.
– Si dans un marché baissier j’attends pour acheter quelque chose dont j’ai besoin (une maison par exemple), je ne spécule pas, je cherche seulement les meilleurs conditions pour avoir ce bien. Ce n’est pas de la spéculation, je suis le bon père de famille d’Aristote.
– En revanche si dans un marché haussier j’achète un bien dans le but de le revendre avec plus-value, sans en avoir le besoin effectif, mon seul but par cette action est de m’enrichir. Je suis alors un spéculateur, le mauvais père de famille d’Aristote.
C’est pourtant simple…
D’autre part, vous dites que vos actes n’ont besoin d’aucune justification. Pourtant dans la même phrase, vous en donnez : nécessité de se défendre contre une « menace » (quelle menace au juste ?).
Je remarque enfin que vous employez systématiquement, dans chaque post, le mot « patrimoine » plutôt que « fortune » ou « richesse ». Étymologiquement, le patrimoine est ce que l’on reçoit de ses parents pour le transmettre aux générations suivantes. Cela se rapporte à des biens durables, biens physiques construits ou acquis culturels, pas vraiment à l’argent, qui reste un moyen d’échange, pas un bien utilisable en tant que tel.
Je persiste à penser que malgré vos affirmations, vous avez un problème de morale qui vous pousse à vous accrocher à l’idée que tous les hommes sont comme vous. D’où tous vos amalgames pour le croire et tenter de le faire croire.
La question n’est pas de savoir si tel ou tel est un spéculateur et a un problème de morale avec lui-même. Le problème est que nous sommes dans une société qui accepte et même encourage l’avidité et la cupidité. C’est absurde et c’est pourquoi il a fallut aux libéraux inventer la fable des abeilles et autres mains invisibles pour justifier l’injustifiable. Après qu’on aie appliqué la morale libérale, on découvre stupéfaits que la corruption règne en maître, que la société tombe en pièces et que même notre environnement se dégrade dangereusement. Si donc il n’y a pas de main invisible pour transformer cette cupidité en bien social, la cupidité est mauvaise par quelque bout qu’on la prenne et doit être réprimée comme autrefois. C’est cela ou voir notre civilisation s’écrouler.
Comme souvent quand je vois des déclarations d’Aristote, je trouve ça finalement assez creux. Aristote était mon philosophe préféré au Lycée (au moins parmis les grecs) et j’en ai un peu honte aujourd’hui.
Ici c’est assez typique, le raisonnement tient sur des postulats parlant mais très éloignés du réel. Pourquoi les marchands et les pères de familles seraient-elles des personnes différentes ? Si ce n’est pas le cas, et qu’il faut entendre que les commerçants doivent faire de l’argent dans l’intérêt de la société (qui se développe dessus) et une fois chez eux et équipés de leurs pantoufles de pères de familles le reléguer à un role d’outil, qui achète les biens des commerçants au delà du simple nécessaire, rendant pertinent son intérêt pour le développement de son commerce ?
A mon sens donc beaucoup de pose pour proférer une platitude philosophique, à savoir que l’argent n’est pas une fin en soit.
la vision d’Aristote me semble « saine ».
la monnaie permet d’acquérir ce qui interesse dans un but de « réalisation de soi ».
si ce qui interesse, c’est la monnaie, on devient collectionneur (numismate).
si ce qui interesse est l’accumulation, on devient riche (ou on essaie).
vous savez qu’il y a des gens qui mettent 10 ans à construire des tours eiffel avec trois cent cinquante mille allumettes ?
confiez leur votre patrimoine !
@Loïc Abadie
Bon, enfin, bref, vous êtes un spéculateur « pas honteux ». Ce que nous avions bien compris. Quoique…
Par contre, je pense, comme un intervenant ci-dessus, que vous tentez, malgré tout, de justifier… moralement vos activités. En prétendant placer vos activités particulières dans le champ de la « morale ordinaire » et de la banalisation. Ne vous en déplaise, il y a une grosse différence entre la part « spéculative » inhérente à toute activité humaine, et le fait de participer activement, en pleine connaissance de cause, à un système sciemment organisé ayant comme activité, et objectif principal, la spéculation quotidienne sur ce qui n’est même plus la « valeur » des choses.
Le fait que vous justifiez vos activités par la nécessité de vous « défendre » contre un « environnement menaçant » est, d’ailleurs, aussi… une justification morale. En gros, vous prônez la légitime défense. Qui est une justification juridique. Dans laquelle la manière dont vous demandez à la société de ne pas vous considérer comme « coupable ». Ce qui est à 100% dans le champ du jugement moral.
La différence, elle est sans doute dans l’intensité, la part de l’activité y consacrée, et, surtout, d’exclure explicitement toute interférence de la « morale » dans son exercice.
La plupart des gens ne spéculent que plutôt rarement. Quand ils le font, souvent, il n’en ont pas conscience. Enfin, les facteurs moraux peuvent très bien intervenir en tant que limitant, ou refus de, l’activité purement spéculative.
Enfin, le fait de présenter votre spéculation, active, comme un « droit » est curieuse. Certes, pour l’instant, vous en avez le « droit ». Mais il ne s’agit certainement pas d’un droit fondamental. Ni imprescriptible. Certains droits ne sont pas absolus. La société a, elle aussi, le droit de les mettre en balance avec d’éventuelles nuisances qu’ils peuvent causer à autrui. Ou de les juger disproportionnés par rapport aux droit de la société à atteindre des objectifs communs. C’est précisément ce dont il est question actuellement.
Je passe sur vos menaces de « délocalisation » individuelle. Un grand classique de la liturgie néo-libérale. Grand bien vous fasse de vous considérer, et vos activités spéculatives, comme à ce point indispensables que tout le monde doivent trembler de frayeur rien qu’à l’idée de perdre vos inestimables talents.
Personnellement, je pense que se passer des adeptes de la spéculation, non seulement ne serait pas du tout un drame. Mais plutôt le contraire. La capacité de nuisance collective de ces activités ayant, depuis longtemps, dépassé les bénéfices que l’on pourrait en espérer.
Par ailleurs, je serais bien curieux de voir à quoi ressemblerait votre propre monde « idéal », s’il n’était plus peuplé que de spéculateurs. Vous spéculeriez entre-vous? Et sur quoi? Dans l’hypothèse ou plus personne n’acceptait de se faire l’objet de vos « paris »?
@ Loïc Abadie
La spéculation est pour vous « normale » car elle ne se distingue pas des autres emplois relatifs à l’argent.
Mais n’est-ce pas accorder à l’argent un statut purement instrumental sans fonction politique et sociale que de le situer par delà le bien et le mal, en dehors de toute moralité ?
Je dis cela parce que la moralité est souvent associée au religieux, mais Aristote nous montre fort bien qu’il est possible de fonder rationnellement la moralité, en tant que celle-ci est un élément constitutif de la communauté politique. La moralité ce sont les humains qui assument seuls leur destinée historique en dehors de toute intervention divine et à l’horizon d’un avenir collectif où se discute, est tranché ce qui est juste et injuste, au sein d’institutions spécifiques, qui relèvent du processus démocratique. Les modernes, entre parenthèses, des siècles plus tard, reprendront le fil de la moralité non religieuse, certes à leur manière, parfois dans un sens utilitariste et individualiste que n’avait pas Aristote, mais sans lâcher le fil aristotélicien de la moralité.
Or vous vous réclamez du droit, mais quel sens peut encore avoir ce dernier s’il évacue toute réflexion morale de son horizon de pensée, dès lors qu’il est question d’argent ? Si l’argent — et donc la spéculation qui en est un usage particulier — n’est pas du domaine de la moralité, au sens où la moralité c’est ce qui définit l’action des hommes dans une histoire dont ils sont les seuls maîtres quand auparavant l’histoire du monde était autant celle de Dieu que des hommes, et toujours à l’horizon d’une communauté politique, n’est-il pas alors le pur reflet du rapport entre individus qui n’ont alors plus pour seule politique que de se dégager du politique au sens de l’espace public et délibératif ?
Vous vous réclamez du droit, d’un droit, mais n’est-ce pas un droit bien particulier, c’est à dire un droit qui se réfère en dernière analyse à la raison du plus fort ? Pour le juriste du XX ème siècle, Carl Schmitt, toute communauté politique n’a pas pour fondement une volonté commune de vivre ensemble, mais l’opposition à un ennemi duquel on doit se défendre et s’organiser. Partagez-vous cette conception ? D »autre part, n’êtes-vous pas en train de fondre le politique dans l’économique — au sens d’une raison purement instrumentale — en supposant que l’argent serait un instrument neutre ?
Pour dire les choses crument ne vous situez-vous pas clairement dans l’optique de l’animal luttant pour sa survie, en somme de l’animal pré-politique au sens aristotélicien ? C’est évidemment votre droit le plus strict, cela n’exclue pas d’ailleurs qu’en de nombreux domaines vous puissiez distinguer le bien et le mal, vous l’avez même affirmé dans quelque autre commentaire. Mais alors pourquoi n’incluez-vous pas l’argent dans le domaine de la moralité ?
Une dernière question : est-ce la gravité de la crise actuelle qui vous interdit d’attribuer à l’argent un autre rôle que celui consistant à se prémunir contre les aléas individuels de l’existence — ie l’argent pour la survie, ou bien est-ce une conviction philosophique valable pour vous en toutes circonstances ?
@loic,
En fait je ne pense pas que vous spéculier, car pour cela il faut avoir la posibilité de manipuler les cours. Et je ne pense pas que vous ayez les moyens de la faire. Tout aux plus vous spéculer sur l’impact de vos idée sur le marché. Mais vous me semblez plutot être un parieur. M’enfin je reconnais que de nos jours la spéculation, c’est le pari bousier, immobiler ou du simple commerçant qui enticipe la demande. Alors que les pari ne concerne que les activité lié aux jeux, sport . Hors le fait d’asimiler la spéculation avec le pari montre bien que l’économie et devenu un sport ou un casino a part entière. M’enfin la spéculation n’as pas vraiment de conséquence grave, se qui est grave c’est lorsque l’on pipe les dés pour être gagnant. Lorsque l’on vend a des gens insolvable des biens hors de prix pour touché qu’elle misérable pourcentage. Lorsque l’on vends des paquet d’action pour influencer les cours ou lorsque l’on cré un monopole pour controler les prix. Ils y a donc deux type de spéculateur celui qui ne cherche qu’as tirer profit de son travail d’analyste et celui qui triche pour être sur de gagner.
@Pitalugue
Pour faire une comparaison physique le travail c’est comme l’électricité çà se transforme, çà s’échange mais çà ne se stocke pas au contraire de l’argent. C’est cette différence de nature qui fait que le pouvoir d’achat de l’argent ne peut pas être constant entre le moment où l’on accumule celle-ci et le moment ou l’on essaie de la retransformer en travail. La capacité de travail d’une société dépendant de facteur sociaux, d’évolution démographique de la technique de l’énergie et des matières premières disponibles etc, il est impossible de conserver le même pouvoir d’achat à la monnaie à moins que la société cesse d’évoluer en tout point ce qui est impossible le temps s’écoule et change tout quoique nous fassions. Seule une monnaie dont la durée de vie serait courte permettrait de rapproché l’argent de la nature du travail. Mais de ce fait l’accumulation deviendrait impossible et les spéculateurs s’en retournerait à torturer leur voisins. Comme le disait Keynes mieux vont qu’une personne torture son portefeuille plutôt que son voisin, même s’il a oublié que certain se permette de torturer leur voisin grâce à leur porte-feuille.
L’accumulation permet en partie de concentrer les fantasmes de certains, en évacuant leur trop plein de libido. Alors peut-être aurait elle été mieux utilisé ailleurs, mais cette énergie libidinale aurait tout aussi bien pu se transformer en horreur plus grande que l’accumulation capitaliste.
@ Yann
alors faut faire des enfants, non ? 🙂
*** la spéculation :
du latin = voir, comtempler, observer.
synonymes
spéculation (n.f.)accaparement, affaire, affaires, affairisme, agio, agiotage, bourse, boursicotage, calcul, change, commerce, conjecture, contemplation, étude, imagination, jeu, méditation, observation, opération, pensée, projet, raisonnement, raréfaction, recherche, réflexion, rêve, rêverie, supputation, théorie, trafic, traficotage, transaction, tripotage.
c’est clair, non ?
@Paul Jorion, @ Loïc Abadie
Bonsoir Paul et tous les intervenants. Cher Aristote, quelle fraîcheur en 2009: Créer un objet pour son utilité objective ou.. pour en disposer et ainsi pouvoir en dispenser son utilité à d’autres moyennant finances (et toute ses déclinaisons, avantage, passe-droit, crédit etc). Je cherche toujours des personnes qui me donnerait des concepts vraiment novateurs, et je n’en trouve pour ainsi dire que chez les anciens, grecs notamment, bref « Rien de nouveau sous le soleil » (ça c’est encore plus vieux, Ancien Testament.. et c’est pas grec).
L’éthymologie des mots crise et économie nous enseigne à quel point nous vivons une évolution fort logique. Si vous regardez bien, il s’agit simplement d’histoire de famille (de père de famille comme indiqué dans les contrats notariaux français pour les baux fermiers et commerciaux) qui évolue; une gestion de bon père de famille c’est quoi, une gestion mesurée, équilibrée, c’est simple non..
La famille occidentale change?: l’économie occidentale de facto d’où transformation, « crisis ».
Le père de famille veut spéculer en mettant en peril sa famille, sa maison, qu’il le fasse puisque c’est un droit d’après M.Abadie. Je ne sais pas ou il a été chercher que c’était un droit de mettre en peril sa famille, mais pour lui, c’est une méthode qui lui permettrait d’assurer l’avenir de son patrimoine, donc, « puisque tous le monde le fait », c’est un argument.
Finalement, le vrai problème, M.Abadie, ce sont les autres, qui ne voient pas les choses comme vous. Mais puisque vous estimez pouvoir donner de l’eau dans le désert en spéculant, servez vous de votre carte de crédit c’est très hydratant.
Non, ce n’est pas une honte de spéculer, c’est une faute stratégique. La gestion de la Maison Monde (économie) a été confié à des spéculateurs parce que l’on a pas eu le courage de faire ce délicat travail nous-même, L’avenir nous diras bientôt si l’on a appris quelque chose de nos lâchetés; nos enfants nous le dirons de toute façon.
@ Antoine
je viens seulement de lire votre commentaire, je suis d’accord avec votre analyse, sauf que le travail des femmes et des esclaves nous obligent à prendre en considération, outre l’aspect production, un autre élément dans l’analyse : la citoyenneté et le pouvoir de commandement qu’il implique.
Dans le raisonnement d’Aristote, du moins tel que reconstitué par ses commentateurs, il y a un point difficilement compréhensible. Pourquoi en effet ce qui est valable pour les pères de famille ne l’est plus lorsqu’il s’agit des marchands ?
Certes le propre du marchand est de se servir de l’argent dans un but d’échange, ce qui est sa fonction même. Mais alors selon quel principe le marchand échapperait-il à l’éthique ? N’y-t-il pas des marchands qui cherchent, eux aussi à faire fortune ? On peut comprendre que le dévoiement soit prévisible chez le marchand, mais alors pourquoi Aristote ne condamne-t-il pas son activité en tant que telle, mais tout au contraire inscrit l’activité du marchand dans l’ordre des choses.
L’hypothèse la plus cohérente avec la philosophie d’Aristote est que le marchand se situe hors de la sphère politique. Le marchand n’est pas le citoyen à part entière qu’est le père de famille, responsable d qui détient et produit une richesse domestique liée à la terre de son domaine, terre à laquelle est d’ailleurs associée une forte connotation religieuse chez les grecs. Ou dit autrement, dans l’ordre cosmo-politique le marchand ne joue, pour Aristote, qu’un rôle périphérique, sa fonction sociale est subalterne car il ne possède ni produit pas physiquement ses moyens de subsistance. L’helleniste Edouard Will précise que l’homme qui exerce une autre occupation que l’occupation agricole, ou qui a perdu le moyen de vivre de son fonds, voire la possession de celui-ci, peut aller jusqu’à perdre tout ou partie de ses droits civiques. Inversement, pour n’avoir point de droits civiques, il peut ne pas avoir droit à une part du sol. (cf E. Will, Le monde grec et l’orient)
Certes, les femmes et les esclaves, produisaient effectivement sans acquérir pour autant un statut, cependant, à la différence des marchands, ils ne possédaient et n’avaient aucun pouvoir de commandement, rôle dévolu au maître de maison.
Est citoyen avant tout celui qui est capable de vivre plus ou moins en autarcie et commande lui-même la production dont il est l’origine en tant que propriétaire. Le marchand n’est pas un décideur car il ne pas commande la production, il n’est donc pas citoyen à part entière.
Il faut préciser aussi que la part du troc était importante chez les marchands dans la cité athénienne. Bref, les marchands n’étaient sans doute pas non plus ceux qui s’enrichissaient le plus. Dépourvus de pouvoir politique il est difficilement concevable qu’ils aient pu devenir riches. Quant aux échanges extérieurs ils dépendaient beaucoup de l’Etat, notamment pour l’importation des matériaux nécessaires à la construction navale, activité stratégique, à cause des guerres.
Bonjour à tous,
pour moi et comme disait mon père : quand tu gagnes un franc, dépense 80 centimes.
s’il doit y avoir une morale en matière d’argent et d’enrichissement, car la morale est nécessaire à la paix et à la civilisation :
– utiliser l’argent pour des choses qui sont nécessaires à la vie en s’inscrivant dans une perspective de laisser la terre à nos enfants et laisser vivres nos voisins sur cette planète, c’est à dire ne pas surconsommer, réfléchir nos achats, privilégier des circuits de distribution qui rémunèrent plus justement les différents acteurs de la chaine. « Quand tu manges une baguette, penses à celui qui a planté le blé, à celui qui l’a récolté, à celui qui l’a transporté, à celui qui a pétri et cuit ta baguette ».
– économiser pour faire un matelas raisonnable pour pouvoir passer les moments difficiles de l’existence et protéger nos proches
– mais se souvenir que nul n’est immortel et que nous allons tous mourir, et donc utiliser l’argent comme support, comme moyen au partage avec nos proches : j’achète l’agneau pour faire le mechoui avec les gens que j’aime.
Qui est le plus heureux, l’homme qui possède un chateau de 200 pièces, 3 ferraris, 2 avions mais qui n’a pas d’amis ou uniquement des amis qui l’aiment pour son argent ou celui qui a peu mais qui a bon coeur, qui aime et qui est aimé ?
En gros, il faut remettre l’humain au coeur de l’approche économique et pas le PIB, le CAC40 et l’argent. C’est cupide et stupide.
Philippe
Il est vrai que les interventions de Loïc Abadie sont fort utiles en ce qu’elles font avancer la réflexion par nécessité (émotionnelle ?) de réaction. Aussi, je vais tenter d’introduire des nuances dans ce débat qui me paraît fort intéressant :
– Aristote n’aimait guère les marchands de son temps et pourtant ils devaient être en grosse majorité des travailleurs qui allaient chercher les marchandises chez le producteur et les vendaient personnellement sur leur échoppes. Ils cherchaient l’accumulation d’argent mais étaient quand même en partie des « prolétaires » qui gagnaient cet argent à la sueur de leur front. Par contre,aujourd’hui, lors de l’achat des biens nécessaires (?) à notre vie quotidienne, combien de marchands de ce type rencontrons-nous ? La caissière du supermarché n’en est pas… Le réassortisseur de la supérette de quartier non plus… Le vendeur de voiture non plus. Parfois, sur un marché, on rencontre un gars qui a été au marché matinal et s’est levé à 3h00 du mat pour vous offrir ses poireaux ou ses pommes. Ce marchand là, j’éprouve beaucoup de sympathie pour lui mais ne crois pas, hélas pour lui, qu’il deviendra un jour riche.
– Les vrais marchands aujourd’hui, ceux qui pratiquent la chrématistique (Wikipédia : chrématistique (de chrèmatistikos, qui concerne la gestion ou la négociation des affaires et plus particulièrement les affaires d’argent; ta chrèmata, les richesses ou deniers) est une notion créée par Aristote pour décrire la pratique visant à l’accumulation de moyens d’acquisition en général, plus particulièrement de celui qui accumule la monnaie pour elle même et non en vue d’une fin autre que son plaisir personnel. Aristote condamne cette attitude. ») nous ne les voyons plus jamais. Ils sont dans leurs bureaux, devant leur PC et jouent en bourse.
Désolé Loïc, les frontières ne sont pas aussi floues que vous voudriez nous le faire croire : les consommateurs qui doivent acquérir des sandales pour marcher, des artichauts pour manger ou une maison pour s’abriter ne spéculent pas quand ils essaient de faire une « bonne affaire ». Les marchands qui vendent au meilleur prix leurs cageots ou leurs boîtes à chaussures ne sont pas des spéculateurs. Ne le sont que ceux qui acquièrent des biens (ou de l’argent ou… des hommes) non pas parce qu’ils en ont besoin pour lancer leur entreprise ou cueillir les pommes de leur verger (toutes mûres le même jour et qu’ils ne peuvent cueillir seul) mais simplement pour faire encore et toujours plus d’argent, concentré de pouvoir et dé réassurance. Je vous fait ce crédit -clin d’œil-)Loïc, vous me semblez faire partie de ces accumulateurs d’argent motivés surtout par la peur du lendemain. Mais vous rendez-vous compte qu’on a d’autant plus peur que l’on vit dans une société sans solidarités (familiales, de voisinage, de village, de sécurité sociale), solidarités que vous contribuez à détruire par votre vision d’une société du « Chacun pour soi- je ne fais que me défendre – la menace s’amplifie »).
J’ai peur de ne pas vous convaincre mais pour en revenir à nos godillots, mis en exemple par notre philosophe d’il y a 2.300 ans, relisons voulez-vous un auteur d’il y a moins de 4 siècles, Jean de la Fontaine et sa fable du « Savetier et du Financier ».
Pierre-Yves D. : excellente analyse à mon avis. Le rapport « possession du sol-citoyenneté » était encore valide au Moyen-Age (la vente et achat de terres était d’ailleurs sévèrement réglementée).
On en revient toujours au même, comment celui qui ne peut pas subsister de manière autonome (c’est-à-dire les salariés, marchands, etc) peut-il être libre et donc un citoyen?
Une petite rectification : dans le paragraphe où je parles des femmes et des esclaves, je n’oppose pas femmes, esclaves et marchands, il fallait donc lire :
Certes, les femmes et les esclaves, produisaient effectivement sans acquérir pour autant un statut, cependant, comme les marchands, ils ne possédaient et n’avaient aucun pouvoir de commandement, rôle qui était dévolu au maître de maison.
Ce qui risque de mal tourner, le point de vue d’un doux rêveur*.
Notre système économico-financier est en crise. Chacun y va de ses propositions. Certaines sont plus réfléchies que d’autres et ont davantage de chances d’être efficaces. Mais j’ai le sentiment qu’à ainsi chercher des solutions pour améliorer notre système nous répétons les mêmes mécanismes qui ont été utilisés pour les religions par exemple. A savoir du rafistolage pour garder le maximum d’emprise sur le maximum de personnes. Je n’entends pas par là que la religion ou l’économie sont mauvaises pour l’homme, mais qu’elles ont refusé d’admettre le désintérêt croissant qui se manifestait à leur égard dans la population. Avec les risques que cela comporte, et qu’on a pu observer, tant pour la religion que pour l’économie. La religion est restée une motivation importante pour beaucoup de gens, et il peut en être de même pour l’économie, sans pour autant qu’elles ne demeurent au centre de la vie de chacun, qu’elles ne soient le sens de la vie de chacun. Chacun est libre de trouver le sens qu’il veut donner à sa vie ne manquera-t-on pas de répondre. Certes, mais malheureusement, le poids de l’économie est tellement important dans nos sociétés, nous sommes tellement immergés dans ce système de consommation, que s’en extraire tient de l’exploit, et vivre en marge au quotidien est un véritable chemin de croix. Comme cela a été le cas pour la religion. Alors, je me dis que nous risquons de rater là une chance de nous extraire collectivement de cette « nouvelle religion » qui pourtant montre de plus en plus ses limites de par le monde, chez nous comme dans les pays –non pour le moment occidentalisés-.
Alors oui au « Permettons à ceux-ci [les « non-commerciaux »] de focaliser à nouveau leur attention sur ce que la société attend d’eux : enseigner, guérir et favoriser l’accès du public aux œuvres d’art en vue de diffuser la culture. », oui aux inventeurs…la porte est grande ouverte aux hommes de bonne volonté qui souhaitent remettre l’homme au centre de la vie.
Par exemple.
@ Fab
Je suis bien d’accord. Le travail occuppe une place trop importante. Comme l’avait pressenti Aristote, norez société et rongée par la démesure : le désir de possession est sans limites, ce qui nous pousse à nous soumettre aux choses au détriment d’activités plus nobles
@JJJ
11 mars 2009 à 09:15
Et pourtant on parle de « masses monétaires » (y compris pour la monnaie fiduciaire) … et non de « masses argentières » 😉
Bon, une question qui n’a rien à voir mais votre avis m’intéresse
« Faut-il arriver à l’heure au travail? »
Merci d’avance
Faut-il arriver à l’heure au travail ?
si on y est obligé, il vaut mieux.
Merci pour la présentation des vidéos.
Le héron de La Fontaine illustrerait Aristote ? :
http://www.la-fontaine-ch-thierry.net/heron.htm
C’est le désir d’accumulation de richesses qu’il faut viser.
En effet, quand la concentration des richesses et la montée des inégalités provoquent des écarts de revenus hors de proportion et de toute justification, c’est l’attachement à la justice qui impose de le refuser. C’est la simple bonne foi de reconnaître cette injustice. Ni le mérite,ni la récompense de la responsabilité ne pourront jamais justifier des écarts de revenu de un à plusieurs dizaines ou centaines. Ce n’est même pas l’économie (même si l’on acceptait tous le capitalisme) qui peut être invoquée quand un petit nombre possède des richesses qui ne pourront jamais être toutes dépensées et qui ne sont de fait jamais toutes investies. Le désir d’accumulation se traduit aussi par la spéculation. Sous la forme du marché noir,qui se développe dans des situations de crises extrêmes ou de guerre, l’enrichissement fait oublier la souffrance et la simple survie des autres. Sous la forme de l’immobilier, en cas de tension sur le marché, la spéculation impose aux non propriétaires des tarifs locatifs ou d’achats aberrants et le désir de richesses fait perdre au propriétaires le simple sens de la mesure et avec lui de la justice et de l’intérêt général, de l’intérêt commun. Sous la forme de l’actionnariat, il pousse les actionnaires à privilégier la valeur de leurs titres au détriment de l’emploi et des salaires, il provoque des crises spéculatives et financières qui déstabilisent régulièrement toute la société. C’est alors l’intérêt général le plus élémentaire qui est bafoué. Opposée à la volonté d’accumulation, entendons la frugalité (car c’est de cela qu’il s’agit) non comme le fait de se contenter de peu, mais le refus de vouloir trop, si cela nuit trop aux autres.
Pourquoi travailler si ont peut spéculer ? ou faut’il travailler a spéculer….
Spéculation et stade du miroir…
Le monde est à chaque fois une figuration de soi-même, et chacun se fait le centre de la bulle de son soi, ce qui est son souci premier. Alors la spéculation est l’histoire du spectre qui nous observe dans le miroir et qui nous appelle à lui : « Tu as peut-être fait ton temps, il faut maintenant te retrancher ». Ainsi l’angoisse apparaît en même temps que la conscience sort de sa tête pour aller plonger là-bas de l’autre côté dans cette autre tête, reflet dans lequel elle risque de se perdre, se retrouvant dès lors enfermée dans cela que parfois aussi, à l’occasion du rasage, elle observe comme flottant coupé au-dessus d’un corps de poulet déplumé.
De Abidjan le Jeu Mar 05, 2009 6:15 pm
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Platon qui fait de la division du travail la base de la séparation sociale des classes, est la dessus d’accord avec Xénophon, qui avec son instinct bourgeois caractéristique touche déjà de plus près la division du travail dans l’atelier.
La république de Platon , en tant du moins que la division du travail y figure comme principe consécutif de l’Etat, n’est pas une
qu’une idéalisation Athénienne du régime des castes égyptiennes. L’Egypte , d’ailleurs passait pour le pays industriel modèle au yeux d’un grand nombre de ses contemporains, d’Isocrate, par exemple , et elle resta telle pour les Grecs de l’empire Romain .
Marx » Le capital-
Aux Usa vers 1725 la monnaie en dépréciation suite à ( des manipulations illicites de métaux qui composaient les pièces de monnaie ) en Virginie, le troc remplaça la monnaie, par du Tabac…. mais après cela ce fut les l’étalon tabac qui perdu sa valeur, car certains pratiquaient des mélanges de tabac….. de différentes qualités……..