L’idée à l’origine de « Pour une initiative citoyenne dans le domaine financier »

Je trouve particulièrement affligeant que le fait que Corinne Lepage se soit impliquée dans le passé dans le projet du crédit social, en s’étant associée à La Nef, soit invoqué par certains commentateurs comme une raison pour disqualifier par avance toute initiative citoyenne qu’elle pourrait proposer dans le domaine financier, sous prétexte d’un conflit d’intérêt. De telles accusations témoignent à mon sens, du degré de ressentiment et de nihilisme que nous avons atteints dans le contexte actuel du mensonge et de la dissimulation triomphants – et fiers de l’être. Chacun se transforme de nos jours et à sa manière en un Céline fielleux et vociférant. Ce n’est pas un progrès, et ce n’est pas la manière surtout dont nous nous en sortirons.

Oui, le « billet invité » Pour une initiative citoyenne dans le domaine financier est né à la suite d’une conversation que nous avons eue, Corinne et moi, samedi matin. Nous n’avons pas même mentionné La Nef dans cette discussion et je ne divulgue pas un grand secret si je dis que nous parlions de ce que cela impliquerait de rebâtir à partir de rien une « finance citoyenne ». Je ne vous apprendrai rien si je vous dis qu’il s’agirait de revenir aux sources, de revenir à la banque consacrée à la seule fonction d’intermédiation, à l’exclusion de toute spéculation, de tous paris sur les fluctuations de prix.

Il s’agit d’un projet et La Nef n’en fait pas nécessairement partie, ni n’en est d’ailleurs nécessairement exclue. Il se fait que jeudi soir, je débattais, en compagnie de Patrick Viveret et de Charles-Henri Filippi, dans le cadre d’une discussion organisée par le Centre des jeunes, des dirigeants, des acteurs de l’économie sociale et que lors du dîner amical qui suivit le réunion, nous cogitions sur l’avenir du secteur de l’économie sociale, qui n’a pas particulièrement bénéficié du mouvement de rejet qu’a suscitée la crise, le dégoût débouchant sur l’apathie plutôt que sur l’initiative. Or le moment est venu de prendre les choses en main : les politiques préfèrent le connu à l’inconnu et se révèlent incapables de nous proposer quoi que ce soit de neuf. Le Père Noël nous abandonne mais nous ne sommes pas seuls : quatre mille d’entre vous liront ceci d’ici demain à la même heure. Il y a différentes façons de le dire : « Aide-toi et le ciel t’aidera » en est une, « Compter sur ses propres forces » en est une autre. Le message est le même : « Au boulot ! »

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67 réponses à “L’idée à l’origine de « Pour une initiative citoyenne dans le domaine financier »”

  1. Avatar de jeanpaulmichel
    jeanpaulmichel

    Ne nous quittez pas Paul et François.
    Tout comme Kay et d’autre lecteurs de  »l’ombre » je pense que la disparition de votre blog serait catastrophique car vos apportez une vision, une opinion que l’on ne retrouve pas ailleurs. Je n’ai pas trouvé de blog comparable en  »francophonie ». Comme je vous l’avais dit il y a quelques temps où vous aviez émis la même idée, je considère votre blog comme ayant une véritable mission de service public.
    Mais attention, l’approche des élections, l’aggravation de la crise feront que les esprits libres ou informés comme vous deviendront génants. Nombreux sont, seront ceux qui auront intérêt à vous réduire au silence. Vous écoeurer est la meilleure solution. Ne tombez pas dans le piège.
    Cordialement

  2. Avatar de Bénédicte Kibler
    Bénédicte Kibler

    Bonjour Monsieur Jorion,
    Je suis partante pour vous aider dans cette initiative.
    J’ai beaucoup d’estime pour Corinne Lepage et pour vous.
    J’ai confiance.
    donc je suis prête à vous aider, à vous apporter mes compétences
    – de rédactrice Web (communication adaptée au Web)
    ou bien tout simplement pour aider de quelque manière que ce soit!

    A bientôt
    Bénédicte

  3. Avatar de Paul Jorion

    Une proposition de Corinne Lepage :

    Sur Mediapart : « Allons donc sur le blog de Paul Jorion soutenir cette initiative, les aider à créer un mouvement pour agir, au lieu de nous faire tondre… »

    1. Avatar de Verywell
      Verywell

      Il est temps de retirer ses petites billes ; les gens de peu dont je suis affirmeront ainsi leur modeste pouvoir. Mais 1+1+1… le rapport de forces peut s’en trouver plus ou moins modifié. La révolte doit avoir un point de départ. Pour que les banquiers ne se croient plus tout permis et cessent de se gaver. Pour que les politiques entendent enfin ceux qu’ils sont censés défendre. Pour une société plus juste.
      Une question pratique cependant : comment touche-t-on le RSA sans compte bancaire?;-)

      PS : j’espère que l’irruption aimable de Corinne Lepage sur ce blog ne sera pas qu’un happening.

  4. Avatar de fujisan

    @ Politique @ 18 janvier 2010 à 10:01
    Qu’appelez-vous « entrer en politique » ?
    S’incrire à un parti, se présenter aux élections ? Ça le regarde, mais vouloir faire bouger une armoire de l’intérieur est chose presque impossible !
    Ceci dit, ce blog est politique au meilleur sens du terme. Il ose aborder les sujets de fond, nous ouvrir les yeux, porter un autre regard… A nous tous, citoyens, d’oser nous mêler de ce qui nous regarde et de faire bouger l’armoire de l’extérieur !

    Peut-on sortir de la folle concurrence ?
    Petit manifeste à l’intention de ceux qui en ont assez

    Ingmar Granstedt, La Ligne d’Horizon.

    Sommaire:
    1. Une compétition brutale et sans fin
    a. Le grand piège
    b. Le vide politique
    c. Le libéralisme, poison pour la démocratie
    d. Un progrès technique et sauvage

    2. Pour en sortir
    a. Oser penser et résister
    b. Remailler un territoire
    c. Changer d’échelle
    d. Du consommateur irresponsable au citoyen
    e. Des services publics hors violence
    f. Que faire du pouvoir politique ?

    3. Epilogue

    QUE FAIRE DU POUVOIR POLITIQUE?

    Pour sortir de la compétition sans fin, il faudra chercher avec courage dans les cinq directions qui viennent d’être proposées, et peut-être aussi dans d’autres. Oser se poser des questions nouvelles pour renouveler le regard, perdre des habitudes de pensée bien ancrées et commencer à percevoir autrement la réalité vécue. Oser aussi concevoir et entreprendre les actions concrètes pour y répondre. C’est là une exploration que seuls peuvent mener les acteurs de la société civile, là où ils travaillent, là où ils vivent, que ce soit en France, dans d’autres pays de l’Union européenne ou dans d’autres continents. Tout dépend d’eux. Autrement dit, tout dépend de nous, hommes et femmes de tous âges et de catégories socio-professionnelles différentes, mais tous durement soumis à la même loi brutale qui nous oblige à nous concurrencer de plus en plus férocement les uns les autres, à tuer pour ne pas être tués.

    Mais comment faire de ces initiatives de la société civile une politiqueapplicable par les Etats? Comment faire pour que les mouvements enclenchés par les multiples acteurs de la société civile ici et là de par le monde se traduisent en programmes politiques à appliquer au niveau des Etats? Car il faudra bien lever un jour d’énormes contraintes législatives et institutionnelles, celles qui ont été mises en place pour promouvoir et installer dans l’humanité une économie de guerre civile. Il faudra bien qu’un jour les multiples efforts disséminés au sein de la population puissent se conjuguer et recevoir aussi une expression politique. Il faudra bien porter un jour au pouvoir des projets pour une autre législation et une autre réglementation, favorables à un monde libéré de la compétition universelle obligatoire.

    Mais il n’y aura pas de miracle. Cette expression politique ne naîtra que lorsqu’un vaste mouvement dans la société civile aura déjà pris forme et manifesté sa force, tant par ses convictions que par ses pratiques dissidentes. L’expression politique, avec ses porte-parole, ses partis, ses programmes, ses candidats, naîtra des exigences nouvelles posées par le mouvement traversant la société – ou plusieurs sociétés en même temps – et non pas l’inverse. L’initiative de la libération appartient à la société civile, elle nousappartient, elle appartient à chacun d’entre nous, tel qu’il est et là où il se trouve. Et la découverte de la joie qui vient en prenant sur soi de commencer ici et maintenant, elle nous appartient aussi.

    Il serait infantile de compter encore sur les gouvernements pour commencer cette grande remise en cause. Ni les hommes au pouvoir et leurs partis, ni ceux qui dans l’opposition y prétendent, ne peuvent l’initier, la lancer et la développer.

  5. Avatar de JLM

    « …les politiques préfèrent le connu à l’inconnu et se révèlent incapables de nous proposer quoi que ce soit de neuf… »

    C’est très curieux… voici que partout en Europe, les cadres de l’économie sociale s’interrogent sur le déficit démocratique de leurs institutions, avec de plus, ce style managérial qui les à si bien servi dans leur dialogue avec les Ministères autant que dans la récolte des subsides européens. Il est bien temps de s’interroger ! Cela fait trente ans que ces gestionnaires éthiques captent les chômeurs et les exclus dans une galaxie de rouages engrenant l’aide sociale à l’éducation permanente, en passant par les ramifications de l’action mutuelliste et syndicale (j’en passe). Cette question du déficit démocratique serait-elle une opération de vaccine, à l’exemple de l’écrêtement cosmétique des bonus chez les traders ?

    Alors que l’économie sociale réclame sa reconnaissance comme secteur numériquement significatif, comment expliquer qu’en trente ans d’action intensive, ces « acteurs » n’aient aucunement réussi à accroitre, ne fut-ce que d’un peu, la qualification sociale de leur clientèle. Pourquoi ne pas les avoir ouverts à la compréhension des mécanismes de leur exclusion, et pourquoi n’ont-ils pu accéder aux outils qui leur auraient permis d’agir par eux-mêmes et collectivement sur les causes du sort qui leur est construit ?

    Si l’intention eut été l’émancipation et la prise en main de leur destin par les exclus – et non leur simple clientélisation – croyons-nous que ces comédiens de l’action sociale puissent participer à la mise en scène de pôles emplois bouffons ? C’est qu’on en dépensé des sous dans les formations de reconversion des bassins houillers et sidérurgiques ! Certes, le tri manuel des ordures s’effectue aujourd’hui sur tapis roulant, et le tout sera gratiné d’emplois de « serviteurs » à la personne. Le stalinisme avait produit une classe bureaucratique sans vergogne, nos social-démocraties ont depuis trente ans forgé une classe de bureaucrates de l’économie sociale, dont l’immense pouvoir s’est construit d’un double langage en jetant comme Kleenex des générations de travailleurs précaires : c’est notre « ferme aux animaux ».

    La crise sociale submerge la crise économique, devons-nous faire confiance aux « diafoirus » qui nous filent la peste depuis des lustres et prétendent la guérir aujourd’hui ?

  6. Avatar de lepage
    lepage

    je vous rassure. ma présence sur ce blog n’est pas qu’un happening, un moment ephémère. je poursuis une conversation avec Paul depuis de longs mois et l’apprécie. il le sait. je comprends la hargne que certains ont à l’égard des politiques. mais si nous ne cherchons pas un vrai dialogue entre les citoyens et les politiques , comment faire? je n’imaginais pas en faisant cette propsoition un tel dérapage alors que la déontologie et l’éthique sont une composante de ma vie. oui, je suis restée avocate mais j’ai fait lec hoix de défendre plutôt les victimes que les pollueurs ,ce qui ne cadre pas avec l’image d ‘un avocat d ‘affaires quec ertains veulent me mettre sur le dos.
    mais l’essentiel n’est pas là. il est évidemment sur le sujet de fond. celui-ci me parait d’autant plus devoir être débattu que des entreprises européennes petites et moyennes semblent avoir lancé un projet de cette nature pour maîtriser leur accès au crédit . je serai donc heureuse de poursuivre avecceux qui le souhaitent le débat sur le fond

    1. Avatar de fujisan

      « des entreprises européennes petites et moyennes semblent avoir lancé un projet de cette nature pour maîtriser leur accès au crédit »

      Une initiative de Bernard Lietaer ?

      Comment les entreprises peuvent se préserver elles-mêmes
      des conséquences de la crise bancaire

      Quoi que fassent les gouvernements pour sauver les banques, les crédits vont être de plus
      en plus difficiles à obtenir dans les années à venir. L’aspect le plus délicat de cette situation est la
      nature simultanée et globale de la crise bancaire. La plupart des économies dans le monde va
      entrer en récession simultanément, ce qui va automatiquement à nouveau dégrader les bilans
      financiers des banques. Ce qui, ensuite, les incitera à réduire encore plus les crédits, et ainsi de
      suite, dans une spirale vers une récession, ou même vers une dépression qui pourrait durer une
      décennie. Soyez prêts pour une dégringolade sérieuse d’une durée inconfortablement longue !

      Ce que tout cela signifie, en pratique, c’est que nous sommes entrés dans la période sans
      précédent telle que décrite dans mon livre de 2001 « The Future of Money »1 où quatre grandes
      tendances planétaires convergent : instabilité financière, changement de climat, chômage et les
      conséquences économiques d’une société vieillissante.

      Il existe pourtant un précédent très réussi comment empêcher les conséquences néfastes
      d’une crise bancaire, même s’il est très peu connu, qui montre ce que les entreprises peuvent et
      devraient faire dans un tel environnement. En 1934, seize hommes d’affaires se sont réunis à
      Zurich pour créer un système de crédit mutuel entre eux, avec une monnaie appelée WIR ayant
      une valeur équivalente à celle du franc suisse. Au lieu d’emprunter de l’argent aux banques pour
      se payer les uns les autres, les entreprises se distribuent des crédits directement aux uns et aux
      autres dans cette monnaie de « Business to Business » (B2B). Ces crédits sont utilisés pour
      acheter à d’autres entreprises parties prenantes du système, ou pour payer, au moins partiellement,
      les salariés. Ce système est encore opérationnel aujourd’hui : le volume d’affaires en WIR l’an
      dernier était d’environ 2 milliards de dollars par an avec environ 75.000 membres, c’est-à-dire un
      quart des entreprises suisses. Une étude quantitative remarquable montre que ce système est en
      fait le secret de la stabilité légendaire de l’économie suisse. L’utilisation du WIR s’étend
      automatiquement quand il y a une récession en Suisse, puis diminue à nouveau quand la Suisse
      est dans une phase de boom économique. Plus d’information sur le statut actuel du WIR est
      disponible sur internet.

      Nous proposons que les entreprises prennent l’initiative de créer un système B2B,
      analogue au WIR, à l’échelle qui leur semble appropriée. Le gros avantage par rapport à ce
      qui s’est passé en Suisse en 1934, est la disponibilité de technologies informatiques efficaces et
      peu coûteuses, qui permettront de mettre en œuvre cette approche bien plus rapidement que dans
      les années 30.

    2. Avatar de écodouble
      écodouble

      Merci Madame.
      Vous faites partie des 5 % de politiques qu’il faut à tout prix garder.

  7. Avatar de fujisan

    Kiran Bir Sethi teaches kids to take charge – TED (en Anglais)

    Kiran Bir Sethi enseigne aux enfants à devenir responsable.

    Kiran Bir Sethi montre comment son école innovante Riverside School en Inde enseigne aux enfants la leçon la plus précieuse de la vie: « je peux. » Regardez ses élèves prendre les questions locales dans leurs propres mains, mobilier d’autres jeunes, même éduquer leurs parents.

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