Billet invité.
Fidèle à sa vision du monde résumée par le slogan « America First ! », Donald Trump n’a fait que prendre son élan avec le démantèlement d’Obamacare et la construction d’un mur avec le Mexique, ses premières mesures emblématiques. Pour la suite, il voit grand.
Le président américain prétend rapatrier les chaînes d’approvisionnement de l’industrie américaine et taxer les importations de certains pays pour l’exemple, au prétexte qu’ils dévaluent leur monnaie pour favoriser leurs exportations. Le recentrage bat son plein devant des dirigeants européens sur la défensive, démunis devant la mise en cause de principes qui leur semblaient naïvement gravés dans le marbre, sur le même mode qu’ils ont utilisé pour figer leurs règles budgétaires.
N’hésitant pas à attaquer les « règles biaisées » de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), Donald Trump a balayé d’un geste les accords multilatéraux régionaux longuement négociés sous l’égide de son prédécesseur pour favoriser dans l’avenir des accords bilatéraux plus à l’avantage des États-Unis. Une simple question de rapport de force. La suppression de mesures fiscales permettant aux entreprises américaines de diminuer leur taxation grâce à la prise en compte du coût de leurs importations est annoncée. Un projet de taxe aux frontières pour les produits importés est aussi envisagé par le Congrès républicain, qui se sent pousser des ailes, mais il suscite une levée de boucliers de la part du secteur de la production et de la distribution des biens de consommation courante, augmentant selon les lobbies de 20% le coût de ces produits.
Peter Navarro, qui a été placé à la tête d’un nouvel organisme intitulé Conseil national sur les affaires commerciales de la Maison Blanche est à la manœuvre. Comme il est de tradition, Donald Trump a fait référence pour la condamner à la politique japonaise et chinoise de dévaluation de leur monnaie pour favoriser leurs exportations. Mais il a confié à son collaborateur la mission principale d’attaquer bille en tête une nouvelle cible, l’Allemagne. Sans doute parce qu’il considère que des résultats sont plus à portée. Il cherche à accélérer le démantèlement de la monnaie unique en applaudissant le Brexit et en privilégiant des accords avec le Royaume Uni et, si cela se confirme, en incitant le FMI à jouer la sortie de la Grèce de l’euro.
Peter Navarro a déclaré que l’euro, volontairement sous-évalué, « était un Deutsche mark implicite » ce qui en fait un ennemi à abattre. Faut-il s’attendre comme prochaine étape à une accusation officielle de « manipulation de la monnaie » par l’Allemagne, qui serait lourde d’implications ? L’homme de Donald Trump a sans attendre planté d’autres clous, qualifiant « d’obsolètes » l’OTAN et l’Union européenne de « bureaucratique », en s’attaquant à deux piliers de la politique allemande.
Les grands bouleversements ne vont pas s’arrêter là. Patrick McHenry, le vice-président du Comité des services financiers de la Chambre des représentants, a adressé une lettre à Janet Yellen, la présidente de la Fed. Il y met en cause la participation de cette dernière au Comité de Bâle, au Comité de stabilité financière et à l’émetteur de la réglementation des compagnies d’assurance. Selon lui, ces trois institutions désavantagent les États-Unis dans de nombreux domaines : exigences en matière de capitaux, assurances, produits dérivés, risque systémique, et gestion d’actifs. Autant dire en tout !
Ce n’est pas seulement l’arrêt de toute collaboration internationale qui est sonné, c’est aussi l’annonce que les États-Unis feront dorénavant cavalier seul en matière de règlementation financière, signal d’un autre démantèlement. Au nom de la suppression de l’énorme fardeau réglementaire qu’ils représentent (sic), deux nouveaux décrets sont signés ce vendredi par Donald Trump, demandant au Trésor de réformer la loi Dodd-Frank et la « règle Volcker », ce qui nécessitera un accord du Congrès qui ne posera pas de problème. Huit ans de réformes vont être pour l’essentiel anéantis, ouvrant plus que jamais la voie au grand n’importe quoi. Comme si cela ne suffisait pas, Donald Trump va prendre le pouvoir sur la Fed au nom de la prééminence du politique, ce qu’annonce le courrier de Patrick McHenry.
Le mythe de l’indépendance des banques centrales a vécu, à qui le tour ? Le gouvernement allemand met de moins en moins les formes pour signifier à la BCE quelle devrait être sa politique…
Et si l’on soumettait (sans donner le jugement) tout le dossier écrit plainte et réponse à une IA en lui…