LE MONDE CUL PAR DESSUS TÊTE, par François Leclerc

Billet invité.

Le monde est cul par dessus tête ! A la veille d’une intense activité de rencontres internationales, Angela Merkel et Xi Jinping ont hier jeudi convenu par téléphone de « promouvoir le libre-échange », alors que l’on apprend que l’administration américaine se refuse à mentionner le rejet du protectionnisme dans le communiqué du G20 finances de Baden-Baden de cette fin de semaine. Une tradition d’une vingtaine d’années fout le camp, avec laquelle il est incertain que le sommet de juillet du G20 de Hambourg puisse renouer ! Pierre Moscovici réclame « une affirmation positive en faveur du libre-échange pour marquer que c’est bien là le cadre dans lequel doit s’organiser la vie économique de la planète » à cette occasion, on verra bien !

Suite à sa rencontre avec Wolfgang Schäuble, le nouveau secrétaire au Trésor américain Steven Mnuchin, a bien affirmé hier ne pas vouloir une guerre des monnaies, mais il hérite d’une guerre des mots ! Les sherpas du G20 finances ne sont pas parvenus à trouver une formule permettant d’inscrire le principe jusqu’à présent immuable du libre échange dans le communiqué final, ce que Michel Sapin à considéré être un moindre mal. Moins fataliste, Mario Draghi s’est inquiété de voir disparaître « un pilier de la stabilité qui a accompagné la croissance mondiale ces vingt dernières années ».

Les ministres naviguent dans un épais brouillard, à la recherche de repères sur la politique qui va être menée par les États-Unis sur des sujets aussi essentiels que le commerce international, la guerre des monnaies ou bien encore les questions fiscales. Ils s’interrogent propos des marges de manoeuvre dont Steven Mnuchin et l’administration américaine disposent, alors que Donald Trump affronte la réalité géopolitique et diplomatique. 

Une rencontre entre le président américain et Angela Merkel aura aujourd’hui lieu à Washington, alors que règne en Allemagne un mélange de perplexité et d’incertitude à propos des intentions d’un président dont la pensée politique semble se limiter à des messages à l’emporte pièce sur twitter destinés à ses électeurs. Les coupes claires budgétaires qu’il propose tous azimuts, exception faite du secteur de la défense dont les crédits devraient bondir, signent plus que toute chose sa politique. L’Allemagne, qui préside le sommet de Hambourg, avait l’intention de faire du climat son sujet central, mais cela semble mal parti. Les États-Unis refuseraient de mentionner l’accord de Paris de 2015 dans son communiqué final. Quelle importance Donald Trump accorde-t-il d’ailleurs au G20, qui se présente en champion des relations bilatérales ?

Rex Tillerson, le secrétaire d’État qui n’accorde pas d’interview et ne donne pas de conférence de presse, s’est vu confier la mission de préparer la rencontre d’avril de Xi Jinping et de Donald Trump en Floride, la Chine s’étant entendue traitée de « plus grand voleur de l’histoire » au cours de la campagne électorale. Un compromis à propos des échanges commerciaux va être délicat à négocier, une guerre reposant sur des taxes à l’importation des biens chinois aux États-Unis menaçant de succéder à la guerre des monnaies. La menace de ventes massives des réserves chinoises en dollars pouvant lui répondre, le tout dans un contexte de retour de la guerre froide et d’intervention militaire en Corée du Nord.

En réalité, la hausse du dollar est la principale cause de l’érosion du yuan, qui ne cesse de chuter face à lui malgré les efforts de la Banque centrale (PBoC) qui puise dans ses réserves de change pour l’enrayer. Il ne faut pas y voir le résultat d’un calcul destiné à favoriser les exportations, mais la conséquence de fuites massives de capitaux par centaines de milliards de dollars annuels devant leur érosion par rapport au dollar, que les autorités chinoises tentent d’endiguer en réglementant les sorties des capitaux.

Dans ce vaste remue-ménage planétaire, que pèse le sort de la Grèce, dont le gouvernement tente toujours de faire croire que ses négociations avancent ? Les pressions américaines sur le FMI ne sont pas étrangères au durcissement de la position de celui-ci. Jusqu’à maintenant, la Grèce était prise en tenailles entre ses créditeurs, les États-Unis sont désormais aussi de la partie, faisant de la Grèce une carte dans leur jeu.

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