Retranscription de Trump et les murailles de Jéricho, le 18 janvier 2020. Ouvert aux commentaires.
Bonjour, nous sommes le samedi 18 janvier 2020 et ma première tentation de titre pour cette vidéo, ça a été : Oh Boy ! » et je me suis dis que ça ne serait peut-être pas assez explicite de ce que j’entends dire alors j’ai cherché un autre titre et j’en ai trouvé un. Ce sera beaucoup plus clair, vous allez voir : « Les murailles de Jéricho ».
Alors, ce n’est pas dans mes habitudes de commencer une de mes vidéos en lisant un long poème. Ce n’est pas en hommage à la poésie, vous allez voir. J’espère ne pas trop bafouiller mais, rassurez-vous, si je bafouille trop, je recommencerai ma vidéo et ce que vous verrez sera sans doute assez présentable. Voilà, alors, je lis un poème. Il est assez long en fait, vous allez voir :
Sonnez, sonnez toujours, clairons de la pensée
Quand Josué rêveur, la tête aux cieux dressée,
Suivi des siens, marchait, et, prophète irrité,
Sonnait de la trompette autour de la cité,
Au premier tour qu’il fit, le roi se mit à rire ;
Au second tour, riant toujours, il lui fit dire :
« Crois-tu donc renverser ma ville avec du vent ? »
A la troisième fois l’arche allait en avant,
Puis les trompettes, puis toute l’armée en marche,
Et les petits enfants venaient cracher sur l’arche,
Et, soufflant dans leur trompe, imitaient le clairon ;
Au quatrième tour, bravant les fils d’Aaron,
Entre les vieux créneaux tout brunis par la rouille,
Les femmes s’asseyaient en filant leur quenouille,
Et se moquaient, jetant des pierres aux Hébreux ;
A la cinquième fois, sur ces murs ténébreux,
Aveugles et boiteux vinrent, et leurs huées
Raillaient le noir clairon sonnant sous les nuées
A la sixième fois, sur sa tour de granit
Si haute qu’au sommet l’aigle faisait son nid,
Si dure que l’éclair l’eût en vain foudroyée,
Le roi revint, riant à gorge déployée,
Et cria : « Ces Hébreux sont bons musiciens ! »
Autour du roi joyeux riaient tous les anciens
Qui le soir sont assis au temple, et délibèrent.
A la septième fois, les murailles tombèrent.
19 mars 1853, Jersey, Victor Hugo est en exil. Ceci, c’est Les châtiments, au livre 7ème.
Alors, de quoi est-ce que ça parle ? Ça parle du roi qui rit et puis qui cesse de rire quand les murs s’écroulent.
Le roi a cessé de rire, on l’a vu hier, quand il a choisi des gens pour renforcer son équipe d’avocats. Jusqu’ici, M. Trump, vous le savez, avait ignoré entièrement cette procédure d’impeachment. Il n’avait pas pris ça au sérieux. Il disait que c’était une blague, c’était un hoax, c’est-à-dire un « canard », un canular. Hier, il a nommé MM. Dershowitz et Kenneth Starr. M. Kenneth Starr, c’est le procureur qui avait dirigé l’enquête et, ensuite, l’impeachment de M. Bill Clinton. C’est un monsieur qui, à l’époque, avait insisté beaucoup sur la nécessité d’avoir des témoins. Il avait fait venir tous les anciens petits amis de Mme Monica Lewinsky. Il avait fait même venir comme témoin un nettoyeur de vitres de la Maison-Blanche. Donc, c’est quelqu’un qui est très en faveur d’avoir de très nombreux témoins dans un procès de type impeachment. Maintenant, il va devoir défendre M. Trump qui, dans le 2ème chef d’accusation, est accusé d’obstruction, d’avoir empêché tout témoignage des gens dont il pouvait interdire la présence dans la commission d’enquête dirigée à la Chambre du Congrès, à l’Assemblée Nationale, jusqu’ici.
La deuxième personne, c’est M. Dershowitz. M. Dershowitz est un avocat extrêmement connu. Il a défendu, entre autres, M. Von Bulow. Une affaire bien connue qui a donné lieu à des films. Ça vous dit sûrement quelque chose. Et M. O. J. Simpson.
Il a défendu des personnes extrêmement controversées dans des procès. Maintenant, il a M. Trump. Ce M. Dershowitz est quand même assez plombé dans la mesure où il a été un ami intime de M. Jeffrey Epstein. Ça vous dit peut-être quelque chose, ce monsieur qui s’est suicidé en prison récemment alors qu’il commençait à être accusé… Il avait déjà été accusé précédemment mais il avait une avalanche contre lui d’accusations, d’avoir exploité de très jeunes filles pour, en fait, de la prostitution.
M. Kenneth Starr est lui-même aussi plombé par quelque chose du même ordre. Il a été le doyen d’un collège américain et il a dû démissionner en 2016 pour n’avoir pas pris au sérieux une affaire de scandale sexuel.
Alors, M. Trump a changé de stratégie en nommant ces deux personnes, et en particulier M. Kenneth Starr dont il avait dit très publiquement à l’époque de l’enquête sur M. Clinton que c’était un « lunatic », que c’était un fou furieux. Bien entendu, à cette époque-là, M. Trump était dans l’autre camp : il était dans le camp Démocrate. Il a changé depuis.
Qu’est-ce qu’il essaye de faire ? Il essaye de… L’interprétation générale, c’est qu’il essaye maintenant de faire… Il a compris qu’il fallait faire quelque chose parce qu’il n’est pas en position à ce point sûre, qu’il faut qu’il en fasse un show, qu’il en fasse de la téléréalité vis-à-vis de sa base et c’est pour ça qu’il nomme dans son équipe des gens qui sont des gens connus déjà du public.
Comme le disait un commentateur que j’ai regardé tout à l’heure, la tactique de Trump jusqu’ici, c’était de dire : « On ne va pas parler de ça. On va faire comme si ça n’existait pas ». Maintenant, il est passé au stade Barnum, c’est-à-dire qu’il va en faire un show à grand spectacle.
Est-ce que ces gens vont pouvoir le défendre, Dershowitz et Kenneth Starr ? Comme d’autres commentateurs le disent, l’attention du public risque de se déplacer vers le caractère controversé de ces personnages-là. Il n’est pas sûr que ça aide M. Trump du tout. Sauf à – et là, ce n’est pas tout à fait étonnant dans la mesure où ce M. Trump est quelqu’un qui est prêt à appeler Le Peuple à se révolter contre le Deep State et contre tous les ennemis du peuple que sont les Démocrates en général et les gens qui ne l’aiment pas, tous les anti-Trumpers – il est possible que ce soit ça qu’il essaye maintenant d’orchestrer. Il s’est peut-être dit qu’il n’allait pas s’en sortir, même au Sénat, même avec une majorité Républicaine et que ce qu’il pouvait faire maintenant, c’était essayer de se tourner vers le coup d’état. Il n’a pas arrangé les choses de ce côté-là en appelant tous les généraux, il y a quelques jours, en les appelant des « dopes », c’est-à-dire des minus, des gens absolument stupides. Donc, je ne sais pas trop sur qui il va compter. Il va compter essentiellement, je dirai, sur les gens qui ont des armes et qui ont des kalachnikovs dans leur grenier ou dans leur cave. Il va compter essentiellement sur le coup d’état. C’est sa nouvelle stratégie. Il a compris qu’il ne pouvait pas continuer dans la voie où il s’est engagé jusqu’ici.
Est-ce qu’il est le seul de cet avis ? Non, il y a deux acteurs importants qui ont fait le même choix. Il y a – et ça, j’en parle depuis plusieurs jours – ce M. Lev Parnas, qui était une sorte d’homme de main de M. Giuliani, qui servait d’intermédiaire avec des gens sur le terrain en Ukraine, et ce M. Lev Parnas, manifestement, il a non seulement vendu la mèche mais il se met à table. Il est dans les rédactions des chaînes de télévision et il dit absolument tout ce qu’il a sur le cœur maintenant. C’est-à-dire que ce monsieur a compris… enfin, il est d’avis, il est clair que ce monsieur est d’avis que Trump est absolument perdu et que si lui veut s’en tirer, il n’y a plus qu’une chose à faire : c’est montrer qu’il est maintenant carrément dans le camp d’en face.
Et comme je le soulignais l’autre jour, c’est pas parce qu’il essaye d’arranger son cas vis-à-vis de la justice – parce que tout ce qu’il dit en ce moment ne l’arrange ni dans un sens, ni dans un autre – il le fait essentiellement, comme je vous le disais, à mon avis, simplement pour se protéger en disant : « Maintenant, je vide mon sac. Ce n’est plus intéressant pour personne de me flinguer puisque tout ce que j’ai à dire, je viens de le dire et c’est là ».
Et là, on apprend, je dirais d’heures en heures, encore des informations supplémentaires sur ce qui se passait avec M. Robert Hyde avec qui M. Lev Parnas était sur le terrain. Il était en contact avec ce M. Robert Hyde qui prétendait qu’il avait en tous cas des informations qui lui venaient en direct et en temps réel de l’Ukraine, en envoyant des messages du genre : « Maintenant, depuis quelques jours, Mme Yovanovitch, l’Ambassadrice américaine en Ukraine, est chez elle. On a entendu dire qu’elle allait sortir. On sait que son ordinateur est fermé », etc. Et on sait maintenant que ce M. Robert Hyde, parce qu’il l’a expliqué, ce n’est pas lui qui obtenait directement ces informations. C’est un certain M. Anthony De Caluwe, un Belge… C’est la première fois que je vous parle de Belges à propos de M. Trump mais voilà. [En fait on a appris ensuite qu’il était Néerlandais ; seul son numéro de téléphone était Belge] . Donc, c’est ce monsieur-là qui obtenait, lui, des informations manifestement de surveillance qui avait lieu au moment même de l’Ambassadrice Yovanovitch en Ukraine [Interrogé, De Caluwe a affirmé que tout cela n’était qu’une blague].
Alors, il est étonnant bien sûr que ce type d’information n’ait pas produit de réaction aux États-Unis, pour essayer de comprendre ce que c’est que cette histoire, qui surveillait exactement Mme Yovanovitch, dans quel but… Nous avons compris maintenant qu’il y avait une ligne directe d’ordres qui descendaient de la Maison Blanche, de M. Trump, qu’il passait à son avocat Jay Sekulow. Sekulow était en contact avec Giuliani. Giuliani monitorait M. Lev Parnas et celui-ci était en contact avec Robert Hyde qui, lui, obtenait de l’information directement de l’Ukraine.
Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Qu’est-ce qu’il s’est passé, je crois, avant-hier ? L’Ukraine a annoncé qu’elle allait faire, qu’elle lançait une enquête sur qu’est-ce que c’était que cette surveillance de l’ambassadrice américaine en Ukraine à l’époque parce que, comme il est dit dans la déclaration du ministère ukrainien, c’est en infraction avec un traité de Vienne sur la manière de traiter les ambassadeurs. Ce qui est étonnant, et là tout le monde s’interroge… M. Mike Pompeo, qui est ministre des Affaires étrangères, a dit hier qu’effectivement, les Etats-Unis allaient lancer eux-aussi une enquête à ce sujet mais tout le monde a souligné que l’enquête américaine démarre après celle que l’Ukraine a décidé de lancer.
Qu’est-ce que ça veut dire que le gouvernement ukrainien ait lancé une enquête ? En fait, ça va exactement dans le même sens que Lev Parnas qui se met à table. Ça veut dire que l’Ukraine a déterminé qui va gagner dans cette affaire. M. Lev Parnas a déterminé que ce ne serait pas M. Trump. Il est clair maintenant que l’Ukraine a déterminé que ce ne serait pas Trump qui l’emporterait à l’arrivée puisque jusqu’à très récemment, et encore apparemment jusqu’à la semaine dernière – parce que M. Giuliani était de nouveau en Ukraine – les pressions qui venaient de Trump et de ses complices – on peut dire ses complices maintenant parce que tous vont se retrouver un jour en prison – l’Ukraine faisait très attention à ce que M. Trump demandait, en particulier des informations sur les liens de M. Hunter Biden, fils de M. Joe Biden, avec la compagnie Burisma, avec une vieille théorie du complot que ce serait l’Ukraine qui aurait en fait essayé de peser sur l’élection présidentielle pour la nomination en 2016.
Manifestement, l’Ukraine, maintenant, a lancé une enquête mais pas du tout dans le sens que Trump espérait. En fait, une enquête dont il est probable qu’elle mettra en évidence ce que Trump et son équipe essayaient de faire en Ukraine. C’est-à-dire que, non seulement M. Lev Parnas, un monsieur qui manifestement est bien informé, a décidé que Trump avait perdu. L’Ukraine en fait autant. Et quand M. Mike Pompeo finit, hier, par dire qu’il lançait une enquête aussi sur ce qui s’était passé exactement dans cette histoire de surveillance, il est clair qu’il est absolument acculé. Il a empêché… Il était sans doute au courant de cela depuis très longtemps et, hier, il a dû faire machine arrière, c’est-à-dire il ne peut plus faire autrement que de lancer une enquête qui, on l’imagine, l’impliquera lui d’une manière ou d’une autre, impliquera sans doute M. Mike Pence, le Vice-président, probablement William Barr, le ministre de la Justice, c’est-à-dire la fine équipe qui a, dans une sorte de tentative de prise de pouvoir, créé des réseaux parallèles absolument partout non seulement dans l’exercice de la justice aux Etats-Unis mais aussi dans celui de la politique étrangère.
Alors, je suppose que vous avez compris d’où vient mon poème de Victor Hugo. Je crois effectivement que les murailles, on est peut-être à la… aujourd’hui, on doit être à la sixième fois où les trompettes ont sonné et, la septième fois, je ne sais pas si c’est pour dans la journée aujourd’hui, si c’est pour demain ou dans les jours qui viennent, mais la septième fois est en très bonne préparation.
Voilà, allez, à bientôt !
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