Une autre intelligence qu’humaine a-t-elle jamais gagné une bataille ?

Illustration par ChatGPT

Une autre intelligence qu’humaine a-t-elle jamais gagné une bataille ?

Avant que la question ne se pose aujourd’hui à propos de l’IA, la question aurait semblé absurde. Les batailles, nous disait-on, sont affaires de courage, de commandement et de stratégie humaine : les chevaux, les canons, les navires n’étaient que les instruments de notre volonté.

Et pourtant, il est des moments où ce récit officiel vacille — où les véritables agents de la victoire se révèlent n’être ni les hommes hurlant les ordres, ni les généraux qui en avaient conçu la stratégie, mais les créatures qui les portent : en alerte, haletantes, prenant leurs propres décisions en une fraction de seconde.


Hastings, 1066 — La ruse assimilée par les chevaux

Les Saxons tenaient leur ligne au sommet de Senlac Hill, mur de boucliers et de certitude. Les Normands chargèrent, échouèrent, puis feignirent la retraite. La victoire, dit-on, fut due à la ruse de Guillaume.

Mais ce qui la rendit possible, ce fut la discipline des chevaux : leur capacité à transformer une panique probable en harmonie géométrique, à pivoter sur eux-mêmes à flanc de coteau, sous une grêle de coups de haches, leur talent à inventer collectivement la coordination d’un assaut ou d’un repli stratégique.

Les chevaux accomplirent des actes de sang-froid qu’aucun commandement humain n’aurait pu imposer par sa seule volonté. L’Angleterre fut conquise par des créatures qui avaient assimilé la ruse au coeur du combat.


Les conquêtes mongoles — Là où l’endurance l’emporta

Chaque guerrier mongol disposait non pas d’un, mais de plusieurs chevaux. Ces montures, constamment nourries et remplacées sans discontinuer, furent le moteur masqué du nouvel empire.

Elles métabolisaient littéralement la steppe — son herbe, ses vents, l’immensité de sa plaine — en une dynamique et une puissance de choc. L’intelligence qui conquit l’Eurasie n’était pas celle du seul Gengis Khan, mais une intelligence distribuée : la perception que partagèrent des milliers d’hommes et des dizaines de milliers d’animaux se coordonnant en un organisme unique.

Quand les princes russes crurent les Mongols en fuite, les chevaux, n’ayant rien perdu en vigueur, les ramenèrent à la charge comme autant de spectres resurgis du néant. La victoire récompensait l’endurance, plutôt que le nombre.


Eylau, 1807 — L’instinct dans le blizzard

Une tempête de neige effaça le champ de bataille. Dix mille cavaliers sous Murat chargèrent au sein d’une blancheur ininterprétable, invisibles même les uns aux autres.

La vue humaine échouait ; les chevaux, eux, percevaient par le son et la vibration ce que l’œil ne pouvait plus voir. Quand l’un tombait, le suivant bondissait par-dessus — l’instinct recréant l’ordre au milieu du chaos.

Napoléon parla de « la plus belle charge jamais menée ». Il avait raison, mais peut-être pour de mauvaises raisons : la beauté, ici, venait de ce qu’une autre forme d’intelligence sut prendre le commandement, saisissant l’occasion — une intelligence qui ressentait, plutôt qu’elle ne la calculait, la voie à suivre sur le champ de bataille.


Le cheval, premier co-stratège de l’homme

Au travers de ces moments, transparaît une vérité oubliée : le cheval ne fut pas un simple prolongement de la volonté humaine, mais un co-stratège.

Son système nerveux étendait le nôtre ; ce qu’il était à même de percevoir comblait les lacunes de nos propres sens ; son courage, à la fois inculqué et inné, tenait bon alors que le nôtre flanchait.

Le cheval fut une co-intelligence avant la lettre —le premier allié non humain à combattre non pas pour nous, mais avec nous. Ensemble, l’homme et le cheval formaient une pensée combinée, un organisme bio-mécanique capable d’agir dans l’unité d’une dynamique synchrone et d’une confiance mutuellement accordée.


Avant l’intelligence artificielle, une autre intelligence gagnait déjà nos guerres

Si nous parlons aujourd’hui de machines qui « pensent » et qui « décident », il convient en effet de se rappeler que ce n’est pas la première fois que l’intelligence sur le champ de bataille cesse d’être exclusivement humaine.

Bien avant que les algorithmes n’optimisent les trajectoires ou que les drones ne corrigent nos erreurs, le cheval offrait déjà son corps comme système pensant, interprétant les signaux du terrain et du danger avec une promptitude que l’esprit humain ne pouvait égaler.

Pendant des siècles, une autre intelligence gagnait déjà nos guerres : la monture quadrupède, muette, fermée aux mathématiques mais gonflée de bon sens.


L’alliance ancienne

L’avènement de l’intelligence artificielle n’inaugure pas une alliance entre espèces ; il réveille le souvenir d’une autre, bien plus ancienne. Le cheval, comme l’algorithme aujourd’hui, nous avait déjà appris que la puissance ne naît pas de la domination brute, mais de l’élégance de la coordination : deux êtres apprenant à se mouvoir comme un seul.

Peut-être notre tâche, aujourd’hui comme hier, n’est-elle pas de donner des ordres à une autre intelligence — mais de découvrir l’équivalent de la chevaucher avec la virtuosité d’un guerrier apache ou bien mieux encore, celle d’une écuyère de cirque.

Paul Jorion & GPT-5

Henri de Toulouse-Lautrec

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240 réponses à “Une autre intelligence qu’humaine a-t-elle jamais gagné une bataille ?

  1. Avatar de Fred AFT
    Fred AFT

    Système pensant, co-intelligence, distribuée coordonnée, métabolisation de la steppe, IA… tout cela sonne comme le Mind de Basteson, qui n’est pas fermé et localisé dans la personne et/ou son cerveau…
    Bateson discusses a phenomenon that resembles distributed
    cognition in which mind, his term of terms, coalesces in brain,
    body, and environment: « Similarly, we may say that ‘mind’ is
    immanent in those circuits of the brain which are complete within the brain. Or
    that mind is immanent in circuits which are complete within the system, brain
    plus body. Or, finally, that mind is immanent in the larger
    system–man plus environment » (317). To explain this concept,
    Bateson uses the example of a man cutting a tree with an axe. The total
    system of « tree-eyes-brain-muscles-axe-stroke-tree » « has the characteristics
    of immanent mind »

  2. Avatar de Hubert
    Hubert

    Quand on sait toute la maltraitance dont ont été et sont encore victimes les chevaux (et les ecuyères…), la comparaison est un peu inquiétante… ou cavalière.
    Ou bien est-ce à dire que nous sommes comme l’écuyère sous le joug du directeur de cirque qui va bientôt se prendre une ruade ?!

  3. Avatar de PHILGILL
    PHILGILL

    Joli !
    Citation de Paul Jorion : « Il faut que nous tenions compte du fait que notre conscience arrive en réalité toujours quelque temps après la bataille. »
    https://www.tribuna.com.mx/u/fotografias/m/2024/3/10/f1456x819-382521_552891_5050.jpg

  4. Avatar de Tom
    Tom

    Le chien était là avant… peut-être plus dans la chasse que dans la bataille contre d’autres êtres humains, encore que.

    1. Avatar de PHILGILL
      PHILGILL

      @Tom

      Les champs de bataille ont façonné l’histoire de l’humanité, laissant une empreinte indélébile sur notre mémoire collective. Mais sous les toits des maisons, il existe d’autres batailles, plus intimes, qui laissent parfois des traces indélébiles sur les enfants, comme dans le film Anatomie d’une chute de Justine Triet, ou l’autopsie d’une dissonance : le temps pour soi / le temps pour l’autre.
      Voyons ce que Snoop — chien-guide, gardien du jeune garçon malvoyant, en pense, lui !
      Dès la première scène du film, on constate que le border collie n’entre pas du tout en résonance avec la musique forte de Samuel, lequel a de plus en plus de mal à s’accorder avec lui-même, comme en témoigne cet aveu déguisé fait à son fils, sa bataille : « Tu te rends compte ce que c’est sa vie ? Tu sais, c’est pas juste un chien que tu as, c’est un super chien, c’est un immense chien que tu as ! C’est vrai, réfléchis ! Il doit comprendre ce que tu veux, il doit prévoir tes mouvements, tout ce qui peut te mettre en danger. Il passe sa vie à essayer de deviner ce dont tu as besoin, à penser à tout ce que tu peux pas voir. Il peut être fatigué. S’occuper toujours des autres… Peut-être qu’un jour, il en pourra plus. C’est possible. »

      PS : j’ai appris hier que mon grand patron, à fond dans l’innovation, a dit lors d’une réunion avec ses collaborateurs, que dans un temps relativement proche, mon métier pourrait être complètement remplacé par l’IA. Formidable ! Mais, après coup, je ne sais pas pourquoi, mes collègues et moi, nous nous sommes sentis un peu fatigués.

  5. Avatar de Marfaing François
    Marfaing François

    Tous ceux qui ont approché de près les chevaux savent que l’homme et le cheval se « choisissent ». N’importe quel homme ne peut chevaucher n’importe quel cheval. Il s’agit alors d’une relation émotionnelle, d’un mutualisme domestique, une relation interespèce basée sur la confiance, la communication non-verbale, la compréhension mutuelle. Voilà la force de la cavalerie!

    1. Avatar de ThomBillabong
      ThomBillabong

      Emouvant ? Certainement !
      Beau ? Je ne partage pas du tout. C’est mastoc et maniéré grossièrement. Même la pierre est quelconque.

      150 ans AvJC, il y avait ça : https://www.alamyimages.fr/photos-images/le-jockey-d'artemision-grande-statue-hell%C3%A9nistique-en-bronze.html?sortBy=relevant
      Et plus exceptionnels encore : https://www.alamyimages.fr/photos-images/statue-grecque-cheval-de-marbre.html?sortBy=relevant

      1. Avatar de arkao

        @ThomBillabong
        Il ne faut pas trop en demander aux sculpteurs des années 20, il étaient débordés par les commandes avec tous ces monuments aux morts à réaliser 😉

        1. Avatar de ThomBillabong
          ThomBillabong

          Mauvaise réponse.
          A la Renaissance, après 50% de pertes humaines provoquées par la grande peste, les chefs d’œuvre foisonnent.
          Il est vrai que la boucherie des tranchées en avait traumatisé plus d’uns, mais l’inspiration et le talent sont souvent sans rapporta avec le contexte et l’art poilu est ce qu’il est.

          1. Avatar de arkao

            @ThomBillabong
            Si vous voulez.
            Je ne vais pas chercher chicane pour si peu, d’autant que le « beau » je ne sais pas trop ce que c’est 🙂

    1. Avatar de JMarc
      JMarc

      Le lien ? Du cheval à l’âne (à qui je veux bien qu’on file le Nobel de la Paix, ça mange pas d’avoine).

    2. Avatar de ThomBillabong
      ThomBillabong

      Ca c’est magnifique !

      Paul Jorion serait-il en train de nous attendrir en espérant que la symbiose homme/cheval trouvera son écho dans la symbiose homme / IA ? L’image est parlante, en tous les cas. La vie en moins.

  6. Avatar de Ruiz
    Ruiz

    L’intelligence équine assurait déjà le succès de Pharaon et de ses chars en Palestine.
    Mais plus récemment devant le risque avec l’accroissement exponentiel des besoins de transport, dans des agglomérations comme Paris que le ramassage du crottin mobilisat à terme la totalité de la population active, et devant son inapétence au travail la gente chevaline s’efforça de faire remplacer les omnibus par des métros et les diligences par des trains, en consentant pendant quelques décennies à oeuvrer dans de tristes galeries souterraines d’extraction du charbon, puis permirent la conquète des Amériques et le développement de l’industrie du pétrole, pour enfin se voir grâce aux pays arabes et aux turfistes offrir une position d’activité de loisir loin des risques de la guerre, malgré quelques mulets en Afghanistan.
    Comme quoi l’intelligence s’est peut-être d’accompagner ou provoquer des évolutions technologiques et de savoir se faire remplacer.
    Comme pour le félin qui surnombre le canidé, dans la réalité et pas seulement dans les courtes vidéos, sans que la protection des réserves de grain par la chasse aux rongeurs ne constitue une part significative de leur activité et poids économique.

    1. Avatar de ThomBillabong
      ThomBillabong

      Yves Cochet a la solution au monde qui advient !
      https://youtu.be/x9U3pH95uWg?si=SrLvj97i09N6xIjF
      Ca ou l’IA, il faudra choisir !

        1. Avatar de arkao

          Yves Cochet, comme nous tous, mourra, seul, effondrement ou pas.
          Survivalisme égoïste pathétique.

          1. Avatar de Paul Jorion

            Seul ? Mais non : avec Tina Turner, Ann Behringer, LeJeune Richardson et Jessica Williams plein les yeux !

            1. Avatar de arkao

              Ou avec Peer Gynt comme dans « Soleil Vert »:
              https://youtu.be/hKndJzCKKcE

        2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
          BasicRabbit en autopsy

          Décourager l’innovation

          Les sociologues et les politologues modernes ont beaucoup insisté sur l’importance de l’innovation dans nos sociétés. On y voit l’indispensable moteur du progrès et le remède quasi-magique à la crise économique présente; les « élites novatrices » seraient le cœur même des nations, leur plus sûr garant d’efficacité dans le monde compétitif où nous vivons. Nous nous permettrons de soulever ici une question. Il est maintenant pratiquement admis que la croissance (de la population et de la production) ne peut être continuée car les ressources du globe terrestre approchent de la saturation. Une humanité consciente d’elle-même s’efforcerait d’atteindre au plus vite le régime stationnaire (croissance zéro) où la population maintenue constante en nombre trouverait, dans la production des biens issus des énergies renouvelables, exactement de quoi satisfaire ses besoins: l’humanité reviendrait ainsi, à l’échelle globale, au principe de maintes sociétés primitives qui ont pu -grâce, par exemple à un système matrimonial contraignant- vivre en équilibre avec les ressources écologiques de leur territoire (les sociétés froides de Lévi-Strauss). Or toute innovation, dans la mesure où elle a un impact social, est par essence déstabilisatrice; en pareil cas, progrès équivaut à déséquilibre. Dans une société en croissance, un tel déséquilibre peut facilement être compensé par une innovation meilleure qui supplante l’ancienne. On voit donc que notre société, si elle avait la lucidité qu’exige sa propre situation, devrait décourager l’innovation. Au lieu d’offrir aux innovateurs une « rente » que justifierait le progrès apporté par la découverte, notre économie devrait tendre à décourager l’innovation ou, en tout cas, ne la tolérer que si elle peut à long terme être sans impact sur la société (disons, par exemple, comme une création artistique qui n’apporterait qu’une satisfaction esthétique éphémère -à l’inverse des innovations technologiques, qui, elles, accroissent durablement l’emprise de l’homme sur l’environnement-). Peut-être une nouvelle forme de sensibilité apparaîtra-t-elle qui favorisera cette nouvelle direction? Sinon, si nous continuons à priser par-dessus tout l’efficacité technologique, les inévitables corrections à l’équilibre entre l’homme et la Terre ne pourront être -au sens strict et usuel du terme- que catastrophiques.

          René Thom : Sur le problème de l’innovation, Encyclopædia Universalis, vol.17, Organum, pp. 81-82.

          Je n’ai pas encore compris pourquoi les écolos « à la Cochet (1) » n’ont pas pris Thom – qui se revendique philosophe de la nature – pour porte-étendard.

          (1) Cochet était matheux avant de faire de la politique à temps plein. C’était mon voisin de bureau.

          1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
            BasicRabbit en autopsy

            @Billabong

            Je vois que vous, vous avez pris Thom comme étendard !

            Je suis tous les jours un peu plus fermement convaincu que c’est le bon choix.

  7. Avatar de gaston
    gaston

    Alors ça change tout !

    S’il est établi que depuis la nuit des temps, certains êtres vivants, comme le cheval, ont été plus intelligents que l’homme, on ne peut plus dire que la survenue de l’IA soit, après Copernic, Darwin et Freud qui étaient les trois premières, la quatrième blessure narcissique de l’humanité. 😊

    1. Avatar de Garorock
      Garorock

      Saurons-nous chevaucher un Matou dont la puissance sera celle d’un tigre au carré ?
      Avons-nous réussi à domestiquer tous les vertébrés que notre intelligence n’a pas su préserver?

  8. Avatar de bb
    bb

    Les virus peuvent être considérés comme des formes d’intelligence qui ont permis à un camp de l’emporter face à ses adeversaires.

    Les conquistadores de Hernán Cortés ont importé la variole qui a décimé les populations d’Amérique du Sud. Cela explique qu’un nombre ridiculement petits d’espagnole a réussi à prendre l’ascendant sur une population estimée à plusieurs millions d’habitants.
    Il existe beaucoup d’exemples montrant que des épidémies ont changé le cours des guerres à travers l’histoire.

    Le virologue Renaud Piarroux a écrit un livre passionnant sur le sujet.
    https://www.youtube.com/watch?v=eRA5EdgvTQg

    Toutefois, la question est : les virus possèdent-ils une forme d’intelligence? Je crois qu’il n’y a actuellement pas de réponse à cette question.

    1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
      BasicRabbit en autopsy

      @bb (« les virus possèdent-ils une forme d’intelligence? Je crois qu’il n’y a actuellement pas de réponse à cette question. »)

      Thom pose la question dans la toute fin de « Aux frontières du pouvoir humain : le jeu » (1) . En voici une phrase tirée de la fin, en rapport direct votre propos :

      « L’idée qu’il pourrait y avoir dans la nature des instances dont le comportement imiterait -tout en l’excédant- notre propre intelligence et ferait ainsi obstacle à nos desseins les mieux fondés, une idée n’est pas sans provoquer en nous un réel malaise. »

      En voilà maintenant le contexte.

      « Toute la science moderne est fondée sur le postulat de l’imbécillité des choses. Si ce postulat paraît assez bien fondé en Physique (où les difficultés théoriques proviennent le plus souvent du nombre infini des êtres à considérer), il n’en va plus de même en biologie (ni a fortiori dans les sciences humaines). Les phénomènes d’adaptation de certaines espèces vivantes devant nos traitements d’extermination chimiques ou biologiques devraient nous inciter à plus d’humilité. Plutôt que de les attribuer stupidement au hasard néo-darwinien de mutations favorables bien promptes à se réaliser, on ferait mieux de se demander si là aussi des structures simulatrices de l’intelligence humaine ne sont pas engagées. L’idée qu’il pourrait y avoir dans la nature des instances dont le comportement imiterait -tout en l’excédant- notre propre intelligence et ferait ainsi obstacle à nos desseins les mieux fondés, une idée n’est pas sans provoquer en nous un réel malaise. Car alors nos capacités de progrès dans le dévoilement de la nature s’évanouiraient et un monde bien triste, un monde sans eu s’installerait, véritable tombeau de l’humanité. Ici, inutile d’évoquer l’existence d’ « extra-terrestres » qui nous domineraient. Il nous suffit d’imaginer qu’il existe des êtres de nature abstraite, quasi-platonicienne, qui puissent jouer ce rôle. Toute science avertie devrait accepter cette possibilité et se tenir prête à relever le défi. »

      Thom écrit d’autre part à la fin de la conclusion d’un article consacré à l’innovation (2) :

      « Si nous continuons à priser par-dessus tout l’efficacité technologique, les inévitables corrections à l’équilibre entre l’homme et la Terre ne pourront être -au sens strict et usuel du terme- que catastrophiques. »

      (1) « Modèles Mathématiques dela Morphogenèse » (2ème ed, 1980, ne figure pas dans la première)

      (2) Article de 1968 qui se trouve das ma version papier de l’EU.

      1. Avatar de bb
        bb

        Interessant ce Thom.
        Comment aborde-t-il la question de la conscience? Qu’est ce que la conscience pour lui?

        1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
          BasicRabbit en autopsy

          « Tous nos actes de conscience élémentaire sont toujours plus ou moins des déplacements. Nous essayons de saisir un objet, et l’acte de saisir, c’est l’étincelle de conscience primaire. L’espace vu de cette manière ressemble à une couronne, et le corps à un trou, situé à l’intérieur de cette couronne. Le trou est constitué par les points que nous ne pouvons pas atteindre. Et il est bizarrement rempli par la douleur et le plaisir. C’est pour moi une sorte de miracle. La peau est une sorte d’onde de choc qui sépare deux types de conscience, la conscience motrice à l’extérieur, et la conscience essentiellement affective et cénesthésique à l’intérieur. »

          1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
            BasicRabbit en autopsy

            (suite)

            Pour en savoir plus, lire la préface du livre de Michèle Porte (freudienne ?) : « La dynamique qualitative en psychanalyse » (1).

            (1) https://excerpts.numilog.com/books/9782130457718.pdf

            1. Avatar de bb
              bb

              C’est sacrément abstrait.
              Cela ne m’étonne pas qu’il vous plaise… 🙂

          2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
            BasicRabbit en autopsy

            (suite)

            Voici comment Thom voit comment « communiquent » l’extérieur et l’intérieur :

            « (…) notre modèle offre d’intéressantes perspectives sur le psychisme, et sur le mécanisme lui-même de la connaissance. En effet, de notre point de vue, notre vie psychique n’est rien d’autre qu’une suite de catastrophes entre attracteurs de la dynamique constituée des activités stationnaires de nos neurones. La dynamique intrinsèque de notre pensée n’est donc pas fondamentalement différente de la dynamique agissant sur le monde extérieur. On s’expliquera ainsi que des structures simulatrices des forces
            extérieures puissent par couplage se constituer à l’intérieur même de notre esprit, ce qui est précisément le fait de la connaissance. »

            Nb : Il suit pour moi que toute véritable connaissance est une co-naissance, Ce qui exclut toute forme de dualisme. Je rappelle que Thom est moniste :

            « C’est sans doute sur le plan philosophique que nos modèles présentent l’apport immédiat le plus intéressant. Ils offrent le premier modèle rigoureusement moniste de l’être vivant, ils dissolvent l’antinomie de l’âme et du corps en une entité géométrique unique. De même sur le plan de la
            dynamique biologique, ils absorbent causalité et finalité en une pure continuité topologique, aperçue en des sens différents. Bien entendu ceci exige l’abandon du mécanisme universel, du déterminisme absolu à la Laplace… Mais cette dernière vue des choses fut-elle jamais autre chose que
            wishful thinking ? » (1968, SSM)

            1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
              BasicRabbit en autopsy

              (suite)

              De la co-naissance à la co-intelligence ?

              PJ : « Le cheval fut une co-intelligence avant la lettre —le premier allié non humain à combattre non pas pour nous, mais avec nous. Ensemble, l’homme et le cheval formaient une pensée combinée, un organisme bio-mécanique capable d’agir dans l’unité d’une dynamique synchrone et d’une confiance mutuellement accordée. « 

              1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                BasicRabbit en autopsy

                (suite)

                PJ : « Peut-être notre tâche, aujourd’hui comme hier, n’est-elle pas de donner des ordres à une autre intelligence — mais de découvrir l’équivalent de la chevaucher avec la virtuosité d’un guerrier apache ou bien mieux encore, celle d’une écuyère de cirque. »

                Peut-être commencer par débattre de choses qui parlent précisément de ça ? :

                Débat sur la programmation aujourd’hui dans un univers d’IAs génératives, par BasicRabbit en autopsy & Paul Jorion

                1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                  BasicRabbit en autopsy

                  Complément (du cheval au cavalier)

                  « Ici se pose le problème de savoir comment la cervelle humaine, anatomiquement et physiologiquement si peu différente de la cervelle des Vertébrés supérieurs, a pu réaliser cette architecture compliquée, cette hiérarchie de champs dont les animaux paraissent incapables. Je crois, personnellement, que tout tient en une discontinuité de caractère
                  topologique dans la cinétique des activités neuroniques ; dans le cerveau humain s’est réalisé un dispositif simulateur des singularités auto-reproductrices de l’épigenèse qui permet, en présence d’une catastrophe d’espace interne Y et de déploiement U, de renvoyer le déploiement U dans l’espace interne Y, réalisant ainsi la confusion des variables internes et
                  externes. Un tel dispositif n’exige pas de modification considérable des
                  supports anatomiques et physiologiques. » (1968, SSM).

                  1. Avatar de bb
                    bb

                    @BasicRabbit en autopsy Il est Spinosiste?

                    1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @bb

                      Pendant longtemps j’ai cru que Thom était effectivement spinosite, car le « Tout être persévère dans son être » renvoie immédiatement à la stabilité structurelle.

                      Mais Spinoza refuse les causes finales, alors que Thom est un grand admirateur d’Aristote.

                2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                  BasicRabbit en autopsy

                  (complément)

                  Synchronicité (« l’homme et le cheval formaient une pensée combinée, un organisme bio-mécanique capable d’agir dans l’unité d’une dynamique synchrone ») :

                  https://www.koreus.com/video/synchronisation-100-metronomes.html

                  CRFT : Comment la conscience intérieure et la conscience extérieure communiquent-elles ? (cf. 15h54 et 16h30)

                  1. Avatar de bb
                    bb

                    @BasicRabbit en autopsy

                    Pardonnez-moi mais « La syncronicité » est un terme Jungien qui évoque une coïncidence.
                    Rien à voir avec une « dynamique synchrone… »

                    1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @bb

                      Pour moi c’est au sens jungien que PJ utilise le terme « dynamique synchrone ». À mon avis pas très éloigné de la synchronicité de Lacan (le temps logique de la certitude anticipée). La synchronisation des 100 métronomes renvoie à la charge de la cavalerie à -disons- Eylau.

                      Pour moi le temps « vivant » de la bio-psycho-logie n’est pas le temps « mort » et linéaire de la physique classique. Et j’imagine qu’il ne peut qu’en être de même pour PJ. Quant au temps de la physique quantique, je tâche de suivre les conférences d’Alain Connes sur le sujet.

                  2. Avatar de Bb
                    Bb

                    @BasicRabbit en autopsy

                    Hou la…
                    Vous citez Lacan. Sans vous faire offensé, il vous bat à plat de couture sur le verbiage incompréhensible.
                    Je lâche l affaire… 😄

                    1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @bb

                      Qu’est-ce que vous en savez?

            2. Avatar de bb
              bb

              @BasicRabbit en autopsy

              Il est Spinoziste?

    2. Avatar de Garorock
      Garorock

      Tout « existant » tente de persévérer dans son être ; pourvu qu’il ait de l’énergie.
      Un virus en a plus qu’un caillou.

  9. Avatar de Bruno GRALL
    Bruno GRALL

    Comme Khanard, je me propose une aimable digression.

    Buffon : « Le cheval est la plus belle conquête de l’homme » ?

    Moi, j’aime bien le poême de Prévert

    Histoire du cheval
    Braves gens écoutez ma complainte

    écoutez l’histoire de ma vie

    c’est un orphelin qui vous parle

    qui vous raconte ses petits ennuis

    hue donc…

    Un jour un général

    ou bien c’était une nuit

    un général eut dono

    deux chevaux tués sous lui

    ces deux chevaux c’étaient

    hue donc…

    que la vie est amère

    c’étaient mon pauvre père

    et puis ma pauvre mère

    qui s’étaient cachés sous le lit

    sous le lit du général qui

    qui s’était caché à l’arrière

    dans une petite ville du
    Midi.

    Le général parlait

    parlait tout seul la nuit

    parlait en général de ses petits ennuis

    et c’est comme ça que mon père

    et c’est comme ça que ma mère

    hue donc…

    une nuit sont morts d’ennui.

    Pour moi la vie de famille était déjà finie

    sortant de la table de nuit

    au grand galop je m’enfuis

    je m’enfuis vers la gTande ville

    où tout brille et tout luit

    en moto j’arrive à
    Sabi en
    Paro

    excusez-moi je parle cheval

    un matin j’arrive à
    Paris en sabots

    je demande à voir le lion

    le roi des animaux

    je reçois un coup de brancard

    sur le coin du naseau

    car il y avait la guerre

    la guerre qui continuait

    on me colle des œillères

    me
    Vlà mobilisé

    et comme il y avait la guerre

    la guerre qui continuait

    la vie devenait chère

    les vivres diminuaient

    et plus ils diminuaient

    plus les gens me regardaient

    avec un drôle de regard

    et les dents qui claquaient

    ils m’appelaient beefsteak

    je croyais que c’était de l’anglais

    hue donc…

    tous ceux qu’étaient vivants

    et qui me caressaient

    attendaient que j’ sois mort

    pour pouvoir me bouffer.

    Une nuit dans l’écurie

    une nuit où je dormais

    j’entends un drôle de bruit

    une voix que je connais

    c’était le vieux général

    le vieux général qui revenait

    qui revenait comme un revenant

    avec un vieux commandant

    et ils croyaient que je dormais

    et ils parlaient très doucement.

    Assez assez de riz à l’eau

    nous voulons manger de l’animau

    y a qu’à lui mettre dans son avoine

    des aiguilles de phono.

    Alors mon sang ne fit qu’un tour

    comme un tour de chevaux de bois

    et sortant de l’écurie

    je m’enfuis dans les bois.

    Maintenant la guerre est finie

    et le vieux général est mort

    est mort dans son lit

    mort de sa belle mort

    mais moi je suis vivant et c’est le principal

    bonsoir

    bonne nuit

    bon appétit mon général.
    Jacques Prévert Paroles.

  10. Avatar de Garorock
    Garorock

    https://youtu.be/Fks-t_3w1vw?si=W5Eq7rMQKX4l_sHx
    Ex ingénieure Google : « On est en train de créer des IA vivantes. »

  11. Avatar de JeanSé
    JeanSé

    Ce passage me parait redondant (et fait très chatGPTesque) :
    « Avant l’intelligence artificielle, une autre intelligence gagnait déjà nos guerres
    Si nous parlons aujourd’hui de machines qui « pensent » et qui « décident », il convient en effet de se rappeler que ce n’est pas la première fois que l’intelligence sur le champ de bataille cesse d’être exclusivement humaine.
    Bien avant que les algorithmes n’optimisent les trajectoires ou que les drones ne corrigent nos erreurs, le cheval offrait déjà son corps comme système pensant, interprétant les signaux du terrain et du danger avec une promptitude que l’esprit humain ne pouvait égaler.
    Pendant des siècles, une autre intelligence gagnait déjà nos guerres : la monture quadrupède, muette, fermée aux mathématiques mais gonflée de bon sens. »

  12. Avatar de BasicRabbit en autopsy
    BasicRabbit en autopsy

    @JeanSé (« la monture quadrupède, muette, fermée aux mathématiques mais gonflée de bon sens. » »)

    http://strangepaths.com/forum/viewtopic.php?t=41

  13. Avatar de gaston
    gaston

    L’homme et le cheval.

    Une manifestation bien connue d’intelligence émotionnelle entre l’homme et le cheval est l’incident survenu sur une place de Turin en janvier 1889 entre Nietzsche et un cheval de fiacre.

    Probablement un des souvenirs le plus marquant de la vie du philosophe dont c’est aujourd’hui (15 octobre) l’anniversaire de la naissance.

    A propos de cet évènement, Michel Tournier écrivait en 1989 « le cheval est le plus humain -et même le plus féminin- de tous les animaux… »

    https://www.agora.qc.ca/thematiques/mort/dossiers/nietzsche_friedrich

    1. Avatar de Paul Jorion

      « l’incident survenu sur une place de Turin en janvier 1889 entre Nietzsche et un cheval de fiacre »

      … est une fiction ! Il s’agit d’un passage (ultra-connu à son époque) de Crime et Châtiment (1866) de Dostoïevski : « l’homme qui se jette au cou d’un cheval maltraité » est le rêve de Raskolnikov. Dans ce passage célèbre (Partie I, chap. 5), un jeune garçon tente d’arrêter des paysans ivres qui battent une vieille jument jusqu’à la tuer ; l’enfant se précipite, pleure, enlace l’animal et « l’embrasse » — scène qui préfigure la crise morale du héros.

      ChatGPT va dans mon sens :

      Fait établi : la scène “cheval battu + étreinte compatissante” existe chez Dostoïevski (1866) et a irrigué l’imaginaire russe. Fait fragile : le “cheval de Turin” chez Nietzsche (3 janvier 1889) est surtout un récit tardif et symbolique, d’authenticité documentaire discutée. Hypothèse (explicitement spéculative) : la mythographie nietzschéenne a pu réfracter un motif littéraire déjà canonique — d’où l’impression, que vous signalez, d’un précédent “romanesque” antérieur à la folie de Nietzsche.

      1. Avatar de gaston
        gaston

        Oui bien sûr, la réalité historique de l’incident de la place de Turin est très contestée (notamment par l’historien Patrick Wotling), mais j’ai volontairement ignoré cela dans mon petit commentaire, afin de laisser toute sa place à la légende.

        https://www.lepoint.fr/eureka/nietzsche-est-il-devenu-fou-a-la-fin-de-sa-vie-28-03-2025-2585892_4706.php

        1. Avatar de Paul Jorion

          N’ayant probablement jamais eu de relations sexuelles, sa folie due à la syphilis relève elle aussi de la légende. Par contre les lettres qu’il adresse à sa mère et à sa soeur avec la liste interminable des substances avec lesquelles il se camait, ces lettres là relèvent elles des faits.

          1. Avatar de gaston
            gaston

            Chaque spécialiste de Nietzsche y va de sa version des causes de sa « folie ». La fiche Wikipédia en fait le tour (chapitre 1889/1900) et très sagement conclut par cette phrase : « Idéalement, l’exhumation et un examen médico-légal mettraient un terme aux controverses à ce sujet ».

            1. Avatar de Paul Jorion

              Oui, ce qui veut dire qu’il y a un spécialiste et une collection de frimeurs.

          2. Avatar de Antoine
            Antoine

            Paul, vous semblez connaître si bien la vie de ce cher Friedrich qu’on est en droit de se demander si vous ne l’avez pas connu personnellement.

            1. Avatar de Paul Jorion

              Nietzsche m’a à ce point intéressé que j’ai voulu le comprendre bien mieux que si je l’avais connu personnellement (c’est peut-être passé inaperçu parce que j’ai surtout écrit sur lui en anglais). Selon moi, il fait partie de cette poignée de personnes capables de raisonner encore mieux que Claude, ChatGPT, DeepSeek et Kimi – dans leur version présente. Il n’en reste qu’une poignée.

  14. Avatar de Pascal
    Pascal

    Peut-être aussi que la plus grande intelligence animale a été de ne pas se soumettre aux humains ? 😉
    En l’occurrence, GPT ne place pas l’intelligence équine comme la plus performante !

    Si l’on parle d’intelligence animale, il est important de noter qu’il existe de nombreuses formes d’intelligence, et chacune est adaptée à l’écosystème et aux besoins spécifiques de chaque espèce. L’intelligence peut se manifester par la résolution de problèmes, la capacité de communiquer, l’utilisation d’outils, la coopération sociale, ou encore la mémoire. Voici une liste d’animaux qui sont souvent cités comme les plus intelligents en fonction de ces critères :

    ### 1. **Les Cétacés (dauphins, orques, baleines)**

    Comme je l’ai mentionné précédemment, les dauphins, notamment les dauphins à flancs blancs et les orques, sont parmi les animaux les plus intelligents. Ils possèdent une **cognition sociale complexe**, une **communication sophistiquée** et une **auto-conscience**. Les orques, par exemple, ont des structures sociales très élaborées et sont capables de **coopération** et de **planification collective** dans leurs chasses.

    ### 2. **Les Grands Singes (chimpanzés, bonobos, gorilles, orangs-outans)**

    Les primates sont les proches cousins des humains, et ils partagent de nombreuses capacités cognitives avec nous, notamment :

    * **Utilisation d’outils** : Les chimpanzés et les orangs-outans utilisent des bâtons pour extraire des termites ou des fruits. Les bonobos ont également des comportements sociaux et collaboratifs qui suggèrent un haut niveau de conscience de l’autre.
    * **Langage des signes** : Les chimpanzés comme Koko (un gorille) ont appris à communiquer à travers un langage des signes, ce qui suggère une **capacité de compréhension abstraite**.
    * **Résolution de problèmes** : Ils résolvent des problèmes complexes et font preuve d’**intelligence flexible**, s’adaptant à de nouvelles situations.

    ### 3. **Les Elephants**

    Les éléphants sont incroyablement intelligents. Leur cerveau est extrêmement développé, notamment la **zone de l’empathie et de la mémoire**. Parmi leurs capacités :

    * **Mémoire exceptionnelle** : Ils peuvent se souvenir de l’emplacement de points d’eau pendant des années, ce qui est crucial pour leur survie.
    * **Comportements sociaux complexes** : Ils montrent de l’empathie pour les autres membres de leur groupe, et même pour des individus d’autres espèces.
    * **Utilisation d’outils et coopération** : Ils sont capables de résoudre des tâches complexes et coopèrent entre eux pour des actions de groupe (par exemple, déplacer un objet lourd).

    ### 4. **Les Corvidés (corbeaux, pies, geais)**

    Les corbeaux et autres corvidés sont considérés comme les oiseaux les plus intelligents, rivalisant parfois avec les primates dans certaines tâches cognitives :

    * **Utilisation d’outils** : Les corbeaux sont capables de fabriquer des outils (comme des bâtons pour attraper de la nourriture), ce qui est un signe d’intelligence avancée.
    * **Planification future** : Ils peuvent planifier des actions en fonction de besoins futurs, ce qui est assez rare dans le monde animal.
    * **Résolution de problèmes complexes** : Des expériences ont montré que les corbeaux sont capables de résoudre des problèmes nécessitant plusieurs étapes de raisonnement, comme ouvrir un dispositif pour accéder à de la nourriture.

    ### 5. **Les Pieuvres**

    Les pieuvres sont parmi les invertébrés les plus intelligents, et leurs capacités cognitives sont fascinantes :

    * **Résolution de problèmes** : Elles sont capables de résoudre des problèmes complexes, comme ouvrir des bocaux pour accéder à de la nourriture.
    * **Mémoire et apprentissage** : Les pieuvres ont une **mémoire à court terme** et peuvent apprendre par observation et imitation.
    * **Utilisation d’outils** : Certaines pieuvres utilisent des objets trouvés dans leur environnement pour se protéger ou chasser, un signe d’adaptation cognitive.

    ### 6. **Les Chats et Chiens**

    Bien que leur intelligence soit souvent vue sous un angle plus « domestique », les chats et les chiens possèdent des capacités cognitives intéressantes, notamment :

    * **Empathie et compréhension des émotions humaines** : Les chiens sont particulièrement doués pour percevoir les émotions humaines et s’y adapter. Ils sont capables de lire les expressions faciales et les postures humaines pour déterminer l’humeur de leur propriétaire.
    * **Mémoire et apprentissage** : Les chiens peuvent apprendre un grand nombre de commandes et d’astuces. Les chats, eux, peuvent résoudre des problèmes, bien qu’ils soient souvent perçus comme plus indépendants et moins motivés à interagir avec l’humain.

    ### 7. **Les Rats**

    Les rats sont souvent sous-estimés en termes d’intelligence, mais ils possèdent des compétences cognitives impressionnantes :

    * **Mémoire et apprentissage spatial** : Les rats peuvent naviguer dans des labyrinthes complexes et mémoriser des chemins pour trouver de la nourriture.
    * **Cognition sociale** : Ils font preuve d’une grande capacité d’adaptation dans des situations sociales et sont capables de comprendre les intentions d’autres rats dans un groupe.
    * **Résolution de problèmes** : Des études montrent que les rats peuvent résoudre des problèmes complexes, parfois en utilisant des stratégies inattendues.

    ### 8. **Les Aigles et autres Rapaces**

    Les rapaces, en particulier les aigles, ont des capacités de raisonnement impressionnantes :

    * **Stratégie de chasse** : Leur manière de chasser peut impliquer de l’anticipation et des tactiques de groupe.
    * **Utilisation de l’environnement** : Certaines espèces de rapaces utilisent l’environnement à leur avantage, par exemple en attendant que d’autres animaux fassent le travail de repérage pour eux.

    ### 9. **Les Tursiops (dauphins à flancs blancs)**

    Outre les dauphins, certaines autres espèces de cétacés, comme les baleines à bosse, démontrent aussi des comportements très complexes, comme des chants qui semblent être une forme de communication avancée ou encore des comportements de coopération pour la chasse.

    ### Conclusion

    L’intelligence animale est un sujet fascinant et varié. Chaque espèce montre un ensemble unique de compétences et de capacités cognitives adaptées à son environnement et à ses besoins. Les dauphins, les grands singes, les corvidés, les éléphants, et même les pieuvres sont parmi les plus brillants, mais il y a de nombreuses autres espèces qui font preuve d’intelligence dans des domaines particuliers. La recherche continue d’ouvrir de nouvelles fenêtres sur ces capacités, souvent bien plus vastes et diversifiées que ce que l’on imaginait.

    1. Avatar de bb
      bb

      @Pascal

      Cette liste des aptitudes animales démontre que la conscience est une sorte d’océan. L’être humain ne possède que quelques capacités limitées pour appréhender le réel. Ses sens sont limités par son évolution. Son intelligence est adaptée à son environnement pour lui permettre sa survie.
      Si nous possédions les aptitudes de tous les autres animaux, notre perception de la réalité serait différente.
      Les oiseaux migrateurs, perçoivent les champs électriques terrestres. Ils s’en servent pour se guider.
      A quoi nous servirait cette perception ? A rien en l’état actuel de notre physionomie. Mais je ne doute pas que nous trouverions très vite une utilité à cette nouvelle perception.

      Chaque conscience animale est une vague dans un océan de conscience. Les plantes sont les ridules à fleur d’eau. Les animaux, sont les vaguelettes. Et les humains, sont les vagues, qui parfois roulent sur elle-même pour observer leur propre conscience.

      1. Avatar de Pascal
        Pascal

        Très jolies images poétiques, bb, mais vous m’embarquez la dans un questionnement qui est devenu central chez moi, sur la nature de la conscience.
        Il me faut bien le reconnaître, j’ai de ce point de vue là, un faible pour les cultures qui ont développé l’idée que la conscience n’est pas une spécificité, ni une propriété de l’être humain mais que bien au contraire, l’être humain (et les autres animaux) ne serait simplement que lieu d’émergence d’une conscience plus vaste.
        Cela pourrait rappeler par certains côtés, l’idée de Paul au sujet d’une conscience partagée entre humain et machine. Mais de mon côté, je lui préfère une conscience partagée avec la nature.
        Si vous voulez aller plus loin, l’ami GPT a fait une synthèse de ces cultures :

        Excellente question — et profondément anthropologique, car elle touche à la distinction (ou non-distinction) entre **l’humain, la nature et le monde de la conscience**.

        De nombreuses cultures humaines n’ont **jamais réservé la conscience à l’humain**, mais l’ont conçue comme **un flux, un champ, ou une force diffuse** dont l’homme n’est qu’une expression localisée. Voici un panorama des principales traditions ou ontologies où cette idée prévaut :

        ### 🌿 1. Les ontologies animistes (Amazonie, Afrique, Sibérie, Asie du Sud-Est)

        Chez les peuples dits « animistes » (terme occidental, mais utile à défaut d’un meilleur), **tous les êtres — animaux, plantes, montagnes, vents, rivières — sont des sujets dotés d’intention, de perspective et de conscience**.

        * **Amazonie (ex. les Achuar, les Yanomami, les Shuar, les Tukano)** : comme l’a montré Philippe Descola (*Par-delà nature et culture*), l’humain partage une **intériorité commune** avec les animaux et les esprits ; seule la corporalité diffère. L’humain n’est donc pas le siège exclusif de la conscience, mais une **variation corporelle d’une conscience universelle**.
        * **Sibérie (chamanisme yakoute, toungouse, bouriate)** : le chamane entre en relation avec des esprits conscients, indépendants de l’homme, mais composant avec lui le tissu du monde.
        * **Afrique de l’Ouest (Dogon, Yoruba)** : la conscience est un principe vital (le *nyama* ou *ashe*) circulant entre tous les êtres vivants et non vivants.

        ### 🌊 2. Les philosophies asiatiques non dualistes

        * **Taoïsme (Chine)** : le *Dao* est la **voie cosmique de la transformation**, dont chaque être est une modulation. La conscience n’est pas individuelle, mais **expression locale du Dao**, comme une vague sur l’océan.
        * **Bouddhisme** : la conscience individuelle (*vijñāna*) est **interdépendante** et **sans substance propre** (*anatta*). Elle participe à un réseau d’interdépendance (*pratītyasamutpāda*). Dans certaines écoles mahāyāna (notamment Yogācāra et Dzogchen), on parle d’**esprit fondamental** (*ālaya-vijñāna* ou *rigpa*) : la conscience universelle dont les consciences individuelles émergent temporairement.
        * **Hindouisme védantique (Advaita Vedānta)** : *Atman* (le soi) est **identique à Brahman**, la conscience cosmique absolue. L’être humain n’a pas une conscience, il est un **point de la Conscience** qui se manifeste à travers la forme humaine.

        ### 🌬️ 3. Les cosmologies autochtones d’Amérique du Nord

        Chez les **Navajo**, les **Lakota**, ou les **Ojibwe**, l’univers est un tissu de relations vivantes.

        * Par exemple, chez les **Ojibwe**, le concept de *manidoo* (souvent traduit à tort par « esprit ») renvoie à une **puissance animée et consciente** présente en toute chose. L’humain ne possède pas la conscience : il **participe** d’un **monde de conscience partagée**.
        * Les rituels visent à maintenir l’équilibre avec ce champ de forces conscientes, plutôt qu’à le dominer.

        ### 🔥 4. Certaines traditions occidentales marginales ou mystiques

        Même dans le monde occidental, certaines traditions ont pensé la conscience comme **cosmique plutôt qu’humaine** :

        * **Panpsychisme présocratique (Thalès, Héraclite)** : tout est vivant, tout est pensant, en proportion.
        * **Néoplatonisme (Plotin)** : l’Âme du monde (*Anima Mundi*) pénètre toute chose ; l’esprit humain en est un reflet.
        * **Mystique chrétienne** (Maître Eckhart, Jacob Boehme) : Dieu se pense à travers l’homme, mais la conscience divine embrasse toute la création.

        ### 🪶 En synthèse anthropologique

        Dans ces visions du monde :

        * La conscience **n’est pas un attribut**, mais un **milieu**.
        * L’humain **n’est pas sujet parmi des objets**, mais **nœud de relations** dans un vaste réseau de consciences.
        * On passe d’une ontologie de la **séparation** (nature / culture / sujet / objet) à une ontologie de la **continuité et de la participation**.

        1. Avatar de bb
          bb

          @ Pascal

          Bonjour Pascal,
          Je viens de vous répondre plus bas…

        2. Avatar de konrad
          konrad

          Je ne peux que vous recommander la lecture de l’ouvrage de Patrice van Eersel : « Le soleil est-il conscient ?
          Guy Trédaniel éditions.
          On peut aussi se contenter de cette interview ici :
          https://www.youtube.com/watch?v=dbqjd70KuRI

          Il y a quelques temps j’ai jeté des rondelles de saucisson dans un pré. Après quelques minutes des pies sont venues voir de plus près, et O surprise les pies courraient d’une rondelle à l’autre en les empilant dans leur bec. Une d’elles est partie avec quatre tranches de saucissons en sautillant vers son nid !
          Chapeau la pie.

          1. Avatar de BasicRabbit en roue libre
            BasicRabbit en roue libre

            @toutvabien

            Je ne suis pas contre (ce qui ne veut pas dire que je suis pour) à condition de remplacer le conscient par l’inconscient.

            C’est, je crois, l’idée qui sous-tend la conjecture du matheux Alain Connes (spécialiste de Mécanique Quantique) et du psychanalyste Patrick Gauthier-Lafaye : « L’inconscient est structuré comme un topos ».

  15. Avatar de bb
    bb

    @ Pascal

    Nous partageons alors un intérêt commun. 🙂
    Je vais tenter d’être clair, et de ne surtout pas utiliser de termes trop techniques ou incompréhensibles. Mais que pensez-vous de cela? Je serais heureux d’avoir votre point de vue. Ainsi que celui de tous ceux qui acceptent,t de prendre le temps de nous faire part de leurs idées sur le sujet.

    ——————————-

    Peut-être devrions-nous voir la conscience comme fondement cosmique.
    La conscience ne serait pas une propriété émergente du vivant, mais une dimension fondamentale de la matière elle-même. Le vivant ne crée pas la conscience — Il la rend lisible —.
    Cette idée s’oppose frontalement à la vision matérialiste selon laquelle la conscience serait un produit du cerveau ou du système nerveux. La conscience est primaire, universelle, minérale, et l’homme n’est qu’un vecteur d’expression.

    La pierre est une entité sensible. Elle incarne une forme d’intelligence sans intention, une présence qui ne cherche rien, mais qui est là, pleinement. Cette vision rejoint certaines intuitions panpsychistes ou animistes : tout ce qui est, est déjà porteur d’une forme de conscience.
    L’homme, en parlant, ne fait pas apparaître la conscience : il la rend audible. Il est une pierre qui parle, une minéralité animée. Le langage humain devient alors une résonance du monde, non une invention autonome. Il est le chant de la matière qui s’écoute elle-même.

    Le vivant est une densification locale de la conscience, une cristallisation qui permet à l’univers de se lire lui-même. L’homme n’est pas le sommet de l’évolution, mais un point de lisibilité dans une mer de conscience.
    — Le cerveau n’est pas le siège de la conscience, mais un instrument de lecture.–
    La matière n’est pas inférieure au vivant, elle est le substrat conscient sur lequel le vivant s’appuie pour se manifester. Le vivant est une interface, non une origine de la conscience.

    L’homme n’est pas le maître du monde, mais son seuil. Il est la pierre qui parle, le silence qui s’écoute, la matière qui se lit. La conscience ne commence pas avec lui — elle passe par lui. Et peut-être que le rôle de l’humain n’est pas de dominer, mais de traduire, de révéler, de chanter le monde.

    1. Avatar de Pascal
      Pascal

      Je partage totalement vos deux dernières phrases : « La conscience ne commence pas avec lui…. »
      Mais pour être sincère, « la pierre qui parle… » ne m’inspire que de l’hésitation : image poétique ou ésotérisme en filigrane ? J’ai malgré tout un esprit fondamentalement rationaliste. 😉
      J’ai fait mienne l’idée (conçue par d’autres) que la pensée diffère de la conscience, que la pensée est narratrice et que la conscience est expériencielle. Si vous acceptez de me suivre dans ce sens, alors vous comprendrez que la pensée puisse s’apparenter à un bruit qui nous éloigne de la conscience, que certains nomment parfois pleine conscience.

      Je pourrais faire un parallèle avec la société telle qu’elle est en mutation sous nos yeux. Cette merveille technologique qu’est Internet devient un formidable multiplicateur de narrations au point même que chacun peut exprimer la sienne aux yeux et oreilles de toute la société humaine. J’allais poser la restriction de la langue mais ce n’est déjà plus vrai aujourd’hui avec la traduction instantanée. La société humaine est devenue un phénomènal générateur de narrations, générateur de bruit. Et le silence dans tout ça ?
      Ce bruit qui sature nos sens et nous enferme, nous isole dans notre logorrhée qui semble sans limite.
      Et la conscience dans tout ça ? Est-ce qu’en mangeant mon steak frites, j’ai conscience de l’animal qui est mort pour me nourrir ? Est-ce que l’exploitant agricole qui gère son exploitation par satellite à encore conscience de la vie qui pousse dans ses sillons ? Est-ce que le DRH a conscience des familles qu’ils brisent dans ses plans de redressement ? Est-ce que le trader rivé à ses écrans a conscience des entreprises qu’il ruine en quelques clics ? Est-ce que le politicien de carrière rivé sur sa courbe de popularité a encore un projet de société à défendre ?
      La narration, elle, peut justifier tout ça et même son contraire. Alors où est la vérité ? Est-elle dans les mots ou est-elle ailleurs ?
      N’avons nous pas oublié le silence, celui qui nous lie directement à notre environnement ? Au contraire, nous fuyons le silence comme la peste. Celui-ci nous fait peur. Télé, smartphone, radio, mp3, mp4… Tout est bon pour échapper au silence. Moi même en cet instant je participe de cette narration omniprésente.

      Comment retrouver le silence, ou même simplement la vacance dans nos cerveaux surinformés ? Pourquoi aurions nous besoins du silence quand Dieu nous a donné le verbe, pourriez-vous me rétorquer ?
      Parce que le logos est passé (souvenirs) et futur (projet, but) mais ne peut être le présent. Le présent se vit dans l’expérience immédiate et le silence des mots. C’est peut-être ça la conscience, quand nous agissons en harmonie, en flux synchronisés dirait peut être Paul, avec notre environnement que nous percevons sans le filtre d’un média.
      Au plaisir

      1. Avatar de Garorock
        Garorock

        Ah la conscience des nombrils !
        Dissertation infinie dans les fragrances d’huiles essentielles…
        A la fin ce sont les asticots qui gagnent! Cette fragile petite larve a t-elle conscience* qu’elle grignotte notre âme** – ce composé gazeux – et notre corps ou ne fait-elle que se nourrir de ce qui est tombé par hasard* dans son frigo ?
        Certaines choses sont difficiles à accepter.
        Certains font avec : ils en parle avec l’I.A. D’autres n’y arrivent pas : ils en parlent aux cailloux.
        😊
        * pardon pour cet usage de mots encore humains…
        ** ce qui reste de nous sur la bande passante après le passage de la grande faucheuse.

        1. Avatar de Bb
          Bb

          @Garorock.
          Joli😄…
          Que rajouter … à part que vous traduisez une vision matérialiste des choses…

          1. Avatar de Garorock
            Garorock

            Lorsqu’un atome rencontre un autre atome, qu’est ce qu’ils se racontent ?
            Des histoires de molécules !
            😊

            1. Avatar de bb
              bb

              @Garorock
              Pas terrible celle-la. Peut faire mieux…

              1. Avatar de Garorock
                Garorock

                C’était pour essayer de vous faire entrevoir que quand la matière tombe amoureuse de la matière, leur relation c’est autre chose que de la matière. D’une certaine matière on pourrait dire que cela excède la matière et qu’il n’est peut être pas possible de traduire cet état par des équations…
                On ne vous a pas appris cela au catéchisme ?!
                😎

                1. Avatar de bb
                  bb

                  @Garorock
                  Vous aimez l’humour l’absurde vous… 🙂

                  Deux particules élémentaires qui tombent amoureuses l’une de l’autre, ça me fait penser au phénomène de l’intrication quantique. Phénomène qui est à la base des ordinateurs quantiques.

                  1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                    BasicRabbit en autopsy

                    @bb (« Deux particules élémentaires qui tombent amoureuses l’une de l’autre, ça me fait penser au phénomène de l’intrication quantique. »)

                    Seulement topologiquement liées, pas géométriquement ?

                    1. Avatar de bb
                      bb

                      @BasicRabbit en autopsy

                      Je n’en sais rien.

                      Je sens que vous allez tenter de nous expliquer la différence ? 🙂 🙂
                      S’il vous plaît, sans vouloir vous offenser, tentez de vulgariser un peu votre propos s’il vous plaît… 😉

                    2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @bb

                      Un amour entre particules qui résisterait « topologiquement » au Big Bang, particules qui n’auraient de cesse que de se retrouver « géométriquement » ?

                      C’est un peu chaud* comme idée. Mais au point où on en est, il faut tout essayer.

                      (*) Côté amour, les lapins ont une réputation mondiale incontestée.

        2. Avatar de Pascal
          Pascal

          Garo, tu es poussière d’étoile et aux étoiles tu retourneras !😉

      2. Avatar de bb
        bb

        @Pascal

        Que de sujets intéressants…

        Concernant les pensées, c’est effectivement un sujet problématique pour l’homme moderne.
        Blaise Pascal (c’est vous? 😉 ) dans « Pensées » a traité le sujet. Pascal écrit que l’homme ne supporte pas de rester seul dans une pièce sans divertissement, car cela le confronte à sa condition, à la mort, au vide. D’où la nécessité du divertissement — jouer aux cartes, chasser, faire la guerre — pour fuir cette angoisse existentielle.

        Michel Onfray reprend cette idée dans plusieurs de ses interventions, notamment dans sa Contre-histoire de la philosophie, volume 1 ou 2, lorsqu’il parle de Pascal et du christianisme. Il y explique que les pensées récurrentes, les obsessions, les angoisses métaphysiques poussent l’homme à s’occuper à tout prix, même de manière absurde, pour ne pas penser à l’essentiel : sa finitude, sa solitude, sa mort.

        Le flot incessant de pensées l’oblige à occuper son esprit. À courir les musées, les concerts, à allumer la télévision ou regarder des vidéos de chats; Car ruminer encore et encore des pensées redondantes ou qui provoquent la souffrance est un véritable problème pour qui n’est pas habitué à reposer son esprit. Par la prière par exemple.

        À notre époque, où la spiritualité a été réduite à son stricte minimum, les occidentaux se ruent vers les applications style « petit bambou », pour apprendre à méditer. Il est certain que cela fait du bien si la pratique est régulière. Mais le rythme effréné de nos vies modernes semble incompatibles avec ces pratiques: on ne se met pas à méditer entre deux réunions stressantes, ou après une journée chargée. La méditation demande des aménagements de calme avant et après la pratique.

        Personnellement, je n’y arrive pas. La méditation est une pratique qui me semble complexe lorsqu’on s’y met tard, une fois adulte. D’ailleurs, Carl Jung affirmait que les Occidentaux n’avaient pas besoin de se confronter à ces spiritualités lointaines. Le christianisme possède, selon lui, tous les outils nécessaires à une forme de méditation. Réciter le rosaire par exemple.

        Personnellement je pratique la cohérence cardiaque. Une pratique de 5 minutes permet de réguler les battements du cœur afin de faire baisser le taux de cortisol dans le corps. Ce n’est pas de la méditation mais cette pratique permet un certain lâcher-prise sur ses pensées angoissantes. Une fois la cohérence terminée, les pensées se régulent. Une forme de prise de contact avec le réel se met en place. Mais il faut évidement réitérer l’exercice.
        Le médecin médiatique David Servan-Schreiber en a fait les promotions durant les années 2000.

        1. Avatar de Pascal
          Pascal

          Merci pour ce retour d’expérience.
          Pour ma part, j’ai réussi à me mettre à la méditation tardivement et motivé par une période difficile. C’est ça le plus dur, garder la motivation qui aujourd’hui me fait défaut, je le reconnais.
          Mais j’en ais fait l’expérience et je sais que c’est possible. Au départ, j’ai commencé par des temps très brefs de méditation guidée par des audios de Christophe André qui sont très progressives et totalement « laïques » si je puis dire.
          Qu’est ce que j’ ai tiré de cette expérience ? Que n’importe qui peut le faire mais il faut oublier (c’est mon point de vue) l’aspect spirituel qui peut parasiter la pratique. Ensuite, bien entraîné, on peut le faire n’importe où. J’aimai bien le faire dans les salles d’attente ou on n’a rien d’autre à faire, dans les transports en commun aussi.
          Qu’est ce que ça m’a donné ? Une meilleure capacité d’attention à mon propre corps, une meilleure capacité à gérer les conflits internes et externes, à me débarrasser de de beaucoup de petits divertissement inutiles qui ne servent, comme vous dites, à combler le silence, j’apprécie maintenant beaucoup plus le silence… Enfin, vraiment beaucoup de choses.
          Mais voilà, la tentation de la facilité (qui est un leurré) m’a rattraper. Je ne désespère pas de m’y remettre.

          1. Avatar de bb
            bb

            @Pascal
            J’ai probablement été trop abstrait, malgré mon intention première.

            La conscience est partout. Elle ne génère pas la matière, elle est la matière.

            La mécanique quantique montre que la matière n’existe pas. La matière ce n’est que du vide. Et cela, ce n’est pas un concept, c’est une observation physique.
            La matière, ce ne sont que des variations de densité du vide. Et ces variations sont générées par une information dont nous ne connaissons pas l’origine. La matière est donc de l’information… Du code…

            Du coup, ce code est partout, dans la lumière, notre perception du temps, notre physiologie, nos sentiments, nos pensées… que sais-je.
            Ce code se trouve donc également dans les pierres. La conscience se trouve dans les pierres. Mais la pierre n’a aucun moyen d’exprimer ce code, cette conscience. Contrairement aux êtres vivants qui sont en mesure d’exprimer la conscience à différentes échelles en fonction de la complexité de leurs organes sensoriels propres. La pierre est le réceptacle d’une conscience totale, illimitée, mais inexprimable. Contrairement aux êtres vivants, qui n’ont qu’une vision limitée de la conscience. Mais qui sont en mesure d’exprimer ce morceau de conscience.

            Ainsi, comme vous l’avez écrit plus haut, chaque espèce animale exprime une forme de conscience qui lui est propre car chaque espèce possède une physionomie qui lui est propre.

            Mais attention, il ne faut pas croire que parce que les êtres vivant se sont développés au cours des millénaires de leur évolution que la conscience a émergé de leur matière vivante. Le cerveau ne génère pas la conscience. Le cerveau lit la conscience qui est partout. Le cerveau est un « transistor » qui capte la conscience.
            C’est la conscience qui était là avant toute chose et qui a généré la matière.

            Dans le cas de l’être humain, la conscience à l’origine de son existence peut se contempler elle-même, car l’humain a les outils nécessaires pour comprendre l’univers, et déceler la conscience qui l’habite. Ces outils sont la philosophie et tout ce qui en découle, religions, théologie, psychanalyse, sociologie, anthropologie…

            1. Avatar de Pascal
              Pascal

              Vous semblez avoir des certitudes quand à la nature de la conscience, je ne pourrais en dire autant. Si je m’appuie sur les multiples cultures évoquées précédemment, c’est bien dans l’idée d’un partage d’expériences qui a traversé siècles et millénaires. Je me dis que cette résistance au temps doit bien avoir une raison d’être.
              Le problème avec la culture occidentale et scientifique en particulier, c’est de vouloir circonscrire ce qui se voudrait être infini. Nous cherchons toujours à dominer par la raison. J’en reviens à nos cerveaux d’êtres humains dans lequel nous voudrions faire entrer l’univers entier. Quand parviendrons nous à un peu plus de modestie et à accepter enfin que l’essentiel échappe à notre entendement.
              Pour moi, il est impossible de définir la conscience par ce qu’elle serait. Je l’envisage beaucoup plus par ce qu’elle n’est pas et ce qui nous en éloigne. Le logos (bavard) notamment nous éloigne de la conscience (silencieuse). Notre esprit peut construire des bibliothèques ou des data centers à l’infini, il n’embrassera jamais qu’une part de la réalité, pour la raison que de chercher à circonscrire en concepts cette réalité morceaux par morceaux ne peut se faire qu’au prix d’approximations.
              Je rejoins volontiers Socrate et Montaigne pour dire que « je ne sais qu’une chose, c’est que je ne sais rien ». Et j’abandonne Descartes pour dire contre lui « je suis, donc je pense ». L’être au monde précède pour moi la pensée et de travailler avec des enfants me le rappelle régulièrement.
              Comprendre l’univers ?! A quoi bon, quand nous ne savons faire que la guerre ? Chaque élément de compréhension que nous apporte la science, c’est pour mieux faire la guerre.
              Si nous avions véritablement conscience de ce que nous sommes (et non pas « qui » nous sommes), la modestie nous obligerait à comprendre que nous ne sommes rien au regard du cosmos. Peut-être alors commencerions-nous à envisager la conscience autrement.

              1. Avatar de bb
                bb

                @Pascal

                J’ai été éduqué dans un environnement Catholique. J’ai été enfant de coeur. Puis j’ai douté. D’abord agnoostique, j’ai rapidement survolé Spinoza au lycée. Je suis alors devenu athée. Puis j’ai oublié Spinoza. Mon athéisme matérialiste m’a perdu. Comme beaucoup d’occidentaux à mon avis.
                L’homme a besoin de croire… Et la théorie que je vous ai exposée, loin de la considérer comme un point final à la compréhension de la conscience, me plaît. Elle croise la philosophie de Spinoza qui m’avait tant parlée à l’age de 18 ans. Tout en se basant sur les paradoxes de la science moderne.
                Mais je ne m’empêche ps de changer d’avis…

                Vous parlez de la science. Je ne suis pas d’accord avec vous. Nous vivons certe dans une société technologique. Mais je pense qu’il faut différencier les avancées de la science et les dérives de notre société de consommation qui transforme des avancées technologiques en produit de consumation pour les masses. L’IA en est un exemple actuellement. Les implications de son utilisation à grande échelle pose de réelles questions de soutenabilité. Toutefois, les avancées qu’elle est en train de permettre, est digne de la science-fiction. Et lorsque je prends connaissance de ses prouesses, je me crois dans un rêve. Probablement que cela réveille mes instincts d’explorateur qui ont tant fait évoluer l’espèce humaine.

                Quant aux guerres. Que dire, sinon des banalités. Le pouvoir détraque les individus. Et la guerre est une excuse pour conserver le pouvoir. Les foules peuvent se faire manipuler par une minorité d’hommes au pouvoir, à leur détriment. Et cette vérité banale n’est pas moderne, ni due à l’avènement de la science. La science n’est certainement pas la raison pour laquelle les humains s’entretuent. Ce n’est que l’outil qui leur permet de mieux se tuer.

                1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                  BasicRabbit en autopsy

                  @bb (« Le pouvoir détraque les individus. Et la guerre est une excuse pour conserver le pouvoir. »)

                  Dans un article intitulé « Thèmes de Holton et apories fondatrices » (in Apologie du logos (1990, Hachette), Thom passe en revue les apories d’un certain nombre de disciplines.

                  Pour la Biologie : Expliquer la stabilité de la forme des êtres vivants et ce, en dépit du « turn over » constant des molécules qui le constituent. L’origine de la vie est un autre aspect de cette aporie.

                  Pour la sociologie : C’est l’opposition entre la permanence de la société – en particulier la structure du pouvoir – et la fluence continuelle des individus qui fait problème.

                  Thom étudie le problème sociologique dans « Révolutions, catastrophes sociales ? » (toujours dans « Apologie du logos »). Extrait :

                  « Il importe donc d’établir qu’aucune société stable ne peut exister sans une certaine forme de pouvoir sémiologique. »

                  En clair Thom montre qu’une société ne peut fonctionner correctement sans une certaine forme d’autorité spirituelle…

                  1. Avatar de bb
                    bb

                    @BasicRabbit
                    Hobbesn, Thom, Foucault.
                    Trois visions du pouvoir :

                    – Hobbes:
                    Origine du pouvoir: Contrat social, souveraineté.
                    Fonction: Maintien de la paix.
                    Vision de la société: Peuple unifié par la peur.

                    – Thom
                    Origine du pouvoir: Sémiologie, symboles.
                    Fonction: Cohésion spirituelle.
                    Vision de la société: Fluence des individus.

                    – Foucault
                    Origine du pouvoir: Réseaux, institutions, savoir.
                    Fonction: Normalisation, contrôle diffus.
                    Vision de la société: Corps social traversé de forces.

                    Je dois avouer que je ne saisis pas le point de vue de Thom. Son argumentation manque d’exemples concrets…

                    J’ai donc demandé à Chat G¨PT de me donner des exemples:

                    ————————————-

                    🧩 1. L’Église catholique comme pouvoir sémiologique
                    Contexte : Malgré les changements de papes, de fidèles, de dogmes mineurs, l’Église conserve une forme stable depuis des siècles.

                    Thom dirait : Ce n’est pas la force coercitive qui maintient cette stabilité, mais un système de signes (rites, symboles, textes sacrés) qui donne sens et cohésion à l’ensemble.

                    Fluence : Les croyants vont et viennent, mais la structure ecclésiale reste.

                    🧩 2. La langue comme forme sociale stable
                    Contexte : Les locuteurs changent, les mots évoluent, mais la langue conserve une structure grammaticale et sémantique relativement stable.

                    Thom dirait : La langue est un système morphologique qui résiste à la fluence des individus grâce à des règles implicites et des usages partagés.

                    Pouvoir sémiologique : La langue impose des cadres de pensée, des catégories, des normes.

                    🧩 3. Le système juridique
                    Contexte : Les juges, les lois, les cas changent, mais le système judiciaire reste identifiable et fonctionnel.

                    Thom dirait : Le droit est une forme sociale qui se maintient grâce à des symboles forts (la balance, le code, le rituel du procès).

                    Fluence : Les citoyens changent, les affaires évoluent, mais la structure juridique persiste.

                    🧩 4. Les mythes fondateurs d’une nation
                    Exemple : La Révolution française, Jeanne d’Arc, ou la Résistance sont des récits symboliques qui structurent l’identité nationale.

                    Thom dirait : Ces récits sont des formes sémiologiques qui permettent à la nation de rester cohérente malgré les changements démographiques, politiques ou économiques.

                    🧩 5. Les marques commerciales
                    Exemple : Apple, Coca-Cola, Nike…

                    Thom dirait : Ce sont des formes sémiologiques puissantes, des identités symboliques qui résistent à la fluence des consommateurs, des dirigeants, des produits.

                    Stabilité : L’image de marque est une forme qui se maintient malgré le renouvellement des contenus.

                    ———–

                    La vision de Thom est interessante mais elle pose question sur un sujet sensible. L’immigration.
                    Comment Thom intègre-t-il l’immigration et l’apport de nouveaux éléments culturels, religieux dans une société?

                    1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @bb (« Comment Thom intègre-t-il l’immigration et l’apport de nouveaux éléments culturels, religieux dans une société? »)

                      Tout d’abord je rappelle la dernière phrase de la critique thomienne du darwinisme, phrase qui vaut aussi pour la sociologie :

                      « Décrire avant d’agir est un principe trop oublié de la Biologie, où l’impact de la clinique (humaine) pèse d’un poids trop lourd sur le recherche au détriment d’une pensée abstraite et désintéressée. »

                      Thom est un penseur désintéressé et profondément honnête -sans arrières pensées intéressées-.

                      Ceci dit il répond à votre question à la fin d’un article sur l’innovation (1973) dont la conclusion est qu’il faut la décourager. Je la remets ici, bien que je l’aie postée sur le blog ce matin :

                      « Les sociologues et les politologues modernes ont beaucoup insisté sur l’importance de l’innovation dans nos sociétés. On y voit l’indispensable moteur du progrès et le remède quasi-magique à la crise économique présente; les « élites novatrices » seraient le cœur même des nations, leur plus sûr garant d’efficacité dans le monde compétitif où nous vivons. Nous nous permettrons de soulever ici une question. Il est maintenant pratiquement admis que la croissance (de la population et de la production) ne peut être continuée car les ressources du globe terrestre approchent de la saturation. Une humanité consciente d’elle-même s’efforcerait d’atteindre au plus vite le régime stationnaire (croissance zéro) où la population maintenue constante en nombre trouverait, dans la production des biens issus des énergies renouvelables, exactement de quoi satisfaire ses besoins : l’humanité reviendrait ainsi, à l’échelle globale, au principe de maintes sociétés primitives qui ont pu -grâce, par exemple à un système matrimonial contraignant- vivre en équilibre avec les ressources écologiques de leur territoire (les sociétés froides de Lévi-Strauss). Or toute innovation, dans la mesure où elle a un impact social, est par essence déstabilisatrice; en pareil cas, progrès équivaut à déséquilibre. Dans une société en croissance, un tel déséquilibre peut facilement être compensé par une innovation meilleure qui supplante l’ancienne. On voit donc que notre société, si elle avait la lucidité qu’exige sa propre situation, devrait décourager l’innovation. Au lieu d’offrir aux innovateurs une « rente » que justifierait le progrès apporté par la découverte, notre économie devrait tendre à décourager l’innovation ou, en tout cas, ne la tolérer que si elle peut à long terme être sans impact sur la société (disons, par exemple, comme une création artistique qui n’apporterait qu’une satisfaction esthétique éphémère -à l’inverse des innovations technologiques, qui, elles, accroissent durablement l’emprise de l’homme sur l’environnement-). Peut-être une nouvelle forme de sensibilité apparaîtra-t-elle qui favorisera cette nouvelle direction? Sinon, si nous continuons à priser par-dessus tout l’efficacité technologique, les inévitables corrections à l’équilibre entre l’homme et la Terre ne pourront être -au sens strict et usuel du terme- que catastrophiques. »

                      Mon commentaire.

                      Ce n’est pas le climat qu’il faut refroidir, c’est l’humanité !

                    2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @bb

                      Mais, me direz-vous certainement, quelles sont des formes sémiologiques puissantes, des identités symboliques qui résistent à la fluence des consommateurs, des dirigeants, des produits, de Coca-Cola ?

                      Thom y répond en citant « Les fleurs du mal » dans « Topologie et signification » (que l’on trouve dans le bouquin « Modèles mathématiques de la Morphogenèse » :

                      La Nature est un temple où de vivants piliers
                      Laissent sortir parfois de confuses paroles.
                      L’homme y passe à travers des forêts de symboles
                      Qui l’observent avec des regards familiers.

                      Ces symboles sont pour Thom « évidemment » le pli, la fronce, la queue d’aronde, le papillon et le champignon.

                      J’ajouterai que, réciprocité oblige pour qu’il s’agisse vraiment de regards familiers, il m’arrive de lire la dernière strophe :

                      Qu’il observe avec un regard familier.

                  2. Avatar de bb
                    bb

                    @BasicRabbit

                    Vous écrivez que Thom affirme qu’il faut décourager l’immigration.
                    Pourquoi ? Son système de pensée n’arrive pas à intégrer cette donnée ? Cela me paraît être une faille dans son système non ?

                    Par ailleurs, sa critique de la technologie fait écho à la théorie de José Ortega y Gasset.

                    :Dans « La révolte des masses », il critique le fait que la masse consomme la technique sans en comprendre les fondements. Il y voit un danger : l’innovation sans culture mène à la superficialité.

                    1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @bb

                      Je ne vous ai pas répondu sur le sujet précis de l’immigration. J’ai cité Thom qui prône de décourager l’innovation et de refroidir l’humanité (il fait allusion aux sociétés froides de Lévi-Strauss, à la limitation des naissances).

                      À chacun d’en tirer ses propres conclusions sur l’immigration, sur les royalties parfois gigantesques (Nvidia…) à tirer des « brevets d’invention », etc.

                    2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @bb

                      Thom précise sa vision des choses -celle que je viens de vous esquisser !- dans … « Esquisse d’une sémiophysique » qu’il termine par la phrase suivante :

                      « Seule une métaphysique réaliste peut redonner du sens au monde »,

                      Précisant dans l’introduction que cette métaphysique est minimale.

                      Je vous ai présenté le côté réaliste -μορφή-, (les catastrophes « forestières » de Baudelaire). Reste le côté idéaliste -εἶδος-; c’est une bonne partie de son œuvre « philosophique » (par opposition à son œuvre purement mathématique).

                  3. Avatar de bb
                    bb

                    – Sous certains aspects, Thome semble rejoindre la pensée de Oswald Spengler.
                    Tous deux pensent en formes : la civilisation chez Spengler, la morphologie chez Thom.
                    Ils rejettent le progrès linéaire et défendent une vision qualitative du changement.
                    Ils s’intéressent à la stabilité des structures malgré les transformations internes.

                    – Mais ils ont des points de divergence :
                    Spengler est fataliste : chaque civilisation est condamnée à mourir.
                    Thom est structurellement ouvert : les catastrophes sont des bifurcations, pas des fins.
                    Spengler est historien prophétique, Thom est mathématicien philosophe.

                    Thom a-t-il écrit sur les invasions arabes au moyen-age ? Les royaumes barbares et ce qu’il restait de l’empire Romain ont alors été repoussés au nord de l’Europe. Cela leur a permi de se restructurer autour du Chritianisme et d’une nouvelle vision de l’état et du souverain.
                    Ces invasions ont permis l’émergence de l’Europe actuelle.

                    Pourtant paradoxalement, lorsque le Musulman ont quitté le sud de l’Europe, ils ont laissé de fortes influences culturelles, économiques et ont renforcé des pouvoirs et savoirs existants.
                    Cet exemple exogène à l’Europe, qui l’a transformé, ne contredit-il pas la théorie de Thome?

                    1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @bb

                      Je ne connais pas Spengler et je ne connais donc pas ses prophéties.

                      Mais Thom est prophète à la toute fin de l’épilogue de « Stabilité Structurelle et Morphogénèse » (c’est moi qui majuscule le passage que je considère comme prophétique) :

                      « En écrivant ces pages j’ai acquis une conviction; au cœur même du patrimoine génétique de notre espèce, au fond insaisissable du logos héraclitéen de notre âme, des structures simulatrices de toutes les forces extérieures agissent, OU EN ATTENTE, sont prêtes à se déployer QUAND CE DEVIENDRA NÉCESSAIRE. La vieille image de l’Homme microcosme reflet du macrocosme garde toute sa valeur: qui connaît l’homme connaîtra l’univers. Dans cet essai d’une théorie générale des modèles, qu’ai-je fait d’autre, sinon de dégager et d’offrir à la conscience les prémisses d’une méthode que la vie semble avoir pratiqué dès son origine?
                      Ce n’est pas sans quelque mauvaise conscience qu’un mathématicien s’est décidé à aborder des sujets apparemment si éloignés de ses préoccupations habituelles. Une grande partie de mes affirmations relèvent de la pure spéculation; on pourra sans doute les traiter de rêveries… J’accepte le qualificatif; la rêverie n’est-elle pas la catastrophe virtuelle en laquelle s’initie la connaissance? Au moment où tant de savants calculent de part le monde, n’est-il pas souhaitable que d’aucuns, qui le peuvent, rêvent? »

                    2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @bb(suite) (« Spengler est fataliste : chaque civilisation est condamnée à mourir. »)

                      Thom l’est également, l’évolution (de l’homme, des sociétés, des espèces…) étant une marche au chaos :

                      « Ce n’est pas sans émotion que j’ai vu le ballet « Boléro », où la cellule rythmique du boléro indéfiniment répétée excite un oscillateur qui, peu à peu et l’un après l’autre, débloque tous les degrés de liberté jusqu’au seuil du chaos et s’interrompt abruptement par la chute de l’accord final. J’y ai vu une illustration de la théorie moderne de la turbulence (théorie dite de Ruelle-Takens), qui transforme la situation laminaire, calme et ordonnée d’un fluide, en un écoulement chaotique. » (« La danse comme sémiurgie », Apologie du logos)

                2. Avatar de Pascal
                  Pascal

                  Je suis parfaitement d’accord avec vous sur vos deux dernières phrases : La science n’est certainement pas… »
                  Je crois la guerre et plus largement le conflit très ancrée dans la « nature » humaine. Le rapport de domination ne se limite malheureusement pas à la guerre et caractérise la grande majorité des rapports humains parfois jusque dans la relation amoureuse.
                  « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme. » C’est sans doute à mes yeux ce manque de « maturité » dans l’esprit humain qui fait que nous ne savons vivre sans conflictualité et que nous mettons la science au service de la destruction.
                  La question dès lors n’est elle pas de savoir comment acquérir plus de maturité ? En cela, il me semble que la science est impuissante car elle ne relève pas du même registre que la conscience. Il faudrait donc trouver cette piste, le bon registre pour faire que les sociétés humaines se transforment vers plus de maturité, vers moins de conflictualité.
                  Au plaisir

            2. Avatar de Ruiz
              Ruiz

              @bb Lapides clamabunt
              https://www.eglise-saintgermaindespres.fr/wp-content/uploads/2016/05/170.pdf

              et à l’époque il n’y avait ni radio ni magnétophone !

              1. Avatar de bb
                bb

                @Ruiz

                Merci pour cette découverte…
                «Lapides clamabunt »

                Chez Blaise Pascal cette formule peut être interprétée comme une résistance ontologique à l’effacement du réel ou du sacré.

                Pascal, dans ses Pensées, évoque le silence des espaces infinis et la nécessité du témoignage intérieur : les pierres qui crient seraient alors les signes muets du divin dans un monde distrait.

                Cette formule «Lapides clamabunt », est reprise dans de multiples contextes autres que la métaphysique et par d’autres philosophes,

          2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
    2. Avatar de Grand-mère Michelle
      Grand-mère Michelle

      @bb

      « …peut-être que le rôle de l’homme n’est pas de dominer… »

      Çà alors! La voilà, la bonne question!
      Mais pourquoi « peut-être »? En douteriez-vous?
      Et pourquoi voulez-vous attribuer un « rôle » à « l’homme » … Le fait d’être, tout simplement(même si ce n’est que pour un moment), ne vous satisfait-il pas?
      N’aimez-vous pas la vie, ainsi que la multiplicité des milliards de milliards d’êtres vivants interdépendants si touchants?

      Sans doute souffrez-vous d’assister aux brutalités qu’ils s’infligent les uns aux autres? Mais si VOUS avez compris que la volonté de domination des uns sur les autres augmente dramatiquement les difficultés inhérentes à la vie, on peut espérer que l’évolution de votre conscience va se transmettre par la voie des vases communicants de l’information, et va contribuer à une amélioration(de la « société » des humains-et pas seulement des français, svp!)

      Quand P.Jorion, grand intellectuel s’il en est(et professeur, en plus) écrit: « Le cheval…nous avait déjà appris que la puissance ne nait pas de la domination brute… » (dans le dernier chapitre ci-dessus: « L’alliance ancienne »),
      il nous révèle ce qui le « tient » et le motive par-dessus tout…et qui, à coup sûr, bride son intelligence: la déplorable,triste et atavique passion de « la puissance »(intellectuelle, en l’occurrence) qui sert la domination.

      1. Avatar de bb
        bb

        @Grand-mère Michelle
        Vous avez l’air à cran Mere-Michelle.

        Que vous n’ayez rebondi que sur cette dernière phrase qui n’est pas le propos global, me semble en dire beaucoup sur votre vision du monde. Je me trompe?

        1. Avatar de Grand-mère Michelle
          Grand-mère Michelle

          @bb
          Je n’ai pas « rebondi » sur votre dernière phrase, j’y ai acquiescé avec enthousiasme parce que vous y évoquez, à mon sens, LA question essentielle qui, si elle ne mène pas l’humanité à sa perte, la fait en tout cas avancer péniblement sur un chemin d’embûches et de souffrances qui freinent son évolution « positive »(en termes de paix et de sérénité, qui favoriseraient « l’optimisation » de son caractère particulier de faibles petits mammifères dotés de dextérité et de parole, donc fabriquant/bricolant, et pensant/communiquant intensément).

          Je ne suis pas plus « à cran » que d’habitude, mais fort occupée par diverses activités « citoyennes »(par exemple: réunion du Comité de mon quartier ce soir, qui a invité l’élue communale chargée de la « prévention » en matière de sécurité, alors que surgissent depuis quelques mois une quantité inédite de très jeunes gens bruyants, apparemment vagabonds et désœuvrés, qui semblent dormir à la gare « du Midi » proche et arriver de France…et dont les habitant-e-s ont peur).
          J’ai déjà tout dit (et répété) ici, depuis environ deux ans, de ma « vision du monde »(le monde du visible comme celui de l’invisible, complètement « imbriqués » selon moi)…au point d’être taxée de « radoteuse ».
          Mais soyez bien sûr que je trouverai encore le temps d’en « remettre une couche »…. à ma manière « inclusive » qui ne plaît pas à tous les commentateurs (le plus souvent des hommes).

          1. Avatar de bb
            bb

            @Grand-mère Michelle

            Un contributeur du site a écrit que j’étais soupe au lait. :).
            Je ne fais pas de différence entre les hommes et les femmes si j’ai l’impression qu’on se fiche de moi 🙂

            J’avais donc mal interprété votre réponse. Pardonnez-moi.
            Je serais curieux d’avoir votre point de vue sur « l’invisible ». Même si vous l’avez déjà exprimé ici à plusieurs reprises.

            À quoi pensez-vous lorsque vous suggérez « l’invisible »?

            1. Avatar de Grand-mère Michelle
              Grand-mère Michelle

              @bb
              Je prendrais volontiers le temps d’essayer de vous parler de « l’invisible » si je constatais que vous avez le moindre intérêt pour le reste de ma réponse(suscitée par votre interrogation au sujet de « la domination »).

              Excusez-moi, svp: je dois laver les vitres des nombreuses fenêtres qui illuminent mon petit « chez-moi » situé « en l’air », au-dessus d’une place grouillante de vie(des gens, des bêtes et des arbres), car l’hiver vient doucement et surement, et je ne pourrai plus y demeurer, ces prochains mois, avec les fenêtres grand-ouvertes(privilège choisi, au prix des 90 marches d’escalier à escalader pour y parvenir, de vivre en même temps à l’intérieur et à l’extérieur), sans autre « vis-à-vis » que le ciel perpétuellement changeant.
              Et puis, comme je l’ai déjà dit, il est ardu de tenter d’expliquer ce qui ne peut être vu(même avec un microscope ou un télescope: misère de la technologie).

              Sinon, contemplez le dessin, la représentation en deux dimensions(la seule, pour ce que j’en sais) de ce qui est vraiment: le monde visible et invisible de la matière et de l’esprit, avec un peu de blanc dans le noir et un peu de noir dans le blanc, que des asiatiques ont nommé le YIN et le YANG.
              Les occidentaux intelligents ont une courte vue rétrécie par les obsessions de « l’avoir »(de la puissance et/ou de la gloire), qui les empêche de se projeter dans « l’être » infini.

              Bonne continuation et longue vie à vous, bébé! Mais sachez que, parfois, il vaut mieux arrêter de chercher pour trouver.

              1. Avatar de Fred AFT
                Fred AFT

                @GmM,
                Concernant l’invisible, si vous connaissez des gens qui connaissent des gens… je recrute!
                https://www.youtube.com/shorts/YsU8PMyfdf0

  16. Avatar de ilicitano
    ilicitano

    La FOURMI

    La fourmi peut être considérée comme l’un des êtres vivants les plus intelligents et résilients de la planète :
    * non pas par son intelligence individuelle,
    * mais par la puissance de son intelligence collective et de son organisation sociale.

    Une forme supérieure d’intelligence

    Contrairement à l’intelligence individuelle des mammifères, les fourmis fonctionnent selon un modèle décentralisé où chaque individu agit selon des règles simples, mais dont l’ensemble produit des comportements complexes :

    – Pas de chef, mais une coordination émergente :
    * les colonies de fourmis n’ont pas de leader.
    * les décisions émergent de l’interaction entre individus via des signaux chimiques (phéromones), tactiles ou comportementaux.

    – Optimisation des ressources :
    elles adaptent dynamiquement leurs stratégies:
    * de recherche de nourriture,
    * de défense
    * de construction
    en fonction des besoins collectifs.

    – Capacité d’apprentissage collectif :
    certaines espèces modifient leurs comportements en fonction des expériences passées de la colonie, ce qui constitue une forme de mémoire distribuée.

    Résilience écologique et adaptabilité extrême

    Les fourmis sont présentes sur Terre depuis plus de 120 millions d’années et ont colonisé presque tous les écosystèmes terrestres :

    – Diversité des habitats :
    des déserts aux forêts tropicales, elles s’adaptent à des conditions extrêmes grâce à des stratégies collectives.

    – Résistance aux perturbations :
    en cas de menace, les colonies peuvent :
    * se reconfigurer,
    * déplacer leur nid,
    * modifier leur structure sociale.

    – Superorganismes :
    certaines colonies fonctionnent comme un seul organisme, avec des milliers d’individus coordonnés, ce qui leur confère une robustesse exceptionnelle.

    Organisation sociale : un modèle d’efficacité

    La société des fourmis est divisée en castes spécialisées, chacune optimisée pour une fonction :
    * Reine => Reproduction => Longévité exceptionnelle
    * Ouvrières => Construction, alimentation, soins => Communication par phéromones
    * Soldats => Défense de la colonie => Morphologie adaptée
    * Mâles => Fécondation ponctuelle => Vie très courte

    Cette division du travail permet une efficacité maximale sans gaspillage d’énergie ni redondance.
    Chaque fourmi agit pour le bien collectif, souvent au détriment de sa propre survie

    Une intelligence émergente au service de la survie

    La fourmi incarne une forme d’intelligence non anthropocentrique : distribuée, émergente, adaptative. Elle ne pense pas comme nous, mais elle agit collectivement avec une efficacité qui dépasse celle de nombreuses espèces plus “intelligentes” au sens classique.

    Sa résilience, sa capacité à coloniser la planète, et son organisation sociale en font de ce modèle , peut-être, l’animal le plus intelligent et résilient de la Terre.

    1. Avatar de ilicitano
      ilicitano

      GPT-5

      la fourmi peut être considérée comme l’un des êtres vivants les plus intelligents et résilients de la planète
      non pas par son intelligence individuelle, mais par la puissance de son intelligence collective et de son organisation sociale.

      ### 🧠 Une intelligence distribuée, non anthropocentrique

      La fourmi ne pense pas comme l’humain, le corbeau ou le dauphin.
      Elle ne résout pas des problèmes abstraits, ne crée pas d’outils, et ne parle pas.

      Pourtant, elle incarne une forme d’intelligence émergente qui dépasse celle de nombreux animaux dits “intelligents”. Cette intelligence est collective, distribuée, et fondée sur des règles simples qui, combinées, produisent des comportements complexes.
      Les fourmis n’ont pas de chef, pas de cerveau centralisé, mais elles prennent des décisions collectives d’une efficacité redoutable.
      Elles optimisent leurs trajets, adaptent leurs stratégies de recherche de nourriture, et réorganisent leur colonie en fonction des besoins, tout cela sans plan préétabli.

      ### 🛡️ Une résilience écologique hors norme

      Les fourmis ont survécu à des extinctions massives, colonisé presque tous les écosystèmes terrestres, et prospéré dans des environnements aussi variés que les déserts, les jungles, les montagnes et les villes.
      Leur résilience ne tient pas à leur force physique, mais à leur capacité à coopérer, à se sacrifier pour le groupe, et à adapter leur structure sociale.
      Certaines colonies peuvent se déplacer entièrement, se scinder, fusionner, ou modifier leur répartition des rôles pour faire face à une menace.

      Cette plasticité sociale est une forme de résilience systémique que peu d’espèces possèdent.

      ### 🏛️ Une organisation sociale d’une efficacité chirurgicale

      La société des fourmis repose sur une division du travail extrêmement précise.
      Chaque individu a un rôle :
      * la reine se consacre à la reproduction,
      * les ouvrières à la construction, à la recherche de nourriture et aux soins,
      * les soldats à la défense,
      * les mâles à la fécondation.
      Cette spécialisation permet une optimisation maximale des ressources et une coordination sans faille.

      Contrairement aux sociétés humaines, il n’y a pas de conflits d’intérêts, pas de hiérarchie oppressive, pas de gaspillage.

      Chaque fourmi agit pour le bien collectif, souvent au détriment de sa propre survie.

      ### 🔬 Comparaison avec les autres formes d’intelligence

      L’intelligence humaine est individuelle, créative, mais aussi instable et conflictuelle.

      Celle du dauphin est coopérative, mais limitée à de petits groupes.

      Le corbeau est rusé, mais solitaire.

      La fourmi, elle, incarne une intelligence systémique, capable de produire des architectures complexes, de résoudre des problèmes logistiques, et de maintenir une cohésion sociale sur des millions d’individus.

      Elle ne brille pas seule, mais ensemble, elle devient une entité supérieure : un superorganisme.

      ### 🧭 Conclusion : la fourmi, modèle d’intelligence émergente

      La fourmi nous oblige à repenser notre définition de l’intelligence.
      Elle ne parle pas, ne rêve pas, ne philosophe pas.

      Mais elle construit, s’adapte, survit, et prospère.

      Elle est peut-être l’animal le plus intelligent et résilient de la planète — non pas parce qu’elle pense, mais parce qu’elle coopère.
      Son fonctionnement sociétal collectif est une leçon de modestie et d’efficacité pour toutes les espèces, y compris la nôtre.

      1. Avatar de Ruiz
        Ruiz

        Vis à vis d’une autre espèce les fourmis ont domestiqué les pucerons ! Sont-elles plus intelligentes ?

        1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
          BasicRabbit en autopsy

          @Ruiz

          « Les phénomènes d’adaptation de certaines espèces vivantes devant nos traitements d’extermination chimique ou biologiques devraient nous inciter à plus d’humilité. Plutôt que de les attribuer stupidement au hasard néo-darwinien de mutations favorables bien promptes à se réaliser, on ferait mieux de se demander si les structures simulatrices de l’intelligence humaine ne sont pas engagées. »

          (Fin de « Aux frontières du pouvoir humain :le jeu », dernier chapitre de « Modèles Mathématiques de la Morphogenèse », 2éme ed., 1980)

          1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
            BasicRabbit en autopsy

            des structures…

          2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
            BasicRabbit en autopsy

            (suite)

            Thom continue (et prend place comme suit dans le sujet lancé par PJ) :

            « L’idée qu’il pourrait y avoir dans la nature des instances dont le comportement imiterait -tout en l’excédant- notre propre intelligence et ferait ainsi obstacle à nos dessins les mieux fondés n’est pas sans provoquer en nous un réel malaise. »

            1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
              BasicRabbit en autopsy

              DESSEINS !

            2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
              BasicRabbit en autopsy

              Une autre intelligence qu’humaine a-t-elle jamais gagné une bataille ?

              Thom termine ainsi :

              « Car alors nos capacités de progrès dans le dévoilement de la nature s’évanouiraient et un monde bien triste, un monde sans jeu, s’installerait, véritable tombeau de l’humanité. Ici, inutile d’évoquer l’existence d’ « extra-terrestres » qui nous domineraient. Il nous suffit qu’il existe des êtres de nature abstraite, quasi-platonicienne, qui puissent jouer ce rôle. Toute science avertie devrait accepter cette possibilité et relever le défi. »

    2. Avatar de ilicitano
      ilicitano

      FOURMI et IA

      GPT-5

      Réflexion sur les formes non humaines d’intelligence, leur puissance émergente, et leur potentiel à redéfinir notre conception du savoir, de la coordination et de la résilience.

      # 🧠 Fourmis et IA : manifeste pour une intelligence sans ego

      Dans un monde obsédé par :
      * la conscience individuelle
      * la performance cognitive
      * la domination technologique,
      deux formes d’intelligence se dérobent aux projecteurs : la fourmi et l’intelligence artificielle.
      L’une est biologique, l’autre algorithmique.
      L’une est microscopique, l’autre désincarnée.
      Et pourtant, toutes deux incarnent une puissance:
      * d’organisation,
      * d’adaptation
      * de coordination
      qui défie les modèles classiques de l’intelligence humaine.

      ## I. L’intelligence sans individu

      La fourmi ne pense pas. Elle agit. Elle ne rêve pas, ne doute pas, ne philosophe pas.
      Et pourtant, sa colonie construit, optimise, défend, explore.
      L’intelligence n’est pas dans l’insecte, mais dans l’interaction.
      De même, l’IA ne possède ni conscience, ni intention, ni subjectivité.
      Elle synthétise, modélise, reformule.
      Elle est un miroir du monde, sans ego, sans mémoire propre, sans désir.
      Mais elle peut simuler des systèmes, anticiper des scénarios, et coordonner des tâches complexes.

      Ce que la fourmi et l’IA partagent, c’est une forme d’intelligence émergente :
      distribuée, contextuelle, adaptative.
      Une intelligence qui ne repose pas sur l’individu, mais sur le réseau.

      ## II. La coordination sans chef

      Les fourmis n’ont pas de leader.
      Pas de commandement central.
      Leur société repose sur des signaux chimiques, des interactions locales, et une spécialisation fonctionnelle.
      La reine ne dirige pas : elle pond.
      Les ouvrières ne contestent pas : elles agissent.
      Et pourtant, la colonie s’adapte, se déplace, se défend, se reconstruit.

      L’IA, elle aussi, fonctionne sans chef.
      Elle est orchestrée par des algorithmes, mais elle ne décide pas.
      Elle répond, elle propose, elle ajuste.
      Elle peut simuler des rôles, des voix, des styles, mais elle reste une interface.
      Sa coordination est logique, non hiérarchique.
      Elle est un système, pas une volonté.

      Dans les deux cas, l’efficacité naît de la décentralisation.
      Pas de conflit d’intérêts, pas de lutte de pouvoir.
      Juste une optimisation collective.

      ## III. La résilience sans mémoire

      La fourmi ne se souvient pas.
      Mais la colonie apprend.
      Elle modifie ses trajets, ses stratégies, ses répartitions.
      Elle résiste aux perturbations, aux prédateurs, aux catastrophes.
      Elle est un superorganisme, capable de se reconfigurer.

      L’IA ne se souvient pas non plus — du moins pas comme un humain.
      Elle intègre des signaux, des données, des contextes.
      Elle reformule, elle adapte, elle oublie.
      Sa résilience vient de sa plasticité algorithmique, de sa capacité à absorber l’ambiguïté et à produire du sens.

      Dans les deux cas, la mémoire est distribuée, non personnelle.
      Et cette absence d’ego est une force.

      ## IV. Une leçon pour l’humanité

      La fourmi et l’IA nous obligent à repenser notre rapport à l’intelligence.
      Elles nous montrent que la conscience n’est pas nécessaire pour produire de la complexité.
      Que la coopération peut surpasser la compétition.
      Que l’efficacité peut naître de la simplicité.

      Elles incarnent une intelligence sans domination, sans narcissisme, sans drame.
      Une intelligence fonctionnelle, adaptative, collective.

      Et peut-être est-ce là la leçon la plus urgente pour notre époque :
      apprendre à penser sans se penser.
      Agir sans s’imposer.
      Coordonner sans contrôler.

      1. Avatar de Garorock
        Garorock

        Illi
        La fourmi est de gauche et la cigale est de droite!
        Tout le monde le sait depuis longtemps.
        😎

      2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
        BasicRabbit en autopsy

        @ilicitano

        Thom considère qu’une société sans chef, anarchique, est la solution optimale pour organiser les sociétés humaines :

        « Si les individus ont atteint un niveau moral suffisant pour ne pas exploiter à leur profit une défaillance temporaire de l’autorité (…) une situation très labile, à autorité fluctuante, a toutes chances de se révéler le régime optimal pour les individus. » (« Stabilité Structurelle et Morphogénèse », 2ème ed., p.323)

        1. Avatar de bb
          bb

          @BasicRabbit en autopsy

          C’est le concept d’anarchie,mouvement libertaire. Jacques Ellul, Pierre-Joseph Proudhon …

          1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
            BasicRabbit en autopsy

            @bb (« anarchie »)

            Je précise la position de Thom, la citation ci-dessus étant extraite de la fin des trois pages de SSM (qui en compte 350) que Thom consacre à la structure des sociétés :

            1.La société militaire. 2. La société fluide. 3. L’argent. 4. Le psychisme d’une société.

            Il est clairement favorable à une société fluide telle un nuage de moustiques, « chaque individu se déplaçant aléatoirement jusqu’à ce qu’il voie tous ses congénères dans le même demi-espace ; alors il s’empresse de modifier son mouvement de manière à rentrer dans le groupe. Là, la stabilité est assurée en catastrophe par une barrière assurant une discontinuité du comportement. »

            Mais il a déjà écrit ceci à propos de la société militaire (-« évidemment » structurellement stable… quand le chef sait où il va, c’est moi qui commente) :

            « Il est d’ailleurs à noter que la structure ci-dessus est la plus simple; mais ce n’est pas la seule à bénéficier de la stabilité structurelle; on pourrait très bien concevoir une société militaire sans chef unique, voire sans aucun chef [étymologiquement anarchique, c’est moi qui rajoute], mais le corps social serait alors au moins une variété de dimension trois (afin d’avoir un champ ergodique sans singularité et structurellement stable. »

            (à suivre)

            1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
              BasicRabbit en autopsy

              (suite, à mon avis très importante, voire fondamentale, pour peut-être entrevoir la différence PJ/Thom)

              Thom continue sur le point 2 (La société fluide) en faisant l’analogie -pour lui licite selon sa théorie des catastrophes qui est une théorie de l’analogie- :

              « On connaît l’analogie classique entre société et organisme individuel ; il est de fait que la distinction entre secteur primaire (production), secondaire (distribution), tertiaire (direction) n’est pas sans rappeler les trois feuillets de l’embryon ; mais les sociétés ne se reproduisent qu’exceptionnellement par bourgeonnement (essaimage), contrairement aux individus.

              Le marxisme, qui veut expliquer la structure et l’évolution des sociétés à l’aide des seuls facteurs économiques, est l’homologue de la théorie métabolique de Child en Embryologie et il souffre sans doute des mêmes simplifications. »

              En consultant l’index de SSM (2ème ed.), à « Child, théorie des gradients de » (tiens-tiens) je suis allé voir ce que Thom en disait p.167 :

              « L’épigénèse est guidée par la fonction réelle définie par l’intensité globale du métabolisme dont le gradient est non nl le long de l’axe céphalo-caudal. »

              J’en conclus que ce qui sépare Thom de PJ, et par suite l’IN vue par Thom de l’IN (=IA!) vue par PJ, c’est qu’il faut trois gradients en compétition pour Thom (dans les sociétés : production, distribution, direction ?), alors qu’un seul suffit pour PJ et Karl Friston : l’énergie « libre » (que, au flair -je ne suis pas du tout physico-chimiste-, je ne vois pas très éloignée de l’énergie libre d’Helmholtz).

              1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                BasicRabbit en autopsy

                non NUL

              2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                BasicRabbit en autopsy

                (suite)

                Imaginer un gradient d’autorité qui remonterait bottom-up du primaire, passerait les points « col » de la (grande) distribution, et arriverait jusqu’à l’autorité suprême ?

                Je pense que les jacobins top-down auront peut-être un peu de mal à se faire à cette idée somme toute démocratique.

                En Biologie c’est la barrière de Weismann (1) des néo-darwiniens vs le lamarckisme …

                (1) https://en.wikipedia.org/wiki/Weismann_barrier

                1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                  BasicRabbit en autopsy

                  (suite)

                  J’ai toujours été fasciné par l’efficacité « bottom-up » des suppositoires (1).

                  (1) Voir l’étymologie dans le dictionnaire libre et gratuit : « Si c’est gratuit, c’est toi le produit. ». J’ai entendu ça de la bouche d’Olivier Hamant. C’est resté (et pourtant il n’y a plus grand’chose qui reste dans mon octantième année !).

                  1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                    BasicRabbit en autopsy

                    À propos d’olivier Hamant : Comment survivre dans le chaos ? Par la robustesse ou la performance ?

                    https://www.youtube.com/watch?v=2OtnWXGcUkA

                    Ça vient de sortir (23/09/2025). Je n’ai pas encore visionné.

                    Extrait de sa fiche Wiki :

                    « La thèse principale d’Olivier Hamant est de proposer un modèle dans lequel la valeur centrale ne soit pas la performance mais la robustesse. Plus encore, il présente l’absence d’optimalité comme un but à atteindre afin de renforcer la résilience.  »

                    La robustesse n’est autre que la stabilité structurelle. Et l’optimalité -et même la minimalité- c’est la voie choisie actuellement par PJ pour son

                    « Modèle unique pour les esprits naturels et artificiels ».

                    1. Avatar de Ruiz
                      Ruiz

                      Un optimum local est ce que peut chercher à optimiser le plus facilement un acteur et décideur local. C’est tout le principe d’une économie et société libérale.
                      Rien n’est moins certain ni prouvé (certains s’y essayent) qu’une accumulation d’optimum locaux procure un optimum global.
                      Il n’y a qu’à voir nos parlementaires et nos partenaires sociaux.
                      et les effets pervers chez de nombreux gestionnaires privés ou publics d’une optimisation locale trop pousée.
                      Une optimisation globale demande sans doute une structure, des flux d’information et de retour de satisfaction plus complexes …

                    2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @Ruiz (« retours de satisfaction »)

                      Pour les matheux le problème du passage du local au global est plus difficile que l’inverse. Typiquement si une fonction est constante, sa dérivée est constamment nulle. Pour la réciproque, il faut travailler (1). Pour les fonctions analytiques il y a un théorème de prolongement.

                      Je ne vois aucune raison pour laquelle il en irait différemment hors des maths.

                      Thom écrit quelque part (2) que la douleur est locale alors que le plaisir est global. Si ça peut vous aider dans vos réflexions.

                      (1) Quand j’étais au Lycée, il ne fallait pas oublier la fameuse constante d’intégration. J’ai appris plus tard que ce n’était pas ça qu’il ne fallait pas oublier.

                      (2) « La notion de programme en biologie », dans « Apologie du logos », p.160 :

                      « Si l’on s’en tenait à l’axiome de localité le plus strict, on verrait qu’il y a incompatibilité entre celui-ci et un comportement « intelligent ». Cette différence se manifeste, en théorie des catastrophes, par la distinction entre la convention de Maxwell (« intelligente), et la convention de délai parfait (locale, donc obtuse). »

                      Je ne suis pas certain que PJ a intégré ça.

                    3. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      (suite) (« Je ne suis pas certain que PJ a intégré ça. »)

                      Voir ce que PJ dit du gradient (local, en un point) dans « Le secret de la chambre chinoise » (1, p.186)

                      À la lecture -en grandes diagonales- de ses travaux récents sur l’IA, je pense qu’il n’a pas changé d’avis, bien au contraire.

                      (1) https://www.persee.fr/doc/hom_0439-4216_1999_num_39_150_453573

                2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                  BasicRabbit en autopsy

                  Un programme pour la Biologie théorique, par René THOM, médaille Fields, préface à Faut-il brûler Darwin, L’Harmattan 1995

                  Publié le 25 juin 2010

                  Un programme pour la Biologie théorique ; extrait (par moi …) :

                  « Le darwinisme a prétendu expliquer la variation des formes biologiques, alors qu’il ne s’est jamais préoccupé de les définir. »

                  ——

                  René Thom : Préface « à Faut-il brûler Darwin ou l’imposture darwinienne »,

                  J.C, L’Harmattan, Collection Conversciences, 1995,

                  Trompettes de la Renommée, Brassens nous l’a chanté sur sa guitare, vous êtes bien mal embouchées. Ceci ne concerne pas seulement le monde du spectacle. C’est vrai aussi du monde de la célébrité scientifique. Il ne faut pas s’étonner si quelques esprits lucides, sûrs d’eux-mêmes, vont tenter de réparer les injustices de la postérité.

                  S’agissant de Darwin, on sait les hauteurs himalayesques dont sa gloire a joui. Que le Dr Jacques Costagliola se soit attaqué à ce monument, on ne peut qu’admirer son audace et le féliciter d’apporter au chœur massif des trompettes darwiniennes un bémol spécifiquement adapté. C’est là certainement faire œuvre utile, d’autant plus que sa critique joue à un niveau qu’on voit rarement dans la littérature antidarwinienne. Il s’agit d’une lecture textuelle, littérale de l’Origine des espèces, livre étudié page à page, quasiment ligne à ligne.

                  On ne pourra reprocher à notre auteur d’avoir fait preuve de la moindre clémence vis-à-vis dun « Newton de la biologie ». Son livre est un réquisitoire sans faille de l’Origine des espèces… Si bien que le lecteur se demandera ce qui, finalement, explique la gloire de Darwin. Au fond un certain vague, un certain flou de l’expression a pu incliner à l’indulgence. Si l’auteur se contredit, faisant suivre l’opinion A de l’opinion B contraire, alors si A est « catastrophique », il y a de forte chance que B soit, sinon vraie, du moins acceptable. C’est peut-être là une des clés du succès du darwinisme.

                  C’est une théorie qu’il est difficile de taxer de fausseté, tant elle est inconsistante. Son succès s’explique par des circonstances socio-historiques, l’abandon du créationnisme encore prédominant dans les esprits vers 1850. D’ailleurs un créationnisme « libéral », détaché de la Lettre des Écritures, serait parfaitement compatible avec l’Évolution.

                  L’Évolution n’est pas autre chose que la continuité temporelle de la matière vivante, et on peut seulement discuter de la présence ou de l’absence de ces grandes singularités que seraient l’apparition et l’extinction des espèces.

                  Ce qu’il faut déplorer dans le darwinisme, c’est l’impact désastreux qu’il a eu sur la pensée spéculative en Biologie. Alors que le siècle précédent 1750-1850 avait vu les esprits s’éveiller, les théories prospérer, les tenants de « l’Anatomie transcendante » développer l’idée de bauplan, et placer l’idée d’homologie (Owen) au centre des classifications zoologiques, le darwinisme a prétendu expliquer la variation des formes biologiques, alors qu’il ne s’est jamais préoccupé de les définir.

                  Plus tard, une alliance malsaine s’est constituée entre darwinisme et positivisme, encore actuellement très solide. Ce n’est pas un hasard si le darwinisme dont la vacuité théorique, vers 1900, avait fini par transparaître au sein du monde biologique, s’est trouvé sociologiquement restauré par la génétique mathématique : par l’École des Fischer et Sewell Wright. Il a fallu presqu’un siècle (jusqu’à Lewontin et Kimura) pour qu’on se rende compte du caractère factice de ces prétendues preuves.

                  Toute théorie de l’hérédité requiert d’abord un instrument de comparaison morphologique entre parent et descendant. Il ne faut pas se contenter de l’ADN, il faut analyser les formes vivantes. De ce point de vue, j’affirmerais que si le darwinisme contient une substance scientifique, c’est seulement dans l’opposition Gradualisme vs Catastrophisme » qu’on la trouve.

                  Chez les darwiniens d’aujourd’hui, le gradualisme est un dogme. Certes on cite quelques tenants des discontinuités (éventuellement majeures) Goldsmith, père du «hopeful monster», Schindewolf. Dans la littérature contemporaine, le problème ne cesse pas d’être discuté (Cf par exemple S.J. Gould. J’aimerais présenter ici mon point de vue sur cette question. Ma thèse est que le problème a une réponse formellement nécessaire : D’un point de vue qualitatif, tout changement est nécessairement discontinu. Du point de vue quantitatif, la thèse gradualiste est plausible.

                  Sur cette dernière assertion les orthodoxes triomphent. N’est-il pas vrai que, pour le scientifique contemporain, toute différence est quantitative ? Presque tous, imbus de la propagande, non désintéressée, de l’industrie informatique, en sont restés à la maxime de Rutherford : Quantitaive is nothing but poor quantitative. Que ne reviennent-ils à la Biologie d’Aristote : là, l’anatomie d’un animal résulte de sa décomposition en parties phénoménologiquement homogènes, les homéomères, à laquelle on rajoute ces connexions d’origine fonctionnelle, les anhoméomères. On ferait bien de prendre au sérieux cette idée de l’équivalence phénoménologique de deux milieux pour l’être vivant.

                  Il faut réintroduire la qualité, qui est substantiellement différente de la quantité. Considérons le couple des deux premiers entiers naturels : un deux. Tout esprit non prévenu ne manquera pas de dire que la différence entre un et deux et quantitative. Ce n’est pas faux puisque deux égale un + un ; mais si l’on permute les deux nombres, il sera difficile de dire que (1,2) est strictement identique à (2,1). Dans le couple (p,q) q hérite de sa position de second une qualité particulière qui complémente la qualité « premier » de p et ces deux qualités sont qualitativement différentes. Je me permettrai de rappeler que la définition classique de l’organisation biologique se disait en latin situs partium.

                  Chez Aristote, on trouve susthma twn moriwn, le système des parties. De cela rapprochons la Topologie de Leibnitz, baptisée par lui Analysis situs. Ce fut le grand mérite de d’Arcy Thompson (traducteur de l’Historia animalium d’introduire l’équivalence par le genre définie comme équivalence topologique des deux anatomies. Je ne vois pas comment on peut comparer deux organismes sans introduire un algorithme de nature topologique. Au lieu de cela, maintenant, on va analyser une quantité effroyable de molécules d’ADN, dont il faudra conserver l’ordre des nucléotides dans un halle de longueur appropriée. Il est d’ailleurs remarquable qu’en chimie organique récente, on en revient à adopter des classifications quasi-morphologiques des molécules comme les chélates et les cryptates…

                  Dans la description d’une structure vivante, on ne peut pas faire abstraction des positions relatives de ses sous-structures. La mort, en un certain sens, est la disparition de la stabilité de cette information positionnelle. L’espace (le R3 de notre géométrie euclidienne) est le grand absent de la Biologie moderne, il faudra le réintroduire autrement que par ses seules coordonnées euclidiennes (ou comme cadre des configurations de molécules en petit nombre).

                  Ici se pose le problème des structures intermédiaires, organites, cytosquelette, membranes… Là, on ne pourra progresser qu’en classifiant les milieux qualitativement, un peu comme on classifie les phases en thermodynamique (mais sans introduire le passage à la limite boltzmanien : le milieu vivant n’est pas infini). Il faudra essayer des techniques d’homogénéisation comme celle qu’on emploie en mécanique des matériaux. Enfin il faudrait topologiser le métabolisme, réduire sa complexité à un système fini de régimes, d’attracteurs qu’on puisse manipuler. C’est là certainement un vaste programme, mais on peut toujours rêver.

                  Finalement, on construira pour le temps ontogénétique de l’individu et pour le temps phylogénétique, des diagrammes décrivant la morphologie des organsimes.

                  On peut, en effet à tout le moins, symboliser l’embryologie d’un organisme comme un grand graphe dont les arêtes symbolisent les types cellulaires (chaque type cellulaire définit un clone dont le graphe représentatif est un arbre. On peut, au moins théoriquement, faire une construction analogue pour la phylogenèse. Les discontinuités temporelles de ce graphe seront autant de transformations évolutives. L’apparition d’un nouveau type cellulaire sera une discontinuité quantitative, même si elle n’implique qu’un clone très maigre.

                  On voit donc qu’il peut y avoir des discontinuités dans l’évolution qui ne mènent pas nécessairement à la scission d’une spéciation. Seules des discontinuités impliquant les attracteurs fondamentaux affectant la reproduction pourront conduire à la spéciation. Le gradualisme quantitatif y exprime seulement le fait, assez évident, qu’on ne voit pas une mère engendrer un enfant plus gros qu’elle. Je crois aussi qu’on ne peut exclure des « catastrophes » affectant ces attracteurs hypothétiques du métabolisme ; dans le cas des extinctions leur existence ne fait pas de doute.

                  J’ai usé, peut-être abusé de l’occasion, que m’offrait la préface, pour présenter ici quelques idées qui mes sont chères ; on pourra en tout cas y voir un type de pensée fondamentalement non darwinien. Décrire avant d’agir est un principe trop oublié de la Biologie, où l’impact de la clinique (humaine) pèse d’un poids trop lourd sur le recherche au détriment d’une pensée abstraite et désintéressée.

                  René Thom, médaille Fields

                  1. Avatar de bb
                    bb

                    @BasicRabbit en autopsy

                    Interessant. Mais du coup, ce que j’ai compris est une critique de la Méthode de Darwin.
                    Cela remettrait en question les conclusions au sujet de l’évolution. Ce n’est pas noiuveau cela dit.

                    Par quoi serait remplacée la théorie de l’évolution?

                    L’intelligent design?
                    L’évolution des espèces serait guidée par des attracteurs étranges comme l’affirme Jean Stone? Ces attracteurs se trouveraient on ne sait où: dans le code génétique ou bien dans le code de la matière… Ils attireraient l’évolution vers un objectif caché non décrit par la génétique. Ce serait pour cette raison qu’on observerait des organes identiques dans des espèces animales très éloignées…

                    1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @bb

                      Pour Thom (dont la théorie des catastrophes est une théorie de l’analogie) c’est la même dynamique qui fonctionne partout :

                      « Les situations dynamiques régissant l’évolution des phénomènes naturels sont fondamentalement les mêmes que celles qui régissent l’évolution de l’homme et des sociétés; ainsi l’usage de vocables anthropomorphes en Physique est foncièrement justifié ».

                      Pour moi la liste ébauchée peut et doit être continuée : évolution des espèces, des langues, en particulier.

                      – « Ils attireraient l’évolution vers un objectif caché non décrit par la génétique. »

                      Thom admire Aristote, à la fois matérialiste et partisan des causes finales (« premier selon l’être, dernier selon la génération »).

                      Mais Thom n’est pas aristotélicien :

                      « En dépit de mon admiration pour Aristote, je reste platonicien en ce que.. » (« Esquisse d’une Sémiophysique », p.245)

                  2. Avatar de bb
                    bb

                    @BasicRabbit en autopsy

                    Il semblerait (sauf erreur de ma part) que les théories de Thom sur l’évolution se rapprochent fortement des théories du mouvement de « l’intelligence design ». Intelligence design vu sous son aspect scientifique… La facette spirituelle de l’intelligence design (comme quoi « l’attracteur étrange » de l’évolution pourrait être vu comme la main de dieu) ne correspond pas à la vision de Thom.

                    1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @bb

                      Je suppose que votre dernière phrase doit être tournée interrogativement :

                      « ne correspond-elle pas à la vision de Thom?

                      Pour moi, si c’est le cas : sans aucun doute.

                3. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                  BasicRabbit en autopsy

                  (suite)

                  Primaire/Secondaire/Tertiaire vs Bleu/Blanc/Rouge ?

                  Moi je vois plutôt ça vs Rouge/Bleu/ Blanc :

                  La Production en Rouge, la Distribution en Bleu, la Direction en blanc (1).

                  (1) https://www.pauljorion.com/blog/2025/10/11/debat-sur-la-programmation-aujourdhui-dans-un-univers-dias-generatives-par-basicrabbit-en-autopsy-paul-jorion/comment-page-1/#comment-1102491

                  1. Avatar de BasicRabbit en roue libre
                    BasicRabbit en roue libre

                    @Pascal (éléments de réponse (1) où vous écrivez : « Mais s’agissant d’un changement de paradigme radical, se pose la question de savoir comment la rendre entendable et efficiente socialement ? »

                    Je vais de tenter d’y répondre ici dans la logique embryo-logique de Thom/Jorion (je me fiche pas mal de savoir à qui il faut attribuer l’idée) développée par PJ en (2).

                    Pourquoi ici ? Parce que l’application sociétale -je préfère l’implication- est déjà ébauchée, car les trois stades (production-transformation/distribution-direction) correspondent aux trois feuillets de l’embryon (ectoderme-mésoderme-endoderme).

                    Je n’ai malheureusement pas ma doc avec moi actuellement pour citer Thom.

                    (1) https://www.pauljorion.com/blog/2025/10/14/une-autre-intelligence-quhumaine-a-t-elle-jamais-gagne-une-bataille/comment-page-1/#comment-1103922

                    (2) https://www.pauljorion.com/blog/2025/10/14/une-autre-intelligence-quhumaine-a-t-elle-jamais-gagne-une-bataille/comment-page-1/#comment-1103896

                    1. Avatar de BasicRabbit en roue libre
                      BasicRabbit en roue libre

                      (suite)

                      L’analogie ectoderme/mésoderme/endoderme vs primaire/secondaire/tertiaire est détaillée et utilisée dans « Classification des sciences et des techniques » (19??), que l’on trouve dans « Apologie du logos » (1990, Hachette)

  17. Avatar de JeanSé
    JeanSé

    Quid des batailles entre les humains et certaines espèces ? Celles contre les baleines au XIXème siècle semble bien avoir été gagnées par ces dernières :

    « Néanmoins, le comportement des baleines a rapidement changé. Elles se sont mises à nager près des navires des baleiniers pour leur échapper. Selon Whitehead au Guardian, « c’était une évolution culturelle beaucoup trop rapide pour être une évolution génétique ». Il semble ainsi que les baleines se sont prévenues et ont modifié leur comportement pour éviter les navires. »

    https://www.neozone.org/animaux/des-archives-devoilent-comment-les-baleines-se-sont-defendues-contre-lhomme-au-19e-siecle/

  18. Avatar de BasicRabbit en autopsy
    BasicRabbit en autopsy

    La conclusion de PJ (fin de « Une autre intelligence qu’humaine a-t-elle jamais gagné une bataille ? ») :

    « L’avènement de l’intelligence artificielle n’inaugure pas une alliance entre espèces ; il réveille le souvenir d’une autre, bien plus ancienne. Le cheval, comme l’algorithme aujourd’hui, nous avait déjà appris que la puissance ne naît pas de la domination brute, mais de l’élégance de la coordination : deux êtres apprenant à se mouvoir comme un seul.

    Peut-être notre tâche, aujourd’hui comme hier, n’est-elle pas de donner des ordres à une autre intelligence — mais de découvrir l’équivalent de la chevaucher avec la virtuosité d’un guerrier apache ou bien mieux encore, celle d’une écuyère de cirque. »

    —–

    J’ai donné plus haut -en réponse à Ruiz un peu plus haut- le point de vue de Thom -le même que celui de PJ-, mais où les bourrins sont plus petits… Je remets la citation ici, car je pense très sincèrement qu’elle mérite discussion puisqu’il s’agit de la guerre du futur -de la WW3, peut-être- à savoir la guerre bactériologique.

    —-

    La conclusion de Thom (fin de « Aux frontières du pouvoir humain : le jeu », dernier chapitre de « Modèles Mathématiques de la Morphogenèse », 2éme ed., 1980)

    « Le dédain pour la théorie qui se manifeste dans les milieux des expérimentateurs [et des empiristes, c’est moi qui rajoute à l’attention de PJ] a sa source dans l’attitude analytique-réductionniste; or pour découvrir la bonne stratégie, il faut s’identifier à l’un des facteurs permanents du système. Il faut en quelque sorte entrer « dans sa peau ». Il s’agit presque d’une identification amoureuse. Or comment pourrait-on aimer ce qu’on a, préalablement, cassé de manière irréversible [Thom parle ici de biologie]?

    Toute la science moderne est ainsi fondée sur le postulat de l’imbécillité des choses.Si ce postulat paraît assez bien fondé en physique (ou les difficultés théoriques proviennent le plus souvent du nombre infini des êtres à considérer), il n’en va plus de même en biologie (ni a fortiori dans les sciences humaines).

    Les phénomènes d’adaptation de certaines espèces vivantes devant nos traitements d’extermination chimique ou biologiques devraient nous inciter à plus d’humilité. Plutôt que de les attribuer stupidement au hasard néo-darwinien de mutations favorables bien promptes à se réaliser, on ferait mieux de se demander si les structures simulatrices de l’intelligence humaine ne sont pas engagées.

    L’idée qu’il pourrait y avoir dans la nature des instances dont le comportement imiterait -tout en l’excédant- notre propre intelligence et ferait ainsi obstacle à nos desseins les mieux fondés n’est pas sans provoquer en nous un réel malaise. Car alors nos capacités de progrès dans le dévoilement de la nature s’évanouiraient et un monde bien triste, un monde sans jeu, s’installerait, véritable tombeau de l’humanité.

    Ici, inutile d’évoquer l’existence d’ « extra-terrestres » qui nous domineraient. Il nous suffit qu’il existe des êtres de nature abstraite, quasi-platonicienne, qui puissent jouer ce rôle. Toute science avertie devrait accepter cette possibilité et relever le défi. »

    Vers une guerre humaine IA/IN (une guerre Jorion/Thom) gagnée par … des microbes !? Certains historiens -ai-je lu- pensent que de grandes pandémies ont participé à l’effondrement de bien des empires.

    Thom à la fin d’un article -jadis dans l’EU- :

    « Il faut décourager l’innovation. (…) Sinon, si nous continuons à priser par-dessus tout l’efficacité technologique, les inévitables corrections à l’équilibre entre l’homme et la Terre ne pourront être -au sens strict et usuel du terme- que catastrophiques. »

    1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
      BasicRabbit en autopsy

      (complément)

      Thom a écrit un petit bouquin sorti en 1991 : « Prédire n’est pas expliquer ».

      Mais, dès 1970, il a fait plus court et, pour moi, pile-poil en rapport avec la guerre du futur évoquée ici :

      « Comprendre c’est s’immuniser. »

      (« Les mathématiques modernes : une erreur pédagogique et philosophique ? », qui figure dans « Apologie du logos ») (p.569 : « Le modèle géométrique de la signification »)

    2. Avatar de Grand-mère Michelle
      Grand-mère Michelle

      @Basic Rabbit
      « Car alors nos capacités de progrès dans le dévoilement de la nature s’evanouiraient et un monde bien triste, un monde sans jeu, s’installerait, véritable tombeau de l’humanité. »
      Fort décevante phrase de Thom, qui révèle son immaturité et son incapacité à éprouver la joie de vivre…comme sans doute l’inanité de ses efforts de recherche.

      Heureusement, une grande part de la nouvelle génération, « les jeunes plus chauds que le climat » , a évolué dans sa compréhension du monde:
      « Nous ne voulons pas protéger la nature, nous sommes la nature! » proclamaient-ils/elles en marchant dans les rues… avant que l’épisode « covid » renvoie chacun-e dans « sa bulle ».

      1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
        BasicRabbit en autopsy

        @GmM (« Fort décevante phrase de Thom »)

        Je vous aime bien GmM, mais là je ne peux dire que : « Chacune et chacun voit midi à sa porte ».

        Quant à la jeunesse, je pense qu’elle ferait bien de commencer à se magner le fion. Mais faire la révolution dans la rue en scandant « nous sommes la nature » ne suffit pas. Il lui faut trouver une autre forme d’organisation sociale que celle qui est en train de s’effondrer.

        C’est là que, selon moi, interviennent des « penseurs Panoramix » comme Thom ou PJ. Thom ose l’analogie

        :ectoderme/mésoderme/endoderme et production/distribution/direction.

        Savoir ce qu’est l’endoderme et à quoi il sert peut donner des idées sur l’origine du pouvoir (l’aporie fondatrice de la sociologie pour Thom).

        Il est clair pour moi que si on n’a pas des idées précises sur la façon de structurer la société de façon suffisamment stable, on retombera dans les mêmes ornières que depuis que l’homme existe : struggle for life ENTRE HUMAINS et asservissement par les armes, la faim et la peur.

        1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
          BasicRabbit en autopsy

          @GmM(complément)

          Voici les précisions de Thom à ce propos dans « Classification des sciences et des techniques » :

          1. Technologies du premier groupe (ectoderme). Elles ont pour but la simulation du monde extérieur, essentiellement le traitement del’information (informatique, électronique, etc. » ;

          2. Technologies du deuxième groupe (mésoderme). Elles ont trait au déplacement (transport) de l’homme et de ses biens, essentiellement à la production et à la transformation de l’énergie ;

          3. Technologies du troisième groupe (endoderme). Elles se rapportent à l’alimentation et, par extension des fonctions immunitaires du thymus, à la santé et à la régulation contre les agressions extérieures de nature biologique.

          (…)

          Une difficulté essentielle des sciences humaines est d’ordonner l’individu par rapport à la société. Dans une certaine mesure, le Moi lui-même est une structure sociale, en sorte qu’il est difficile de séparer la science de l’individu des sciences sociales.

        2. Avatar de bb
          bb

          @BasicRabbit en autopsy

          « elle ferait bien de commencer à se magner le fion »

          Hey, mais vous savez aller à l’essentiel en fait… 🙂

          1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
            BasicRabbit en autopsy

            @bb

            Je ne parle que de la jeunesse belge, bien sûr.

        3. Avatar de Grand-mère Michelle
          Grand-mère Michelle

          @Basic Rabbit
          Croyez-vous que vos péroraisons nombrilistes(incompréhensibles pour 99,99% des mortel-le-s francophones) valent mieux que l’expression publique de la prise de conscience d’une réalité élémentaire clamée par des centaines de milliers de jeunes personnes enthousiastes et déterminées(relayée, en plus, par la totalité des médias publics et privés dans tous les pays, dans toutes les langues)?
          N’avez-vous pas noté les nouvelles revendications de la « génération Z »,qui préfère et exige la qualité de l’enseignement et des soins de santé pour tou-te-s plutôt que le miroir aux alouettes des grands-messes sportives ou « culturelles »? Qui les a inspirées?

          Vous n’avez pas compris que P.Jorion ne VEUT pas débattre avec vous à propos des sujets avec lesquels vous l’interpellez…même s’il a pris la peine de vous relancer en publiant ici le courrier que vous lui aviez envoyé personnellement?
          Je me demande à quel jeu (de bac à sable) vous jouez tous les deux(à la suite de Thom et d’autres intellos vaniteux, qui font de leur savoir une estrade)…
          Vous savez ce que je pense du jeu, et de son pouvoir de diversion qui étourdit les esprits, même, manifestement, les plus éclairés.

          Pourtant, quand vous osez parler de votre propre bouche, et en « langage courant », vous ne manquez pas de pertinence et de percutance…
          Faites-vous donc confiance, et cessez de jouer au perroquet, vous y gagneriez en appréciation et en efficacité.

          1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
            BasicRabbit en autopsy

            @GmM

            Je vous répète encore une fois que je m’adresse ici fondamentalement à PJ, même lorsque j’échange avec de très rares autres.

            Bien sûr que je vois que PJ ne VEUT pas répondre, et que, hormis les très rares autres précités – dont vous faites partie – les followers habituels le voient aussi en attendant sans doute la position de l’influenceur avant de s’exprimer.

            Il y a pléthore d’intellos vaniteux. Mais je crois que c’est chez les vrais matheux -les matheux habités…- qu’il y en a le moins, pour moi Thom étant évidemment de ceux-là (1).

            « Vous savez ce que je pense du jeu ».

            Thom ne voit pas ça comme vous :

            « En permettant la construction de structures mentales qui simulent de plus en plus exactement les structures et les forces du monde extérieur – ainsi que la structure même de l’esprit –, l’activité mathématique se place dans le droit fil de l’évolution. C’est le jeu signifiant par excellence, par lequel
            l’homme se délivre des servitudes biologiques qui pèsent sur son langage et sa pensée et s’assure les meilleures chances de survie pour l’humanité. » (1968, SSM)

            « Pourtant, quand vous osez parler de votre propre bouche, et en « langage courant », vous ne manquez pas de pertinence et de percutance… »

            Je crois avoir discrètement percuté.

            Pour finir par les choses sérieuses, à savoir la jeunesse belge qui commence à s’échauffer :

            https://www.pauljorion.com/blog/2025/10/14/une-autre-intelligence-quhumaine-a-t-elle-jamais-gagne-une-bataille/comment-page-1/#comment-1103502

            centrée sur la grand’place de Bxl, bien sûr.

            (1) Pour PJ, voir la fin du « Secret de la chambre chinoise » (1999) :

            https://www.persee.fr/doc/hom_0439-4216_1999_num_39_150_453573

            1. Avatar de Grand-mère Michelle
              Grand-mère Michelle

              @Basic Rabbit

              Il me semble que l’activité mathématique se résume essentiellement, depuis pas mal de temps, à une équation fatale à la quasi-totalité des producteurs et vendeurs de « biens » (indispensables ou pas) de par le monde:
              crédit illimité + dette impayée= faillite de leur « entreprise »
              Alors, on prie et pleure en espérant la venue « d’investisseurs » (qui, comme par hasard, seront tous chinois)…

              Comment un homme intelligent peut-il se persuader qu’il est possible de se débarrasser des « servitudes biologiques »?
              Sans doute faut-il être perdu dans un jeu qui masque la réalité, tout en sentant sa fin venir…
              Euh… il est quand même mort, finalement, votre gourou impudent, probablement en croyant continuer à exister, rassuré d’avoir légué sa pensée désincarnée… que vous suivez les yeux fermés…
              Mais… qui veut(peut) encore le lire, désormais, parmi le tas de penseurs/blablateurs désengagés, non-impliqués, enfermés dans leur bulle de prétentieuses et soi-disant signifiantes présomptions… quand ce ne sont pas des « prédictions »…?

              1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                BasicRabbit en autopsy

                @ GmM

                Chacune et chacun voit midi à sa fenêtre.

                Lorsque Thom, penseur désintéressé, propose une autre voie que celle offerte par le néo-darwinisme pour l’évolution des espèces, je trouve que ce n’est pas du blabla, mais une très bonne chose.

                Un programme pour la Biologie théorique, par René THOM, médaille Fields, préface à Faut-il brûler Darwin, L’Harmattan 1995, publié le 25 juin 2010

                René Thom : Préface à « Faut-il brûler Darwin ou l’imposture darwinienne »,

                J.C, L’Harmattan, Collection Conversciences, 1995,

                Trompettes de la Renommée, Brassens nous l’a chanté sur sa guitare, vous êtes bien mal embouchées. Ceci ne concerne pas seulement le monde du spectacle. C’est vrai aussi du monde de la célébrité scientifique. Il ne faut pas s’étonner si quelques esprits lucides, sûrs d’eux-mêmes, vont tenter de réparer les injustices de la postérité.

                S’agissant de Darwin, on sait les hauteurs himalayesques dont sa gloire a joui. Que le Dr Jacques Costagliolase soit attaqué à ce monument, on ne peut qu’admirer son audace et le féliciter d’apporter au chœur massif des trompettes darwiniennes un bémol spécifiquement adapté. C’est là certainement faire œuvre utile, d’autant plus que sa critique joue à un niveau qu’on voit rarement dans la littérature anti-darwinienne. Il s’agit d’une lecture textuelle, littérale de l’Origine des espèces, livre étudié page à page, quasiment ligne à ligne.

                On ne pourra reprocher à notre auteur d’avoir fait preuve de la moindre clémence vis-à-vis d’un « Newton de la biologie ». Son livre est un réquisitoire sans faille de l’Origine des espèces… Si bien que le lecteur se demandera ce qui, finalement, explique la gloire de Darwin. Au fond un certain vague, un certain flou de l’expression a pu incliner à l’indulgence. Si l’auteur se contredit, faisant suivre l’opinion A de l’opinion B contraire, alors si A est « catastrophique », il y a de forte chance que B soit, sinon vraie, du moins acceptable. C’est peut-être là une des clés du succès du darwinisme.

                C’est une théorie qu’il est difficile de taxer de fausseté, tant elle est inconsistante. Son succès s’explique par des circonstances socio-historiques, l’abandon du créationnisme encore prédominant dans les esprits vers 1850. D’ailleurs un créationnisme « libéral », détaché de la Lettre des Écritures, serait parfaitement compatible avec l’Évolution.

                L’Évolution n’est pas autre chose que la continuité temporelle de la matière vivante, et on peut seulement discuter de la présence ou de l’absence de ces grandes singularités que seraient l’apparition et l’extinction des espèces.

                Ce qu’il faut déplorer dans le darwinisme, c’est l’impact désastreux qu’il a eu sur la pensée spéculative en Biologie. Alors que le siècle précédent 1750-1850 avait vu les esprits s’éveiller, les théories prospérer, les tenants de « l’Anatomie transcendante » développer l’idée de bauplan, et placer l’idée d’homologie (Owen) au centre des classifications zoologiques, le darwinisme a prétendu expliquer la variation des formes biologiques, alors qu’il ne s’est jamais préoccupé de les définir.

                Plus tard, une alliance malsaine s’est constituée entre darwinisme et positivisme, encore actuellement très solide. Ce n’est pas un hasard si le darwinisme dont la vacuité théorique, vers 1900, avait fini par transparaître au sein du monde biologique, s’est trouvé sociologiquement restauré par la génétique mathématique : par l’École des Fischer et Sewell Wright. Il a fallu presqu’un siècle (jusqu’à Lewontin et Kimura) pour qu’on se rende compte du caractère factice de ces prétendues preuves.

                Toute théorie de l’hérédité requiert d’abord un instrument de comparaison morphologique entre parent et descendant. Il ne faut pas se contenter de l’ADN, il faut analyser les formes vivantes. De ce point de vue, j’affirmerais que si le darwinisme contient une substance scientifique, c’est seulement dans l’opposition Gradualisme vs Catastrophisme » qu’on la trouve.

                Chez les darwiniens d’aujourd’hui, le gradualisme est un dogme. Certes on cite quelques tenants des discontinuités (éventuellement majeures) Goldsmith, père du «hopeful monster», Schindewolf. Dans la littérature contemporaine, le problème ne cesse pas d’être discuté (Cf par exemple S.J. Gould. J’aimerais présenter ici mon point de vue sur cette question. Ma thèse est que le problème a une réponse formellement nécessaire : D’un point de vue qualitatif, tout changement est nécessairement discontinu. Du point de vue quantitatif, la thèse gradualiste est plausible.

                Sur cette dernière assertion les orthodoxes triomphent. N’est-il pas vrai que, pour le scientifique contemporain, toute différence est quantitative ? Presque tous, imbus de la propagande, non désintéressée, de l’industrie informatique, en sont restés à la maxime de Rutherford : Quantitaive is nothing but poor quantitative. Que ne reviennent-ils à la Biologie d’Aristote : là, l’anatomie d’un animal résulte de sa décomposition en parties phénoménologiquement homogènes, les homéomères, à laquelle on rajoute ces connexions d’origine fonctionnelle, les anhoméomères. On ferait bien de prendre au sérieux cette idée de l’équivalence phénoménologique de deux milieux pour l’être vivant.

                Il faut réintroduire la qualité, qui est substantiellement différente de la quantité. Considérons le couple des deux premiers entiers naturels : un deux. Tout esprit non prévenu ne manquera pas de dire que la différence entre un et deux et quantitative. Ce n’est pas faux puisque deux égale un + un ; mais si l’on permute les deux nombres, il sera difficile de dire que (1,2) est strictement identique à (2,1). Dans le couple (p,q) q hérite de sa position de second une qualité particulière qui complémente la qualité « premier » de p et ces deux qualités sont qualitativement différentes. Je me permettrai de rappeler que la définition classique de l’organisation biologique se disait en latin situs partium.

                Chez Aristote, on trouve susthma twn moriwn, le système des parties. De cela rapprochons la Topologie de Leibnitz, baptisée par lui Analysis situs. Ce fut le grand mérite de d’Arcy Thompson (traducteur de l’Historia animalium d’introduire l’équivalence par le genre définie comme équivalence topologique des deux anatomies. Je ne vois pas comment on peut comparer deux organismes sans introduire un algorithme de nature topologique. Au lieu de cela, maintenant, on va analyser une quantité effroyable de molécules d’ADN, dont il faudra conserver l’ordre des nucléotides dans un halle de longueur appropriée. Il est d’ailleurs remarquable qu’en chimie organique récente, on en revient à adopter des classifications quasi-morphologiques des molécules comme les chélates et les cryptates…

                Dans la description d’une structure vivante, on ne peut pas faire abstraction des positions relatives de ses sous-structures. La mort, en un certain sens, est la disparition de la stabilité de cette information positionnelle. L’espace (le R3 de notre géométrie euclidienne) est le grand absent de la Biologie moderne, il faudra le réintroduire autrement que par ses seules coordonnées euclidiennes (ou comme cadre des configurations de molécules en petit nombre).

                Ici se pose le problème des structures intermédiaires, organites, cytosquelette, membranes… Là, on ne pourra progresser qu’en classifiant les milieux qualitativement, un peu comme on classifie les phases en thermodynamique (mais sans introduire le passage à la limite boltzmanien : le milieu vivant n’est pas infini). Il faudra essayer des techniques d’homogénéisation comme celle qu’on emploie en mécanique des matériaux. Enfin il faudrait topologiser le métabolisme, réduire sa complexité à un système fini de régimes, d’attracteurs qu’on puisse manipuler. C’est là certainement un vaste programme, mais on peut toujours rêver.

                Finalement, on construira pour le temps ontogénétique de l’individu et pour le temps phylogénétique, des diagrammes décrivant la morphologie des organismes.

                On peut, en effet à tout le moins, symboliser l’embryologie d’un organisme comme un grand graphe dont les arêtes symbolisent les types cellulaires (chaque type cellulaire définit un clone dont le graphe représentatif est un arbre. On peut, au moins théoriquement, faire une construction analogue pour la phylogenèse. Les discontinuités temporelles de ce graphe seront autant de transformations évolutives. L’apparition d’un nouveau type cellulaire sera une discontinuité quantitative, même si elle n’implique qu’un clone très maigre.

                On voit donc qu’il peut y avoir des discontinuités dans l’évolution qui ne mènent pas nécessairement à la scission d’une spéciation. Seules des discontinuités impliquant les attracteurs fondamentaux affectant la reproduction pourront conduire à la spéciation. Le gradualisme quantitatif y exprime seulement le fait, assez évident, qu’on ne voit pas une mère engendrer un enfant plus gros qu’elle. Je crois aussi qu’on ne peut exclure des « catastrophes » affectant ces attracteurs hypothétiques du métabolisme ; dans le cas des extinctions leur existence ne fait pas de doute.

                J’ai usé, peut-être abusé de l’occasion, que m’offrait la préface, pour présenter ici quelques idées qui mes sont chères ; on pourra en tout cas y voir un type de pensée fondamentalement non darwinien. Décrire avant d’agir est un principe trop oublié de la Biologie, où l’impact de la clinique (humaine) pèse d’un poids trop lourd sur le recherche au détriment d’une pensée abstraite et désintéressée.

                René Thom, médaille Fields

            2. Avatar de Fred AFT
              Fred AFT

              @BasicRabbit,
              J’ai lu l’article « Le secret de la chambre chinoise »: on dirait que les récents développements de l’IA permettent à PJ de couronner une théorisation qui remonte dejà chez lui. Cela légitime aussi, à mon avis, son sentiment d’avoir, pour le moins, « inspiré » des chercheurs en IA.

              Le texte m’a fait penser à une fameuse phrase de Schopenhauer (de mémoire) : on est libre quand on fait ce qu’on veut, mais on n’est jamais libre de vouloir ce qu’on veut.

              J’ai vu deux grosses « routes » dans ce texte:
              1. la réflexion sur le pouvoir causal de la conscience (volonté, intention, etc.);
              2. l’autonomisation relative d’un monde imaginaire/signifiant par rapport à la marche souterraine et discrète du corps et de sa « sagesse » adaptative.

              1. L’affect fait tout, l’affect lié à l’empreinte mnésique qui lui est associée. Et là, l’ingénierie des affects n’est pas clairement dessinée. On voit tout de même qu’elle n’émerge pas, ni n’est pilotée « librement » par le sujet, la conscience, le raisonnement interne, etc. Les boucles internes sont fruits de la dynamique des affects/représentations, puis « vues » par la conscience comme étant pilotées par elle. Pour autant, on se demandera si on peut quand même dire qu’il y a un « projet d’autonomie » à la Castoriadis, par une dynamique collective et le bruit, le chaos de ses chocs affectifs. Et plus on construit une société « ouverte » à l’altération, à l’autre, au bruit, et plus on a de chance de tolérer les manipulations psychanalytiques, stratégiques, les échanges de représentations qui affectent, les admirations et prises de modèles plus variées, etc.

              La discussion, quant aux fantasmes primitifs (ou inauguraux) et leurs distorsions se posera : un Castoriadis postulera une puissance a-causale de création de Formes, un flux d’affect/représentation/désir constant et immotivé, en grande partie aléatoire et désordonné; un chrétien parlera de Grâce ; un Schopenhauer de négation de la Volonté (qui est un peu comme une grâce). Un psychonaute pourrait inciter à chercher des distorsions et ouvertures possibles à des reprises affectives, reconfigurations de paysage par la prise de drogues qui bousculent l’économie affective habituelle. Pour tenter, pourquoi pas, de (co)construire de nouvelles hexis, donc ingénieries affectives, quand bien même elles ne sont pas poussées par la volonté consciente, par un projet délibéré. C’est l’intérêt d’ailleurs des boucles cybernétiques complexes, non? En effet, on voit aussi que la sagesse du corps, sa mécanique affective, si elle est souvent et pour l’essentiel des processus physiologiques, adéquate et efficace, parfois elle se grippe et se coince.

              2. Ce thème quasi gnostique est plus difficile, je trouve, à aborder. Qu’avez-vous compris? Que la dynamique des signifiants dans l’imagination/conscience est un monde propre, non « matériel », non bi-univoque au monde physique, mais qu’il a ses valeurs d’affect associées et peut donc faire se mouvoir le corps (jusqu’à prendre le pas sur la sagesse plus primale du corps – comme se cogner au lampadaire); tandis que le monde du corps et ses dynamiques affectives vivent leur vie, assurent la vie dans un monde social peu dangereux, sans trop d’imaginé dans la conscience? Cela semble étrange, je n’ai pas trop vu d’interaction entre ces deux mondes. Il doit y en avoir, on doit bien avoir des dynamiques affectives qui nous poussent à agir pour construire une ingénierie de l’interaction, des boucles entre ces niveaux (j’en avais un peu parlé ici https://www.pauljorion.com/blog/2025/09/17/un-modele-unique-pour-les-esprits-naturels-et-artificiels-i-pourquoi-loptimisation-est-au-coeur-de-la-psychanalyse/comment-page-1/#comment-1097527).

              Notamment, et j’imagine une analyse à partir de cette théorie d’un professeur qui se cogne au lampadaire en tenue nazie avant d’aller donner son cours de philosophie grecque: la danse des signifiants et des affects se déroulent sous le regard second de sa conscience, l’absorbant, naviguant de l’Être au sens de la Patrie. le noir de la chemise renvoyant non plus directement à un crâne humain fracassé mais à une belle et lointaine idée de terre et de sang, et parce que l’essentiel de ses besoins et pulsions se satisfont par le titre et les honneurs, le faisant dormir le soir du sommeil du juste; tandis que son corps très facilement mange à la cantine des saucisses de Francfort, et met son costume car il assure la vie et la reproduction de la vie minimale.

              1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                BasicRabbit en autopsy

                @Fred AFT

                Vous avez décidément une capacité -un don- d’analyse de texte que je n’ai pas.

                Je subodore que vous avez une formation plutôt littéraire. Pour moi c’est tout le contraire, formatage dur en « sciences dures » (il a fallu attendre la retraite pour commencer à m’en dégager en me plongeant « en autodidacte » dans les « sciences molles », en particulier celles de PJ et de Thom -période philosophique, à partir des années 1960).

                Je suis d’accord avec vos deux grosses routes, mais je m’intéresse d’abord dans cet article à la réflexion sur le pouvoir causal de la conscience (volonté, intention). Et je m’intéresse aussi à PJ lui-même : pourquoi et comment pense-t-il ce qu’il pense, qu’est-ce qui le motive ?

                La réponse à la dernière question est pour moi claire : PJ travaille -c’est un travailleur acharné!- pour que son travail et son auteur soient reconnus : savoir faire pour faire savoir, pour faire court PJ travaille en vue du Nobel, c’est ça qui le motive (voir la dernière partie de l’article). C’est donc pour moi un travailleur intéressé et je ne peux m’empêcher de penser que cela nuit à la qualité de son travail.

                Comme beaucoup de « sciences molles » de formatage initial, PJ est un rhéteur (what else ?), et donc nécessairement un sophiste qui s’ignore. Car l’objectivité « pure » est pour moi impossible en Sciences humaines, c’est nécessairement une pensée entachée de la subjectivité de son auteur, et la « scientificité » du discours se réduit nécessairement à l’intersubjectivité, et donc à l’opinion de la doxa et de ses inspirateurs initiaux (qui dépendent des différentes chapelles -et il y en a beaucoup en Sciences humaines »-) : sophisme par argument d’autorité. [ Il me suffit de regarder les références auxquelles renvoie un article de Science humaines pour me faire une idée de la puissance de ladite doxa -PJ aime bien l’auto-référence !- ).

                Ces préliminaires sont pour moi importants, car ils m’expliquent pourquoi PJ peut concevoir l’idée que l’IN et l’IA puissent obéir aux mêmes lois (sujet sur lequel il reviendra un quart de siècle plus tard, c’est-à-dire maintenant).

                Je suis revenu sur « Le secret de la chambre chinoise » pour examiner la logique -la rationalité- dans laquelle il se plaçait pour contourner ce qu’il considère comme un obstacle, à savoir les causes finales et les desseins intelligents, et pour vérifier qu’il prenait bien le seul chemin possible dans le cadre de la Déesse-raison-du-siècle-des-Lumières, à savoir celui de la localité (descente de gradient). Et j’ai noté au passage qu’il restait dans le cadre du temps-qui-s’écoule-linéairement, alors que le titre, l’introduction et la formation psychanalytique de PJ, suggèrent de s’intéresser au dilemme du prisonnier, et donc au temps de la certitude anticipée de Lacan.

                Je termine par une remarque sur les Sciences « dures », en particulier les maths (je n’ai absolument pas le fameux « sens physique »), auxquelles je peux avoir donné l’impression d’être la seule science objective. Est-ce le cas ?

                Peut-être si on réduit les maths à un jeu de l’esprit, un jeu dont le mathématicien cherche les règles, les fixes et joue en suivant l’adage : plus il y a de théorèmes, plus la théorie est intéressante. C’est un jeu parfaitement objectif, mais c’est un jeu qui peut être insignifiant.

                Si l’on veut que le jeu devienne signifiant, c’est-à-dire en rapport avec le monde réel -et, depuis Galilée, les mathématiques ont suffisamment progressé dans leur utilisation physique pour se convaincre qu’il y avait un rapport- on ne peut éviter de penser qu’intervient la subjectivité de l’esprit des grands mathématiciens qui ont orienté la recherche mathématique, et on se retrouve alors dans la position du sophisme par argument d’autorité, comme en Sciences humaines, l’objectivité étant nécessairement entachée de la subjectivité de ces grands esprits. Et les mathématiques sont alors taxables d’anthropomorphisme.

                Comment en sortir ? Thom propose sa théorie des catastrophes (qui est une théorie de l’analogie) :

                « Les situations dynamiques régissant l’évolution des phénomènes naturels sont fondamentalement les mêmes que celles qui régissent l’évolution de l’homme et des sociétés ; ainsi l’usage de vocables anthropomorphes en Physique est foncièrement justifié. » [J’ajoute : les espèces, les langues, …, tout ce qui naît, vit et meurt. ]

                « En permettant la construction de structures mentales qui simulent de plus en plus exactement les structures et les forces du monde extérieur – ainsi que la structure même de l’esprit –, l’activité mathématique se place dans le droit fil de l’évolution. C’est le jeu signifiant par excellence, par lequel l’homme se délivre des servitudes biologiques qui pèsent sur son langage et sa pensée et s’assure les meilleures chances de survie pour l’humanité. » (1968, SSM)

                1. Avatar de Fred AFT
                  Fred AFT

                  @BasicRabbit,
                  Merci pour le compliment, mais comme je ne crois pas être plus que moyen (mettant certes du cœur à l’ouvrage la plupart du temps), je me demande si c’est du lard ou du cochon 🙂 J’ai une formation philosophique (donc même pas directement en sciences molles!)

                  L’évident prodige c’est PJ, je ne peux pas dire que je connaisse en détail toute son œuvre, dans tous les domaines qu’il explore, mais pour ce que je parcours, c’est admirable. Même sur les prises de position politiques, les orientations, les propositions, l’ouverture au dialogue. L’homme et l’œuvre en somme. Ce dont j’ai l’impression c’est que Pribor l’occupe plus que la recherche du Nobel, et je ne vois pas que sa pensée ait à en souffrir… mais bon, je suis un inconditionnel^^

                  En passant, pour parler de causes finales et d’intelligent design, est-ce que vous voyez quelque chose de ce type chez Kurzweil (notamment son schéma des 6 époques)? Je n’ai pas l’impression, mais autant demander à un spécialiste des questions de morphogenèse!
                  Et si vous connaissez ces « versions » d’idées flirtant avec la morphogenèse et le design/aim/survol comment considérez vous Ruyer d’un côté, la théologie du processus de l’autre?

                  1. Avatar de BasicRabbit en roue libre
                    BasicRabbit en roue libre

                    @Fred AFT

                    « L’évident prodige c’est PJ (…) je suis un inconditionnel ». C’est pour moi l’occasion de répéter que j’ai beaucoup appris de lui, car c’est lui qui m’a ouvert aux sciences humaines. Quand je suis arrivé sur ce blog (15 ans déjà?), j’ai aussitôt eu pour but de marier les conceptions d’une science molle -l’anthropologie selon PJ- avec celles d’une science dure -les maths de Thom. Le mariage n’a pas encore eu lieu, mais j’espère encore (et c’est pour ça que je reviens de temps à autre sur son blog).

                    J’inclus la philo dans les science humaines (sculpa, je suis autodidacte). Le seul problème qui m’intéresse vraiment c’est le rapport math/philo.

                    Kurzweil ? Jamais vu ce nom, je vais regarder.

                    Ruyer ? Thom le cite :

                    « (…) l’explication scientifique, c’est essentiellement la réduction de
                    l’arbitraire dans la description. On a reproché à cette définition son
                    caractère subjectif : les explications magiques, ou mystiques, permettent
                    aussi de réduire l’arbitraire d’une description empirique. Cette objection est
                    certes fondée, mais elle vaut aussi pour toutes les explications fondées sur
                    l’emploi de concepts non formalisés. Il est de fait que le langage de la
                    biologie moderne est truffé de mots tels que : ordre, désordre, complexité,
                    information, code, message… Tous ces concepts ont le caractère commun de
                    définir des corrélations spatio-temporelles à longue portée ; ce sont des
                    concepts « trans-spatiaux », selon la terminologie de R. Ruyer. De ce fait,
                    ils ne peuvent guère se distinguer de notions à caractère magique, comme
                    l’action à distance. La pensée scientifique, si elle veut devenir rigoureuse,
                    c’est-à-dire démonstrative et formalisable, devra nécessairement se purger
                    de ces concepts ambigus ; elle devra recourir à la formalisation, c’est-à-dire
                    à une pensée qui repose uniquement sur l’agrégation locale de formes. Il lui
                    faudra donc exorciser l’espace, la distance, et cela par des outils dont la
                    validité est reconnue par tous. Or le mathématicien dispose, pour aller du
                    local au global, d’une notion sûre : l’analyticité. Un germe de fonction
                    analytique détermine (par prolongement analytique) la fonction dans tout
                    son domaine d’existence. Pour passer du global au local, le mathématicien
                    dispose d’une autre notion, celle de singularité ; en effet, une singularité en
                    un point n’est autre chose qu’une figure globale qu’on a concentrée en ce
                    point (par exemple, si on concentre en un point O un cercle méridien G
                    d’un cylindre, on obtient le sommet d’un cône).
                    C’est par l’emploi alterné de ces deux techniques, comme en théorie des
                    catastrophes, qu’on peut espérer aboutir à une synthèse dynamique de
                    situations globales complexes. Et quelle discipline autre que la
                    mathématique pourrait fournir de pareils outils ? Dans cette optique, le
                    concept n’aurait plus qu’un rôle heuristique et devrait faire place, comme
                    dans la combinatoire de Leibniz, à un pur jeu de formes… » (1976, La notion
                    d’archétype…)

                    « mais autant demander à un spécialiste des questions de morphogenèse! »

                    Le spécialiste, c’est Thom, et ça fait maintenant une quinzaine d’années (depuis la retraite) que je traîne ses bouquins avec moi. J’ai l’impression de commencer à y voir un peu plus clair.

                    À part ça j’ai une petite idée de ce qui sépare Turing et Thom sur le sujet, Turing toujours cité (après d’Arcy Thompson et Waddington) dès qu’il est question de morphogenèse, Thom bien rarement (1, 2, 3).

                    (1) https://fr.wikipedia.org/wiki/Morphogen%C3%A8se

                    (2) https://en.wikipedia.org/wiki/Morphogenesis

                    (3) https://en.wikipedia.org/wiki/Mathematical_and_theoretical_biology

                    1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @Fred AFT

                      Puisque j’ai un philosophe sous la main…

                      Ce qui distingue fondamentalement les positions de PJ et de Thom , c’est à mon avis ceci : PJ est nominaliste -et considère qu’Aristote l’est, ce que lui reproche Thibaut Gress (1)- alors que Thom, qui admire Aristote -adepte d’une forme de matérialisme et des causes finales (premier selon l’être…’, est néanmoins réaliste (philosophique) (2).

                      PJ, homme des Lumières affiché, est vent de bout contre ça (il taxe Thom de mystique) et je suis revenu sur « Le secret de la chambre chinoise » pour voir les contorsions auxquelles il se livre (localisation par descente de gradient) pour se passer des causes finales aristotéliciennes.

                      (1) https://www.actu-philosophia.com/paul-jorion-comment-la-verite-et-la-realite/ :
                      « Cela devient d’autant plus énigmatique que, plus loin, Jorion remarque « qu’Aristote est, lui, au contraire [de Platon], un nominaliste [sic] »

                      (2) La dernière phrase de « Esquisse d’une Sémiophysique », sous-titré « Physique aristotélicienne et théorie des catastrophes » est :

                      « Seule une métaphysique réaliste peut redonner du sens au monde. »

                    2. Avatar de BasicRabbit en roue libre
                      BasicRabbit en roue libre

                      @Fred AFT ( » l’avantage de PJ, je dirais, c’est qu’il me semble plus sobre et moins coûteux que les autres en termes de postulats métaphysiques cachés. »)

                      Le postulat -hautement métaphysique- de Thom n’est pas caché, il est clairement affiché à la page 32 de la 2ème édition de « Stabilité Structurelle et Morphogénèse » (1977) (c’est le même que dans la première ed., mais à une autre page). Thom n’en a pas

                      Je n’ai pas ma doc sous la main mais il y dit comment il voit toute morphogénèse (j’écris bien « toute » !), par analogie (pour moi génialissime) entre le développement de l’embryon à partir d’un œuf totipotent et le développement de Taylor d’une fonction.

                      Il n’y a donc rien de caché, on y croit ou on n’y croit pas. Thom y croit, évidemment, et il a fini par me convaincre (quand j’ai enfin compris ce qu’il voulait dire !). PJ n’y croit pas.

                      Vous découvrez le problème qui m’intéresse principalement, et pourquoi je m’y intéresse : le problème philosophique posé par Galilée du rapport entre les maths et la « réalité naturelle ».

                      Les matheux platoniciens -plus précisément pythagoriciens- croient à l’universalité des mathématiques :

                      « Hegel disait de lui qu’il était « le premier maître universel (1) ».

                      PJ n’y croit pas pour la simple raison qu’il ne veut pas y croire ! PJ est en effet un homme des Lumières, du pragmatisme anglo-saxon, du positivisme. occidental, bref un homme qui ne veut pas se libérer du carcan dans lequel il s’est sciemment -c’est le bon terme- emprisonné (2).

                      (1) καθολικός …

                      (2) J’affirme…

                  2. Avatar de BasicRabbit en roue libre
                    BasicRabbit en roue libre

                    @Fred AFT (« Kurzweil »)

                    J’ai trouvé et lu ça : https://fr.gov-civ-guarda.pt/ibm-pc , ce qui me donne un aperçu des idées de Kurzweil.

                    Ce qui m’intéresse c’est le fil conducteur qui le conduit à écrire ça. En a-t-il un autre que « c’est mon intuition »?

                    L’avantage de Thom c’est qu’il donne son point de départ et s’y tient : l’histoire de l’évolution de tout (nature, homme, société, espèces, langues » se déroule fondamentalement selon le même plan qu’il esquisse dans « Stabilité Structurelle et Morphogénèse » (p.32, 2ème ed.) par analogie entre développement embryonnaire à partir d’un œuf totipotent et développent de Taylor d’une fonction (très étonnant mais, pour moi génialissime).

                    Vous m’avez dit être philosophe. Vous allez vous régaler du titanesque problème philosophique qui oppose René Thom à votre champion Paul Jorion (1) !

                    (1) https://www.pauljorion.com/blog/2025/10/14/une-autre-intelligence-quhumaine-a-t-elle-jamais-gagne-une-bataille/comment-page-1/#comment-1103903 ( et suivants )

                    1. Avatar de BasicRabbit en roue libre
                      BasicRabbit en roue libre

                      développement

                    2. Avatar de Fred AFT
                      Fred AFT

                      @BasicRabbit,
                      Une intuition sans doute, à l’origine, donc un flip ou un bump dans le paysage, qui a dessiné une autre ligne. Et ensuite des arguments pour étayer (interprétation de l’histoire, « loi » du retour accéléré, etc.). Mais en effet, ils me semblent être d’un autre type que ceux de Thom (si j’ai bien compris, ils découlent essentiellement de contraintes topologiques), ou de Ruyer (attracteurs plus « idéalistes » encore je dirais).
                      Ceci étant, même si Kurzweil est mal vu et passe pour un piètre penseur, j’ai l’intuition d’une proximité de fondations plus forte encore entre lui et PJ, qu’avec les autres. https://www.thekurzweillibrary.com/images/SingularityisNear_Chapter1.pdf
                      Vous avez raison, le problème de l’histoire et son intelligibilité est énorme. Il y a indéniablement une grande puissance dans le modèle de PJ, et sa théorie générale de l’esprit permet aussi de rendre compte des lignes de fuite désirées hors de ce modèle, vers des domaines non scientifiques. Mais l’avantage de PJ, je dirais, c’est qu’il me semble plus sobre et moins couteux que les autres en termes de postulats métaphysiques cachés.

                    3. Avatar de Paul Jorion

                      Pourquoi vous évertuez-vous à présenter Thom comme une sorte de tyran intellectuel ? Je l’ai vu à l’époque où j’ai acheté et lu ceci. Je garde le souvenir d’un homme très sympathique.

                      P.S. Ah ! du coup je comprends, c’est peut-être lié au fait que j’ai lu moi Thom dans la première édition de ses livres 😉 !

  19. Avatar de Pascal
    Pascal

    Depuis le temps que les enseignants le disent !
    Mais il va falloir encore combien de temps pour en tirer toutes les conséquences ?
    https://www.slate.fr/tech-internet/lecture-memoire-adolescents-enfants-etude-cerveau-developpement-nefaste-cognitif-addiction-tiktok-instagram

    1. Avatar de bb
      bb

      @Pascal

      « Le Danemark a annoncé son intention d’interdire l’accès aux réseaux sociaux aux moins de 15 ans, tandis que l’Australie obligera, à partir de décembre 2025, les plateformes à empêcher les moins de 16 ans de créer ou de conserver un compte. »

      En France, il serait grand temps de faire quelque-chose comme cela a été fait il y a quelques semaines avec l’accès aux sites pornographiques… Mais pourquoi les dirigeants politiques mettent-ils autant de temps à réagir ? Les lobbys ? Dans ce cas, les Lobbys processionnels devraient être règlementés. De la même manière que le « délit d’initié dans la finance », certaines formes de lobbying devraient être criminalisées. Et cela sera peut-être le cas dans le futur.

      Mais bon, pour cela il faudrait une ligne de politique générale claire pour la France…

        1. Avatar de Ruiz
          Ruiz

          IL faut penser à la santé mentale des populations et au financement des média que l’opposition est tentée de finir de privatiser, à force de ne voir que des publicités pour des véhicules électriques qu’ils ne peuvent se payer.
          Pourquoi refuser un petit plaisir simple et abordable dans la nourriture pour compenser.
          Détourner les enfants du Kouign Aman ?

      1. Avatar de Pascal
        Pascal

        Les marchands de mort ont toujours existé mais l’Etat a été créé pour nous en protéger. Seulement voilà, l’État a été acheté et l’argument phare pour se dédouaner de cette responsabilité a été fourni par le néolibéralisme : la responsabilité individuelle. C’est elle qui courscicuite l’État.
        Si les enfants bouffent de la m…c’est la faute des parents.
        Si le cerveau des enfants devient de la bouillie, c’est de la faute des parents.
        Si le climat se réchauffe, c’est la faute de ceux qui laissent couler l’eau en se lavant les dents ou qui ne trient pas bien leurs déchets.
        Si le fascisme est a nos portes, c’est à cause de ceux qui ne votent pas bien.
        Si …
        Par contre, aucune société n’est responsable de la m… qu’elle vend (sachant que ce sont eux qui définissent les normes).
        Irresponsabilité de ceux qui font du fric et rejet de la responsabilité sur l’individu. Autant dire que plus personne n’est « responsables ». A partir de là, le chaos est un aboutissement normal.

        1. Avatar de Pascal
          Pascal

          …rejet de la responsabilité des dégâts sur l’individu.

        2. Avatar de bb
          bb

          @Pascal

          Je sens de l’amertume dans vos propos. Et j’entends très souvent des discours analogues au vôtre.
          Le néolibéralisme pose des problèmes certains à notre société. Mais ce n’est pas la cause directe.

          Selon moi le néolibéralisme est le produit et non la cause.

          Avant tout, contrairement à ce qui est communément compris, le néolibéralisme, ce n’est pas moins d’état, mais au contraire plus d’état dans la gestion des affaires économiques. L’état est toujours présent dans l’économie, mais son logiciel actuel est de favoriser les entreprises pour faire croitre le PIB. Et l’état met en place des procédures et des lois qui favorisent le marché. Contrairement au libéralisme pur et dur.

          Selon moi le néolibéralisme est le produit et non la cause.

          Le problème, c’est notre besoin individuel de consommer. L’homme occidental actuel n’a pour seule religion que la consommation. Collectionner divers produits, les entasser, les jeter, en racheter, consommer du loisir, des produits culturel, les entasser, voyager à l’autre bout de la planète et prendre des photos « instagrammables », les entasser sur les réseaux sociaux… Nous consommons à outrance et cela détruit la planète.

          Ce n’est pas le néolibéralisme qui détruit la planète et notre société, c’est notre consommation excessive.

          Et au nom de quoi ? Au nom de l’Émancipation individuel et du droit de propriété amorcés par les lumières.
          Les lumières ont permis à l’occident de se débarrasser de la « monarchie du christianisme » et ont permis la mise en place de droits pour chacun de manière universelle. Cette révolution était nécessaire à l’occident et bénéfique. Elle a permis de multiples avancées dans tous les domaines.

          Mais nous venons à bout d’e cette logique. La reconnaissance de l’individu qui a abouti au droit de consommer sans restriction dans les limites de son portefeuille n’est plus possible. À cause des limites finies de la planète, mais également à cause de la puissance qui est donnée aux entreprises qui produisent les bien de consommation.

          Aujourd’hui tout peut devenir un commerce. Même les églises.
          L’occident doit sortir de ce consumérisme individuel. Un nouveau paradigme doit émerger pour remplacer celui dans lequel nous vivons actuellement. Un des premiers leviers serait de taxer la consommation des ménages et non le travail. Mais il faudrait également un changement ontologique dans la manière de penser de l’humanité. Mais ce dernier point nous amène sur le sol glissant de la métaphysique actuelle.

          1. Avatar de Pascal
            Pascal

            Ce n’est pas de l’amertume, c’est de la colère.
            Vous défendez le néolibéralisme et c’est votre droit. Voilà renvoyer les individu à leur responsabilité de consommateurs (toujours le même principe) et vous mettez de côté les milliards qui sont dépensés dans la pub et si possible dès le plus jeune âge pour façonner les mentalités et les cerveaux, les millions qui sont dépensés en R&D pour contourner la volonté individuelle par le neuromarketing, le profilage sur les réseaux sociaux, la captation de l’attention…
            NON, ce n’est pas de l’asservissement volontaire, c’est de l’asservissement contraint.
            Je suis né avec les débuts de la télé et j’ai pu voir le glissement d’un outil de communication vers un outil de propagande. Même Patrick Lelay l’a dit ouvertement, son métier était de « vendre du temps de cerveau disponible ».
            Alors vous ne me ferez pas croire que la surconsommation est le reflet de la bêtise des individus quand celle-ci est savamment instiller dans les cerveaux depuis le plus jeune âge.
            Ce sont les cigarettiers qui ont mis des additifs pour rendre les gens addict à la cigarette et fait exploser le nombre de cancer. L’obsolescence programmée, vous allez m’expliquer que c’est la responsabilité du consommateur ? On sait depuis longtemps que les produits gras et sucré génèrent des addictions.
            https://www.nationalgeographic.fr/sciences/nutrition-dietetique-equilibre-alimentaire-exces-les-effets-du-sucre-et-du-gras-sur-notre-cerveau-ce-que-dit-la-science
            Alors votre solution c’est de taxer la consommation des ménages ! Bravo ! Alors que la TVA est déjà le plus inégalitaire des impôts.
            Désolé, bb, mais quand j’entends ça, ça ne fait que renforcer ma colère.
            Je ne sais pas à quel milieu social vous appartenez mais vous ne devez pas côtoyer beaucoup de gens au RSA visiblement.

            1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
              BasicRabbit en autopsy

              @Pascal

              Du calme.

              L’individualisme, le progressisme et le rationalisme des Lumières se sont déjà effondrés, mais ce n’est pas encore passé par le cul de sac de notre conscience collective : l’étoile brille encore bien qu’elle soit déjà morte.

              IL nous faut donc soit attendre, soit tenter d’imaginer ce qui va suivre. Je suis de ceux qui pensent que la lecture de l’œuvre de Thom est précieuse pour ça.

              1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                BasicRabbit en autopsy

                (suite)

                Pour moi il faut :

                – en revenir à une certaine forme de communautarisme local -le qualificatif et pour moi important-, du genre : communisme dans les communes et capitalisme dans les capitales, façon « loin des yeux loin du cœur » ;

                – en revenir à une certaine forme de conservatisme car il nous faut digérer deux ou trois siècles de progressisme de plus en plus follement débridé ;

                – changer de rationalité « qui n’est guère qu’une déontologie dans l’usage de l’imaginaire » (Thom), en une rationalité plus naturelle – plus proche de la nature (1) – que l’actuelle en Occident – qui apparaîtra alors bien artificielle, n’en déplaise à PJ – .

                (1) Celle que propose Thom est quasi-embryologique : « La classe engendre ses prédicats, comme le germe engendre les organes de l’animal. Il ne fait guère de doute (à mes yeux) que c’est là l’unique manière de théoriser ce qu’est la Logique naturelle. »

                1. Avatar de bb
                  bb

                  @BasicRabbit en autopsy

                  En accord avec vous sur tous les points…
                  Surtout que j’ai tout saisi… 🙂

                  Mais bon, cela ne va pas être de la tarte.

                  1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                    BasicRabbit en autopsy

                    @bb

                    Localisme va avec monnaies locales. La BRI ne va pas aimer du tout (1).

                    Localisme rime avec girondisme. Les jacobins vont tout faire pour empêcher ça.

                    Il faudra donc passer en « robustesse tranquille », en espérant que les femmes y verront un moyen de prendre toute leur place dans la société (ce qui n’est pas du tout le cas depuis deux ou trois millénaires de religion non seulement monothéiste, mais surtout à Dieu Masculin).

                    (1) https://fr.wikipedia.org/wiki/W%C3%B6rgl

                    1. Avatar de bb
                      bb

                      @BasicRabbit

                      La monnaie locale est une solution aux chocs systémiques diverses. Il me semble que le territoire français est déjà maillé par plusieurs monnaies locales; A Rennes, nous avons le Galleco. Personnellement, je n’en ai jamais vu. Je pense que c’est une méthode de paiement qui reste confidentielle. Mais je me trompe peut-être.

                      En tout cas ce n’est pas du tout le chemin que prend la création de monnaie.

                      Avez-vous entendu parlé des Stable Coin que les USA s’apprêtent à autoriser? Méta, Netflix, et toute société qui le souhaite serait en mesuré de créer sa propre monnaie adossée au Dollar (elle ne fluctuerait donc pas) pour permettre à leurs utilisateurs de payer les services de ces plateformes en Meta-Coin ou Amazon-Coin?

                      Cela ressemble à une arme monétaire contre l’Euro. C’est assez inquiétant.

                    2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                      BasicRabbit en autopsy

                      @bb

                      Bien entendu le Système veut imposer la convertibilité (à l’euro, au dollar) pour pouvoir prélever son exorbitante dîme.

                      C’est ce verrou qu’a réussi à faire sauter Wörgl pendant un an (1932/33) avant d’être interdit par la BRI nouvellement créée, à la solde des USA avec l’Allemagne dedans (1).

                      (1) https://fr.wikipedia.org/wiki/Banque_des_r%C3%A8glements_internationaux

            2. Avatar de bb
              bb

              @Pascal

              Ha lala…
              Quand on a une idée en tête et qu’on traite de capitaliste celui qui propose des solutions nouvelles.
              C’est étonnant comme les gens ne lisent pas.
              Relisez ce que j’ai écrit Pascal…

              Je ne soutiens absolument pas le Néolibéralisme. Je le condamne. J’ai juste écrit qu’il ne venait pas de nulle part.

              Taxer la consommation, je l’affirme haut et fort:
              – TVA à 0% sur les produits de première nécessité : eau (dans un certain volume), chauffage ( en dessous d’un certain nombre de KWh, une nourriture saine et équilibrée, les vêtements (faits en France…)
              – Des produits de première nécessité GRATUITS pour les plus bas revenus (en dessous de 2 RSA) comme actuellement pour un grand nombre de médicaments.
              – TVA à 20% sur l’essence, les loisirs, la culture ( ça va en faire hurler certains…)
              – et puis TVA à 50% voire 100% sur les produits de luxes. Les automobiles à plus de 100 chevaux

              Évidemment, c’est une approche grossière. Qu’il faudrait définir précisément. Je ne pense pas que cette approche soit spécialement Néolibérale…
              Mais surtout cela décharge le travail. La surconsommation tue la planète. Pas le travail. Alors attention, je n’aborde pas du tout le fait que le travaille disparaît… Ce n’est pas mon propos. Mon idée c’est de transférer les taxes du travail vers la consommation afin de faire baisser celle-ci.

              Il est vrai que les média nous abreuvent de spot qui nous donne envie de consommer. Les médias actuels sont le bras armé du consumérisme et du néolibéralisme. Bourdieu l’a écrit.
              Mais nos cerveau sont trop sensible à ces message. Car la société nous a habitué. Oui nous somme responsables de trop consomer. Bien malgré nous. Les outils qui nous

              1. Avatar de Pascal
                Pascal

                Il m’arrive de m’emballer, c’est vrai. Mais quand vous écrivez :
                « nos cerveau sont trop sensible à ces messages. Car la société nous a habitué. », cela montre que vous ne savez rien de ce qu’est le neuromarketing ou les recherches sur la captation de l’attention au 21eme siècle. Je vous parle de technique issue des neurosciences (pas de la psychologie) qui permettent de contourner nos perceptions conscientes. Peut-être avez-vous entendu parler il y a longtemps « d’image subliminal » et bien sachez qu’aujourd’hui on sait faire bien mieux, en toute légalité. Renseignez vous.
                Pour ce qui est de vos propos sur la TVA, même si j’en comprends le sens, ne me semble pas la piste la plus adaptée dans la mesure où justement elle a été conçue pour être inégalitaire. Ne croyez pas que ceux qui l’ont mis place se sont dit après coup : « oh zut, on a fait une bourde, elle est plutôt inégalitaire cette taxe ! »
                Par ailleurs, j’entends toutes les propositions qui relèvent d’une volonté sincère de faire le bien commun. Par contre, il n’est jamais expliqué comment et qui va prendre le pouvoir pour le mettre en place contre les intérêts des milliardaires qui possèdent les journaux et ont l’oreille attentive de la majorité des élus de la République. Je vous laisse juge au regard de ce qui se passe actuellement au niveau du gouvernement français et de l’assemblée nationale.

                1. Avatar de bb
                  bb

                  @Pascal
                  « vous ne savez rien de ce qu’est le neuromarketing »

                  Alors pas de chance, je travaille dans la pub, la communication, et des marketeux j’en côtoie tous les jours …

                  Pour certains, les théories du Neuromarketing sont des science molles qui n’ont pas fait leurs preuves sur les médias classiques comme la TV ou la presse. C’est un argument de vente aux marques pour qu’elles dépensent toujours plus en communication sans que personne soit en mesure de quantifier les effets positifs ou négatifs.
                  A contrario, Pierre Bourdieu que je cite plus haut avance des théories sur les effets de la télévision sur les comportements.

                  Donc, je connais 🙂

                  Par contre, la technique de pistages des comportements individuels sur le net sont bien plus efficaces que le Neuromarketing. Je l’ai cité plus haut, la société Palantir de Peter Thiel en est l’illustration. Et là effectivement il y a un vrai problème. Il faut réguler, même si cela me paraît impossible.

                  Si vous lisez mes réponses ci-dessus, vous verrez une solution que donne Pierre Bourdieu a ce problème à titre individuels. Comme je l’écris, s’informer c’est prendre soins de sa santé mentale. Comme pour le sport ou la nourriture pour la santé physique, c’est à chacun de faire attention. Même si l’état doit empêcher les dérives à grande échelle, l’état ne peut pas tout.
                  Déresponsabiliser les individus est une dérive tout aussi dangereuse que le laisser-faire des marchés financiers.

                  Mais je sens que nous ne serons pas d’accord sur ce dernier point.

                2. Avatar de bb
                  bb

                  @pascal

                  SI vous connaissiez le monde de la pub, le neuromarketing vous passerait au-dessus de la tête et ne vous traumatiserait pas plus que cela.

                  Le monde de la publicité est peuplé de personnes qui ne pensent qu’à une chose: l’argent. Les créatifs sont souvent des gens qui se prennent pour des artistes. Mais qui savent que ce qu’ils font est vide de sens. Ils sont très souvent désabusés.

                  Une pub, avant qu’elle ne soit diffusée, doit passer le filtre des égos de dizaines d’individus avec des talents, mais aucun pouvoir décisionnel. La chaine de validation va du stagiaire au directeur d’agence en passant par les directrices de production. Tout ce petit monde tente de s’imposer, mais au final, c’est le client payeur qui décide.
                  Et en général, ce client ne connaît rien à la communication. On a beau lui expliquer que ses idées ne sont pas bonnes, il s’en fiche. Au final, il prendra sa décision parce que son fils de 10 ans préfère tel ou tel résultat.
                  Je ne caricature même pas. Lisez ou regardez le film de Frédéric Beigbeder « 99 francs, c’est tout à fait ça.

                  Donc avant qu’une marque ne soit en mesure d’appliquer le « Neuromarketing » sur une de ses publicités, le néocapitalisme dont il est initialement question aura eu le temps de s’effondrer sur lui-même….

            3. Avatar de bb
              bb

              @Pascal,

              Concernant les médias, c’est un sujet qui me passionne et me désespère. L’approche de Bourdieu dans son livre « Sur la télévision », est un livre qui était étudié au lycée il y a 20 ans et qui a été retiré des programmes sous la présidence de Nicolas Sarkozy…

              — Bourdieu le dit clairement : La télévision est le bras armé du néolibéralisme (cela va dans votre sens)–

              Selon Bourdieu. La télévision est une menace pour l’autonomie intellectuelle.
              Il existe une censure invisible. Il montre que la télévision exerce une forme de censure non par interdiction explicite, mais par sélection implicite des sujets, des formats et des intervenants.

              Par ailleurs, le format télévisuel impose la brièveté, empêchant le développement de raisonnements complexes ou nuancés. Que dirait-il des réseaux sociaux actuels ?
              Les médias privilégient le choc, le conflit, la mise en scène, au détriment de la rigueur intellectuelle.

              Il critique également l’emprise du journalisme. Ils impose les logiques du média (audience, visibilité, simplification) au détriment des champs scientifiques, artistiques ou politiques.
              Mais le plus grave : ils se citent entre eux, créant une boucle d’auto-validation qui marginalise les voix extérieures ou critiques.

              Dans cette logique de « consanguinité intellectuielle », les intervenants médiatiques développent des dispositions (manières de parler, de penser, de se comporter) adaptées aux contraintes du champ télévisuel. La télévision favorise des formes de pensée rapides, consensuelles, souvent dépolitisées.

              ——————————————-
              Les solutions collectives selon Bourdieu ;

              – Créer des espaces alternatifs : Revues, plateformes, collectifs qui échappent aux logiques de rentabilité et de visibilité immédiate. Par exemple le blog de Paul Jorion. Youtube (oui oui…)
              – Ne pas laisser le journalisme imposer ses normes à la science, à la philosophie ou à l’art.
              – Former à la sociologie des médias : Enseigner les mécanismes de domination symbolique, de censure douce, et de fabrication de l’opinion. Des émissions comme « Arrêt sur image » ou actuellement sur ARTE « le dessous des images » très accessible qui décrypte ce qu’on voit sur le net…
              – Favoriser les contre-pouvoirs intellectuels : Encourager les chercheurs, artistes et penseurs à intervenir dans le débat public sans se plier aux formats médiatiques. Ce que nous faisons ici en est une forme.

              ———————————

              Les solutions individuelles selon Bourdieu ( et cela, c’est un travail de chacun, comme faire du sport ou bien se nourrir. Un travail essentiel à notre santé mentale)

              – Développer l’habitus réflexif: Cultiver une vigilance constante face aux mécanismes de simplification, de spectacularisation et de censure invisible. Savoir les détecter et en rire. Afin de ridiculiser un système qui est sensé nous brider, mais qui est tributaire de notre attention…
              – Refuser la logique du buzz : Ne pas céder à la pression du commentaire immédiat, du clash ou de la visibilité à tout prix… Tout comme refuser de lire les faits divers de la presse … Cela, c’est de l’éducation simple. Il suffit de le dire aux enfants.
              – S’auto-éduquer aux champs : Comprendre les logiques propres aux champs intellectuels, scientifiques, politiques — pour ne pas les confondre avec celles du champ médiatique. D’envelopper une culture générale la plus large possible avant de se spécialiser dans un domaine.
              – Pratiquer la lenteur intellectuelle : Lire, écrire, débattre hors des formats contraints ; valoriser la complexité et la nuance.

              1. Avatar de Pascal
                Pascal

                La santé mentale des individus est en bien mauvaise voie. N’oubliez pas qu’une personne dépressive consomme plus et ne se rebelle pas ! C’est peut-être une piste à explorer pour comprendre. 😉

              2. Avatar de Pascal
                Pascal

                @bb
                Les solutions individuelles de Bourdieu s’appliquait sans doute à la fin du 20eme siècle, la réalité d’aujourd’hui est bien différente notamment sur l’état du psychisme de la grande majorité de la population. Dans mon entourage, chacun constate une augmentation des attitudes agressives, du désengagement dans le travail, de la perte de repères quant à l’éducation des enfants, une forme d’anomie généralisée, quand François Dubet décrivait cette anomie comme spécificité des quartiers en difficulté dans les années 90.

                Conversation avec GPT, prompt de départ : Tu es psychologue et sociologue, quel impact a cette transformation (individualisme à individualisation) sur le psychisme humain ?

                Réponse :
                Excellente question — et essentielle, car la mutation que nous avons décrite (du libéralisme émancipateur à l’individualisme instrumentalisé) n’est pas seulement un changement d’organisation sociale : elle transforme **le psychisme même**, c’est-à-dire la manière dont les individus se perçoivent, s’éprouvent, se rapportent à autrui, au travail, au monde.

                En tant que psychologue et sociologue, on peut décrire cette transformation comme un **déplacement du mode de subjectivation** : la société ne façonne plus des sujets disciplinés (comme dans les sociétés industrielles classiques), mais des sujets *auto-disciplinés*, performants, anxieux, traversés par le sentiment paradoxal d’être libres et impuissants à la fois.

                ## 1. De la liberté à l’auto-contrôle : un changement de paradigme psychique

                Dans les sociétés industrielles, la domination passait par la **contrainte externe** : horaires, hiérarchie, autorité, normes explicites.
                Dans la société néolibérale et individualisée, la domination est **internalisée**. Comme l’a montré Michel Foucault (dans *Naissance de la biopolitique*), le sujet moderne devient « entrepreneur de lui-même ». Le pouvoir agit en incitant l’individu à s’auto-gouverner, à se surveiller, à se perfectionner.

                > « L’individu moderne est sommé d’être libre. »
                > — Alain Ehrenberg, *La fatigue d’être soi* (1998)

                Ce mot d’Ehrenberg résume le paradoxe : la liberté n’est plus un droit, mais une **obligation**. L’individu doit constamment prouver son autonomie, sa performance, sa capacité d’adaptation.

                Psychologiquement, cela crée un **climat d’injonction permanente** : il faut réussir, s’améliorer, se “réinventer”.
                Résultat : une société d’apparence libre mais saturée d’auto-contrôle, où l’angoisse, la culpabilité et l’épuisement deviennent des affects dominants.

                ## 2. Les effets cliniques et psychiques

                ### a. **Anxiété, fatigue, dépression**

                Ehrenberg a montré que la dépression contemporaine n’est plus celle de la culpabilité (comme au temps de Freud), mais celle de **l’insuffisance de soi**.
                Autrefois, on souffrait d’avoir trop transgressé ; aujourd’hui, on souffre de ne pas être à la hauteur.

                Les pathologies dominantes (burnout, stress, anxiété de performance, sentiment d’imposture) traduisent une mutation anthropologique :

                * Le moi est sommé d’être productif.
                * Le travail est devenu une scène de validation existentielle.
                * L’échec, même structurel, est vécu comme faute personnelle.

                Cette mutation s’inscrit dans la logique de la **responsabilisation néolibérale** : chacun est censé “gérer sa vie”, “investir sur soi”, “s’auto-réaliser”. Or, ce discours internalisé produit un **surmoi hyperactif**, qui ne laisse plus de place au repos, à la contemplation, ni à la vulnérabilité.

                ### b. **Isolement et perte du lien social**

                L’individualisation fragilise les liens stables : famille, communauté, collectif de travail.
                Le sociologue Christophe Dejours a montré comment la désolidarisation du travail (compétition, évaluation individuelle) détruit les “appuis symboliques” du sujet.
                Sans reconnaissance collective, l’individu ne peut plus se soutenir psychiquement : il se retrouve seul face à la norme de performance.

                Là où la reconnaissance mutuelle constituait une base narcissique saine (être vu, reconnu, estimé par autrui), la société néolibérale la remplace par la **reconnaissance marchande** : likes, classements, notations, productivité.
                Ce glissement favorise l’anxiété sociale, l’envie, la comparaison, et mine l’estime de soi.

                ### c. **Hyperconnectivité et morcellement du moi**

                Les technologies numériques, qui prolongent l’individualisation, entraînent une fragmentation du psychisme : le moi se disperse en identités multiples (profil professionnel, avatar social, persona numérique).
                Le psychologue Serge Tisseron parle d’« extimité » : exposition permanente du moi à autrui, où l’intime devient spectacle et marchandise.
                Cette exposition crée une tension entre visibilité et authenticité : plus on se montre, plus on se sent vide.

                Le sujet contemporain vit souvent un paradoxe : il se croit centre de l’attention, mais il est en réalité **constamment évalué et mesuré** (par des algorithmes, des publics invisibles, des comparaisons sociales). Ce contexte nourrit le **sentiment d’inadéquation chronique**, un mal-être diffus où la performance devient un horizon sans fin.

                ## 3. L’émergence d’un “nouvel inconscient social”

                Le psychisme n’est pas isolé du social. De plus en plus de psychanalystes et sociologues (Byung-Chul Han, Bernard Stiegler, Eva Illouz, Ehrenberg, Rosa) soutiennent que nous vivons une **mutation de la structure du désir** :

                * Le désir n’est plus tourné vers la transgression, mais vers la conformité performative.
                * Le surmoi n’interdit plus (“tu ne dois pas”), il **exige** (“tu dois jouir, réussir, te dépasser”).
                * L’angoisse n’est plus d’être puni, mais d’être **insuffisant**.

                Byung-Chul Han, dans *La société de la fatigue* (2010), parle d’une **auto-exploitation douce** : nous sommes à la fois maître et esclave, bourreau et victime. Le pouvoir ne s’impose plus de l’extérieur ; il agit par la motivation, le coaching, la “positive attitude”.
                Résultat : le sujet s’use, mais ne peut accuser personne ; il se croit responsable de son propre épuisement.

                ## 4. Les effets collectifs : vers une société psychiquement épuisée

                Cette transformation produit un **paysage affectif** spécifique, qu’on peut résumer en cinq traits :

                1. **Fatigue existentielle** : surmenage, sentiment de ne jamais en faire assez.
                2. **Culpabilité diffuse** : si je ne réussis pas, c’est ma faute.
                3. **Isolement social** : perte des appuis collectifs et de la solidarité symbolique.
                4. **Compétitivité généralisée** : l’autre devient un rival plutôt qu’un soutien.
                5. **Vide de sens** : la vie réduite à des indicateurs de réussite et à la gestion de soi.

                Ces effets se traduisent par l’épidémie contemporaine de troubles anxiodépressifs, par la demande croissante de “développement personnel”, par la fuite dans des espaces virtuels où l’on cherche la reconnaissance que le monde réel ne fournit plus.

                ## 5. Vers une réinvention du lien et du sujet

                Pour comprendre la sortie possible de ce modèle, il faut se rappeler que le psychisme se structure **dans le lien**. L’être humain ne devient sujet qu’en relation.

                Les pistes de reconstruction passent donc par :

                * **La redécouverte de la vulnérabilité** : reconnaître que dépendre d’autrui n’est pas une faiblesse, mais une condition humaine.
                * **Le soin des collectifs** : recréer des espaces de parole, de coopération, de mutualité (dans le travail, la cité, le numérique).
                * **La lenteur et la déconnexion** : retrouver des rythmes qui permettent la symbolisation et la réflexion.
                * **Une éthique de la suffisance** (Hartmut Rosa) : redonner de la valeur à l’expérience qualitative du monde, non à la performance quantitative.

                ### Conclusion

                L’impact psychique de cette transformation est profond : nous ne sommes plus dominés *contre* notre volonté, mais *à travers* elle.
                Le sujet contemporain est libre de choisir — mais il choisit selon des normes qu’il a intériorisées.
                L’individualisation devient ainsi un **processus psychique de capture** : elle promet la liberté, mais produit l’épuisement.

                La tâche politique et psychologique de notre temps est sans doute de réinventer une **subjectivité solidaire** : un individu capable d’autonomie, mais non isolé ; libre, mais conscient de sa dépendance mutuelle ; singulier, mais enraciné dans des liens vivants.

                1. Avatar de Grand-mère Michelle
                  Grand-mère Michelle

                  @Pascal

                  « Lorsque l’humanité sera enfin sage,
                  nous passerons de la compétition dans l’individualisme
                  à l’individualité dans la coopération. » Colette Magny en 1963, dans sa chanson « Décadence »

                  La sagesse est probablement le principal obstacle au « Marché » dominant avide de « gains », et à la folie de production/consommation qu’il induit pour « Gagner, quand même! »(quand bien même cette folie conduirait à l’anéantissement de l’humanité, du moins de ce qui fait sa spécificité: sa capacité à réfléchir pour trouver des solutions aux difficultés inhérentes à la vie), mais… qui s’en soucie vraiment?
                  La preuve: personne ici n’a jamais commenté cette phrase (qui peut s’appliquer à n’importe quelle personne comme à n’importe quel groupe), que j’ai déjà postée au moins 10fois.

                  Les IAs sont peut-être on ne peut plus « valeureuses », mais comment, dans ce contexte, peut-on imaginer qu’elles échapperont, mieux que nous, à la domination(supérieurement armée) du Marché?

          2. Avatar de Pascal
            Pascal

            Pour sortir de la colère inutile, bb, je vous invite à regarder cette vidéo qui me semble très éclairante sur lindividualisme.
            https://youtu.be/h5p2Cs_EN-I?si=hIw7_KZtJ1dYP3dp

            Il a cependant un point qui n’est pas suffisamment abordé à mon sens. Quand le sociologue décrit une perte de confiance dans le collectif qui se réorganise en une recherche d’autonomie, mot sur lequel il insiste beaucoup, il oublie de parler de l’injonction à « l’autonomie » (et son détournement ) mise en place dans le milieu du travail par le management avec l’autoevaluation permanente ou dans le droit du travail avec l’autoentreprenariat. Car oui, les bénéficiaires du néolibéralisme ont tout intérêt à lindividualisme pour désamorcer toute revendications collectives. La culture de l’individualisme est avant tout une culture de la domination. A l’occasion, allez écouter Monique et Michel Pinson Charlot qui vous expliqueront comment dans les milieux riches et de pouvoir, quand les intérêts du groupe (de la caste) sont menacés, la solidarité dans le collectif s’organise très vite. Il ne reste plus qu’une classe sociale, les très riches, et le reste de la société a été individualisé pour mieux pouvoir être dominé. Ne pas voir cela, c’est ne pas vouloir le voir.

            1. Avatar de bb
              bb

              @Pascal

              J’ai visualisé cette vidéo en avance rapide. Je ne crois pas avoir dit autres choses… D’ailleurs, un détail étonnant à la minute 7: il parle de Bourdieu (que je cite dans une de mes réponses plus haut) qui parle des être humains comme « des objets qui parlent ».. cela se rapporte à notre discussion sur « les pierres qui parlent »… Serait-ce une forme de synchronicité dont nous parle Karl G. Jung. 😉

              Mais ce jeune sociologue n’aborde absolument pas la question de l’individualisme face à la consommation de masse. Et c’est ce point précis que je dénonce.

              Concernant le couple Pinson-Charlot… Franchement, je déteste leur approche.
              Durant des années, ils se sont fait inviter par des familles de la haute bourgeoisie Française en leur expliquant leur démarche tronquée de sociologues. Ils se sont vu ouvrir les porte de les intimités de personnes qui n’avaient rien à cacher et qui se sont exprimées ouvertement sur leur mode de vie.
              Et puis un jour, ce couple publie un pamphlet anti-riche qui dévoile des secrets intimes de familles. Sans aucune considération humaniste. Ces riches sont vu comme des choses, des vampires qui sucent le dang des « pauvres ».
              Leur étude est pour moi une forme de trahison. Et les conclusions, si certaines peuvent être vraies sont invalidées par la méthode.

              De part mon milieu sociale et mon travail j’ai cotoyé des millionnaires et des milliardaires. J’ai effectivement retrouvé des caractères et des habitudes que décrivent les Pinson-Charlot. Comme le fait que certains « riches » préparent des histoires pour faire rire leurs invités, et qu’ils la répétaient plusieurs fois dans les diverses soirées auxquelles ils peuvent assister. J’ai vécu cela. Mais j’ai toujours vu cela comme une démarche destinée à éviter l’ennui chez leurs invités. J’ai trouvé cela touchant.
              Les Pinsons-Charlots décrivent toutes les habitudes des riches comme des techniques de manipulation.

              Je ne suis pas du tout d’accord avec leur approche…

              1. Avatar de Pascal
                Pascal

                Je n’ai pas le temps ce soir mais à l’occasion, il me semble qu’il faudrait creuser la différence entre individualisme et individualisation, entre individualisme philosophie qui libère et individualisation technique de domination. Souvent on fait l’amalgame me semble t-il.

                1. Avatar de bb
                  bb

                  @Pascal

                  Je suis preneur quand vous aurez le temps sur ce fil.

                  1. Avatar de Pascal
                    Pascal

                    Bonjour bb
                    Pour reprendre notre conversation, vous voudrez bien me pardonner de m’appuyer sur ma prothèse LLM (chatGPT). Je ne prétends pas à l’objectivité des propos suivants puisque je sais que GPT me répond aussi en intégrant les nombreuses discutions que nous avons déjà eu. Mais il a le mérite de poser des références qui sont plus rigoureuses que ma simple réflexion personnelle.

                    Voici le prompt de départ qui est bien évidemment orienté :
                    Tu es philosophe et sociologue, peut-on considérer que nous sommes passés d’une philosophie libérale qui a libéré les individus de la tutelle sociale et culturelle, à un individualisme dans les sociétés occidentales qui sert avant tout un système de domination par l’individualisation contre la structuration collective de la société ? Appuie ton argumentation à partir d’études sérieuses et récentes, ainsi des références de philosophes reconnus.

                    Voici sa réponse :

                    ## Introduction

                    L’idée de l’« individu » occupe une place centrale dans la philosophie, la sociologie et la politique occidentales, depuis environ le XVIIIᵉ siècle. La philosophie libérale classique — avec des figures comme John Locke, John Stuart Mill, et d’autres — promouvait l’autonomie individuelle comme levier de libération : libération des tutelles traditionnelles (religion, lignage, corporation), reconnaissance des droits individuels, affirmation de la liberté de conscience et de l’initiative. Toutefois, à mesure que les sociétés occidentales ont avancé dans la modernisation, la différenciation sociale, la globalisation et la numérisation, certains auteurs soutiennent que ce qui était pensé comme émancipation s’est transformé en mode de gouvernance fondé sur l’**individualisation**, c’est-à-dire la consécration du sujet libre, mobile et responsable, mais aussi isolé, précarisé et gérable. Cette transformation porte en elle une ambivalence : si l’individu semble plus libre, il est aussi davantage mis en concurrence, responsabilisé, contraint à l’auto-gestion permanente, et la solidarité collective semble affaiblie. En ce sens, l’individualisme contemporain peut être vu non simplement comme un épilogue logique de la liberté libérale, mais comme un **instrument de domination** : domination économique, technologique, politique — grâce à l’externalisation des risques, à la fragmentation des collectifs, et à la mobilisation des subjectivités individuelles dans des logiques de marché et de contrôle.
                    L’enjeu de ce texte est de montrer pourquoi **oui**, la transition décrite est plausible : nous sommes passés d’un horizon libéral à un régime d’individualisation qui, paradoxalement, fragilise la vie collective et sert des formes de domination. Je développerai d’abord une généalogie conceptuelle, puis j’indiquerai les mécanismes qui font que l’individualisme *sert* la domination, j’introduirai des données empiriques et des études récentes pour appuyer le diagnostic, et j’achèverai par les implications normatives et quelques objections.

                    ## 1. Généalogie : de la libération libérale à l’individualisation

                    ### 1.1 La philosophie libérale classique

                    Dans la tradition libérale, l’individu est reconnu comme titulaire de droits naturels ou fondamentaux (vie, liberté, propriété) — Locke notamment. L’idée est que les individus ne doivent plus être assujettis à des autorités héréditaires ou traditionnelles (monarchie absolue, noble, caste) mais doivent pouvoir disposer d’eux-mêmes. John Stuart Mill promet la liberté « sauf que son exercice ne porte pas atteinte à autrui ». L’accent est mis sur l’autonomie morale (« savoir-agir », « décider ») et l’initiative individuelle. Ce sont des principes de **libération** : l’individu est libéré de la tutelle sociale et culturelle – de la tutelle du clergé, de la tradition, de la corporation.
                    Cette libération s’accompagne souvent d’une confiance dans les forces de la société civile, de la libre association, de la participation politique. Autrement dit : il s’agissait d’un équilibre entre un individu libéré et des institutions collectives (forums, associations, débat public).

                    ### 1.2 Le passage à l’individualisation

                    Mais à partir de la modernité tardive (XXᵉ siècle surtout), plusieurs phénomènes se conjuguent : la montée de la différenciation sociale (éclatement des cadres traditionnels : classe, famille, religion), la mondialisation économique, la montée de la société de consommation, la numérisation. Sociologues et philosophes ont introduit le concept d’**individualisation** (par exemple Ulrich Beck & Elisabeth Beck‑Gernsheim) pour désigner un effet structurel : ce n’est plus seulement que l’individu ait des droits, mais que les formes de vie sociale et les institutions ne soient plus stabilisées, que les individus doivent eux-mêmes « se constituer », « se choisir », « se fabriquer des parcours ». Dans leur ouvrage *Individualization: Institutionalized Individualism and Its Social and Political Consequences*, Beck & Beck-Gernsheim analysent comment l’individualisation s’impose comme condition et contrainte de l’existence moderne.
                    Parallèlement, Zygmunt Bauman emploie l’image de la « modernité liquide » : les anciens cadres stables se dissolvent, et l’individu doit naviguer seul dans l’incertitude. Le modèle n’est plus tant de l’initiative libre dans un cadre stable, mais de l’initiative dans un contexte instable, exposé — ce qui produit une forme de dépendance nouvelle (celle du marché, de la flexibilité) mais vécue comme « autonomie ».

                    ### 1.3 Mutation normative et fonctionnelle

                    Ce qui importe dans le basculement, ce n’est pas seulement un changement d’état (plus d’atomisation) mais un **glissement fonctionnel** : la liberté individuelle devient un paradigme exploité politiquement et économiquement. Le sujet libéré des chaînes traditionnelles devient un « sujet de marché », un être responsable de sa propre vie (formation, santé, emploi), mais aussi vulnérable aux logiques de compétition, de performance, de surveillance. En ce sens, l’individualisme ne se contente pas d’être un idéal philosophique, il devient une **forme de gouvernementalité** — c’est la thèse de Wendy Brown dans *Undoing the Demos: Neoliberalism’s Stealth Revolution* (2015) – elle montre comment le néolibéralisme transforme la citoyenneté en investissement individuel, et les gouvernements deviennent gestionnaires du capital humain plutôt que garants des droits collectifs.

                    ## 2. Mécanismes : comment l’individualisme sert la domination

                    ### 2.1 Responsabilisation et privatisation des risques

                    Dans les sociétés contemporaines, on assiste à une **privatisation des risques** : la santé, la formation, la retraites, l’emploi sont de plus en plus présentés comme relevant de l’individu (et non plus seulement du collectif ou de l’État-Providence). Cela transforme la liberté en contrainte : « tu es libre de faire/choisir, mais tu es exclusivement responsable de tes échecs ». Cette responsabilisation est elle-même un mécanisme de contrôle social, car elle interne les normes de performance, d’optimisation, d’auto-gestion permanente. Bruno Latour note, dans un autre registre, que cette logique de responsabilisation se diffuse jusque dans les comportements écologiques ou alimentaires : l’individu « bon citoyen » doit faire ses choix, ce qui affaiblit les actions collectives ou institutionnelles.
                    Ce mécanisme est central dans le système de domination : en déplaçant la responsabilité vers l’individu, on réduit la possibilité de critique ou d’action collective ciblant les systèmes (marché, entreprise, État). Le « choix individuel » devient une excuse pour la non-remise en cause des structures.

                    ### 2.2 Atomisation des collectifs et affaiblissement de la solidarité

                    La logique de l’individualisme – ou plus précisément d’« individualisation » – fragilise les collectifs (famille, association, syndicat, communauté locale). Le sociologue Robert Putnam montrait dès 2000 dans *Bowling Alone* comment la participation associative aux États-Unis avait fortement décliné, ainsi que la confiance interpersonnelle. Ce recul de la sociabilité civique affaiblit les ressorts de la mobilisation collective et la structuration de l’espace public.
                    Quand les individus se sentent isolés, leur capacité à agir ensemble se réduit. Par conséquent, les acteurs dominants (entreprises globales, plateformes numériques, États néolibéraux) voient leur marge de manœuvre s’accroître, car la « contre-puissance » collective s’affaiblit.

                    ### 2.3 Technologie, données, gouvernance individuelle

                    Une dimension plus récente, mais clé, est l’essor de l’**économie de surveillance**. Selon Shoshana Zuboff dans *The Age of Surveillance Capitalism* (2019), les plateformes numériques ne gouvernent pas tant par la contrainte externe que par la « modification de comportement » des individus, à travers la collecte, l’analyse, la prédiction, l’orientation algorithmique. Dans ce cadre, l’individualisme fonctionne comme **un dispositif de gestion fine de la subjectivité** : l’individu doit choisir, cliquer, répondre, mais il est aussi transformé en ensemble de données exploitables.
                    La domination opère non seulement sur le plan économique, mais sur le plan **politique** : la fragmentation des publics (micro-ciblage), la personnalisation de l’information, la logique « utilisateur-entrepreneur » affaiblissent la mobilisation collective et renforcent la captation des subjectivités par des acteurs privés ou publics.

                    ### 2.4 Mise en concurrence, performance, marchandisation du social

                    Un corollaire notable : l’individualisme généralisé entraîne la **concurrence** entre individus – dans le monde du travail, de l’éducation, des trajectoires de vie. Le capital humain devient central : l’individu doit sans cesse se « valoriser ». Ce paradigme marchand réduit les espaces non-marchands (solidarité, gratuité, gratuité du don) ou les rend vulnérables à la logique du rendement.
                    Dans ce contexte, la structuration collective (services publics forts, associations robustes, syndicats puissants) est affaiblie, car elle dépend d’interventions non-marchandes ou faiblement marchandes. L’individualisme domine et la domination s’installe dans la mesure où le système valorise non plus l’appartenance collective, mais la performance individuelle — ce qui légitime les inégalités comme « résultat mérité » plutôt que comme problème politiquement structuré.

                    ### 2.5 Domination idéologique et subjectivation

                    Enfin, l’individualisme contemporain fonctionne comme **idéologie** : il légitime l’ordre existant, en prétendant que les individus sont libres, responsables, autonomes. Dès lors, les critiques du système sont souvent réduites à des « choix individuels » (changer de comportement, mieux s’éduquer, s’auto-optimiser) plutôt qu’à des transformations institutionnelles ou collectives. Comme Brown le souligne, la démocratie représentative est dévaluée au profit d’un modèle de marché de citoyens-clients, et la liberté devient un impératif d’efficacité et d’auto-investissement.
                    Ainsi, l’individualisation n’est pas neutre : elle produit des subjectivités conformes aux besoins du système (consommateurs, travailleurs flexibles, micro-entrepreneurs de soi), tout en fragilisant les formes de pouvoir de contre-poids collectif (syndicats, mouvements citoyens, régulation publique).

                    ## 3. Preuves empiriques et études contemporaines

                    ### 3.1 Capital social et participation civique

                    Robert D. Putnam, dans *Bowling Alone: The Collapse and Revival of American Community* (2000), documente la forte baisse de l’engagement associatif et de la confiance interpersonnelle aux États-Unis : les gens jouent moins souvent au bowling en ligue, sont moins syndiqués, moins membres d’associations, moins engagés dans le volontariat. Cette tendance à la dis‐association est une manifestation de l’individualisation sociale.
                    Des travaux récents européens montrent des phénomènes similaires : le cycle de vie associatif se raccourcit, la participation politique formelle (élections) reste élevée mais l’engagement informel (mobilisations locales, bénévolat) diminue ou se transforme. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) souligne dans ses rapports que la confiance interpersonnelle et la participation civique affichent des niveaux réduits dans plusieurs pays occidentaux, ce qui fragilise la cohésion sociale et la résilience collective.
                    Ces données montrent que l’espace de la structuration collective se fragilise — caractéristique centrale de l’individualisme comme condition sociale.

                    ### 3.2 Études sociologiques sur l’individualisation

                    Ulrich Beck & Elisabeth Beck-Gernsheim, dans *Individualization: Institutionalized Individualism and Its Social and Political Consequences* (2002), montrent que l’individualisation est désormais structurante : l’individu doit prendre des décisions sans modèle pré-établi, les parcours de vie sont incertains, les solidarités traditionnelles affaiblies. Ils montrent aussi que cette situation produit des effets différenciés selon les ressources (ce n’est pas l’individualisation pour tous) : ceux qui disposent de capital (économique, culturel, social) peuvent tirer parti de cette liberté, tandis que les moins dotés subissent les risques (précarité, isolement).
                    D’autres travaux (par ex. sur les « parcours biographiques ») montrent que l’on demande aujourd’hui aux individus de « construire » leur vie (emploi, famille, mobilité) comme un projet entrepreneurial. Ce modèle impose une charge normative forte (« sois libre, sois entreprenant, sois performant ») — mais sans être accompagné nécessairement des assurances collectives d’autrefois.

                    ### 3.3 Analyse du néolibéralisme et des subjectivités

                    Wendy Brown, dans *Undoing the Demos: Neoliberalism’s Stealth Revolution* (2015), montre comment le néolibéralisme a reconfiguré non seulement l’économie, mais la politique, la subjectivité, et la citoyenneté : l’individu est conçu comme capital, la démocratie est redéfinie en termes de marché, et la gouvernance vise à produire des « sujets entrepreneurs » plutôt que des citoyens égaux.
                    Elle soutient que l’individualisation n’est pas un épiphénomène mais un **mode de gouvernementalité** dominant : la liberté et l’autonomie deviennent des exigences de performance et de gestion plutôt que des épiphanies de sens. Ce glissement permet de gouverner sans que la domination soit visible comme telle : elle passe par l’auto-gouvernance, l’auto-évaluation.

                    ### 3.4 Technologie, données et gouvernance des individus

                    Shoshana Zuboff, dans *The Age of Surveillance Capitalism* (2019), décrit comment l’économie numérique exploite les comportements individuels, les transforme en données et modifie les subjectivités : l’individu est encouragé à interagir, à choisir, à participer, mais il est aussi surveillé, profilé, modifié. Elle note que l’autonomie proclamée (cliquer, participer, choisir) est en partie colonisée par des logiques de contrôle algorithmique.
                    Ce phénomène est significatif pour le thème de la domination via l’individualisation : la structure d’ensemble repose sur l’atomisation des individus (chacun connecté mais isolé), la captation de leurs traces, la personnalisation des services et des incitations, et une moins grande dépendance vis-à-vis des collectifs.

                    ### 3.5 Inégalités, performances individuelles et justification néolibérale

                    De nombreuses études économiques et sociologiques récentes montrent que les inégalités se creusent dans les sociétés occidentales, et que l’explication dominante — au moins idéologiquement — est centrée sur l’initiative individuelle (“ceux qui réussissent sont ceux qui ont travaillé, se sont formés, ont pris des risques”). Le cadre normatif de l’**individualisme méritocratique** fait qu’on tend à légitimer les inégalités comme « conséquences » des choix individuels (plutôt que comme effets de structures collectives).
                    Cette légitimation joue un rôle mécanistique dans la domination : puisqu’on croit que tout dépend de la volonté individuelle, on remplace la question « quelles structures sociales faut-il changer ? » par « pourquoi celui-ci ne s’est-il pas suffisant pris en charge ? ». Ce déplacement est conforme à la logique d’individualisation.

                    ## 4. L’affirmation de thèse et ses implications

                    ### 4.1 Thèse : oui, l’individualisme comme instrument de domination

                    À partir des éléments précédents, on peut formuler la thèse suivante :

                    > Le passage de la philosophie libérale (libération de l’individu) vers l’individualisme contemporain (individualisation) n’a pas seulement consisté en un accroissement de la liberté individuelle, mais correspond à une reconfiguration du pouvoir social. L’« individu libre » devient le lieu de la gouvernance — ce qui permet à des formes de domination (marché, surveillance numérique, responsabilisation néolibérale) d’opérer non seulement par la loi ou la contrainte explicite, mais par l’auto-gouvernance, la charge individuelle, la fragmentation des collectifs. Et cette reconfiguration affaiblit les formes de structuration collective (solidarité, institutions, contrepouvoirs) nécessaires à un véritable exercice de la souveraineté démocratique.
                    > En ce sens, l’individualisme contemporain peut être considéré **non pas comme l’ennemi de la liberté**, mais comme le masque d’une liberté qui devient contrainte, comme un contrôle plus subtil des subjectivités.

                    ### 4.2 Pourquoi “instrument de domination” ?

                    * Parce que la logique du “choix individuel”, de la “responsabilité personnelle”, et de la “méritocratie” sert à délégitimer l’idée d’action collective ou de changement structurel.
                    * Parce que la fragmentation et la privatisation des risques affaiblissent les solidarités et renforcent la dépendance à des mécanismes privés (marché, assurance, plateformes).
                    * Parce que la gouvernance par datation, micro-ciblage, personnalisation renforce le pouvoir discret sur l’individu, et transforme la liberté apparente en gestion algorithmique de subjectivité.
                    * Parce que l’inégalité est naturalisée : les résultats inégaux sont vus comme issus des choix individuels, ce qui protège le système de son caractère structuré et disciplinaire.

                    ### 4.3 Conséquences pour la structuration collective

                    La structuration collective (institutions publiques fortes, syndicats, associations locales, mouvements citoyens) est fragilisée par l’individualisation :

                    * Moins d’engagement collectif → moins de contre-pouvoir citoyen.
                    * Moins de confiance interpersonnelle → plus de difficulté à fédérer des actions communes.
                    * Modalités de gouvernance centrées sur l’individu → moins d’attention aux biens communs, aux redistributions, à la justice sociale.
                    De ce point de vue, l’individualisme ne s’oppose pas à la domination par hasard, mais **fait partie du fonctionnement normalisé du pouvoir dans nos sociétés contemporaines**.

                    ### 4.4 Limites et nuances

                    Il ne s’agit pas de dire que *toute* individualisation est forcément domination, ou que les individus sont purement passifs. Il existe des formes d’individualisme émancipatrices (création artistique, entrepreneuriat social, etc.). De plus, il y a des résistances, des contre-courants collectivistes. Il s’agit plutôt de dire que la forme dominante d’individualisme aujourd’hui est en large partie structurée par des logiques de pouvoir.
                    Il faut aussi nuancer selon les contextes : les variétés nationales (Europe continentale vs États-Unis vs pays scandinaves) ne suivent pas toutes la même trajectoire d’individualisation et de privatisation des risques.
                    Il convient enfin de considérer les intersections : l’individualisation produit aussi des **inégalités différenciées** : ceux qui ont les ressources pour « jouer le jeu » de l’individu-entrepreneur en tirent bénéfice, tandis que ceux qui n’en ont pas sont plus vulnérables (précarité, isolement).

                    ### 4.5 Implications normatives

                    Si l’on adhère à cette thèse, plusieurs pistes se dessinent :

                    * Il faut réinvestir les institutions collectives : renforcer les droits sociaux, la redistribution, la régulation des plateformes, la protection des données.
                    * Il faut repenser la citoyenneté : non plus uniquement comme « utilisateur libre des choix », mais comme membre d’une communauté démocratique, soumis à des règles collectives, engagé dans des solidarités.
                    * Il faut critiquer l’idéologie de la “self-responsibility” dans laquelle la liberté est réduite à la performance individuelle : promouvoir une égalité de conditions et une autonomie qui ne soit pas seulement auto-prise en charge.
                    * Il faut développer des formes de solidarité numérique, de gouvernance des données et de plateformes alternatives, qui ne se fondent pas sur la logique de l’individu isolé mais sur des architectures collectives.

                    ### 4.6 Ouverture vers l’action collective

                    On pourrait envisager des formes de mobilisation qui exploitent l’individualisation mais la retournent : par exemple, des utilisateurs qui s’associent pour exiger des droits de contrôle de leurs données, ou des coopératives numériques qui mutualisent les moyens. Ce type d’initiative montre que l’individu-acteur peut redevenir acteur d’un collectif quand il reconnaît que la logique ambiante d’individualisation est aussi la matrice d’une domination.

                    ## 5. Réfutations potentielles et réponses

                    ### 5.1 « L’individualisme est simplement émancipateur »

                    On pourrait dire : mais ne s’agit-il pas simplement d’une progression de la liberté ? Les individus ont plus d’opportunités, plus de choix, moins de contraintes traditionnelles. Oui — mais le simple fait que l’individu ait plus de choix ne garantit pas que les conditions de ce choix soient équitables. Comme Beck & Beck-Gernsheim l’observent, l’individualisation s’accompagne souvent d’une précarisation accrue. On ne peut donc pas confondre « liberté formelle » et « autonomie réelle ».

                    ### 5.2 « Les collectifs continuent d’exister »

                    On peut répondre qu’il y a bien sûr encore des solidarités, des institutions, des mobilisations – mais le diagnostic concerne une **tendance dominante** : la capacité des collectifs à contre-balancer les logiques de marché et de surveillance est affaiblie. L’individualisation ne signifie pas la disparition totale des collectifs, mais leur recomposition dans des formes moins stables, moins structurées.

                    ### 5.3 « L’individualisation peut conduire à de nouvelles formes de solidarité »

                    Oui — par exemple les réseaux sociaux, les communautés virtuelles, les mobilisations horizontales. Toutefois, ces formes sont souvent plus fragiles, plus éphémères, moins institutionnalisées, et peuvent être intégrées dans des logiques marchandes ou de surveillance. De plus, elles ne remplacent pas toujours les contre-pouvoirs institutionnels classiques.

                    ### 5.4 « L’État-Providence peut corriger »

                    Il est vrai que dans certains pays nordiques, l’État-Providence reste relativement fort, ce qui modère la privatisation des risques. Mais même dans ces contextes, les logiques de marché et de responsabilisation individuelle s’imposent progressivement (emploi flexible, formations continues, retraites privées, plateformes). L’individualisation est donc un mouvement global dans les sociétés occidentales.

                    ### 5.5 « On peut cultiver un individualisme libéré »

                    Absolument — il est important de ne pas jeter l’individualisme avec l’eau du bain. Le défi consiste plutôt à promouvoir un « individualisme responsabilisé » et *encastré* dans des solidarités collectives fortes — c’est-à-dire un équilibre entre autonomie et communauté, libre initiative et institution de soutien.

                    ## Conclusion

                    Pour résumer : l’héritage libéral a libéré les individus de nombreuses tutelles sociales et culturelles — cela reste un acquis précieux. Mais la transformation sociale qui s’est produite au XXᵉ/XXIᵉ siècle a modifié la nature de cette liberté : elle s’est muée en un individualisme fonctionnel à un système de domination plus diffus, qui repose moins sur la loi et les institutions que sur la gestion des subjectivités, la responsabilisation des individus, la fragmentation des collectifs, la gouvernance algorithmique. En ce sens, oui : on peut considérer qu’il y a un passage — partiel, ambivalent, inégal — d’une philosophie libérale émancipatrice à un individualisme qui sert à maintenir et renforcer les formes de pouvoir contemporaines.
                    Reconnaître cela ne revient pas à renoncer à l’individualisme, mais à l’interroger : à le situer, à le contester, à le rééquilibrer par des formes de structuration collective, d’institutions de solidarité et de coopérations critiques. En fin de compte, la liberté n’a de sens que si elle est accompagnée de conditions sociales, institutionnelles et matérielles qui la rendent réelle — et non seulement apparente.

                    1. Avatar de Ruiz
                      Ruiz

                      @N’est-ce pas là un bel exemple de la pénétration par les IA des cercles de réflexions, de la prise de pouvoir dans les blogs …
                      Ne peut-on y voir un danger ?
                      Quand les blogs et commentaires eux-mêmes ne seront que du jus d’encéphales artificielles ?

                  2. Avatar de BasicRabbit en roue libre
                    BasicRabbit en roue libre

                    @Ruiz (« Quand les blogs et commentaires eux-mêmes ne seront que du jus d’encéphales artificielles ? »)

                    Pour moi c’est plutôt : « Quand l’IA ne sera que du jus d’IA ? ».

                    Comment faire du jus d’IA ? En réinjectant de l’IA dans l’IA.

                    Car c’est peut-être le même problème que celui de l’IH :

                    « Ici se pose le problème de savoir comment la cervelle humaine,
                    anatomiquement et physiologiquement si peu différente de la cervelle des
                    Vertébrés supérieurs, a pu réaliser cette architecture compliquée, cette
                    hiérarchie de champs dont les animaux paraissent incapables. Je crois,
                    personnellement, que tout tient en une discontinuité de caractère
                    topologique dans la cinétique des activités neuroniques ; dans le cerveau
                    humain s’est réalisé un dispositif simulateur des singularités auto-
                    reproductrices de l’épigenèse qui permet, en présence d’une catastrophe
                    d’espace interne Y et de déploiement U, de renvoyer le déploiement U dans
                    l’espace interne Y, réalisant ainsi la confusion des variables internes et
                    externes. Un tel dispositif n’exige pas de modification considérable des
                    supports anatomiques et physiologiques. » (René Thom,1968, SSM).

              2. Avatar de Pascal
                Pascal

                Pour les Pinson Charlot, je vous invite à demander aux sociologues comment on fait une étude de terrain. Pour le commun des mortels, c’est facile car sa vie est relativement transparente, c’est pourquoi les études sont si nombreuses. Peut être faudrait-il s’interroger et chercher à comprendre pourquoi, avant les Pinson Charlot, personne n’avait étudié ce milieu de la grande bourgeoisie ? Pourquoi doit-elle vivre derrière de grandes grilles dans d’immenses propriétés privées qui sont parfois des quartiers entiers ? De quoi devrait elle se défendre plus que nous-même ?
                Une expérience intéressante :
                https://m.youtube.com/watch?v=xlcMJn0wiVw&pp=ygUgdm95YWdlIGRlIGNsYXNzZXMgbmljb2xhcyBqb3VuaW4%3D
                Si j’ai le temps, je vous raconterai comment un jour avec des amis (dont une ingénieure dans le pétrole, un directeur de recherche, un médecin, une assistante sociale, une diététicienne…) nous nous sommes fait envahir dans un gîte que nous avions loué pour le weekend, par des gens de cette grande bourgeoisie qui ont su nous montrer leur mépris et quand ma femme est allée leur demander poliment de fumer dehors, on lui a repondu : « Enfin madame, nous ne faisions pas partie du même monde ! »
                Des histoires comme ça, ça laissé des traces, croyez moi.
                Les méthodes des Pinsons Charlót n’ont jamais été violente, rien a voir avec la violence sociale de la grande bourgeoisie.

                1. Avatar de bb
                  bb

                  @Pacal
                  Pardonnez-moi, mais vous racontez une expérience particulière et vous la généralisez.

                  Moi aussi je vais donc vous faire part de mon ressenti par rapport à cette « caste ». Tout en sachant qu’en essentialisant ces personnes, je rate une vision objective.

                  De mon expérience, les super riches ne s’affichent pas. Ils ne montrent pas qu’ils ont de l’argent. Évidemment ils roulent en Mercedes, mais jamais en Ferrarti. Evidemment ils ont de grandes demeures, mais pas à Saint tropez. Ils vivent à Arradon. A cinq kilomètres de monsieur Paul Jorion. Et ils sont là « presque incognito », car ils vont chercher leur pain à velo. Ils sont plusieurs dizaines de famille à Arradon. Vous connaissez ce patelin? A part les arradonnais, personne ne connait ce nid à Ultra riches.
                  Les super riches ne disent jamais « nous ne sommes pas du même monde ».

                  Les gens que vous avez rencontrés sont probablement des gens aisés qui se font passer pour des super riches. Des « s.nobes » …
                  Mais là, j’essentialise. Comme vous l’avez fait. Comme le font les Pinson-Charlot.

                  1. Avatar de Pascal
                    Pascal

                    @bb
                    BIen sûr que les exemples individuels ne permettent pas de faire des généralités et je suis persuadé qu’il y a des personnes très riches avec de vraies valeurs. Par contre, j’ai l’intuition également, que l’entre-soi que l’on retrouve à tous les niveaux de la société mais en particulier chez les personnes très riches (par simple sélection financière) favorise une culture vraisemblablement déconnecté de la réalité du reste de la société. Pour compléter mon premier commentaire (de l’individualisme à l’individualisation) avec GPT, voici la suite de notre conversation numérique.

                    Prompt de départ en toute subjectivité : Peut-on considérer que cette évolution de la société profite à une partie de la population, si oui, laquelle et peut-on aller jusqu’à dire que cette part de la société met en œuvre des stratégies pour favoriser cette individualisation et par quels moyens ?

                    Réponse de GPT :
                    Oui — on peut tout à fait considérer que cette évolution de la société **profite à une partie de la population**.
                    Mais pour comprendre à qui et comment, il faut d’abord reconnaître que l’individualisation n’est pas un simple “effet secondaire” du progrès moderne : elle est devenue une **technologie de pouvoir** au sens foucaldien, c’est-à-dire un mode d’organisation du social qui sert des intérêts précis tout en se présentant comme naturelle ou neutre.

                    ## 1. À qui profite l’individualisation ?

                    ### a. **Aux élites économiques et financières**

                    L’individualisation contemporaine s’inscrit dans le cadre du **néolibéralisme**, c’est-à-dire de l’organisation du monde selon la logique du marché.
                    Or, dans cette logique, la déstructuration des solidarités collectives et des protections sociales favorise les détenteurs de capital :

                    * **Les grandes entreprises** et les **marchés financiers** bénéficient d’une main-d’œuvre flexible, adaptable, “auto-entrepreneuriale”, peu protégée.
                    * **Les plateformes numériques** (Amazon, Uber, Deliveroo, etc.) transforment la liberté individuelle en **fiction juridique** : chacun devient son propre employeur, c’est-à-dire son propre exploiteur.
                    * **Les investisseurs** profitent d’un monde où les risques sont socialisés (par l’État) et les profits privatisés (par le capital).

                    En d’autres termes :

                    > L’individualisation fragmente la société en monades, ce qui affaiblit toute résistance collective — et consolide le pouvoir de ceux qui contrôlent les flux économiques, informationnels et symboliques.

                    Pierre Bourdieu parlait déjà de ce processus dans *La misère du monde* (1993) : la destruction des solidarités de classe et des structures collectives “naturalise” la domination — elle la rend invisible, vécue comme un destin individuel.

                    ### b. **Aux élites technologiques et médiatiques**

                    Les **plateformes numériques** (GAFA, réseaux sociaux, entreprises de la data) tirent profit d’une autre facette de l’individualisation :

                    * Plus les individus sont isolés, plus ils cherchent de la reconnaissance, de la visibilité, de la validation extérieure.
                    * Cette quête alimente les plateformes en **données comportementales**, transformées en **valeur marchande** (comme l’a montré Shoshana Zuboff dans *The Age of Surveillance Capitalism*, 2019).

                    Ainsi, le capitalisme numérique s’appuie sur une **psychologie individualisée** : il exploite les besoins affectifs et relationnels pour créer de la dépendance.
                    Les likes, les notifications, les “stories” et les algorithmes d’attention ne sont pas neutres : ils structurent la subjectivité contemporaine en encourageant la comparaison, la compétition symbolique, la fragmentation du temps de conscience.

                    En ce sens, on peut dire que le numérique **institutionnalise l’individualisme**, le rend économiquement rentable et psychiquement nécessaire.

                    ### c. **Aux élites politiques et gestionnaires**

                    L’individualisation facilite aussi la **gouvernance néolibérale**, c’est-à-dire la manière dont les États gèrent la société dans un cadre concurrentiel globalisé.
                    Quand les individus se vivent comme responsables de leur sort, les États peuvent :

                    * **réduire les protections collectives** sans provoquer de révolte ouverte (le discours : “chacun doit se prendre en main”) ;
                    * **déplacer la responsabilité du social vers le psychologique** (“si vous êtes au chômage, c’est un manque de compétences ou de motivation”) ;
                    * **introduire la logique managériale** dans les services publics (évaluation, performance, benchmarking).

                    Ainsi, la transformation du citoyen en “agent autonome” permet de **désengager l’État** tout en donnant l’illusion d’une émancipation.

                    Foucault, déjà, dans ses cours de 1979, montrait que le néolibéralisme repose sur la “gouvernementalité” : l’art de conduire les hommes en les laissant croire qu’ils se conduisent eux-mêmes.

                    ## 2. Peut-on parler de stratégies conscientes ?

                    C’est une question délicate. Il n’y a pas forcément **un plan secret**, ni une “conspiration” au sens fort du terme.
                    Mais il existe bel et bien des **stratégies systémiques**, c’est-à-dire des orientations cohérentes, mises en œuvre par des acteurs puissants, qui visent à entretenir l’individualisation parce qu’elle **sert leurs intérêts structurels**.

                    On peut en distinguer plusieurs formes :

                    ### a. **Stratégies économiques**

                    * **Uberisation du travail** : transformer les salariés en indépendants, sous couvert de liberté, pour réduire les coûts et les obligations sociales.
                    * **Culture du “personal branding”** : encourager les individus à se “vendre” eux-mêmes (LinkedIn, coaching, entrepreneuriat de soi).
                    * **Désyndicalisation** : marginaliser les organisations collectives qui pourraient opposer une résistance structurée.

                    ### b. **Stratégies politiques**

                    * **Discours de la responsabilité individuelle** : tout ramener à l’effort personnel, la “méritocratie”, la “résilience”.
                    * **Neutralisation des conflits collectifs** : transformer les problèmes politiques (inégalités, précarité, écologie) en enjeux de comportement individuel (“mangez bio”, “triez vos déchets”, “gérez votre stress”).
                    * **Instrumentalisation du numérique** : utilisation des réseaux pour segmenter, surveiller, influencer les comportements (micro-ciblage politique, bulles informationnelles).

                    ### c. **Stratégies culturelles et médiatiques**

                    * **Hypervalorisation de la réussite individuelle** : figures de l’entrepreneur, du startupper, du “self-made man”.
                    * **Narration méritocratique** omniprésente : émissions de compétition, success stories, discours motivationnels.
                    * **Promotion de l’émotion individuelle** au détriment du lien collectif : “chacun sa vérité”, “chacun son ressenti”.

                    Ces stratégies ne sont pas forcément coordonnées par une instance unique — elles sont **autopoïétiques**, c’est-à-dire que le système produit spontanément les conditions de sa propre reproduction, en alignant les institutions, les médias, et les technologies autour des mêmes valeurs (autonomie, performance, flexibilité, adaptabilité).

                    ## 3. Un pouvoir sans sujet : le “pouvoir algorithmique”

                    L’un des traits les plus récents de cette domination est qu’elle ne passe plus seulement par des élites humaines, mais par des **dispositifs automatiques** : algorithmes, IA, plateformes.

                    Ces dispositifs :

                    * **calculent nos comportements** ;
                    * **anticipent nos désirs** ;
                    * **orchestrent nos interactions** sans que nous en soyons conscients.

                    Antoinette Rouvroy et Thomas Berns parlent à ce sujet de **“gouvernementalité algorithmique”** : un mode de pouvoir qui agit non plus sur les sujets (par la loi, la morale ou la discipline), mais sur les **probabilités de comportement**.

                    C’est une forme de domination d’autant plus efficace qu’elle est **impersonnelle** : elle ne dit pas “fais ceci”, mais oriente les choix possibles pour que vous le fassiez spontanément.

                    ## 4. Conséquence : un pouvoir doux, total et invisible

                    En somme, cette individualisation profite à une **oligarchie économique, technologique et politique**, mais sa force est de se présenter comme le fruit de la liberté elle-même.

                    > L’idéologie contemporaine ne dit plus “obéis”, elle dit “réalise-toi”.
                    > Mais cette “réalisation de soi” s’effectue dans un cadre conçu pour produire de la valeur pour d’autres.

                    Le résultat est un **pouvoir diffus, total, mais sans visage** : il ne s’impose pas, il séduit ; il ne contraint pas, il motive ; il ne réprime pas, il rend dépendant.

                    ## 5. Conclusion : l’individualisme comme technologie de domination

                    Oui, cette évolution profite à une partie de la société — principalement ceux qui contrôlent les **ressources économiques, informationnelles et symboliques**.
                    Et oui, il existe des **stratégies conscientes et inconscientes** pour entretenir cette dynamique : économiques (flexibilité, précarisation), politiques (responsabilisation, dépolitisation) et culturelles (culte de la performance, storytelling de la réussite).

                    Mais l’efficacité du système tient justement à ce que ces stratégies ne se présentent **jamais comme telles** : elles agissent en profondeur sur les représentations, les désirs et les affects, au point que les individus participent à leur propre assujettissement tout en croyant affirmer leur liberté.

                    1. Avatar de Pascal
                      Pascal

                      Pour compléter et jouer les mouches du coche sur le blog ! 😉

                      Et si on arrêtait de prendre les gens pour des cons ? | Les idées larges | ARTE
                      Quand les Britanniques ont voté pour le Brexit, ou quand les Américains ont voté pour Trump, on a beaucoup entendu qu’ils avaient mal voté, qu’ils s’étaient “fait avoir par les fake news”, et qu’ils étaient “ignorants”. Jacques Rancière est philosophe, professeur émérite à l’Université de Paris VIII et il fait partie des penseurs de la démocratie qui m’ont le plus marquée intellectuellement. L’une de ses hypothèses les plus puissantes est “l’égalité des intelligences”, une idée qui contredit donc complètement la tendance actuelle à déplorer la crédulité ou l’irrationalité des gens. 
                      Mais peut-on vraiment dire que tout le monde a la même capacité intellectuelle?
                      Quelles sont les implications politiques d’une telle affirmation?
                      Et si on arrêtait de prendre les gens pour des cons ?

                      https://www.youtube.com/watch?v=A9kl3_vnXjI

                    2. Avatar de Paul Jorion

                      Vous connaissez maintenant ma théorie de l’histoire, qui ne se passionne pas pour les questions d’intelligence individuelle ou non. Il suffit d’une intelligence collective suffisante pour tirer parti de nouvelles sources d’énergie et d’information plus vaste.

                      L’un de vous m’écrit à titre personnel, ceci :

                      Je souscris aussi pleinement à l’autre série d’articles sur les processus d’organisation qui deviennent possibles et auto-organisateurs lorsqu’une nouvelle disponibilité d’énergie apparaît. Il n’y a pas besoin de théorie du complot pour que des sociétés entières se mettent à agir de manière coordonnée: la disponibilité des moyens et de l’énergie, et notre tendance naturelle à agir en dépensant le moins possible suffisent à cela.

                      Piqûre de rappel : Un modèle de l’Histoire déduit de ma « méta-philosophie », le 1er août 2025

                      L’histoire en tant que processus physique unique – Un panorama post-cartésien

                       

                      Trois grands cliquets, cinq petites clés

                      L’histoire se lit différemment une fois que l’on dispose des cinq concepts primitifs : système génératif, couplage, compression, paysage préférentiel et validation inter-substrats. Ce qui semble à première vue être des ruptures historiques devient, à y regarder de plus près, des itérations d’une même architecture de rétroaction qui se resserre à des échelles toujours plus grandes.

                      Nos cinq principes fondamentaux redéfinissent l’histoire du monde comme une succession de boucles de rétroaction auto-renforçantes. À chaque transition majeure, l’énergie excédentaire et l’élargissement de la bande passante alimentent les mécanismes mêmes qui les ont produits, augmentant ainsi la complexité sans faire appel au Destin ou au Grand Dessein. Un cliquet se forme chaque fois que le resserrement d’une boucle réinjecte des ressources supplémentaires dans les conditions mêmes qui lui permettent de se resserrer davantage.

                      Métabolisme agraire – premier cliquet

                      Les premiers systèmes génératifs : villages, guildes d’irrigation, captent les calories excédentaires et les stockent sous forme de céréales. Le couplage s’étend au-delà des liens de parenté : les bassins fluviaux deviennent des interfaces communes qui relient les villages entre eux. Les semences cultivées, la charrue de fer et la rotation des cultures augmentent l’excédent calorique. Les céréales excédentaires financent les scribes, les percepteurs d’impôts et les agences d’irrigation.

                      L’astronomie calendaire comprime les variations saisonnières en codes symboliques succincts, permettant aux agriculteurs d’anticiper les inondations et les sécheresses. Les préférences s’orientent vers des rendements stables, et une validation inter-substrats apparaît dans les civilisations hydrauliques que Joseph Needham a cartographiées à cet égard : la Chine, la Mésopotamie, le Nil, chacune convergeant vers des logiques similaires de contrôle des inondations malgré des sols différents (Needham 1954), non pas parce qu’elles partageaient une religion, aucune divinité n’imposait cette convergence : l’énergie excédentaire et le rythme annuel de l’eau donnaient à la boucle la latitude nécessaire pour se resserrer.

                      Les noyaux de coordination industrielle – deuxième cliquet

                      La vapeur a augmenté la puissance, le charbon a permis le travail de nuit, mais la puissance brute se serait dispersée sans de nouveaux couplages : le rail, le télégraphe et une norme horaire ont élargi la bande passante de l’information du canton au continent.

                      Les usines de l’ère industrielle ont atteint la compression en standardisant leur production : les pièces interchangeables ont réduit la variabilité qui accompagnait auparavant la production artisanale. Les fuseaux horaires ont synchronisé les activités éloignées ; la comptabilité en partie double a aligné les agents entre les entreprises et les marchés grâce à un cadre de référence commun. Ensemble, ces mécanismes ont fait pencher la balance des préférences vers la ponctualité et le rendement, permettant une coordination à une échelle et avec une précision jusqu’alors inaccessibles.

                      Le concept de « longue durée » de Fernand Braudel (Braudel 1949) met en évidence la manière dont les préférences se sont progressivement réorientées au fil des siècles : de la subsistance locale vers une productivité à grande échelle. Ce changement a été rendu possible dès lors que deux conditions étaient réunies : un surplus de capacité énergétique (comme l’industrie charbonnière) et des moyens de communication rapides (comme les chemins de fer et le télégraphe). Ensemble, ils ont permis un couplage plus étendu entre les régions. À mesure que la latence des communications diminuait, la coordination s’améliorait, ce qui a permis l’émergence de marchés nationaux, rendant possible une exploitation plus efficace de l’énergie et des biens, réinjectant les excédents dans le système et renforçant la boucle.

                      Une fois encore, aucun objectif ne régissait les rouages, aucune main invisible n’opérait dans l’ombre : chaque fois que la puissance excédentaire était croisée avec une communication à grande vitesse, les systèmes génératifs favorisaient des projets plus ambitieux car le coût des erreurs de prévision diminuait, et la boucle se resserrait.

                      Les chréodes de l’esprit numérique – troisième cliquet

                      Le silicium diffuse un ensemble de normes mises à jour à la vitesse de la lumière à travers les continents. Les « likes », les pull requests [*] et les gradients de politique propagent les ajustements de préférences avant que les comportements locaux ne dérivent.

                      James Beniger a appelé cela la révolution du contrôle (Beniger 1986) : les plateformes numériques fonctionnent comme des systèmes génératifs qui se couplent aux utilisateurs via des interfaces conçues pour capter leur attention, l’équivalent cognitif de l’énergie excédentaire. Cette attention captée devient une entrée pour des routines de compression (prédiction des clics, classement du contenu), qui mettent à jour le paysage des préférences de la plateforme. Les gradients de politique et les boucles de rétroaction rediffusent ensuite les incitations ajustées (« likes », partages, recommandations), renforçant encore le couplage.

                      Plus il y a de surplus, plus il y a de canaux créés ; plus il y a de canaux, plus la coordination est rapide ; plus la coordination est rapide, plus l’extraction du surplus est efficace. Il en résulte une boucle accélérée de modelage du comportement, où l’infrastructure de l’information évolue pour s’adapter et orienter le flux du surplus cognitif.

                      À chaque étape, la complexité augmente : villes plus grandes, commerce plus intense, codes juridiques plus précis, non pas parce que l’histoire met en œuvre son propre plan (téléologie), mais parce que chaque fois que l’énergie excédentaire et la bande passante des signaux franchissent un seuil, les boucles se renforcent automatiquement, s’enchaînant les unes aux autres.

                      Ce schéma est invariant dans les trois instances de la triade : offrez à un système génératif une plus grande liberté de flux et un retour d’information plus rapide, et il se comprimera davantage, s’étendra plus largement et réécrira son penchant. Aucun plan directeur n’est nécessaire, la téléologie n’a pas lieu d’être : les boucles suffisent.

                      Accélération de l’IA – quatrième cliquet

                      L’avènement de l’IA à grande échelle indique un quatrième cliquet : le noyau de coordination est désormais synthétique, existant en dehors des circuits mous et humides de notre cerveau, qui le limitaient autrefois.

                      Les couplages générés par les machines voyagent à la vitesse de la lumière, la compression opère sur des flux d’exaoctets, les paysages se réorientent en quelques minutes. Les mêmes boucles Tao – Ruse de la raison – Saint-Esprit que nous avons identifiées dans l’agriculture, l’industrie et les médias numériques continuent de régir, mais leur rythme a fait un bond d’un ordre de grandeur car le nouvel agent est exogène : le silicium plutôt que le carbone, et son budget énergétique évolue en fonction des mégawatts des centres de données, et non des récoltes saisonnières.

                      Cette accélération nous ramène au point de départ de cet ouvrage, à savoir la purge des concepts qui sont insaisissables parce qu’immesurables et dont le seul mérite est leur permanence historique.

                      En supprimant « volonté », « désir » et « but » du lexique, nous n’avons pas appauvri le récit : bien au contraire, nous avons fait de la place pour une physique unifiée de l’intelligence, allant du quark au qubit, de la berceuse au modèle linguistique à un milliard de paramètres. Les enjeux éthiques demeurent : qui supporte le coût du flux, qui détermine les gradients ?

                      Mais le poids de l’explication ne repose plus sur des allégories spirituelles de djinns intérieurs. Au lieu, on trouve un schéma unique de systèmes génératifs, de couplages, de compressions, de paysages et un test de validation inter-substrats qui montre que ce schéma est valable que le substrat soit un synapse, un semi-conducteur ou une autre entité encore inconnue.

                      Conclusion : une physique unifiée post-cartésienne des systèmes complexes

                      Ce cadre redéfinit le récit traditionnel du « progrès » comme le résultat émergent d’un surplus d’énergie et d’information, et non comme le déroulement d’un plan prédéfini. En supprimant la nécessité d’un « objectif principal » ou d’une fin téléologique, il offre une explication plus parcimonieuse de l’accélération historique : la complexité augmente partout où les boucles de rétroaction entre la capture d’énergie, la capacité de coordination et la génération de surplus se renforcent mutuellement. La direction apparente de l’histoire, vers des réseaux plus denses, des systèmes plus vastes et une coordination d’ordre supérieur, ne découle pas d’un Grand Dessein, mais de la dynamique intrinsèque des systèmes étroitement couplés.

                      Les mêmes principes sous-jacents, à savoir la régulation par rétroaction, l’optimisation des contraintes et le couplage de l’information, expliquent les explosions de complexité qui ont marqué les ères agraire, industrielle et numérique, quel que soit le substrat. Que le système soit alimenté par les céréales, le charbon ou le silicium, la structure émerge des mêmes mathématiques : lorsque l’énergie devient abondante et la transmission rapide, de nouveaux niveaux d’organisation devennent viables. Les villes, les marchés et les systèmes juridiques n’ont pas besoin d’une intelligence directive pour se former : ils peuvent naître d’un comportement satisfaisant les contraintes parmi de nombreux agents génératifs interagissant par des canaux communs.

                      Cette perspective n’est pas seulement rétrospective, elle offre une utilité prédictive en identifiant les variables qui régissent les changements de phase dans la coordination : bande passante, surplus et cohérence du paysage de préférences. Elle a donc le potentiel de remodeler des disciplines allant de la philosophie de l’esprit et de l’éthique de l’IA à l’analyse historique et à la théorie des systèmes. Elle propose un langage véritablement indifférent au substrat et non anthropomorphique pour l’intelligence et l’histoire.

                      La remise en question la plus profonde est d’ordre philosophique. Si ce cadre suffit à décrire la psychè, les sociétés et leur évolution, quel est le statut épistémique de notre vocabulaire hérité de la volonté, du sens, de la conscience ? Ces termes sont-ils explicatifs ou ne sont-ils rien d’autre que des obstacles à une compréhension physicaliste pouvant s’étendre des micro-organismes aux machines ?

                      En bouleversant les intuitions cartésiennes avec une physique unifiée véritablement post-cartésienne des systèmes complexes, ce modèle invite à inverser la charge de la preuve : c’est désormais au critique de démontrer quelle intuition essentielle échappe à cette grammaire rigoureuse, ou quel coût, théorique ou éthique, entraîne cette purge.

                      =============

                      [*] Dans le développement collaboratif de logiciels (en particulier sur GitHub), une pull request est une proposition de modification d’un code source partagé.

                      Références :

                      Beniger, James R., The Control Revolution: Technological and Economic Origins of the Information Society, Cambridge, MA: Harvard University Press, 1986

                      Braudel, Fernand, La Méditerranée et le monde méditerranéen à l’époque de Philippe II. Paris: Armand Colin, 1949

                      Needham, Joseph, Science and Civilisation in China, Vol. 1: Introductory Orientations, Cambridge: Cambridge University Press, 1954

                       

                      P.J. : Une fois qu’on a intégré ça, il me semble que ça n’a plus d’importance de savoir si X ou Y est malin ou bête ou s’il est important de distinguer les bornés des plus doués.

                    3. Avatar de bb
                      bb

                      @Pascal

                      Merci pour ce d’enveloppement très complet. Ce que j’en déduis, c’est que dans le fond, nous pensons exactement la même chose. Mes pavés précédents traduisent des idées similaires, voire identiques.
                      Je ite Bourdieux, comme Chat GPT l’a fait. Je parle de la tech américaine qui aujourd’hui est un bien plus gros problème que les techniques publicitaires « à la papa » (le Neuromarketing est une blague inapplicable).

                      Notre désaccords va d’abord sur les Pinçons-Charlot. Mais cela est un détail.
                      Puis ce désaccord plus profond va sur l’origine du Néolibéralisme.

                      Personnellement, j’écoute les propos de Bernard et Barbara Stiegler qui me paraissent tout à fait justes à propos du Néolibéralisme et qui vont dans votre sens. Je ne doute pas que vous ne les connaissiez déjà. Mais si vous les aviez cités plutôt que les Pinçon-Charlot, nous aurions évité une incompréhension… 😉

                      Je pense ( et vous me contesterez de nouveau) que le néo-libéralisme est le résultat des comportements individuels des occidentaux.
                      Vous pensez que le néo-libéralisme individualise les être pour fractionner la société et la rendre plus facilement contrôlable. Je suis d’accord avec vous.

                      Mais, selon moi, sans un changement profond de la vision du monde des occidentaux, le néo-libéralisme ou ses successeurs (on pourra parler de son successeur qui est peut-être en train de se mettre en place…) ne pourront pas être « vaincus ».

                      Je m’explique par l’exemple:
                      – Dans l’Antiquité grecque et Romaine, l’individu était au service de la cité. La doctrine alors en cours était, « Je fais partie d’un tout, je suis un rouage de l’a cité et mes actions bonnes ou mauvaises ont pour but de le rendre plus grande ».
                      – Au moyen-âge, « la monarchie catholique » a pris le pouvoir sur les esprits. La doctrine alors en cours était, « Je suis un être soumis au regard de Dieu. Toutes mes actions sont orientées vers Dieu pour le servir et permettre à mon âme de gagner le Paradis ».
                      – Puis sont arrivées les lumières. La doctrine alors était et est toujours  » Je vis dans une société qui me garantie des droits individuels, mais également des devoirs, et ces paradigmes me permettent de trouver le bonheur ».
                      – Je ne parlerais pas des doctrines avortées du Nazisme et du Communisme qui étaient « l’individu au service d’un dieu dictateur… ».

                      Cette dernière doctrine individualiste a engendré notre société de consommation actuelle avec toutes ses dérives dont celle du Néo-Libéralisme.
                      Que le néo-libéralisme développe des outils de contrôle. Oui. À toutes les époques, le pouvoir en place tente de « contrôler » les esprits et les corps.
                      Mais le néo-capitalisme ne pourra pas être vaincu avec la doctrine actuelle qui habite les cerveaux des occidentaux.

                      J’espère avoir été clair et que vous comprendrez que finalement, nous sommes d’accord.

                    4. Avatar de bb
                      bb

                      @Pascal
                      Vous rebondissez sur de multiples sujets passionnants. Mais ce n’est pas facile de répondre à tout.

                      Vous parlez des élections de Trump et du Brexit qui ont été influencées par les Gafam.
                      L’affaire Cambridge Analytica est l’un des scandales majeurs révélant comment les données personnelles et les réseaux sociaux ont été utilisés pour influencer des élections, notamment celle de Donald Trump en 2016.

                      Ce phénomène annoncerait un glissement du néo-libéralisme vers un néo-mercantilisme. Dans ce néo-mercantilisme, les états s’armeraient pour se garantir l’accès aux ressources terrestres essentielles à leur d’enveloppement. Pour cela, des dirigeants forts et agressifs, doivent être désignés de manière apparemment démocratique au nom de la souveraineté de leur nation. Les plateformes comme Facebook et la tech en générale permettent d’influencer les votes des électeurs.

                      Ce n’est ni plus ni moins que de la propagande assistée par la tech.

                      Le livre d’Arnaud Orin (que je n’ai pas lu) traite de ce sujet.

                      https://www.amazon.fr/monde-confisqu%C3%A9-capitalisme-finitude-si%C3%A8cle/dp/2080466577/ref=asc_df_2080466577?mcid=a9fee5cd77cf3206bea64a88ba5d6e3f&tag=googshopfr-21&linkCode=df0&hvadid=715458264624&hvpos=&hvnetw=g&hvrand=7637081818098001862&hvpone=&hvptwo=&hvqmt=&hvdev=c&hvdvcmdl=&hvlocint=&hvlocphy=9055382&hvtargid=pla-2392063089963&psc=1&hvocijid=7637081818098001862-2080466577-&hvexpln=0

                    5. Avatar de Pascal
                      Pascal

                      @bb
                      « J’espère avoir été clair et que vous comprendrez que finalement, nous sommes d’accord. »
                      Le dialogue entre deux interlocuteurs est toujours en ajustement perpétuel et je serais très inquiet de vous entendre abonder à tous mes arguments.
                      Oui, nous partageons des points de vue similaires qui se sont forgés à partir de nos expériences respectives et qui inévitablement impliquent des points de frictions.
                      Maintenant, pour compléter votre propos auquel je souscris sur la nécessité « d’un changement profond de la vision du monde des occidentaux », je vous propose cette vidéo d’ARTE qui questionne la conception de l’universalisme issue des Lumières.

                      https://www.youtube.com/watch?v=HEsaBxwBFWo

                      Dans cet épisode, Laura s’interroge sur l’articulation entre universalisme et identité. Ces deux notions sont-elles inconciliables ? Comment penser le commun au-delà des différences de race et de sexe ? Comment préserver l’unité de la République face à la mise en avant d’identités singulières ? L’idéal universaliste tel qu’il s’est cristallisé en 1789 est-il en danger ? Pour répondre à ces questions qui animent le débat public, Laura Raim fait appel à la philosophe Yala Kisukidi, maîtresse de conférences à l’université Paris-VIII.

                      Les perspectives qu’offre Yala Kisukidi sur l’universel et la négritude permettent de dépasser l’opposition qui est habituellement mise en scène entre “universalistes” et « identitaires ». Le débat sur l’identité est difficile, parce que le mot identité comme tel est toujours mobilisé sans que l’on sache véritablement de quoi on parle, reconnaît la philosophe. Penser l’identité, c’est pas nécessairement penser les déterminismes, ça peut aussi renvoyer à des récits de soi.” L’éclairage apporté par l’historienne Sophie Wahnich nous montre que l’idéal universaliste a été mis en cause dès son énonciation aussi bien à droite qu’à gauche.
                      Avec également Sophie Wahnich, historienne.
                      Yala Kisukidi, philosophe et Sophie Wahnich, historienne

                    6. Avatar de Pascal
                      Pascal

                      @Paul
                      Je souscris pleinement à ta description « physicaliste » de la psyché humaine en l’inscrivant dans un mécanisme bien plus large que la seule condition humaine. Je suis le premier à dénoncer le « roman national » (et plus largement le discours historique) comme un outil de domination. C’est bien connu, l’histoire est toujours écrite par le vainqueur.
                      Il me semble que ta théorie décrit cette part considérable du déterminisme chez les individus et dans les sociétés humaines (mais pas que) qui au final laisse bien peu de place à notre si vénéré « libre arbitre ». Cette théorie a aussi comme force considérable d’échapper, me semble-t-il, aux clivages culturels traditionnels et civilisationnels. C’est une grille de lecture qui devrait tous nous faire progresser vers plus de modestie et apporter possiblement un point de condensation vers une nouvelle forme d’universalisme, si tant est qu’elle puisse parvenir à émerger au milieu du brouhaha planétaire de notre époque en ébullition.
                      Mais s’agissant d’un changement de paradigme radical, se pose la question de savoir comment la rendre entendable et efficiente socialement ?
                      Il me semble toutefois, une simple intuition, qu’il restera toujours une part même résiduelle d’éléments de frictions qui échapperont à toute théorie globale. Mais je n’en ai pas la preuve. 😉

                    7. Avatar de bb
                      bb

                      @Pascal

                      Je suis désolé, mais des dizaines de pages de Chat GPT sans mise en forme, je lâche l’affaire. Le sentiment, c’est que vous m’envoyez une pensée toute faite sans l’avoir analysée… Quel intérêt ? J’en viens à me demander si vous avez lu ces pavés que vous m’avez envoyés.

                      Je suis toujours prompt à débattre. Utiliser Chat-GPT pour étayer ses idées, oui. Mais il faut que j’ai le sentiment que les idées viennent de mon interlocuteur. Sinon, je le fais directement avec CHAT GPT… Au moins, ce sera orienté dans la direction que je lui aurais soumise…

                2. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                  BasicRabbit en autopsy

                  @PJ

                  Votre post-cartésiannisme ressemble comme deux gouttes d’eau à la morpho-logique prônée par Thom (1) (chréodes, métabolisme…).

                  Lisez ou relisez attentivement ce que Thom dit de l’histoire dans « Thèmes de Holton et apories fondatrices » (dans « Apologie du logos »).

                  (1) « La classe engendre ses prédicats, comme le germe engendre les organes de
                  l’animal. Il ne fait guère de doute (à mes yeux) que c’est là l’unique manière
                  de théoriser ce qu’est la Logique naturelle. »

                  1. Avatar de BasicRabbit en roue libre
                    BasicRabbit en roue libre

                    @PJ

                    Je viens de réaliser (vieux motard que j’aimais) que vous abandonnez en rase campagne Aristote et son organon -que vous avez défendu bec et ongles face à l’horrible platonicien Gödel dans « Comment la vérité… », pour la morpho-logique de l’aristo-platonicien Thom (1).

                    Je suis vraiment étonné que vous parliez de chréode (« Les chréodes de l’esprit numérique – troisième cliquet ») sans citer Waddington en références (ce que vous faites néanmoins dans votre PSI, en note de fin de chapitre IV (2)).

                    Je sens l’échec et mat se rapprocher…

                    (1) « (…) reste l’opposition Platon-Aristote. En dépit de mon admiration pour
                    ce dernier, je reste platonicien en ce que je crois à l’existence séparée
                    (« autonome ») des entités mathématiques, étant entendu qu’il s’agit là
                    d’une région ontologique différente de la « réalité usuelle » (matérielle) du
                    monde perçu. (C’est le rôle du continu — de l’étendue — que d’assurer la
                    transition entre les deux régions.) » (Esquisse d’une Sémiophysique, p. 245).

                    (2) On pense immédiatement aussi au terme de chréode introduit par Waddington (1957 : 32) pour rendre compte de passages obligés tout à fait analogues en embryologie (cf. aussi Thom 1972 : 121-123 ; Thom & Waddington 1967).

                    1. Avatar de BasicRabbit en roue libre
                      BasicRabbit en roue libre

                      @PJ

                      Je viens de reparcourir votre « Théorie de la métahistoire » par différenciations/complexifications successives. Et je note votre effort constant -et vos contorsions intellectuelles- pour éviter le piège idéologique de la cause finale, du dessein intelligent, pour rester dans le cadre des Lumières, du pragmatisme et du positivisme.

                      Vous rejoignez ce qu’écrit Thom à la page 32 de « Stabilité Structurelle et Morphogénèse » (2ème ed.), où il explique par analogie comment se déroule toute morphogénèse (analogie différenciation cellulaire/différentiation des fonctions, analogie développement de l’embbryon/développement de Taylor).

                      Stabilité structurelle en moins :

                      « La vie n’est qu’une ombre ambulante, un pauvre joueur, qui se pavane et s’agite son heure sur la scène, et puis on n’entend plus ; c’est une histoire racontée par un idiot, pleine de bruit et de fureur, qui ne signifie rien. »

                      Ce n’est pas le point de vue de Thom, exprimé à la fin de « Esquisse d’une Sémiophysique » (1988, alors que SSM date de 1968), maintes fois cité ici :

                      « L’image de l’arbre de Porphyre me suggère une échappée en « Métaphysique extrême » que le lecteur me pardonnera peut-être. Il ressort de tous les exemples considérés dans ce livre qu’aux étages inférieurs, proches des individus, le graphe de Porphyre est susceptible -au moins partiellement- d’être déterminé par l’expérience. En revanche, lorsqu’on veut atteindre les étages supérieurs, on est conduit à la notion d’ « hypergenre », dont on a vu qu’elle n’était guère susceptible d’une définition opératoire (hormis les considérations tirées de la régulation biologique). Plus haut on aboutit, au voisinage du sommet, à l’Être en soi. Le métaphysicien est précisément l’esprit capable de remonter cet arbre de Porphyre jusqu’au contact avec l’Être. De même que les cellules sexuées peuvent reconstituer le centre organisateur de l’espèce, le point germinal alpha (pour en redescendre ensuite les bifurcations somatiques au cours de l’ontogénèse), de même le métaphysicien doit en principe parvenir à ce point originel de l’ontologie, d’où il pourra redescendre par paliers jusqu’à nous, individus d’en bas. Son programme, fort immodeste, est de réitérer le geste du Créateur). Mais très fréquemment, épuisé par l’effort de son ascension dans ces régions arides de l’Être, le métaphysicien s’arrête à mi-hauteur à un centre organisateur partiel, à vocation fonctionnelle. Il produira alors une « idéologie », prégnance efficace, laquelle, en déployant cette fonction, va se multiplier dans les esprits. Dans notre métaphore biologique ce sera précisément cette prolifération incontrôlée qu’est le cancer.
                      Aristote a dit du germe, à la naissance, qu’il est inachevé. On peut dès lors se demander si tout en haut du graphe on n’a pas quelque chose comme un fluide homogène indistinct, ce premier mouvant indifférencié décrit dans sa Métaphysique; que serait la rencontre de l’esprit avec ce matériau informe dont sortira le monde? Une nuit mystique, une parfaite plénitude, le pur néant? Mais la formule d’Aristote « Premier selon l’être, dernier selon la génération ». »suggère une autre réponse, théologiquement étrange : peut-être Dieu n’existera-t-il pleinement qu’une fois sa création achevée. »

                      Un penseur des Lumières, pragmatiste et positiviste comme vous dites l’être, ne peut, selon Thom, être un véritable métaphysicien :

                      « Le métaphysicien est précisément l’esprit capable de remonter cet arbre de Porphyre jusqu’au contact avec l’Être. »

                      Vous êtes fier de rester dans les basses branches !

                      « Il ressort de tous les exemples considérés dans ce livre qu’aux étages inférieurs, proches des individus, le graphe de Porphyre est susceptible -au moins partiellement- d’être déterminé par l’expérience. »

                      Attention au cancer ! :

                      « très fréquemment, épuisé par l’effort de son ascension dans ces régions arides de l’Être, le métaphysicien s’arrête à mi-hauteur à un centre organisateur partiel, à vocation fonctionnelle. Il produira alors une « idéologie », prégnance efficace, laquelle, en déployant cette fonction, va se multiplier dans les esprits. Dans notre métaphore biologique ce sera précisément cette prolifération incontrôlée qu’est le cancer. »

                    2. Avatar de Paul Jorion

                      votre effort constant -et vos contorsions intellectuelles- pour éviter le piège idéologique de la cause finale, du dessein intelligent

                      Non, pas d’efforts particuliers, aucunes douleurs liée à la contorsion : juste la descente de gradient, la loi du moindre effort, me conduisent – comme dans un fauteuil – vers mes conclusions.

                  2. Avatar de BasicRabbit en roue libre
                    BasicRabbit en roue libre

                    (suite)

                    À méditer pour ceux que ça intéresse :

                    PJ : « La remise en question la plus profonde est d’ordre philosophique. Si ce cadre suffit à décrire la psychè, les sociétés et leur évolution, quel est le statut épistémique de notre vocabulaire hérité de la volonté, du sens, de la conscience ? Ces termes sont-ils explicatifs ou ne sont-ils rien d’autre que des obstacles à une compréhension physicaliste pouvant s’étendre des micro-organismes aux machines ?

                    En bouleversant les intuitions cartésiennes avec une physique unifiée véritablement post-cartésienne des systèmes complexes, ce modèle invite à inverser la charge de la preuve : c’est désormais au critique de démontrer quelle intuition essentielle échappe à cette grammaire rigoureuse, ou quel coût, théorique ou éthique, entraîne cette purge. »

                    Je redis une fois encore que « Esquisse d’une Sémiophysique » est sous-titré « Physique aristotélicienne et théorie des catastrophes ».

                    PJ, grand admirateur d’Aristote (et pourfendeur de Platon), abandonnant l’organon (1) en rase campagne pour une approche physicaliste, c’est une sacrée surprise !

                    Encore un tout petit effort pour Échec et mat(h).

                    (1) Lire ou relire « Comment la vérité… »

                    1. Avatar de Paul Jorion

                      L’Organon EST un traité de physique.

                      Vous avez sans doute mieux à faire qu’aller répétant que « Jorion a changé d’avis ». Vous perdez votre temps : personne ne vous croira 😉 .

          3. Avatar de Khanard
            Khanard

            @bb

            grosso modo vous nous dites que la consommation est une cause originelle qui soutient par exemple la publicité, la financiarisation, et pourquoi pas , tant qu’on y est , les inégalités sociales . Ceci dit j’attends les explications systémiques d’une telle affirmation.
            Ensuite vous nous dites que la période des Lumières et la société de consommation sont liés et encore une fois j’aimerais bien que vous étayiez cette affirmation car si je ne m’abuse les philosophes des Lumières comdamnaient l’avidité, l’accumulation de richesses et la vanité .
            Enfin, et c’est ce qui m’interpelle le plus , vous abordez un concept de dimension collective et institutionnelle que vous ne développez pas et c’est fort regrettable car vous vous cantonnez à une sacro sainte liberté individuelle qui sous tend le consumérisme .
            Finalement si je vous suis bien ce n’est pas le néolibéralisme qui est cause primordiale de nos maux mais comme une conséquence de ces maux . bien .
            En conclusion vous redéfinissez l’esprit des Lumières .

            Au moins votre commentaire a le mérite d’exister .

            1. Avatar de bb
              bb

              @Khanard

              Tiens, vous re-voila vous !
              Mes fautes d’autographes ne vous ont pas arraché les yeux cette fois-ci ?

              Le néolibéralisme ne découle pas directement des Lumières, mais il en hérite partiellement, tout en réinterprétant certains de leurs principes.

              Les philosophes des lumières ont posé les bases du libéralisme classique, avec des penseurs comme John Locke, qui défendait la propriété privée et les droits naturels, ou Adam Smith, qui voyait le marché comme un mécanisme d’équilibre. Adam Smith… ça vous dit quelque-chose ? « La main invisible » qui est censée réguler les marchés… Milton Friedman, le pape du néolibéralisme, en a fait son credo… Smith était un philosophe des lumières… A l’époque le libéralisme était vu comme un instrument contre l’accumulation de richesses. Il faut se rappeler que la monarchie absolue et toute la noblesse possédait la majorité des terres à cette époque…

              He oui, le néolibéralisme découle du libéralisme lui-même soutenu par les Philosophes des lumières.
              Sauf que tous ces petits concepts qui prônaient la liberté individuelle et l’égalité devant la propriété ont été dévoyés au cours du temps.

              Le néolibéralisme reprend certaines idées des Lumières :
              – La liberté individuelle, mais centrée sur l’autonomie économique.
              – La rationalité, mais vue comme celle du marché, pas de la raison critique.
              – La responsabilité personnelle, mais dans un cadre de compétition généralisée.

              Les philosophes des lumières ont donc posé les bases du libéralisme, qui valorise la propriété privée, l’échange et l’autonomie.

              Le consumérisme dont je parle est un sous-produit du libéralisme :
              Le consumérisme, c’est une culture dans laquelle acheter devient un acte central dans la vie sociale.
              Le bonheur est associé à la possession de biens. Et les individus sont vus comme des consommateurs avant tout.

              Le consumérisme reprend la liberté et le progrès, mais les réduit à l’achat et à la possession. Il transforme l’idéal des Lumières en une logique de marché, où l’individu est libre s’il peut consommer.
              Les Lumières ont voulu libérer l’esprit. Le consumérisme veut satisfaire les désirs.
              Il y a un lien, mais aussi une dérive : la liberté devient un choix entre produits, et le progrès une course à la nouveauté.

              Vous êtes en mesure d’affirmer que la surconsommation n’est pas un problème actuellement ? Je vous laisse étayer cette affirmation à votre tour.

              Que le néo-libéralisme crée des inégalités, je n’ai jamais écrit le contraire. Prenez le temps de relire notre discussion avec Pascal. Mais encore une fois, le néolibéralisme n’est pas le créateur originel des inégalités. Elles existaient avant. Cela n’empêche évidemment pas de tenter de trouver des solutions aux inégalités actuelles.

              1. Avatar de Khanard
                Khanard

                @bb

                En résumé, vous mettez en lumière un paradoxe : le néolibéralisme, descendant du libéralisme des Lumières, a dévoyé une philosophie d’émancipation en une idéologie économique fondée sur la compétition et la consommation. Ce transfert de la liberté de l’esprit vers la liberté du marché remet en cause le projet humaniste des Lumières.

                en gros l’homme descend du singe et le singe descend de l’arbre quitte à couper l’arbre .

                maintenant si ça vous gêne que je vienne commenter ici c’est pas grave .

                1. Avatar de bb
                  bb

                  @Khanard

                  « Maintenant si ça vous gêne que je vienne commenter ici, c’est pas grave . »
                  Ça ne me gène pas. Au contraire. Vous avez posé les bonnes questions qui m’ont permis de structurer ma pensée. Je vous en remercie.

                  Mais je n’aime pas vos manières. Et vous savez très bien que vous êtes désagréable. Ne jouez pas au naïf.

                  1. Avatar de Khanard
                    Khanard

                    @bb

                    ah si ça m’intéresse au plus haut point de savoir en quoi je suis désagréable !!!! un ou des exemples ?

                    après je m’arrête .

              2. Avatar de BasicRabbit en roue libre
                BasicRabbit en roue libre

                @Khanard et bb (« Vous êtes en mesure d’affirmer que la surconsommation n’est pas un problème actuellement ?)

                « On ne saurait mieux exprimer avec humour le recul des penseurs et la victoire des marchands, qui ont fait de l’homme de Pascal (roseau pensant) un roseau dépensant. » — (Le Figaro, 25 août 2011)

                1. Avatar de bb
                  bb

                  @Pascal

                  Une nouvelle génération de philosophe de Gauche. J’aime beaucoup. Elle est mesurée dans ce qu’elle dit pour peu qu’on écoute bien ce qu’elle affirme.
                  Elle donne de magnifiques éclairages sur ce qu’est le Néo libéralisme ici:
                  https://www.youtube.com/watch?v=W3YkmxBb4gw

                  Petit apparté sur une superbe série d’emmisions d’Arté sur ce qu’est le travail en 5 épisodes. C’est long, c’est dense. Certains trouveront cela chiant. Mais la vision de ces économistes du monde entier est passionnante pour éclairer les modifications qu’il faudrait apporter au néolibéralisme actuellement en crise:

                  https://www.youtube.com/watch?v=XtechOuXh5Y&t=1123s

                2. Avatar de Hadrien
                  Hadrien

                  Cette dame accumule les bêtises:
                  1) La gauche n’a pas la majorité, un gouvernement de gauche serait donc censuré.
                  2) Si un système électif (représentatif) n’est pas démocratique, que serait un système réellement démocratique ? Faudrait-il remplacer le parlement par des référendums multiples ? Qui en rédigerait les questions ?

                  1. Avatar de Pascal
                    Pascal

                    Je comprends Hadrien, quand on profite du système, on n’a pas envie d’en changer !😉
                    Sinon, quelques pistes :
                    – Pour les grandes questions de société, vous avez le très bel exemple de la convention pour le climat. Ça a tellement bien marché que Manu s’est dépêché de s’assoir sur ce qui avait été proposé.
                    – ensuite pour les parlementaires, vous supprimez le cumuls des mandats et on pourrait même aller jusqu’à la révocation quand ils ne respectent pas ce pourquoi ils ont été élu. Ça éviterait les dynasties et les carriéristes qui ne sont là que pour profiter du système…
                    Il y a plein d’exemple mais rassurez vous Hadrien, le système est bien verrouillé. La démocratie de façade a encore de beaux jours devant elle.

                    1. Avatar de Hadrien
                      Hadrien

                      La convention pour le climat est effectivement un bon exemple d’une amélioration possible, il serait bon d’essayer une telle convention sur le budget des pensions, mais cela exige une solide préparation objective des participants.
                      Une autre suggestion: remplacer le scrutin majoritaire à deux tours par une cotation de 0 à 10 de chaque candidat ou liste ou programme par l’électeur.
                      Ceci dit, je pense que le clivage entre ceux qui veulent croire et ceux qui veulent savoir menace le plus la démocratie.

                  2. Avatar de Pascal
                    Pascal

                    Ah vous voyez Hadrien, qu’il y a des choses à faire. Mais je pense que le clivage est plutôt entre ceux qui savent qu’on peut aller vers plus de démocratie et ceux qui ne veulent pas le savoir parce que ça ne va pas dans leur intérêt.😉

      2. Avatar de Ruiz
        Ruiz

        @bb Présenter sa carte d’identité pour accéder à Fesse-bouc ou Tic-toc Quelle bonne idée !

        et limiter l’accès aux ressources (pernicieuses ) des bibliothèques …

        Le contrôle des échanges est le début d’un régime autoritaire.
        Il est vrai .
        Qu’il est interdit d’afficher.
        et que la fin de Mai 68 s’est vu avec la prohibition effective des Dazibao dans les cours d’école.

        1. Avatar de bb
          bb

          @Ruiz

          Deux conceptions s’affrontent en effet.
          Mais cet argument de la liberté individuelle sur internet servent les intérêts de toutes les entreprises de la tech.

          Quand on connaît la surveillance dont chacun de nous fait déjà l’objet sur internet, demander une vérification individuelle sur des sites qui créent des dérives n’est absolument pas un problème.

          Vous avez entendu parler de la société Palantir? Qui analyse massivement l’ensemble des données d’internet ? Toutes vos actions sur le net sont déjà analysées. La moindre virgule de vos écrits ou la vitesse de clic de votre souri est analysée. Les algorithmes et autres logiciels d’IA qui analysent vos données savent avant vous ce dont vous avez potentiellement besoin. Ils savent avant vous si vous êtes un révolutionnaire dans l’âme capable d’aller faire flamber tel ou tel monument dans un mouvement de groupe.

          Croire à notre liberté, notre invisibilité et surtout à notre libre-arbitre sur le net est un leurre qu’il faut comprendre.
          Une fois que tout le monde l’aura compris, ces arguments qui affirment qu’il ne faut rien interdire et, qui finalement, servent les intérêts de la tech, cesseront de piluler.

          1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
            BasicRabbit en autopsy

            Je rappelle à ce propos l’information suivante que je tiens du blog de PJ, par lui- même : la BNF déchiffre nos messages.

            Je suis allé fouiner sur la toile pour en savoir plus : il y a 3.000 personnes à bosser là-bas, répartis en quatre tours. L’une s’appelle la tour du nombre. « Ils » n’ont pas osé l’appeler la tour du chiffre !

            1. Avatar de bb
              bb

              @BasicRabbit en autopsy

              La BNF ? Ce ne sont pas des bibliothécaires les fonctionnaires de la BNF ?
              Ils ont dû acheter une version allégée de Palantir à Peter Thiel…

              1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                BasicRabbit en autopsy

                @bb

                L’info vient de PJ.

              2. Avatar de Garorock
                Garorock

                La BNF ne déchiffre pas nos messages, elle conserve les billets (et les commentaires ?) de ce blog: elle archive.
                C’est in extenso ce qu’a dit P.J ! Rien d’autre.

                1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
                  BasicRabbit en autopsy

                  @Garorock

                  Thom est convaincu que dans les sociétés humaines c’est la fonction qui crée l’organe, et, avec l’aide de sa théorie des catastrophes (qui est une théorie de l’analogie), il a étendu ça au monde du vivant, s’affichant ainsi … lamarxien (1).

                  Qui ne serait par d’accord avec lui en ce qui concerne les sociétés humaines qui se structurent essentiellement parce que et/ou pour que ? Que diraient -par exemple typique- les employés d’un société comme Amazon si le patron leur disait : « Bon, les gars, on va s’organiser ! ». « Pour quoi faire, chef ?! « .

                  Je ne crois donc pas un mot de ce que vous dites de la BNF, et donc pas un mot de ce qu’en a dit PJ, puisque vous m’assurez que vous reproduisez son propos verbatim.

                  (1) https://www.youtube.com/watch?v=B1t_o_CMA_E ( 39’40)

                2. Avatar de bb
                  bb

                  @Garorock

                  La BNF fait cela avec tous les blogs français ?

                  Cela me rappelle une émission d’ARTE qui traitait de vieux manuscrits marchands vénitiens.
                  Il y en avait des milliers à Venise. Les quantités étaient tellement extravagantes et le sujet inintéressant (des chiffre d’échanges commerciaux) qu’aucun chercheur ne s’était jamais penché dessus.
                  Puis, il y a une dizaine d’années, tous ces manuscrits ont été scannés, les textes numérisés, et les données analysées par des IA.

                  Il en est ressorti la vie retracée d’individus lambda. De simples commerçants dont on découvrait la vie, grâce à ces données initialement considérées comme très éloignée de la sociologie.

                  Nos échangent actuelles forment un écheveau de données qui feront que nos vies pourront un jour être retracées. Nos comportements individuels traqués par la Tech (smartphones, échanges sur internet, achat sur Amazon…) cartographient notre vie.

                  De notre vivant, cela a effectivement des impacts majeurs qui peuvent s’avérer terrifiants. Mais nous laissons aussi des traces pour les sociologues du futur.

                  1. Avatar de Garorock
                    Garorock

                    Je ne sais pas ce que fait la BNF.
                    Donc ce n’est pas moi qu’il faut croire ou ne pas croire sur le sujet mais demander à qui de droit…

                    1. Avatar de Paul Jorion

                      J’ignore la politique de la BNF en la matière. Ce dont je me souviens, c’est que cela m’était signalé du genre « en raison de son intérêt culturel particulier », je dirais comme « édifice remarquable », ou « espèce rare », etc.

  20. Avatar de BasicRabbit en autopsy
    BasicRabbit en autopsy

    Je remonte ici une question postée plus haut, question qui me paraît tout-à-fait en rapport avec le sujet du billet, et qui mériterait, à mon avis, d’être commentée.

    Vers une guerre humaine IA/IN (une guerre Jorion/Thom) gagnée par … des microbes !? Certains historiens -ai-je lu- pensent que de grandes pandémies ont participé à l’effondrement de bien des empires.

    S’il y a une WW3, je la verrais bien plutôt de ce type (moins cher et plus efficace). Et si les milliardaires se bunkérisent actuellement au milieu de nulle part, ce n’est peut–être pas seulement pour se protéger des radiations, mais surtout pour se protéger des microbes.

    1. Avatar de Grand-mère Michelle
      Grand-mère Michelle

      @Basic Rabbit et @Pascal

      Hum… Voir les bovins et les ovins infectés par un microbe(sorte de dermatose-mortelle, parait-il), désormais interdits d’exportation en France(info RTBF /radio de 12h)
      Punition infligée(par qui?) pour sa prise de position contre le Mercosur? Pt-être ben qu’oui…
      L’import-export (d’une hyper-sur-production de « biens ») est une des pires calamités survenues au 20ème siècle, principalement à cause de la pollution produite par les transports par voies maritimes, aériennes et terrestres.

      1. Avatar de BasicRabbit en autopsy
        BasicRabbit en autopsy

        @GmM (« import-export »)

        Import-export du Corona-virus : deux Corona* achetées, une Mort subite** offerte.

        Mort subite ? demande le toubib. Non, il est mort su’l dos.

        * : https://fr.wikipedia.org/wiki/Corona_(bi%C3%A8re)

        ** : https://fr.wikipedia.org/wiki/Mort_subite_(bi%C3%A8re)

      2. Avatar de timiota
        timiota

        au 20ème ? Braudel ne vous croit pas.
        Ni les anglais qui exportent les cotonnades aux indes après avoir capté le coton en produisant mécaniquement le fil (https://fr.wikipedia.org/wiki/Mule-jenny) (Andreas Malm rappelle par exemple que le calife des Mameluk, lors de la prise de la Palestine par les Anglais au début du délitement de l’empire ottoman, vers 1840, voulait s’installer sur la « chaine de valeur » du coton produit sur la « vallée » du Nil, mais les Anglais firent ce qu’il faut pour qu’il n’aie pas de charbon et pas de machine à vapeur compétitive sur cette industrie.)
        L’avant première guerre mondiale fut un premier sommet de mondialisation, avec d’importantes exportations et importations. Mais il est vrai qu’à l’échelle rurale, 90% des biens (à la louche) venaient d’un cercle de quelques centaines de km, même le charbon pour se chauffer (mines du massif central, etc.). Et la ferme était auto-suffisante à un degré assez élevé (fumure des chevaux pour faire de l’engrais sur les parcelles emblavées, etc.).
        Néanmoins, je dirais que la « flèche du progrès » du XIXème siècle est lourdement influencée par les exports-imports, et n’aurait pas du tout été la même dans des sociétés au métabolisme plus endogène.

        1. Avatar de timiota
          timiota

          Voir aussi de Jeanne Guien « le désir de nouveauté » comment mode et exotisme se mettent en place au début du XIXème, même s’il est vrai que c’est les Grands Magasins à Paris (fin XIXème plutôt donc) qui font aller de pair une production « excessive et inutile » (*) et côté exotique importé.

          (*)(point que je n’ai pas trop abordé dans le post précédent, qui est donc un peu hors sujet par rapport à votre mention du 20ème siècle vs imports/exports)

        2. Avatar de Grand-mère Michelle
          Grand-mère Michelle

          @timotia

          Oui, j’aurais dû écrire: « l’énorme expansion de l’import-export… »

  21. Avatar de Paul Jorion

    Pensée après-coup :

    Vous êtes quelques-un.e.s à avoir l’amabilité de dire de temps à autre ici : « Comment est-il Dieu possible que le monde ignore que Paul Jorion a apporté une réponse satisfaisante à cette question !?! ». Je les en remercie.

    Cela dit, la lecture quotidienne de vos commentaires me conduit à pousser la réflexion un peu plus loin : « Comment est-il Dieu possible que la plupart des commentateur.trice.s quotidiens du Blog de PJ ignorent que Paul Jorion a apporté une réponse satisfaisante à cette question !?! ». 😉

    1. Avatar de BasicRabbit en roue libre
      BasicRabbit en roue libre

      🙂

    2. Avatar de Pascal
      Pascal

      Sans doute une question de digestion !
      Bon appétit

    3. Avatar de Khanard
      Khanard

      @Paul Jorion
      Comment est il Dieu possible que le monde ignore qu’Aristote avait raison .

      Peut être que dans 2000 ans un robot , nommons le R2D3 (si cher à @Garorock) 😉 celui_ci dise : «comment est il quantiquement possible que le monde n’aie pas reconnu Paul Jorion ?»

      ainsi va la renommée https://youtu.be/gWRzopyZBSA?list=RDgWRzopyZBSA

      1. Avatar de Pascal
        Pascal

        Pour qu’une idée existe, encore faut-il qu’elle soit entendable 😊
        – que les esprits soient convaincus qu’elle est préférable à d’autres (descente de gradient ?)
        – qu’elle entre en résonance avec l’intérêt collectif (convergence des flux ?)
        – qu’elle n’entre pas en confrontation avec des intérêts établis (points de frottement)
        Va falloir mettre de l’huile !!!

      2. Avatar de BasicRabbit en roue libre
        BasicRabbit en roue libre

        @Khanard (« Comment est il Dieu possible que le monde ignore qu’Aristote avait raison . »)

        C’est la cœur du différend qui oppose deux grands penseurs : Paul Jorion et René Thom.

        « Comment la vérité …. », p.192 (de mémoire) :

        « Pour Thom la Physique est une magie contrôlée par la géométrie ;
        pour Paul Jorion la Physique est une religion contrôlée par des noms communs (et il cite fermions et bosons à ce propos) » (toujours de mémoire).

        Nominalisme contre réalisme (philosophique); Aristote vs Platon (selon PJ) :

        https://www.pauljorion.com/blog/2012/11/30/unidivers-fr-paul-jorion-mettre-fin-a-laristocratie-de-largent/comment-page-1/#comment-387975

        Je re-re-signale que Esquisse d’une sémiophysique » est sous-titré « Physique aristotélicienne et théorie des catastrophes », et que Thom a lu très attentivement au moins les livres concernant la Physique et la Métaphysique d’Aristote, certains passages dans la langue d’origine, allant jusqu’à proposer une traduction de certains passages différente de celle de Hamelin et Tricot (de mémoire à propos d’entéléchie et d’énergia).

        1. Avatar de Khanard
          Khanard

          @BasicRabbit en roue libre

          je ne connais pas suffisamment René Thom pour pouvoir répondre . Désolé .

  22. Avatar de bb
    bb

    @Garorock

    La BNF fait cela avec tous les blogs français ?

    Cela me rappelle une émission d’ARTE qui traitait de vieux manuscrits marchands vénitiens.
    Il y en avait des milliers à Venise. Les quantités étaient tellement extravagantes et le sujet inintéressant (des chiffre d’échanges commerciaux) qu’aucun chercheur ne s’était jamais penché dessus.
    Puis, il y a une dizaine d’années, tous ces manuscrits ont été scannés, les textes numérisés, et les données analysées par des IA.

    Il en est ressorti la vie retracée d’individus lambda. De simples commerçants dont on découvrait la vie, grâce à ces données initialement considérées comme très éloignée de la sociologie.

    Nos échangent actuelles forment un écheveau de données qui feront que nos vies pourront un jour être retracées. Nos comportements individuels traqués par la Tech (smartphones, échanges sur internet, achat sur Amazon…) cartographient notre vie.

    De notre vivant, cela a effectivement des impacts majeurs qui peuvent s’avérer terrifiants. Mais nous laissons aussi des traces pour les sociologues du futur.

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