Le leurre de la conscience

Comme notre débat sur la mécanique quantique se déplace en ce moment vers la conscience, je vous signale que j’ai publié en 1999, dans la revue L’Homme, un texte consacré à la conscience : Le secret de la chambre chinoise. On peut le trouver ici.

En gros, comme vous le verrez, la conscience est pour moi un mécanisme en réalité très accessoire qui nous informe après-coup de ce qui nous arrive et dont l’intérêt principal réside dans l’illusion de libre-arbitre qu’il nous laisse (la caverne de Platon). Si la chose vous intéresse, j’y reviendrai plus longuement. Voici en tout cas la conclusion de cet article :

Pourquoi deux mille cinq cents ans de réflexion se sont-ils révélés impuissants à remettre en cause le pouvoir décisionnel de la conscience ? Il me semble qu’il y a, sur cette question, quelque chose de l’ordre du préjugé, de ce qui ne se modifie qu’en tout dernier recours dans l’organisation conceptuelle (ce que j’ai appelé ailleurs noyau de croyance), quelque chose de l’ordre d’un tabou.

L’histoire des sciences nous est peut-être ici d’un certain secours. Lorsque Max Planck pose les jalons de la mécanique quantique, il nous est aisément loisible d’énumérer ses prédécesseurs : il bâtit sur les fondations posées par Clausius, Maxwell et Boltzmann. Lorsque Darwin met au point sa théorie de l’évolution des espèces ou lorsque Freud développe la métapsychologie freudienne, on aurait au contraire bien du mal à déterminer leurs prédécesseurs (l’œuvre parallèle de Wallace est contemporaine de celle de Darwin). On peut toutefois leur trouver ici et là dans l’histoire (et parfois quelques années auparavant seulement), des précurseurs, des penseurs qui exprimèrent des vues où l’on retrouve en germe, sous forme ébauchée et le plus souvent d’idée isolée, ce qui ne prendra tout son sens que dans la théorie complète que Darwin ou Freud développèrent ensuite. Lorsque des prédécesseurs existent, comme c’est le cas pour Planck, la quête de précurseurs apparaîtrait bien vaine puisqu’une ligne continue de prédécesseurs conduirait jusqu’à eux.

Qu’est-ce qui distingue alors les découvertes de Darwin ou de Freud, sinon leur réelle nouveauté ? « Qu’elles ne constituent pas des théories à proprement parler » disent aujourd’hui certains, « du fait qu’elles ne sont pas falsifiables, qu’elles ne se prêtent pas à la contrépreuve ». L’argument est sans mérite : leurs théories sont falsifiables, au même titre que le Big bangpar exemple, même si cela exigerait davantage d’argumentation discursive que de recours à la vérification expérimentale pure. Ce qui distingue leurs constructions, c’est qu’il est difficile, au sens de « dur » psychologiquement, pour un auteur de les formuler. Il existe ici, comme je l’ai dit, un tabou à surmonter, quelque chose qui provoque la crainte ou la colère si l’on y touche : il y a aussi une conversion à réaliser, en premier lieu pour son auteur, au moment où il formule sa théorie, en second lieu pour son lecteur au moment où celui-ci doit se laisser convaincre, au moment où certains remparts dressés par son affect doivent s’effondrer pour faire place à la conception nouvelle.

Ce qui caractérise le darwinisme ou le freudisme, c’est que s’ils sont vrais, le mérite de Darwin et de Freud, en tant qu’ils en sont les auteurs en est automatiquement diminué. Si nous ne sommes que les descendants de grands singes, alors le darwinisme lui-même a pour auteur le descendant d’un grand singe (les caricaturistes de l’époque s’en sont d’ailleurs donné à cœur joie), de même, si toute œuvre humaine est un moyen détourné de satisfaire une pulsion d’ordre sexuel, alors la métapsychologie freudienne elle-même est un moyen détourné pour son auteur de satisfaire une telle pulsion.

La théorie de l’évolution de Darwin ainsi que la psychanalyse – on l’a écrit – impliquent une dévaluation, un rabaissement de l’image que se fait la race humaine d’elle-même. La vanité de l’espèce en prend un mauvais coup, car il s’agit de bien plus que d’une théorie nouvelle, il s’agit aussi d’une leçon d’humilité. Copernic en avait fait autant lorsqu’il déplaça la terre du centre vers la périphérie ou lorsque Linné le premier classa l’homme au rang des mammifères.

Alors qu’est-ce qui nous empêchait de comprendre la distribution réelle des responsabilités entre le corps et l’âme ? Probablement un mécanisme psychologique du même ordre que celui que je viens d’évoquer à propos de Darwin et de Freud : si tel est bien le cas, alors composer la Neuvième Symphonie ou peindre La ronde de nuit, sont sans aucun doute des réalisations personnelles ayant leur fondement dans un être biologique modelé par une histoire, mais qui ne sont pas davantage liées à un sujet humain maître de ses actions, que le fait pour quiconque d’entre nous d’ouvrir une fenêtre machinalement. Quant à celui qui attacherait son nom à la découverte que les fonctions de l’âme et du corps doivent être simplement inversées, il rabaisserait d’autant sa propre découverte : elle aurait été tout aussi machinale, selon l’automatisme qu’il aurait mis en évidence. Il serait l’auteur de sa découverte par un mécanisme dont – il l’aurait prouvé – sa personne n’est le support que pour des raisons parfaitement fortuites au regard de l’histoire. Tout ce qu’il pourrait affirmer quant au fait qu’elle ne pouvait avoir lieu que par lui se trouverait automatiquement disqualifié : ce ne pouvait être que lui sans doute mais sans pour autant que la paternité en revienne à ce « moi, je » dont il aime ponctuer son discours.

Voilà en quelques mots ce qui expliquerait pourquoi les penseurs qui se sont penchés sur le mystère de la chambre chinoise se sont arrêtés au bord de son élucidation, puisque ce qu’il s’agissait de découvrir les aurait privés de la satisfaction de mettre en avant leur propre personne – satisfaction qui guide de tout temps le processus de la découverte.

Partager :

100 réponses à “Le leurre de la conscience”

  1. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @ Paul Jorion
    Vous publiez, en direct sur ce blog, votre conclusion, qui attribue à la vanité humaine l’incapacité à admettre que la conscience ne peut pas être la cause de la volonté.

    Devons-nous comprendre que c’est ce que vous jugez le plus important dans votre article?

    Certes, la révolution copernicienne, puis la théorie de Darwin ont certainement été à chaque fois un traumatisme pour les contemporains.

    Mais depuis, nous avons digéré
    – le renoncement à l’espace et au temps absolus,
    – les paradoxes de la mécanique quantique,
    – l’inconscient freudien,
    – le théorème d’incomplétude de Gödel (!),
    – la sociobiologie,
    – la matière noire,
    – l’amour expliqué par la lubérine à la première page des magazines de vulgarisation…

    Nous sommes vaccinés! Nous avons pris l’habitude d’être ainsi « rabaissés ». Ca devient même un réflexe de pensée!

    Alors, la conscience incapable de volonté? : « Ouah, hé, même pas mal! »

    A vrai dire, ce n’est pas l’excès de vanité, c’est le mouvement inverse qui m’inquiète, celui d’un excès de haine de soi, qui pourrait finir par saper l’humanisme. On lit de plus en plus souvent des textes un peu étranges qui présentent l’homme comme une bête nuisible, arrogante et malfaisante, et l’humanité comme une maladie qu’aurait attrapé Gaïa, la bonne planète terre!

  2. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @Paul Jorion et quentin

    Je vais apporter à l’hypothèse de l’émergence un argument qui paraîtra étrange dans ce contexte où les échanges sont plutôt de caractère philosophique:

    Le cerveau (humain dans cet exemple) consomme 20W en permanence, qu’il soit éveillé et conscient, ou qu’il dorme. Ceci représente 20% de l’énergie du métabolisme basal au repos, qui est d’environ 100W, alors que le cerveau ne représente que moins de 2% de la masse du corps. L’essentiel de cette énergie sert à maintenir une différence de potentiel de 80 mV entre l’intérieur des neurones et l’extérieur, grâce à des pompes à ions. Ca n’a l’air de rien, mais ça met les membranes cellulaires, qui sont très fines, à la limite du claquage électrique!

    Nous sommes donc en présence d’un système, le cerveau, qui est structurellement hors d’équilibre thermodynamique et très fortement dissipatif d’énergie. Selon les travaux de Ilya Prygogine, c’est la situation typique d’une structure dissipative, qui se caractérise par l’apparition spontanée d’un ordre émergent.

    Sur le plan de la sélection naturelle, il faut bien voir qu’un tel système est très coûteux pour les organismes dotés d’un cerveau développé. Toute cette énergie pourrait être consacrée à la reproduction, par exemple. Il existe sans doute une forte pression de sélection pour l’économiser, comme on l’a mis en évidence pour d’autres caractères et comportements.

    Si ce caractère particulier d’un cerveau fortement dissipatif est néanmoins conservé ou renforcé au cours de l’évolution, c’est probablement qu’il existe de très sérieux avantages qui y sont liés.

    L’optimisation par la sélection naturelle des conditions permettant l’apparition dans le cerveau de propriétés émergentes me parait donc une hypothèse raisonnable.

  3. Avatar de barbe-toute-bleue
    barbe-toute-bleue

    @Marc
    « L’optimisation par la sélection naturelle des conditions permettant l’apparition dans le cerveau de propriétés émergentes me parait donc une hypothèse raisonnable »

    Sur cette dernière phrase : « apparition » ? ou renforcement de la perception, si on considère un chemin « évolutionnel » depuis la bactérie ?

  4. Avatar de TELQUEL
    TELQUEL

    Bonjour a tous ,je vous recommande la lecture de U.G. Krishnamurti (attention il y a 2 Krishnamurti) LE MENTAL EST UN MYTHE aux editions LES DEUX OCEANS .

  5. Avatar de iGor milhit

    @ quentin

    Il semble que Marc Peltier est en mesure de parler de l’émergence, lui.

    @ Marc Peltier

    Merci.

  6. Avatar de quentin

    @Marc Peltier

    Je connaissais les travaux d’Ilya Prigorine sur les structures dissipatives mais je ne savais pas qu’ils étaient à ce point applicables au cerveau humain… Merci pour cet information. Je pense effectivement qu’il y a là quelque chose d’essentiel.

    La notion de structure dissipative, (liée à celle de système chaotique) est également intéressante du point de vue de l’écoulement du temps, puisque Ilya Prigorine y voit l’origine de l’irréversibilité du temps et si je ne me trompe pas l’explication de la réduction du paquet d’onde et de l’indéterminisme par des processus « non linéaires » dans ce type structures…

    Ceci expliquerait pourquoi la plupart des disciplines macroscopiques ont un temps (la biologie, l’évolution, la cosmologie) quand bien même les équations « de bases » sont toutes parfaitement réversible. Autrement dit la flèche du temps est elle aussi émergente.

    Pour entrer dans un domaine plus spéculatifs, voire métaphysique, la conscience est également étroitement liée à la notion d’écoulement du temps et à celle de « présent ». Pourrait-on dire que c’est la conscience qui définit ce qu’est le présent ? En tout cas rien dans les équations de nos modèles physiques ne nous dit « ça c’est le présent » : il est défini ad-hoc sur la ligne du temps, et la seule chose qui nous fait dire qu’il existe, c’est sa perception consciente.

    Le fait que la notion de structure dissipative relie naturellement les concepts d’irréversibilité, d’indéterminisme et d’émergence serait-il un début d’explication aux liens entre matière, conscience et écoulement du temps ?

  7. Avatar de Nadine
    Nadine

    Paul avec votre article sur la conscience c’est presque la nuit des zombies!
    Il me semble que dans cet article vous démontrez que la conscience humaine est apparue très tard dans l’évolution des espèces animales et que de ce fait sans doute que les animaux en sont dépourvus, j’irai même jusqu’à dire que les humains en étaient peut-être aussi dépourvus il y a peu au risque de choquer. En effet pour les taches les plus courantes la conscience n’est pas nécessaire même la raison n’a pas besoin de la conscience car la plupart des raisonnements se font inconsciemment.
    La conscience est bien créée par le cerveau, les psychotropes sont là pour le prouver ou certaines maladies neurologiques, de plus les théories dualistes n’expliquent pas comment la conscience pourrait agir sur le cerveau sans enfreindre les lois de la conservation de l’énergie.

    @Marc Pelletier

    Je ne vois pas en quoi une différence de potentiel de 80 mV entre l’intérieur des neurones et l’extérieur entraînerait une structure dissipative d‘énergie qui se caractériserait par l’apparition spontanée d’un ordre émergent qui ferait apparaître la conscience.
    L’émergence c’est bien jolie mais en matière de conscience cela n’explique rien. Les 80 mV ne servent qu’à propager l’influx nerveux support de l’information biologique entre autre.
    Pour le cerveau c’est surtout la science de l’information qu’il faut utiliser plutôt que la physique des énergies.

  8. Avatar de Anne.J
    Anne.J

    @Nadine

    Si le cerveau n’était qu’un émetteur-récepteur recevant des instructions de l’âme (externe à lui), les maladies neurologiques pourraient avoir le même effet sur la conscience par « déréglage » de cet instrument. Je ne pense pas que nous ayons une quelconque possibilité de démontrer que la conscience est bien issue directement du cerveau (fabriquée par le cerveau).

  9. Avatar de Moi
    Moi

    @Nadine: « et que de ce fait sans doute que les animaux en sont dépourvus »

    En ce qui concerne les grands singes, des expériences semblent démontrer qu’ils en ont une.

    @quentin:

    « Benjamin Libet a proposé à la fin de sa vie des expériences pour le montrer »

    D’un côté on a des tas d’expériences qui semblent démontrer l’inexistence du libre-arbitre, de l’autre des propositions d’expériences? C’est peu si on n’a que cela en faveur du libre-arbitre. Que serait d’ailleurs une expérience cherchant à prouver qu’il n’y a pas de cause à un effet? On peut démontrer avec certitude qu’il y a une cause à un effet, mais démontrer qu’il n’y a pas de cause? C’est absurde non?

    « n’est pas incompatible avec le vécu que l’on en a »

    Le vécu du sujet est une autre question. Des expériences montrent clairement que les sujets peuvent obéir sans en être conscients (ils justifient ensuite leur action au niveau de la conscience pour sauver leur libre-arbitre).

    Il y a un ouvrage de vulgarisation amusant sur le sujet que j’ai lu dernièrement : « Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens » de Robert-Vincent Joule et Jean-Léon Beauvois.

    « Finalement cette expérience nous montre qu’il existe des déterminismes à nos décisions qu’il est possible d’observer par l’expérience. »

    Donc nous sommes d’accord, il n’y a pas de libre-arbitre.

    « la science de la complexité nous garantit qu’il est impossible de prédire entièrement le fonctionnement du cerveau, à plus forte raison sur une période longue, et il ne faut donc pas en conclure hâtivement que le libre arbitre est forcément inexistant. »

    Que nous ne puissions prédire entièrement les réactions d’individu ne signifie rien sur la question de la conscience et du libre-arbitre. Nous ne pouvons prédire entièrement la réaction d’un électron sans pour autant parler du libre-arbitre de l’électron. Ce qui compte est de savoir si l’individu est déterminé, si oui il n’y a pas de libre-arbitre. Ainsi, si nous prenons un panel de 1000 personnes, et que nous pouvons dire avec certitude que mises dans un certain contexte il y en aura 990 qui vont réagir de telle manière, je ne vois pas où est le libre-arbitre. Les 10 qui ont réagit de manière inattendue prouvent juste qu’il y a une certaine part d’indétermination (ou cause cachée) dans les systèmes complexes.

    En tout état de cause, dire qu’il y a du libre-arbitre ne fait pas avancer la science, ne mène à rien sur le plan de la connaissance. C’est un aveu d’impuissance et d’ignorance.
    Dire qu’il y a détermination permet de comprendre certaines choses, permet de prédire et permet d’influer sur la réalité.

  10. Avatar de quentin

    @Nadine

    J’ai du mal à croire que la conscience puisse apparaitre subitement au cours de l’évolution chez l’homme et être inexistante avant (et ailleurs) chez les animaux.

    Il n’y a finalement qu’une différence de niveau entre un cerveau humain et un cerveau animal. Par conséquent il devrait y avoir également une différence de niveau entre la conscience humaine et la conscience animale. Si elle existe chez l’homme, ce qui permet qu’elle existe doit forcément se retrouver en moindre mesure chez l’animal, et la matière elle même doit posséder des propriétés qui permettent cette émergence, une forme de « pré-conscience ».

    Car finalement ce qui nous différencie le plus d’un animal, ce n’est pas notre cerveau ou notre corps, c’est notre civilisation, qui nous éduque et nous forme. Sans la société nous ne sommes rien.

    Bien sûr notre corps est un facteur important dans cette histoire : la civilisation humaine n’a sans doute pu avoir lieu que grâce à notre cerveau plus gros et à nos mains libérées de la marche. Mais n’oublions pas qu’elle a des millénaires derrière elle. C’est donc d’après moi une différence relativement minime au départ (notre corps) qui a aboutit avec le temps à une différence énorme dans les faits (la civilisation).

    Partant de là je ne pense pas que la conscience soit réservée aux humains.

  11. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @Nadine
    Je suis d’accord avec vous, les 80 mV n’expliquent rien en eux-même, et ils sont là, du point de vue de leur origine évolutive, pour permettre la propagation d’un l’influx nerveux par ondes de dépolarisation des membranes cellulaires.

    Il n’empêche que cette particularité crée dans l’ensemble du cerveau une structure dissipative, que l’on ne saurait nier, avec des tissus dont le métabolisme est 10 fois plus élevé que tout autre…

    Je suis bien d’accord aussi sur le fait que l’énergie n’est pas la question. Elle n’intervient que dans cette notion de structure dissipative (voir Prygogine).

    Je maintiens mon « hypothèse raisonnable », tout en étant bien conscient que l’intervention de l’émergence comme clé de la conscience est un peu, pour l’instant, une opération magique, faute d’avoir une théorie plus développée sur ce phénomène universel dans la nature (l’émergence), et qui pourrait bien être très fondamental.

    Il est légitime de considérer des théories qui n’ont pas encore une grande cohérence interne, si elles apparaissent fécondes, si elles suggèrent une voie pour dépasser des paradoxes ou des difficultés.

    Je suis donc encore d’accord avec vous : « L’émergence est bien jolie… » 😉

  12. Avatar de quentin

    @Moi

    > On peut démontrer avec certitude qu’il y a une cause à un effet, mais démontrer qu’il n’y a pas de cause? C’est absurde non?

    Absurde ? Si je vous disiez qu’il n’y a jamais de causes, vous seriez surpris ?
    Selon la théorie quantique il n’y a pas de cause et d’effets, il n’y a que des propensions. Seule les valeurs moyennes à grande échelle, sur un grand nombre de particule, permette de dégager un lien de cause a effet approximatif.
    Si on prend un objet de 1mm qui percute un autre, cette approximation est presque infiniment juste, alors évidement on parle de cause à effet. Si on prend un système chaotique, par exemple, ça ne marche plus, car les fluctuations quantiques sont amplifiées sur l’état global du système.
    Non ce n’est pas absurde qu’il n’y ait pas de causes.

    > Des expériences montrent clairement que les sujets peuvent obéir sans en être conscients (ils justifient ensuite leur action au niveau de la conscience pour sauver leur libre-arbitre).

    Vos expériences montrent qu’on peut être influençable et de mauvaise foi. Je suis d’accord. 😉

    > “Finalement cette expérience nous montre qu’il existe des déterminismes à nos décisions qu’il est possible d’observer par l’expérience.” Donc nous sommes d’accord, il n’y a pas de libre-arbitre.

    Dans la phrase que vous citez, par « déterminations », j’entendais « propension ». Désolé le terme est mal choisi.

    > Ce qui compte est de savoir si l’individu est déterminé, si oui il n’y a pas de libre-arbitre.

    La réponse est non, l’individu n’est pas déterminé. Il n’y a que des propensions.
    Quand je dis que la science de la complexité nous le garanti, il ne s’agit pas d’une formule pour dire qu’on ne possède pas des outils assez puissant ou une connaissance suffisante pour connaitre toute les causes.
    La science nous prouve réellement qu’on ne peut pas prédire l’évolution d’un système complexe à moyen terme, parce qu’elle EST indéterminée. Généralement l’évolution est prévisible à court terme, mais se déteriore avec la durée souhaitée.
    Arriver à un taux de 990 sur 1000 est d’après moi totalement utopique (sur une durée assez longue), parce qu’il ne s’agit pas d’un problème de précision de la mesure.
    L’explication de ceci est comme je le disais qu’un système chaotique amplifie les fluctuations infinitésimales, jusqu’au niveau quantique où la réduction du paquet d’onde est un indéterminisme irréductible.

    > Il y a une certaine part d’indétermination (ou cause cachée)

    Une indétermination n’est pas une cause cachée.

    > Dire qu’il y a détermination permet de comprendre certaines choses, permet de prédire et permet d’influer sur la réalité.

    Qu’entendais vous par « prédire et influer sur la réalité » ? Vous voulez dire… utiliser votre libre arbitre ?
    Admettre qu’on n’a pas de libre arbitre permet donc d’en faire un bon usage ?
    Vous voyez qu’on se mord la queue…

    Il n’y a pas détermination. C’est un aveu d’impuissance, mais c’est comme ça que la nature se comporte et on n’y peut rien. Encore un coup pour notre humilité sans doute ? N’est-ce pas ça qui est dur à admettre ?

    Par conséquent, et étant donné la complexité du cerveau, l’expérience de Benjamin Libet ne prouve en aucun cas qu’il n’y a pas de libre arbitre, elle montre seulement qu’on peut observer des propensions, ce qu’on sait déjà intuitivement. C’est donc une interprétation abusive du résultat de cette expérience à laquelle même son auteur n’adhérait pas que de dire qu’elle prouve qu’il n’y a pas de libre arbitre.

  13. Avatar de Nadine
    Nadine

    @Anne.J
    Dans un récepteur-emetteur, le récepteur et l’émetteur sont de même nature sinon aucun lien physique ne peut s’établir. Si votre hypothèse est vraie (dualiste-interactionniste) la conscience et la matière biologique étant de nature différentes vous retombez sur le problème de la conservation de l’énergie.

    @Moi
    Vous dites: « En ce qui concerne les grands singes, des expériences semblent démontrer qu’ils en ont une. »

    Les preuves ?
    Attention de ne pas projeter nos propres états mentaux sur les animaux.
    Seul le langage évolué peut faire « émerger » comme dirait Marc pelletier la conscience.

    @Quentin
    Vous dites: « J’ai du mal à croire que la conscience puisse apparaître subitement au cours de l’évolution chez l’homme »

    C’est une hypothèse que j’expérimente malheureusement presque toutes les nuits avec mon fils qui est somnambule. Il se lève de son lit, allume la télé ou va se servir au frigo un jus de fruit, etc bref il est capable d’exécuter des opérations très compliquées en exprimant même des émotions bien qu’il soit complètement inconscient !

    Et puis pour ceux qui sont vraiment intéressés par la conscience vous avez les cas cliniques de personnalités multiples, c’est renversant !

  14. Avatar de Phil Osof
    Phil Osof

    (Mon interprétation est rédigée sous forme d’affirmations, mais ce sont des hypothèses)

    La décision est une nécessité évolutive pour répondre le plus efficacement au danger. Décider, faire un choix, c’est balancer le pour et le contre et déterminer l’attitude la moins risquée qui permettra la survie. C’est en quelque sorte un calcul de probabilité. Simplement, ce calcul doit se faire plus ou moins rapidement :
    Par réflexe physique (je détecte un mouvement violent avec ma vision périphérique, je décide de me baisser).
    Par réflexe issu de l’expérience (la voiture part en glissade, je décide de contre-braquer) Ou, dans le cas d’un problème non-immédiat et inédit, par la réflexion consciente. Dans ce cas précis, muni d’informations plus ou moins complètes, et en me basant sur mon expérience ainsi que l’éducation que j’ai reçu, je réfléchis à l’attitude la moins risquée (sauf si je suis Trader, évidemment).
    Pour les décisions rapides ou habituelles, la conscience n’intervient pas. Siège du traitement des informations, la conscience analyse les causes et conséquences de l’expérience et en déduit des réponses automatiques rapides (qui sont stockées je ne sais trop où). Si la réponse est unique et sans contrainte de rapidité, la conscience intervient directement dans le calcul du risque et la détermination du choix.

    Quant au Libre Arbitre, la notice de Wikipédia insiste sur la notion de culpabilité qui lui est associée. La société « veut » que je fasse certaines choses. C’est pourquoi elle m’a enseigné des règles et imposé des tabous qui doivent toujours guider mes choix. De ce fait, mon comportement peut devenir prévisible et déterminé, et ceux qui ont inventé ou font respecter ces règles peuvent en tirer profit pour leur compte personnel. Mais si certaines de ces règles me déplaisent, et que je décide de m’en affranchir, cela signifie que j’ai changé certains des paramètres qui régissaient mon calcul de risque. Soit que j’ai trouvé un comportement plus efficace en changeant les règles, soit que certaines règles qu’on m’impose se contredisent entre elles (ça peut arriver dans une société complexe) et que j’accorde une importance supérieure à certaines d’entre elles. J’exerce alors mon libre arbitre. En conscience.

    Dans le sujet précedent, j’avais dit que le lézard avait un libre arbitre. C’était inexact. Dans sa vie de reptile, il est pratiquement certain que le lézard suit rigoureusement les règles que lui dicte son système de survie rudimentaire. Par contre, le lézard n’agira pas forcément selon ma volonté. Le lézard dispose t-il d’un libre arbitre par rapport à moi s’il ne se comporte pas comme je veux qu’il le fasse ?

  15. Avatar de Paul Jorion

    @ quentin

    Si on prend un système chaotique, par exemple, ça ne marche plus, car les fluctuations quantiques sont amplifiées sur l’état global du système.

    Quand un bateau prend l’eau et qu’il acquiert ce qu’on appelle une « carène liquide », il entre en régime chaotique qui décidera ou non s’il chavire. Si l’on vous suit, cela voudrait dire que quand il n’y a pas d’eau à fond de cale les fluctuations quantiques ne sont pas amplifiées sur l’état global du système mais que dès que l’eau atteint un certain niveau dans sa cale les fluctuations quantiques sont amplifiées sur l’état global du système. Est-ce possible ?

    1. Avatar de timiota
      timiota

      Gell-Man (le Quark et le Jaguar) et M V Berry (Bristol univ) en ont discuté de façon + ou – vulgarisée.

      D’après Berry, même un système classique est imprévisible. Si on prend des boules de billard idéales et qu’on essaye de prédire la 50eme collision entre elles, la trajectoire se trouve être influencée par aussi peu que la position d’un atome au fin fond de l’univers. Si je me suis trompé et que ce n’est pas la 50ème, ce sera la 60ème ou la 100ème collision.

      Gell-Man a de son côté décrit les aspects quantiques autant que classique de cette affaire.
      On peut avoir dans un système dynamique des bifurcations vers des attracteurs, et il est aisé d’identifier le centre et peu ou prou la périphérie , mais on reste fichtrement incapable de prévoir le moment où la bifurcation se produit.

      Donc si on remonte le cours d’une prise de décision d’un cerveau, on « trouve » bien (par la pensée), un moment où cela a dépendu de la position d’un atome, disons d’une liaison hydrogène d’un neuro-transmetteur (genre acétyl-choline) près d’un synapse, pour situer les choses, juste après (Mmmm) le moment ou consciemment la personne a décidé consciemment de se mettre à réfléchir et à produire une décision dans un délai raisonnable.

      Mais la vision microscopique étant de peu de secours, je ne vois aucun inconvénient à utiliser d’autres outils plutôt globaux, ceux qui mènent aux concept philosophiques de transcendance ou de sublimation, etc…

  16. Avatar de TELQUEL
    TELQUEL

    Phil Osof@ ,la chose a noter et qui est essentiel par rapport a votre interpretation et que le systeme nerveux decide avant le sujet voir http://www.nouvellescles.com/article.php3?id_article=447.A aucun il n’y a du « faire ou du agir »tout n’est qu’interference energie/onde- energie/onde – et nous ne sommes a aucun moment la source de l’energie ni l’emetteur de l’ondemmais on arrive a le croire c’est le miracle de la vie ,alors vivons la !

  17. Avatar de Sophie LEROY
    Sophie LEROY

    «Science sans conscience n’est que ruine de l’âme.»
    (Rabelais)

  18. Avatar de Anne.J
    Anne.J

    @Nadine

    A propos de votre réponse du 24 février 2009 à 19:36

    Pourquoi être certaine qu’il n’y a aucune autre hypothèse alternative à  » la conscience et la matière biologique étant de nature différentes vous retombez sur le problème de la conservation de l’énergie.  » ?
    Mais surtout, pourquoi n’y aurait-il pas conservation de l’énergie dans cette hypothèse ? Que peut on savoir d’éventuels liens entre cet univers dans lequel nous sommes et d’autres « univers » possibles ?

  19. Avatar de Fab
    Fab

    Bonjour,

    Sophie LEROY dit : «Science sans conscience n’est que ruine de l’âme.» (Rabelais)
    Il a été prouvé qu’il était inconscient quand il a dit ça !

    Questions du matin :

    La dernière phrase du lien proposé par TELQUEL : « La clé de toute civilisation est la quête du sens. » (le plan D ?). Le type qui a dit ça était-il conscient ? Le scientifique, qui dit « Saute ! » à la puce et lui coupe une patte à chaque fois qu’elle a sauté, et finit par conclure que « quand on coupe 4 pattes à une puce elle devient sourde », n’oublie-t-il pas trop vite l’hypothèse que la puce ait pu perdre conscience ? Lorsque je dis « Je suis un être vivant », suis-je conscient et, partant, suis-je sûr de ne pas me tromper ? Ne résoudrait-on pas un grand nombre de problèmes en faisant enregistrer dans la conscience ou l’inconscient des jeunes enfants l’idée que leurs décisions ne leur appartiennent pas ? Se pourrait-il que la conscience soit dotée d’intelligence, et donc qu’elle nous laisse l’illusion de la spontanéité ? La conscience est-elle perturbée par la mesure ? La conscience, ou l’imagination, peut-elle être diluée dans le corps ?

    Bonne journée.

  20. Avatar de Moi
    Moi

    @quentin:

    « Seule les valeurs moyennes à grande échelle, sur un grand nombre de particule, permette de dégager un lien de cause a effet approximatif. »

    Je ne suis pas grand connaisseur (voire pas connaisseur du tout) de la physique quantique, mais que le lien de cause à effet soit dégagé approximativement ne signifie pas qu’il n’y a pas de lien de cause à effet, cela signifie même plutôt qu’il y a bien un lien de cause à effet. C’est de la logique. Donc je ne vois pas en quoi l’utilisation du mot « propension » change quoi que ce soit au fait qu’il y a détermination, même si cette détermination est floue.
    Enfin, si on laisse tomber la causalité, on laisse tout bonnement tomber la science. Celle-ci étudie les causes et les effets, par définition. Dire qu’un effet n’a pas de cause n’est pas de la connaissance, c’est de l’ignorance.

    « La science nous prouve réellement qu’on ne peut pas prédire l’évolution d’un système complexe à moyen terme, parce qu’elle EST indéterminée. »

    Du tout. La science cherche à améliorer la prédiction de l’évolution des systèmes complexes (vous pensez qu’il faisait quoi Prygogyne? qu’il passait sa journée à se tourner les pouces en se disant « on peut pas savoir »?). Ce que la science nous dit actuellement c’est qu’on ne peut prédire avec certitude et exactitude totale (contrairement à la physique de Laplace) car il y a une part d’indétermination dans l’enchaînement des causes et des effets.

    « Une indétermination n’est pas une cause cachée. »

    C’est juste. En fait la cause n’est pas cachée du tout, c’est juste qu’on ne peut prédire avec certitude l’effet. Il faudrait parler de « détermination floue », le terme « indétermination » prêtant à confusion en laissant penser qu’il n’y aurait pas de cause.

    « Qu’entendais vous par “prédire et influer sur la réalité” ? Vous voulez dire… utiliser votre libre arbitre ? »

    Je ne vois pas le rapport. Je voulais dire « augmenter nos possibilités d’action ». Lorsque je me muscle pour soulever des poids plus lourds, est-ce que j’utilise mon libre-arbitre? C’est idem avec la science, c’est la musculation du cerveau. Le libre-arbitre c’est choisir sans déterminations entre plusieurs possibilités d’action.

    @Nadine: http://lecerveau.mcgill.ca/flash/capsules/experience_rouge06.html

  21. Avatar de quentin

    @Paul Jorion

    Je ne suis pas spécialiste des bateaux, mais c’est la définition d’un système chaotique que d’amplifier les fluctuations du niveau inférieur sur son état global.

    Pour le bateau, les fluctuations sont d’abord celles des vagues. Quand le bateau prend l’eau, sa position deviendrait sujette aux plus petites fluctuations des vagues, il se peut que celles-ci entrainent le chavirement ou non de manière imprévisible.

    Pour peu que les vagues soient aussi des systèmes chaotiques reposant sur un niveau inférieur, et donc sujette aux fluctuations des molécules d’air et d’eau par amplification de ces micro-perturbations, on peut remonter jusqu’au niveau quantique. C’est alors un nombre incommensurable de fluctuations quantiques qui entrent en jeu à chaque instant dans le processus de chavirement.

    Concrètement cela signifie que si une seule molécule d’eau « décide » de se déplacer d’un nano-mètre, cette perturbation peut entrainer une divergence qui aboutira de fil en aiguille au chavirement du bateau.

  22. Avatar de Nadine
    Nadine

    @TELQUEL

    Je viens de lire l’article de Jean Staune, le moins que l’on puisse dire c’est que le journaliste pose les bonnes questions par contre les réponses sont étranges. Prenons la question qui me parait essentielle dans cet article et voyons la réponse:

    « N. C. : Comment une entité non énergétique pourrait-elle agir sur la matière et nous faire bouger ?

    J. S. :Là, nous serions bien ennuyés si la Mécanique quantique n’avait pas déjà été inventée. En effet, pour rester strictement scientifique, il faut respecter le principe de conservation d’énergie de Lavoisier : rien ne se perd, rien ne se crée. Mais Sir Eccles, le prix Nobel de neurologie, nous souffle la réponse dans son livre-testament. On a calculé que l’énergie nécessaire pour manipuler l’une de ses vésicules était de 10-18 g (soit 0,000… dix-huit zéro en tout… 001 gramme), ce qui est une quantité d’énergie si petite qu’elle entre dans l’ordre du principe d’incertitude d’Heisenberg. Il est donc scientifiquement légitime de postuler, sans violer le principe de Lavoisier, que la conscience, l’esprit, est une force capable de réorganiser le mouvement des vésicules synaptiques et d’influer sur la probabilité de leurs répartitions. »

    Vous l’aurez remarqué Jean Staune parle de gramme au lieu de Joule pour parler de l‘énergie…, ensuite pour expliquer que la conscience agit sur la matière dans un système de pensée dualiste il fait intervenir le principe d’incertitude d’Heisenberg sur une idée de Eccles. Mais une conscience immatérielle n’a pas plus de prise sur la matière « superposée » que sur la matière ordinaire. Utiliser ce principe d’incertitude c’est vraiment méconnaître les fondements de la mécanique quantique, d’ailleurs les vésicules aussi petites soient-elles, sont dans un environnement neuronal qui ne leur permettent pas d’être dans des états de superposition quantique. Avec le cerveau on reste dans de la physique classique.
    Il ne s’agit pas ici de nier la conscience, celle ci existe et nous confère un avantage certain par rapport aux autres espèces animales. Simplement la conscience est apparue très tard dans l’évolution et si l’ensemble des mécanismes biologiques et physiologiques du comportement humain de base peut s’en passer c’est que donc durant cette évolution, ces mécanismes ont été mis en place sans le recours de la conscience.

    @Anne.J

    Il peut y avoir d’autres hypothèses alternatives.

  23. Avatar de Moi
    Moi

    @quentin : « Concrètement cela signifie que si une seule molécule d’eau “décide” de se déplacer d’un nano-mètre, cette perturbation peut entrainer une divergence qui aboutira de fil en aiguille au chavirement du bateau. »

    Tout la question du libre-arbitre est dans les guillemets que vous mettez à « décide ». La molécule décide-t-elle réellement? Bien sûr que non, il y a forcément une cause à son déplacement. Où l’on voit que la question de l’indétermination ne démontre rien concernant le libre-arbitre.

    L’homme lui aussi « décide ».

  24. Avatar de quentin

    @Nadine

    Votre fils reproduit la nuit des choses qu’il a dans un premier temps apprises de manière conscientes… Serait-il capable de faire face à une situation nouvelle imprévue et de trouver une solution originale dans cet état ?

    Il semble que les chimpanzés en soient capables. Il est bien connu qu’ils savent utiliser des outils, et de manières différentes suivant les tribus. Ils sont également capable d’abstraction (comme faire le lien entre une maquette et une pièce réelle). Ils se reconnaissent dans une glace.

    Ils ont aussi ce qui ressemble à des traditions : certaines tribus de chimpanzés ont des pratiques rituelles particulières (comme des façons de se saluer), qu’on retrouve dans les tribus avoisinantes mais qui sont absentes chez les tribus se situant à de quelques centaines de kilomètres de là. (J’ai appris ça dans l’excellent livre de Richard Dawkins : il était une fois nos ancêtre…)

    Bon ceci dit j’avoue que je suis sensible à l’idée que la « vraie conscience » telle que nous la connaissons vienne avec le langage. Ce qui n’exclut pas des formes de consciences plus faibles chez les animaux.

    Par ailleurs vous dites « avec le cerveau on reste dans la physique classique ». Il me semble pourtant que la réponse d’un neurone à une impulsion électrique n’est pas entièrement déterministe. Elle est chaotique. Par exemple dans certains cas elle répondra par deux impulsions au lieu d’une à un stimulus. Ce phénomène serait particulièrement vrai quand le neurone s’insère dans un réseau (Voir cette page par exemple : http://www.cndp.fr/themadoc/le_chaos/le_chaos_en_biologie.htm )

    Etant donné les multiples boucles de rétroactions dans le cerveau, l’état global de ce dernier possède lui aussi une forte sensibilité aux conditions initiales (en l’occurrence la réponse des neurones), et constitue donc lui-même un système chaotique.

    Puisqu’on en est à un niveau cellulaire, pas très éloigné du niveau moléculaire, est-il exclu que des phénomènes quantiques entrent en jeu dans la réponse d’un neurone à un stimulus ? Ca me semble au contraire très probable. Le fait que la membrane des neurones soit un système dissipatif peut avoir son importance dans ce comportement imprévisible. De là on en déduit que ces mêmes phénomènes quantiques entrent en jeu dans l’évolution du cerveau tout entier et ont un impact sur son évolution.

    @Moi

    Je pense qu’on peut tomber d’accord sur l’idée de « détermination floue ». Dans ce cas ça laisse une place au libre arbitre. Ca ne prouve pas qui l’existe, mais le contraire n’est pas démontré pour autant.

  25. Avatar de quentin

    @moi

    Je mais des guillemet à « décide » parce que c’est une façon de parler.

    > La molécule décide-t-elle réellement? Bien sûr que non, il y a forcément une cause à son déplacement.

    Non il n’y a pas de cause à son déplacement. En l’occurrence un déplacement de 1 nm peut être dû au hasard.
    Au hasard « pur », celui de la physique quantique. A cette échelle on ne peut plus parler de causalité.

  26. Avatar de Moi
    Moi

    @quentin: « Je pense qu’on peut tomber d’accord sur l’idée de “détermination floue”. Dans ce cas ça laisse une place au libre arbitre. »

    On peut bien tomber d’accord sur la détermination floue mais pas sur le libre-arbitre. Qu’est-ce que pour vous le libre-arbitre? Parce que j’ai l’impression qu’on n’en a pas la même définition. En ce qui me concerne, un choix libre est un choix non-déterminé, qui n’a pas de cause. S’il a une cause, il n’est pas libre, par définition. Et peu importe que l’on sache déterminer précisément ce que provoquera cette cause ou pas.
    Lorsque l’on croit à l’existence du libre-arbitre on présuppose des actions qui échappent à la loi de la causalité. Cela dépasse l’entendement, c’est de l’ordre de la foi (ainsi, Dieu est dit « causa sui », cause de soi, éternel et incréé). La science présuppose TOUJOURS qu’un effet a une cause. La science nie donc par définition le libre-arbitre. D’où le fait que je vous ait dit précédemment qu’une expérience démontrant qu’un phénomène n’a pas de cause est absurde, c’est impossible car si un phénomène est de l’ordre de l’expérience il possède forcément une cause (sauf si c’est un miracle, mais y croyez-vous?).

    « Non il n’y a pas de cause à son déplacement. En l’occurrence un déplacement de 1 nm peut être dû au hasard. »

    D’après moi, vous mélangez régulièrement l’indétermination et la non-causalité. Ce sont deux choses bien différentes, le hasard (contraire de « nécessité ») fait référence au sens de l’action, la causalité (contraire de « libre ») fait référence à l’origine de l’action. Un objet peut se déplacer au hasard et avoir une cause. Un être libre (ce que je nie que cela existe, sauf à croire en l’existence de Dieu) agit sans cause mais pas au hasard.
    Ce que la physique quantique a remis en cause c’est le rapport entre nécessité et hasard, c’est-à-dire le problème de la mesure de la détermination (et de la réversibilité de l’enchaînement causal). Aucunement la causalité elle-même. Prenons l’exemple d’une boule de billard: il y a une différence entre dire que l’on ne peut savoir où la boule va aller une fois frappée par la queue de billard et dire que la boule va bouger sans être touchée par la queue de billard juste parce qu’elle en a décidé ainsi.

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Causalit%C3%A9_(physique)

    Je cite : « Il y a donc, selon ces principes, un indéterminisme fondamental.
    Ce problème remet en question la vision traditionnelle de la causalité, selon lequel tout effet procède d’une cause et que, toutes choses étant égales par ailleurs, un même effet succède à une même cause. Mais il ne remet pas en cause le principe de causalité : au contraire, étant irréversible, la mesure quantique établit un ordre temporel compatible avec lui. »

  27. Avatar de quentin

    @Moi

    Je suis à peu près d’accord avec tout ce que vous dites sur le déterminisme et la causalité. C’est effectivement une question de terme. Si on considère la causalité un sens fort (une cause = un effet, la même cause = le même effet), il n’y a plus de causalité. Si on entend dans un sens plus faible (la cause provoque l’effet, mais le résultat n’est pas forcément déterminé) vous avez raison. Mais dans ce cas on peut dire que ce qui détermine le résultat est en partie a-causal. Ce peut être ce qu’on appelle le « hasard », mais le fait est qu’on ne sait pas ce qu’il y a exactement derrière.

    Les expériences de Benjamin Libet prouveraient que le libre arbitre est une illusion parce qu’on pourrait observer un déterminisme avant qu’une décision ne soit consciente. Puisque ce déterminisme n’est l’approximatif et que la possibilité de changer d’avis n’est pas exclue, les expériences de Benjamin Libet ne prouvent rien. C’est à peu près tout ce que je voulais dire.

    Vous dites « un choix libre est un choix non-déterminé », je suis d’accord avec vous.
    Vous dites ensuite « Lorsque l’on croit à l’existence du libre-arbitre on présuppose des actions qui échappent à la loi de la causalité. ».
    Avec la causalité au sens faible, je ne suis pas d’accord avec vous. Ce n’est pas parce que je suis libre que je ne vais pas avoir des « propensions » à aller dans un sens. Ces « propensions » jouent le rôle de la cause. Il n’empêche que je suis libre parce que le résultat final n’est pas déterminé, qu’il existe une composante a-causale.
    Je suis peut être enfermé dans un « faisceau de possibilités » déterminé par des causes, mais au sein de ce « faisceau » je peut très bien être libre. C’est ainsi que j’entends le libre arbitre.

    Je n’entend pas prouver l’existence du libre arbitre. Etant matérialiste, j’admet que s’il existe, il doit s’inscrire dans la causalité au sens ou vous l’entendez. Mais qu’on ne me dise pas que « c’est prouvé que le libre arbitre n’existe pas ». Comme disait Nadine, après, c’est la nuit des zombies…

  28. Avatar de Moi
    Moi

    @quentin:

    « Il n’empêche que je suis libre parce que le résultat final n’est pas déterminé, qu’il existe une composante a-causale. »

    C’est pour moi comme dire qu’une pièce de monnaie est libre parce qu’elle a 50% de chance de tomber pile et 50% de tomber face et qu’on ne sait pas déterminer si elle tombera pile ou face.
    Et vous vous contredisez en parlant de « une composante a-causale » tout en disant « le libre-arbitre… il doit s’inscrire dans la causalité au sens ou vous l’entendez ».

    « Mais qu’on ne me dise pas que “c’est prouvé que le libre arbitre n’existe pas”.  »

    Des expériences vont pourtant dans ce sens. Et comment en serait-il autrement puisque la science nie « l’a-causal »?
    Ce que vous demandez c’est comme prouver que les miracles n’existent pas. On ne peut le faire mais on peut prouver, en prenant chaque supposé miracle à la fois, qu’il n’y a là rien de miraculeux (et vous direz à chaque fois « mais cela ne prouve pas qu’il n’existe pas un miracle ailleurs »).
    Donc d’un côté nous avons la science expérimentale et la raison qui nous dit qu’il n’y a pas de libre-arbitre et de l’autre votre volonté ferme de croire au libre-arbitre (car vous n’avez rien opposé d’autre que cela, il est logiquement impossible de démontrer que le libre-arbitre existe puisqu’il contredit la logique causale, des légions de philosophes se sont déjà attaqués sans succès à la démonstration de l’existence de la causa sui).

  29. Avatar de quentin

    @Moi
    La science ne nie pas du tout l’a-causale, et il existe une composante a-causale dans la nature, ce qui n’a rien de contradictoire avec le principe de causalité. La science ne nie donc pas le libre arbitre.

  30. Avatar de Nadine
    Nadine

    @Quentin

    La physique du chaos c’est de la physique classique. Ne confondez pas le hasard classique lié à notre ignorance et le hasard quantique qui est d’une nature complètement différente et qui n’intervient pas en biologie. On peut arriver à faire en sorte que des protéines manifestent un comportement quantique mais sous des conditions expérimentales très particulières qui n’ont rien à voir avec la biologie.

Contact

Contactez Paul Jorion

Commentaires récents

  1. Et donc, le scénario possible, c’est une condamnation suffisamment solide pour que Donald soit inéligible, ce qui serait en mesure…

Articles récents

Catégories

Archives

Tags

Allemagne Aristote bancor BCE Bourse Brexit capitalisme centrale nucléaire de Fukushima ChatGPT Chine Confinement Coronavirus Covid-19 dette dette publique Donald Trump Emmanuel Macron Espagne Etats-Unis Europe extinction du genre humain FMI France Grèce intelligence artificielle interdiction des paris sur les fluctuations de prix Italie Japon John Maynard Keynes Karl Marx pandémie Portugal psychanalyse robotisation Royaume-Uni Russie réchauffement climatique Réfugiés spéculation Thomas Piketty Ukraine ultralibéralisme Vladimir Poutine zone euro « Le dernier qui s'en va éteint la lumière »

Meta