À partir d’une conférence de Kojève, par Nikademus

Billet invité.

Une conférence de Kojève en janvier 1957, publiée en 2 fois dans Commentaire, la première partie en 1980, la seconde – ils ont pris leur temps -, en 1999.

A lire attentivement pour la hauteur de point de vue et parce qu’il y rappelle entre autres qu’« il est avantageux, non seulement du point de vue politique, mais encore de celui de l’économie elle-même, de payer pour le travail non pas le minimum, mais le maximum possible » et que c’est cela et rien d’autre qui a sauvé le capitalisme première manière (Ford).

On sait que les ministres du premier cercle du pouvoir ont choisi une voie contraire puisqu’ils proclament ces jours-ci que l’antithèse exacte de cette proposition les mène certes au suicide politique mais n’en est pas moins la seule envisageable, avec un fatalisme que l’on jugerait digne de l’antique s’il ne rappelait pas plutôt ces idéologues soviétiques qui trouvaient très en-dessous d’eux d’accepter une quelconque validation par la réalité ou l’expérience quand seule une sanctification finale par l’Histoire était à leur mesure. Mais pour ces derniers celle-ci n’est jamais venue, comme on sait ; et pour leurs pâles imitateurs, elle ne viendra pas.

« But I do think that there is a strong conviction that there is no choice but to reform this country. It will probably be painful, and perhaps we will fail in the end. But France will succeed.” Emmanuel Macron, ministre de l’économie, New York Times, Emmanuel Macron of France Is the Face of the New Socialism, LIZ ALDERMAN, OCT. 6, 2014.

« Cette mesure va finir par porter ses fruits, le président en est persuadé. Peut-être que ceci nous fera perdre la prochaine élection présidentielle mais nous pensons que ceci est une nécessité pour le bien du pays ». François Rebsamen, ministre du travail, Jean-Baptiste Chastand, Une interview choc de François Rebsamen dépubliée, 3 octobre 2014.

C’est cette illusion qu’il faut en priorité ruiner. Pour le gros patron, qu’il trouvera toujours une clientèle ailleurs et qu’il n’a pas à se soucier de celle qu’il a historiquement sous la main. Pour le petit, que le travail constitue pour lui une charge quand c’est en fait le mauvais prix que l’on lui paie pour ses marchandises qui ne lui laisse d’autre voie que de saquer sa propre clientèle. Dans l’un et l’autre cas, ils les conduisent à un suicide économique à terme d’une bien plus grande ampleur et de beaucoup plus sérieux que celui que font mine d’accomplir pour épater la galerie nos ministres.

La robotisation de grande ampleur en cours étant bien le plus mauvais moment, ou bien le meilleur, pour affronter enfin cette terrible question occultée par tous : comment faire vivre tous ces gens dont finalement on n’a plus besoin pour travailler et qui pourtant doivent consommer ?

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