La conscience, c’est quoi ? le 28 avril 2021 – Retranscription

Retranscription de La conscience, c’est quoi ?, le 28 avril 2021.

Bonjour, on est le mercredi 28 avril 2021 et, vous le savez sans doute, je fais des vidéos. J’en fais depuis 2008 donc j’en ai fait beaucoup mais je me suis aperçu ce matin que j’ai toujours fait des vidéos sur des choses qui me traversaient l’esprit et là, ce matin, il y a quelqu’un qui m’a suggéré de faire une vidéo sur un sujet qui est la conscience, comment ça marche parce que cette personne a vu que j’en parle occasionnellement, des idées que j’ai sur la conscience, que j’ai fait un article quand même conséquent – je ne sais pas, il fait une quarantaine de pages sans doute – en 1999. Ça ne s’appelait pas « La conscience » : c’était l’époque où on mettait des titres incompréhensibles et il fallait que les gens devinent de quoi ça parle. Ça s’appelait : « Le secret de la chambre chinoise » mais ça parlait de la conscience. 

J’avais mis tous les éléments dont je disposais sur ce que je comprenais de la conscience et le plus gros de ce que je comprenais venait de ma formation de psychanalyste, d’avoir réfléchi à ça parce que, vous le savez, c’est une notion absolument centrale chez Freud, la conscience par opposition à l’inconscient parce qu’il avait mis l’accent, il a attiré l’attention sur tout ce qui se passe chez nous et qui ne demande pas que la conscience soit là. Par exemple, de dormir la nuit, ça ne demande pas que la conscience soit là mais il y a aussi des tas de choses que nous faisons sans véritablement que la conscience soit là, des choses que nous faisons par réflexe et, comme on dit, machinalement. Bon, tout à l’heure, je me suis posé la question : « Est-ce que je suis déjà allé voir la boîte aux lettres s’il y avait du courrier ? ». Je pourrais me dire, parce que je ne connais pas la réponse : « Est-ce que c’est parce que ma mémoire est particulièrement mauvaise ? ». Non, c’est parce que ce sont des choses qu’on fait machinalement. On les fait machinalement, c’est-à-dire qu’en fait, la conscience n’est pas vraiment là. Si au moment où j’étais sorti, si quelqu’un m’avait interpelé, un voisin d’en face, là, voilà, « Pop ! », ma conscience se serait rallumée, aurait pensé au fait que je suis dans la rue en train de vérifier s’il y a du courrier. 

Dans ce que nous faisons dans la vie de tous les jours, il y a très peu de choses finalement qui réclament la conscience parce qu’il y a beaucoup de choses qui se font machinalement. Quand vous apprenez à conduire, vous vous concentrez sans doute, comme on dit : « on se concentre », et chaque fois qu’on change de vitesse, on se dit : « Voilà, je suis en train de changer de vitesse. Il ne faut pas que j’oublie que je suis en seconde et que je passe en troisième. Voilà, maintenant, il faut que je freine. Il ne faut pas que j’oublie de débrayer si je vais m’arrêter » et ainsi de suite. Après, tout ça devient du machinal effectivement. Tout ça fonctionne de soi-même. On n’est pas là à conduire avec quelqu’un à côté de soi en disant : « Ecoutez, une seconde ! je vais devoir vous laisser un instant parce que je vais devoir me concentrer sur le fait que je dois changer de vitesse ». Non, tout ça se passe automatiquement. 

Donc, il y a des moments où on est inconscient. Il y a beaucoup de choses qui se passent sans que la conscience soit nécessaire et puis il y a un certain nombre de choses où on a l’impression quand même que la conscience est indispensable. Je pense à l’époque où on faisait encore ça dans des agendas, où on notait quelque chose. Maintenant, tout ça est devenu automatisé. Si vous avez un ordinateur, une tablette, on vous rappelle que vous devez aller chez le dentiste mercredi prochain à 16 h. Donc, avant, on avait un agenda. Il fallait le sortir ou bien on retenait ce qui y était écrit et alors, de temps en temps… « Aïe, j’ai mordu sur quelque chose de vraiment très dur. Tiens, ça me rappelle que la semaine prochaine, je vais devoir aller chez le dentiste à 16 h mercredi » ou bien on se souvient, on pense au fait qu’on doit acheter du beurre, on se verse un verre de lait et on se dit : « Tiens, ça me rappelle que quand j’irai à la boutique la prochaine fois, il ne faut pas que j’oublie de prendre du beurre ». 

Tout ça se passait comme ça, c’est-à-dire que les choses qu’il fallait faire dans l’avenir, constituaient un souci : c’était un souci qu’on se créait. On lui donnait une date, il était daté, il était horodaté et c’est inscrit quelque part dans la mémoire et ça se rappelait par association : quand il y avait des choses qui ramenaient ce souvenir en surface. 

Mais il y a quand même un certain nombre de choses où on a l’impression qu’on a vraiment besoin de la conscience. Par exemple, on va se donner un autre souci et ce souci, ce sera de résoudre un problème, de calculer la valeur de quelque chose qui demande un calcul. Il y a des additions à faire, il y a des multiplications à faire. Alors là, il y a un algorithme comme on appelle ça maintenant – enfin, ça fait longtemps qu’on l’appelle un algorithme mais maintenant, on appelle souvent « algorithme «  simplement, des programmes d’ordinateur – et donc, il y a une procédure à suivre. Si c’est 7 x 8 = 56, ça, ce n’est pas grave : c’est inscrit dans la mémoire, c’est dans le machinal, ça fait partie de la table de multiplication que j’ai apprise par cœur. Mais 133 x 149, là, il va falloir que j’utilise une calculette ou que je prenne un bout de papier et que je fasse le calcul donc, là, le souci, c’est d’arriver à la solution et on se place le souci, là, devant soi. C’est ce qu’Aristote appelait la cause finale, c’est-à-dire en fait l’objectif. C’est une cause mais pas une cause qui se trouve derrière nous comme quelque chose qui nous a poussés à obtenir un certain effet. Non, c’est la cause qui nous attire, la cause qui nous attire. Et en physique, on appelle ça un puits de potentiel, c’est-à-dire qu’on va essayer de faire disparaître une tension, de la réduire à zéro. Et la tension qu’on ressent, c’est qu’on veut résoudre ce problème. On a le souci de le résoudre et on va se diriger vers la solution et plus on se rapprochera de la solution, plus ce potentiel va diminuer et quand on sera arrivé au résultat, pouf ! ce sera fini : la tension aura disparu, on aura supprimé le souci. 

Et d’une certaine manière, c’est un processus qui est là aussi automatique parce qu’on connaît les procédures. Il y a une dynamique d’affect en arrière-plan qui fait que le souci, c’est quelque chose qui nous dérange et qu’on a envie d’aller vers l’absence de souci, voilà. C’est ce qu’on appelle l’ataraxie en philosophie, c’est vouloir se débarrasser des soucis, arriver à une équanimité de l’âme, être débarrassé de tout souci. 

Et en fait, quand on réfléchit dans cette perspective-là, on se rend compte que nous avons vraiment envie d’être débarrassés de nos soucis. C’est quelque chose qui nous agite en permanence. On peut avoir aussi des soucis permanents : si on des problèmes d’argent, on a ce souci de gagner de l’argent en permanence et ça vous sabote la vie. On sait bien que c’est beaucoup plus agréable de ne pas avoir de soucis d’argent ou de ne pas avoir mal aux dents ou de ne pas devoir aller acheter des chaussures et des choses comme ça, que tout soit déjà résolu. 

Et là, la conscience est donc là mais plus on fait de la psychanalyse, qu’on la pratique en ayant des analysants, plus on réfléchit aux questions et plus on s’aperçoit qu’il y a peu de choses qui, finalement, requièrent cette conscience. La preuve, c’est que les machines intelligentes peuvent faire la même chose sans avoir la conscience. On sait qu’elles n’ont pas la conscience. Evidemment, on pourrait dire : « C’est comme les animaux, ils ont peut-être la conscience mais comme ils ne parlent pas, ils ne peuvent pas nous le dire ». Enfin bon, on ne croit pas que ce soit nécessaire. Et de toute manière, on ne se dit pas, en intelligence artificielle, que ce type-là de problème, on ne pourra le résoudre que quand la machine sera consciente. Non, on a l’impression qu’on peut faire tout ce qui est intelligent chez un être humain sans avoir besoin de la conscience. C’est-à-dire que d’une certaine manière, c’est dans la perspective qu’avait ouverte M. Ivan Pavlov. On parle de processus « pavloviens », c’est-à-dire des choses qui se produisent de manière automatique : stimulus => réponse, voilà. 

Quand j’avais écrit moi un bouquin sur l’intelligence artificielle, en parallèle avec le fait que je réalisais un projet d’intelligence artificielle (un truc qui s’appelait ANELLA = Réseau associatif à propriétés émergentes de logique et d’apprentissage), il m’était apparu qu’on pouvait décrire le processus de parler, réfléchir, dire des choses, dialoguer comme un processus pavlovien. On peut le décrire entièrement d’un bout à l’autre comme du stimulus => réponse, sachant que nous avons des stimulations qui ne nous viennent pas nécessairement du monde extérieur : nous avons aussi des stimulations qui nous viennent du monde intérieur. On a faim, on a soif, on a envie de faire des choses et aussi, on se rend compte qu’on réagit à ce qu’on dit soi-même. 

Il y a des cas flagrants comme la honte. Je dis un truc et puis, merde ! c’est pas du tout ça que j’aurais dû dire, c’est même très gênant, etc. Je n’avais pas l’intention de me rendre honteux. C’est venu comme ça, automatiquement. En fait, j’ai été honteux quand j’ai entendu ce que je disais moi-même, quand je me suis entendu le dire. 

Et ça : cette idée qu’on dit des choses sans en être conscient, sans qu’il n’y ait de volonté délibérée de le faire, il est central au processus de la cure psychanalytique. C’est quand on s’entend dire des choses qu’on ne reconnaît pas, quand le psychanalyste ou la psychanalyste vous fait répéter en disant : « Vous avez entendu ? vous avez dit cela » et que vous êtes obligé de dire : « Je me suis entendu dire cela mais ce n’est pas du tout ça que j’avais l’intention de dire et en fait, je suis aussi surpris que vous de m’être entendu dire ce genre de choses ! » et c’est là que des vérités cachées à soi-même parviennent en surface. 

Donc, vous voyez, plus on réfléchit à la conscience… Bon, on sait que ça existe. Je sais bien que le matin quand je me réveille, ça prend un certain temps et tout à coup, je passe d’un moment où il y avait peut-être un peu de rêve qui flottait, une conscience en tout cas très très minimale qui venait après un moment où il n’y avait pas de conscience du tout et ma conscience réémerge. Donc, je peux dire : « Maintenant, je suis conscient. Maintenant, je fais des choses consciemment », etc. Quand je dis « consciemment », ça ne veut pas dire nécessairement qu’il y a un mécanisme « intention – volonté – ma conscience convoque la volonté – la volonté, je lui dis : « Produis l’intention » – une fois que l’intention est là, c’est le but que je m’assigne, etc. » Non, tout ça s’enchaîne. 

Tout ça s’enchaîne. Alors, la conscience, ça sert à quoi ? Ça ne sert en tout cas pas à faire ce que toutes les machines intelligentes font. Puisque ce n’est pas nécessaire, ce n’est pas à ça que ça sert. De la manière dont les anglophones le formulent est-ce que la conscience est dans le driver’s seat ? Est-elle sur le siège du conducteur ? La plupart des choses que l’on fait dans la vie quotidienne et que les machines peuvent faire : les robots, l’intelligence artificielle, de l’intelligence artificielle collée sur un robot avec une base de données qui est remplie de plein de trucs qui permettent de faire des recherches, etc. Tout ça ne demande pas la conscience. Quand on pose la question : « Est-ce qu’il est nécessaire d’avoir la conscience pour faire une machine qui simule entièrement l’être humain ? », on se rend compte qu’en fin de compte ce n’est pas nécessaire. 

Ce n’est pas nécessaire. Alors, à quoi ça sert, la conscience, si c’est pas nécessaire ? Eh bien, c’est là que j’ai une hypothèse dont je parle quelquefois et qui a conduit cette personne tout à l’heure à me dire : « Pourquoi ne l’expliqueriez-vous pas à tout le monde ? » C’est la chose suivante : à mon avis, c’est ce qu’on appelle un artéfact. [Le mot a de nombreux sens, mais l’un des sens est qu’un artéfact, c’est quelque chose qui est produit sans nécessité, qui est là mais sans qu’il y ait à cela de nécessité véritable. Ça a été produit comme un sous-produit. 

C’est un sous-produit et mon sentiment, c’est que la conscience, c’est un sous-produit, c’est un sous-produit du mécanisme de la mémoire. Ce qui fait que je n’ai aucune difficulté à considérer que tout animal qui a une mémoire qui peut être rappelée, et une mémoire dans laquelle de nouvelles choses peuvent être inscrites, à mon sentiment, un animal qui a ça ou même une créature qui aurait ça, même une créature artificielle, aurait le potentiel d’être consciente d’elle-même. 

Qu’est-ce qu’il faudrait en plus ? Il faudrait qu’il y ait quelque chose qui produise cette conscience. Et l’image qui vient – plusieurs personnes l’ont déjà utilisée mais sans réfléchir sans doute beaucoup au mécanisme lui-même – comme un hologramme. 

Vous savez ce que c’est un hologramme : vous avez quelque chose, une information qui est à plat, qui est stockée comme dans une photo mais avec une certaine lumière, vous allez produire, vous allez faire apparaître à partir de ce qui est écrit, inscrit, vous allez faire apparaître l’image en trois dimensions qui a été inscrite là-dedans. Vous allez pouvoir la faire émerger. Vous le savez, on voit ça dans les films de science-fiction. Il y a quelqu’un qui regarde quelque chose et puis, tout à coup, pouf, il y a un objet qui apparaît là en trois dimensions. On le représente plus ou moins, je veux dire, transparent pour qu’on se rende compte que c’est virtuel comme on dit, c’est une image virtuelle comme on peut produire avec des jeux de miroir, on peut produire une image virtuelle, une image qui apparaît là à la vision mais qui est un produit justement de ces effets de miroir, de projecteur, etc. et qui apparaît à un endroit où elle n’est pas véritablement si l’on peut dire. Enfin, elle est là véritablement mais pas de manière matérialisée. 

Alors, à mon avis, la conscience, c’est quelque chose de l’ordre de l’hologramme et l’hologramme, ça appelle, pour son mécanisme, l’idée d’une résonance. C’est une résonance qui va faire que quelque chose qui est en deux dimensions va apparaître en trois dimensions, c’est parce qu’il y a des choses qui vont se mettre à résonner mais pas « raisonner » comme produire un raisonnement, résonner comme un diapason, comme une cloche qui continue à résonner, des choses de cet ordre-là. Et on sait qu’on peut produire des interférences. L’image qui me vient, c’est l’effet Larsen. Vous savez, on met les micros, on met les haut-parleurs, etc. et tout à coup, le son se répond d’un appareil à l’autre et ça produit un son qui n’est pas délibérément produit par un endroit ou un autre. C’est la rencontre, c’est dans cette résonance que ça apparaît. 

À mon sens, la conscience, elle apparaît-là comme artéfact, et je l’ai déjà dit, de la mémoire. Quand nous voyons quelque chose, quand nous faisons quelque chose, est appelée en permanence à un endroit – je ne vais pas dire que c’est la conscience puisque c’est ça que j’essaye d’expliquer – l’information pertinente. Elle est rappelée de là où elle est inscrite. 

Par exemple, je me promène et tout à coup, un serpent. « Ouh là, c’est important parce qu’un serpent, ça peut mordre, etc. » Tout à coup, sans que j’aie dû pousser sur un bouton, sans que j’aie dû me concentrer, tout à coup, toute l’information que j’ai sur un serpent, elle est là mobilisée. Il a été reconnu que c’était un serpent parce que ça a matché. Il y a une représentation du serpent qui est venue coller à ce que je vois là + toute l’information « Attention, attention, ça va vite ! Attention, ça peut se diriger vers toi ! Attention ça peut avoir des crocs ! Attention, les crocs peuvent être venimeux ! Attention, ce venin peut être extrêmement dangereux ! ». Tout ça est arrivé là. Mais pendant que je fais ça, j’enregistre tout ce qui est en train de se passer, c’est-à-dire que j’ajoute à ma base de données sur les serpents : je suis en train d’ajouter l’information supplémentaire relative à celui que je suis en train de voir. Par exemple, c’est une couleur que j’ai peut-être jamais vue. Par exemple, j’ajoute le fait que c’est à tel endroit maintenant, à tel moment que je rencontre ce serpent, etc. C’est-à-dire que tandis que l’information « serpent » dans ma tête est en train de descendre vers un certain endroit ET que, de ce même endroit, est en train de monter, pour aller s’inscrire en mémoire de l’info en sens opposé, relative aux serpents. C’est-à-dire que pendant que je tire parti de ma base de données pour l’information « serpent », je suis en train d’alimenter ma base de données avec de l’information « serpent », ce qui veut dire que je suis en train de produire une sorte de court-circuit qu’il vaut mieux appeler une résonance. Au moment où se croisent l’information « serpent » qui remonte [inscription en mémoire] et celle qui descend [remémoration], à mon sens, c’est là qu’il y a quelque chose qui se passe et qui est de l’ordre de ce que l’on appelle « la conscience » : à ce moment-là, « je suis conscient », et « je suis conscient de ce qui est en train de se passer. » Je suis pleinement conscient de ce qui est en train de se passer quand je suis au cœur de ce processus où il y a beaucoup d’informations qui descendent et beaucoup d’informations qui essayent de remonter. 

L’inscription dans la mémoire, elle n’est pas immédiate et on le sait bien parce qu’on sait que, quand vous avez un accident et qu’on vous demande après ce qu’il s’est passé, ça n’a pas été inscrit : il y a eu un choc, et ça n’a pas eu le temps de s’inscrire. Mais, on sait que l’information remonte et que la prochaine fois, en voyant un serpent, le fait que vous l’avez vu maintenant va faire partie des choses qui ont été inscrites. 

En résumé, il y a donc un double processus de mémoire où des informations descendent et des informations du même ordre, du même ordre parce qu’on parle de la même chose, remontent. Je mobilise l’information sur le serpent et je remonte de l’information sur le serpent. Et, à un moment donné, ça se croise. À mon sens, c’est là que se passe la conscience et donc, comme je vous le dis, tout animal en qui se déroule un processus de ce type-là, de mémoire où s’inscrivent les choses et où ces choses sont mobilisables par la suite, j’ai lue sentiment que cet animal a la conscience exactement comme nous et cette idée que l’animal ne serait pas conscient de ce qui lui arrive, je n’y ai jamais cru une seule seconde et mon petit modèle suggère qu’il n’y a pas de raison d’y croire. 

Est-ce que c’est une explication de la conscience ? Oui, d’une certaine manière, sauf qu’il manque un élément fondamental. Il manque un élément fondamental, c’est que nous ne savons toujours pas comment les informations sont inscrites en mémoire. Nous n’en avons pas la moindre idée. Nous disons que le fait que c’est inscrit, c’est sans doute « un truc un peu holographique », avec de l’information distribuée. Il n’y a pas un endroit dans mon cerveau où il y a des neurones qui sont juste consacrés au serpent que j’ai vu aujourd’hui, à peu près au même endroit où s’est inscrit tout ce qui se rapportait aux serpents déjà avant. C’est probablement « distribué » comme on dit : c’est réparti à l’intérieur du cerveau et donc, quand un phénomène de mémoire a lieu, ça mobilise sans doute un très grand nombre de neurones. Mais le fait est que nous ne savons pas. 

Nous ne savons toujours pas. Nous savons un certain nombre de choses, nous étudions le cerveau, nous regardons ce qu’il se passe quand l’affect est mobilisé, ce qui est activé dans la tête, tout ça on peut le voir. Maintenant, on peut envoyer même des signaux et c’est une des compagnies de M. Elon Musk [Neuralink] d’essayer d’envoyer directement des signaux ou d’interpréter directement des patterns, des configurations qui apparaissent dans le cerveau. 

Donc on n’est peut-être pas très très loin de comprendre comment la mémoire est stockée exactement mais si on veut vérifier le modèle, mon modèle des deux flux de mémoire qui se croisent, produisant une sorte d’hologramme, il faudra avoir une vision beaucoup plus précise de comment ça marche exactement, pour qu’à ce moment-là, des physiciens puissent en faire un véritable modèle et qu’on puisse voir peut-être expérimentalement, ce qui se passe quand on fait se croiser des flux d’information portant sur exactement la même chose, par exemple le serpent dans l’exemple que j’ai donné, et on verra s’il se passe quelque chose de l’ordre de la résonance, qui ressemble à ce que nous appelons « la conscience ».

Cela dit, vous voyez exactement pourquoi on peut fabriquer des machines intelligentes qui pourraient nous reproduire entièrement sans que la conscience apparaisse pour autant. Si elle est apparue de la manière que j’ai dite, on peut sûrement produire un système tel qu’il n’y ait pas de résonance de manière délibérée, qu’il n’y ait pas de résonance entre les flux qui descendent et les flux qui remontent. Ça ne doit pas être très compliqué. C’est peut-être même compliqué de le faire de telle manière qu’il y ait véritablement de la résonance qui apparaisse. 

La seule chose dont nous sommes conscients, c’est que nous avons la conscience. Et que tous les matins, il faut que, d’une certaine manière, toute la mémoire que nous avons reconnecte avec cette image que nous avons de nous-même. C’est un des thèmes chez Philip K. Dick bien entendu, c’est que chaque nuit, on pourrait nous remplacer entièrement la cassette et que ce serait avec des trucs complètement bidonnés que nous nous réveillions le matin. Ou alors comme dans le film de Christopher Nolan « Memento » où le type ne se souvient pas d’un jour à l’autre de la manière dont ça connecte. Ça ne connecte pas et donc il est obligé de… Si vous avez vu le film : « spoiler ! »… il est obligé d’écrire des choses chaque soir qu’il puisse relire le matin pour se donner une idée au moins de qui il est et de ce qu’il doit faire et des problèmes à résoudre. Et l’intérêt du film, bien entendu, c’est qu’avec ces petits bouts de griffonnages, il n’arrive à rien et, en particulier, que le monde autour de lui va exploiter le fait qu’il n’ait pas cette mémoire continue et qu’il doive à tout moment essayer de la reconstituer. 

Voilà, merci à la personne qui m’a dit de, pour une fois, parler de choses dont je parle de manière tout à fait incidente mais auxquelles je ne pense jamais à consacrer véritablement une vidéo. Et réagissez, réagissez sur mon blog à ce que je viens de dire. Peut-être qu’on peut avancer et trouver des choses intéressantes ! Voilà, à bientôt !

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