George Soros et la « rectification » des noms

Dans ma vidéo d’hier, j’ai procédé à ce que Confucius recommande en période troublée : procéder à la « rectification » des noms (c’est également l’un des messages indirects de Orwell dans 1984 quand il évoque la « novlangue », l’utilisation des mots pour dire leur contraire dans un monde dystopique ; appeler par exemple « La vérité », un organe de propagande).

J’ai rappelé à propos du « socialisme » qu’il renvoie à un mouvement de pensée distinct à la fois du communisme soviétique d’inspiration marxiste et d’une variété soft de l’ultra-libéralisme que l’on trouve malheureusement souvent dans le commerce sous cette étiquette.

Ayant ainsi procédé à une rectification des noms et ayant dénoncé la novlangue, j’ai mentionné quelques noms comme représentants du « socialisme » rectifié, ceux de John Maynard Keynes, Lord Adair Turner et George Soros (à qui j’attribue personnellement la responsabilité de l’opération « Panama papers »).

La mention du nom de Soros a conduit à deux types de réaction dans le courrier qui m’est parvenu : ceux qui ont pensé du mal de moi parce que j’avais mentionné Soros, et ceux qui ont pensé du bien de Soros parce que je l’avais mentionné.

Dans la première catégorie, un monsieur qui m’a écrit ceci :

Ainsi Paul Jorion nous révèle qu’il fait partie du « courant Soros ».
Tout s’explique. Tout. Il fallait seulement le savoir, et il fallait seulement le dire. Je pense que quelques milliers de vos lecteurs ont du avaler de travers en entendant ça. Personnellement, j’ai souri. Avec tristesse. Mais c’est toujours mieux de savoir d’où quelqu’un prêche.

Je lui ai répondu ceci : « Comment voulez-vous que je l’empêche de rejoindre mon camp, avec les moyens dont il dispose ? 😀 Le vôtre, c’est quoi ? »

J’attends la réponse.

Dans la seconde catégorie : ceux ou celles qui ont pensé du bien de Soros parce que je l’ai mentionné, j’ai reçu une proposition de traduction d’une tribune libre publiée dans le Wall Street Journal le 20 septembre 2016, intitulée : « Why I’m Investing $500 Million in Migrants », pourquoi j’investis 500 millions de dollars dans les migrants, par George Soros. En voici le texte :

Le monde a été déstabilisé par une poussée de migration forcée. Des dizaines de millions de gens sont en mouvement, fuyant leur pays d’origine, à la recherche d’une meilleure vie à l’étranger. Certains fuient la guerre civile ou un régime oppressif, d’autres sont poussés par une extrême pauvreté, séduits par la possibilité d’un avancement économique pour eux et leur famille.

Notre échec collectif à développer et mettre en œuvre des politiques efficaces pour traiter ce flux accru, a contribué grandement à développer la misère humaine et l’instabilité politique – tant dans les pays que les gens fuient que dans les pays qui les accueillent, volontairement ou contre leur gré. Les migrants se retrouvent souvent plongés dans une vie de désespoir oisif, tandis que des pays hôtes sont incapables de tirer parti du bénéfice réel qu’une plus grande intégration pourrait apporter.

Les gouvernements doivent jouer un rôle central dans la gestion de cette crise en créant et soutenant une infrastructure matérielle et sociale adéquate pour les migrants et les réfugiés. Mais mobiliser le pouvoir du secteur privé est également essentiel.

L’ayant compris, l’administration Obama a récemment lancé un « Appel à l’action » en demandant aux entreprises américaines de jouer un plus grand rôle en relevant les défis posés par la migration forcée. Aujourd’hui, les leaders de secteur privé se réunissent aux Nations Unies pour s’engager concrètement afin d’aider à résoudre le problème.

En réponse, j’ai décidé d’affecter 500 millions de dollars à des investissements spécifiquement liés aux besoins des migrants, des réfugiés et des communautés d’accueil. J’investirai dans des start-up, dans des entreprises bien établies, dans des initiatives et des entreprises sociales fondées par les migrants et les réfugiés eux-mêmes. Bien que ma préoccupation principale soit d’aider les migrants et les réfugiés arrivant en Europe, je serai à l’affût de bonnes idées d’investissement susceptibles de bénéficier aux migrants dans le monde entier.

Cet engagement en capitaux propres viendra compléter les contributions philanthropiques que mes fondations ont faites pour faire face à cette migration forcée, un problème que nous traitons, à l’échelle mondiale depuis des décennies, et auquel nous avons consacré des ressources financières significatives.

Nous chercherons des investissements dans une variété de secteurs, parmi lesquels la technologie numérique naissante, qui semble particulièrement prometteuse pour fournir des solutions aux problèmes particuliers auxquels les personnes déplacées doivent souvent faire face. Les avancées dans ce secteur peuvent aider les gens à obtenir l’accès plus efficacement au gouvernement, aux services juridiques, financiers et de santé. Les entreprises privées investissent déjà des milliards de dollars pour développer de tels services pour des communautés non-itinérantes.

C’est pourquoi l’argent se déplace maintenant instantanément d’un portefeuille électronique à un autre, des conducteurs trouvent des clients en utilisant seulement un téléphone portable et un médecin en Amérique du Nord peut conseiller un patient en Afrique en temps réel. La personnalisation et l’extension de ces innovations au service des migrants aideront à améliorer la qualité de vie de millions de personnes dans le monde entier.

Tous les investissements que nous faisons appartiendront à mon organisation à but non lucratif. Ils sont destinés à réussir – parce que je veux montrer comment le capital privé peut jouer un rôle constructif dans l’aide aux migrants – et tous les profits financeront les programmes des fondations « Open Society » [1], y compris les programmes qui profitent aux migrants et aux réfugiés.

En tant que hérauts de la société civile, nous nous assurerons que de nos investissements émergeront des produits et des services qui profiteront véritablement aux migrants et aux communautés qui les accueillent.

Nous travaillerons aussi étroitement avec des organisations comme le Bureau du Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés et le International Rescue Committee [2] pour établir une charte qui guidera nos investissements. Notre but est d’encadrer, dans une perspective d’intérêt général, les innovations que seul le secteur privé peut fournir.

J’espère que mon engagement inspirera d’autres investisseurs à s’engager dans la même mission.

[1] Fondation caritative créée en 1979 par Georges Soros.

[2] Fondé en 1933 à l’initiative d’Albert Einstein pour aider les opposants à Adolf Hitler

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© Dow Jones Inc.

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