Ce texte est un « article presslib’ » (*)
On a financé le spéculateur plutôt que l’entrepreneur. On a laissé sans aucun contrôle les agences de notation et les fonds spéculatifs. On a obligé les entreprises, les banques, les compagnies d’assurance à inscrire leurs actifs dans leurs comptes aux prix du marché qui montent et qui descendent au gré de la spéculation. On a soumis les banques à des règles comptables qui ne fournissent aucune garantie sur la bonne gestion des risques mais qui, en cas de crise, contribuent à aggraver la situation au lieu d’amortir le choc. C’était une folie dont le prix se paie aujourd’hui ! […]
L’idée de la toute-puissance du marché qui ne devait être contrarié par aucune règle, par aucune intervention politique, cette idée de la toute-puissance du marché était une idée folle. L’idée que les marchés ont toujours raison est une idée folle. […]
Et qui pourrait admettre que tant d’opérateurs financiers s’en tirent à bon compte alors que pendant des années ils se sont enrichis en menant tout le système financier dans la situation dont il se trouve aujourd’hui ? Les responsabilités doivent être recherchées et les responsables de ce naufrage doivent être sanctionnés au moins financièrement. L’impunité serait immorale. […]
… ne rien faire, ne rien changer, se contenter de mettre toutes les pertes à la charge du contribuable et faire comme s’il ne s’était rien passé serait également une erreur historique. […]
En ces circonstances exceptionnelles où la nécessité d’agir s’impose à tous, j’appelle l’Europe à réfléchir sur sa capacité à faire face à l’urgence, à repenser ses règles, ses principes, en tirant les leçons de ce qui se passe dans le monde. L’Europe doit se donner les moyens d’agir quand la situation l’exige et non se condamner à subir. […]
Nicolas Sarkozy, Président de la République française, Discours de Toulon, le 25 septembre 2008.
Ce qui m’a rappelé le Discours de Toulon, c’est l’information hier dans un sondage d’opinion de l’agence de presse américaine Bloomberg, que 71 % des répondants pensent que les bonus importants devraient être interdits dans les entreprises qui ont bénéficié de l’aide publique durant la crise, et 17 % pensent que les bonus d’un montant supérieur à 400 000 $ devraient être imposés à 50 %.
Quelles sont les mesures qui ont été prises dans ce domaine-là aux États-Unis ? Le Président Obama a nommé M. Feinberg pour qu’il examine la paie des dirigeants des cent compagnies les plus importantes ayant reçu une aide de l’État. Les bonus ont été réduits à Bank of America, Citigroup, AIG, General Motors et Chrysler ; les trois dernières étaient en faillite et continuaient d’attribuer des bonus avec l’aide généreuse du contribuable américain. L’imposition à 50 % des bonus élevés avait été proposée par deux sénateurs américains, la proposition fut rejetée sans même avoir été soumise à un vote.
Il existe donc aux États-Unis comme en Europe (en France en tout cas), des mesures proposées par des personnalités politiques (parfois dans une position suprême d’autorité dans leur pays) et soutenues par une vaste majorité de la population, qui ne reçoivent même pas un début d’application.
Je me propose de faire la chose suivante dans les jours qui viennent : extraire des différents discours de Mr. Sarkozy (en sus du Discours de Toulon, il y a aussi Colloque « Nouveau monde, nouveau capitalisme » 2009 et Colloque « Nouveau monde, nouveau capitalisme » 2010) appartenant tous à ce que Le Figaro a appelé « une croisade pour en finir avec les ‘spéculateurs’ et tourner la page des ‘dérives du capitalisme financier’ », les propositions radicales qui, si l’on en croit les sondages, bénéficient aujourd’hui d’une approbation d’au moins 80 % de la population française.
Je soumettrai cela à votre lecture dans un prochain billet. Nous en discuterons alors et tenterons de mettre au point à partir de là, un texte court mais percutant. Une possibilité alors, sachant que l’UMP souscrira pour des raisons évidentes à ces mesures, serait de proposer à l’ensemble des autres partis de les mettre également à leur programme (si j’en crois leurs déclarations respectives, il semblerait bien que tous en réalité puissent le faire). D’autres types d’actions sont également envisageables.
(… à suivre)
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