LES ÉMERGENTS SOUFFRENT ET LA RUSSIE EST AU TAPIS, par François Leclerc

Billet invité.

Sonnés, les dirigeants russes se tâtent pour vérifier s’ils sont entiers. Les grandes entreprises exportatrices ont été mises à contribution pour vendre les devises dont elles disposent et contribuer à la stabilisation du rouble, afin d’épargner la Banque de Russie qui a dépensé plus de dix milliards de dollars depuis le début du mois, et dont les réserves abondantes ne sont pas inépuisables. Dans l’attente d’autres mesures, elle va faciliter l’accès aux devises étrangères et protéger les banques de leurs pertes comptables.

Le premier ministre Dmitri Medvedev affirme aujourd’hui qu’aucune mesure d’encadrement des changes ne sera prise, afin de ne pas porter atteinte aux principes du marché, dit-il. Mais, en tout état de cause, le rouble aura perdu la moitié de sa valeur depuis le début de l’année, et rien ne pourra empêcher la Russie d’entrer dans une franche récession, et de connaître simultanément une flambée inflationniste des prix. Le système bancaire va être soumis à rude épreuve en raison de l’endettement des entreprises et des particuliers en devises étrangères. Composé d’une myriade de petits établissements côtoyant une poignée de grands établissements, ce système est très fragile et va devoir être restructuré dans l’urgence. Enfin, Vladimir Poutine – qui s’est tenu à l’écart afin de se démarquer du gouvernement, seul responsable selon lui de la conduite de la politique économique – tirera demain les leçons politiques et essayera d’en faire autant avec les marrons du feu en faisant une fois de plus appel au chauvinisme russe, sa carte favorite.

Les pays de la zone euro vont perdre un de leurs bons clients, ce qui avait déjà débuté en raison de la crise ukrainienne, tandis que les banques et les entreprises plus particulièrement exposées à la Russie vont en subir le contrecoup, ce qui s’est ressenti en Bourse. Certes, ce ne sera pas la fin du monde, mais cela confirme qu’il ne faut pas attendre de relance du commerce extérieur avec les pays émergents : l’un après l’autre, les pays du BRIC n’offrent plus les mêmes débouchés qu’avant. De quoi inciter la Fed a encore plus de prudence dans le relèvement de son taux directeur, dont l’une des conséquences prévisibles sera de favoriser la sortie des capitaux des pays émergents et de peser encore sur leur développement économique.

Si l’évasion des capitaux a joué un grand rôle dans la crise russe, la chute du prix du pétrole y a également contribué. Elle a pour origine la volonté des majors du Cartel de peser sur la rentabilité des gisements de gaz de schiste américains concurrents en restreignant leur production. Le chacun pour soi se développe, n’augurant rien de bon dans une économie mondialisée et sans retour en arrière possible. La Russie va en faire l’expérience, coupée des marchés financiers et voyant ses recettes budgétaires s’évanouir, devant compter sur ses propres forces pour suppléer à des importations dont elle n’a plus les moyens.

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