Le vrai débat sur la monnaie : un second point

Ce texte est un « article presslib’ » (*)

Dans le livre de John Kenneth Galbraith, L’argent (1975), il écrit :

Dans les entretiens télévisés, l’hôte, réputé pour ses questions incisives, a l’habitude de faire débuter l’entretien avec l’économiste invité en lui posant celle-ci : « Dites-moi, après tout, la monnaie, c’est quoi ? » Les réponses sont immanquablement incohérentes.

C’est pour cela que je ne pense pas qu’il suffise de lire ce qui en est dit dans les manuels à l’intention des enfants des écoles (même de terminale !). Dans La transmission des savoirs (1984), nous nous étions, Geneviève Delbos et moi, intéressés à la forme particulière d’aplatissement que subit le savoir en vue d’être transmis sous sa forme scolaire. Ce qui disparaît en particulier, c’est le raisonnement, c’est–à–dire l’articulation des propositions en un discours théorique. Le raisonnement est remplacé par un ensemble de phrases isolées – de préférence courtes – qui puissent être mémorisées et régurgitées en situation d’examen.

Les citations que certains réclament – de préférence en provenance d’un Prix Nobel – comme substituts d’un raisonnement, procèdent de la même anesthésie de la pensée. Ce n’est pas comme ça, vous l’avez compris, que je fonctionne.

La question de la monnaie est complexe et ce n’est pas parce que celle-ci a été inventée par des hommes que la complexité de son fonctionnement actuel ne dépasse pas son entendement présent. Certains de vous invoquent un consensus qui existerait à ce sujet, ce n’est pas le cas : les théories sont en grand nombre et, je l’ai déjà signalé, intentionnellement incomplètes, les auteurs qui s’y sont aventurés jugeant que seules des simplifications drastiques leur permettraient de faire quelque progrès.

Je ne sais pas si la monnaie réclame un Galilée, rien de ce que j’ai lu jusqu’ici ne me dissuade en tout cas de le penser.

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

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347 réponses à “Le vrai débat sur la monnaie : un second point”

  1. Avatar de Shiva
    Shiva

    @François Leclerc

    Effectivement on voit les courbes plonger vers zéro, ce mois de décembre qui n’apparait pas encore est sans doute celui du franchissement de la barre fatidique de l’étranglement du crédit dans la zone Euro (je crois que l’Espagne y est pour quelque chose). Pour la France la croissance du crédit fin octobre se situe entre 8 et 10% et semble plutôt en augmentation (le crédit immobilier étant faible par manque de demande). Si ces chiffres sont falsifiés, c’est gravissime, surtout en cette période.
    J’ai lu un rapport sur le résultat des commissions départementales, qui réunissent la banque de France, les banques commerciales, les entreprises demandeuses de crédit, il indiquait que seule 10% des demandes correspondaient à des problèmes conjoncturels, mais que la majorité trouvaient des réponses de crédit satisfaisantes (je ne sais plus ou et je ne l’ai pas enregistré…).

    Mon précédent post avait des allures par trop optimiste, l’embellie n’étant pas encore en vue loin s’en faut…

  2. Avatar de Shiva
    Shiva

    @Paul Jorion

    Idem pour les dépôts, une entrée de liquide et une dette….

  3. Avatar de Bru
    Bru

    @M. Jorion

    et le fait est que l’entreprise a une camionnette pour une valeur de 10Ke, quelle peut exploiter, revendre, ou même spéculer sur la valeur future pour les collectionneurs d’une magnifique 407 diesel version fourgonnette verte.

    Ou voulez vous en venir ? j’ai du mal a suivre en quoi cette histoire de camionnette remet en cause la démonstration de Etienne.

    Quand vous faites un chèque ou une carte bleu, le plus basique des réalismes tend a constater que vous avez payer un achat.

  4. Avatar de Paul Jorion

    @ Etienne Chouard et Bru

    1. Définition : la monnaie scripturale est la somme des soldes créditeurs des dépôts à vue

    Comme le mécanisme des réserves fractionnaires permet effectivement que la même somme se retrouve sur plusieurs comptes, (la première fois comme 100 €, la seconde comme 90 €, la troisième fois comme 81€, … etc.) il s’agit – comme je l’ai dit et redit – d’un double compte, d’un triple compte, …, etc. de la même somme (… à condition bien sûr que l’on emprunte de l’argent pour le laisser dormir sur un compte à vue … et payer des intérêts pour ce privilège). Cela n’enlève rien au fait que si tous se présentent au même moment pour retirer l’argent sur leur compte la banque ne dispose que des 100€ initiaux. Elle criera alors à la « panique bancaire » et ce qu’elle exprimera par là, c’est que « Zut, la réalité comptable n’est pas la réalité ! » Les paniques bancaires ne sont pas des fléaux tombés du ciel, c’est la punition de ceux qui prennent la réalité comptable pour la réalité [économique], c’est–à–dire des vessies pour des lanternes.

  5. Avatar de Bru
    Bru

    @Paul Jorion,

    Effectivement, si tous les déposant veulent retirer leur argent ou veulent exercer leur droit a l’achat avec cette monnaie le système explose je vous l’accorde.
    Mais accordez moi, que même s’il n’existait aucune banque que tous les épargnants du monde gardant leur économies dans un bas de laine exerce leur droit a acheter un bien avec ces dites économie le système explose également.

    Dans un cas comme dans l’autre ce sont des monnaies qui ne peuvent être exercées en totalité au même moment. Cependant, les deux sont des monnaies car les 2 sont utilisées comme moyen de paiement.

  6. Avatar de Étienne Chouard

    Bonsoir.

    @ Archimondain, qui me dit :

    [Vos trois points] démontrent effectivement une création monétaire. Mais vous oubliez une hypothèse. Si vous pouvez en plus affirmer que tous les clients peuvent retirer l’argent de leurs DAV, je serais convaincu. Mais pour le moment, il me semble que ce n’est pas possible sans mettre la banque en faillite. De l’argent qui ne peut être utilisé (et qui n’est donc plus un moyen de paiement pour un certain temps : le temps de remboursement des crédits correspondants) n’est donc pas vraiment de l’argent.

    Mais voyons, vous faites comme si seule la monnaie fiduciaire permettait de régler les échanges ! Mais à l’évidence, il n’en est rien : l’immense majorité, non, la presque totalité des échanges se règlent (ça veut dire ‘sont soldés’ et qu’on n’aura pas à y revenir) avec de la monnaie scripturale (totalement dématérialisée) sans aucun mouvement de monnaie manuelle.

    En montant en épingle la possibilité toute théorique (parce que sans mobile) d’une demande générale de conversion de la monnaie scripturale en monnaie manuelle, vous inventez une faiblesse qui n’existe pas puisque les deux types de monnaie sont strictement équivalents et convertibles sans délai, ni coût, ni risque.

    Vous dites : « Si vous pouvez en plus affirmer que tous les clients peuvent retirer l’argent de leurs DAV, je serai convaincu. »

    Mais pourquoi diable faudrait-il qu’ils le puissent, puisque la monnaie ne sert pas à ça ? LA MONNAIE SCRIPTURALE NE SERT PAS À ÊTRE CONVERTIE EN MONNAIE MANUELLE, ELLE NE SERT PAS À ÊTRE RETIRÉE : ELLE SERT À SOLDER LES COMPTES ENTRE UN DÉBITEUR ET UN CRÉANCIER. Et elle convient très bien pour jouer ce rôle sous sa forme dématérialisée (scripturale).

    La réalité économique (et comptable), c’est que la monnaie scripturale, toute dématérialisée qu’elle est, convient très bien à solder les échanges entre humains, sans AUCUN mouvement de monnaie manuelle : c’est donc indubitablement de la monnaie.

    Quant à votre deuxième paragraphe :

    Si en revanche, l’argent qui sert de ‘garantie’ lors de l’octroi d’un crédit peut tout de même être dépensé alors que le crédit n’est pas remboursé, je suis d’accord pour dire qu’il y a création. Mais cela ne me semble pas être le cas. Donc, en tant que réalité comptable, création peut-être. En tant que moyen de paiement, je ne suis toujours pas convaincu.

    … L’argent qui sert de garantie au prêt… Vous parlez des réserves ? Évidemment qu’on peut le dépenser avant que le prêt ne soit remboursé… C’est presque sans rapport.

    Les réserves sont une contrainte qui ne ‘constituent’ pas le processus création monétaire (une partie du malentendu vient sans doute de cette confusion, comme si la monnaie pouvait être créée ‘en application’ des règles des réserves) : ces réserves ne font que (tenter de) l’encadrer : les réserves ne s’appliquent pas à tel ou tel crédit nommément, mais c’est plutôt l’ensemble des encours qui doit être couvert par une proportion de monnaie banque centrale. Mais les banques n’attendent pas d’avoir les réserves pour prêter, l’ordre est même précisément l’inverse (et ça compte pour comprendre) : d’abord on prête, puis on compense avec les concurrents, et puis si on en a besoin, on réapprovisionne en monnaie banque centrale… Mais il est déraisonnable de penser que les sommes qui sont prêtées sont les mêmes que celles qui étaient préalablement déposées, cela ne correspond pas à la réalité.
    ___________________

    @ Nadine qui dit :

    Ce n’est pas parce qu’aucun autre DAV baisse qu’il y a création monétaire.

    La banque joue sur le fait que personne n’ira retirer son argent. Elle prête de l’argent qu’elle n’a pas. Le système bancaire est une banque virtuelle où personne ne vient retirer son argent, c’est aussi simple que cela. Aucune création monétaire n’intervient car ce n’est pas nécessaire et c’est contre-productif.

    Nadine, en plus de mon explication ci-dessus (à Archimondain), je voudrais vous poser une vraie question :

    Pour vous, qu’est que la monnaie, qu’est-ce que l’argent ?
    _______________________

    @ Paul qui me dit : La « réalité comptable » n’est pas une réalité.

    Cette affirmation est sidérante.

    Votre exemple de la comptabilisation d’un achat de voiture montre justement le contraire : l’écriture que vous prenez comme « exemple de fiction comptable » montre pourtant parfaitement la réalité économique d’un achat d’immobilisation : au prix d’une sortie de monnaie d’un compte de trésorerie (actif très liquide, en bas du bilan), j’ai augmenté ma fortune immobilisée (un autre actif est apparu au bilan, plus haut, moins liquide).

    Un compte de bilan s’est vidé, un autre s’est rempli, je ne me suis pas appauvri.

    Aucune stylisation, aucune fiction là-dedans.

    Au contraire, la comptabilité cherche (au moins tant que les financiers ne se mettent pas à en trafiquer les règles pour travestir la vérité) à traduire le plus fidèlement possible la réalité économique de l’entreprise. Et la partie double est une trouvaille extrêmement rigoureuse.

    Et quand vous dites « La « création monétaire ex nihilo » est un artefact (une fiction) qui permet de maintenir cette égalité comptable entre le crédit et le débit », on dirait que vous n’avez compris ni à quoi sert la comptabilité, ni comment elle fonctionne, ni ce qu’est la monnaie scripturale (une dette de banque envers un client, un chiffre sur un compte, librement transmissible). La fiction dont vous parlez a une réalité bien tangible, pas fictive du tout, dans la plupart des échanges sur terre. Moi, je parlerais plutôt de convention.

    Dans un autre commentaire, vous dites : « Cela n’enlève rien au fait que si tous se présentent au même moment pour retirer l’argent sur leur compte la banque ne dispose que des 100 € initiaux. »

    C’est encore la fausse faiblesse dont je parlais plus haut.

    Il faudrait sortir de cette conception enfantine que seuls les billets et les pièces sont « de l’argent » (je retrouve cette conception très réductrice (fétichiste ? mes billets, mes beaux billets…) chez Helmut Creutz, que je continue à lire mais qui commence à me casser les pieds tant il dit de sottises, vraiment ; il faudra qu’on reparle de ce gros livre très contestable). Presque toute la monnaie est désormais dématérialisée et la monnaie scripturale ne sert pas à être convertie en monnaie fiduciaire, au contraire : elle joue son rôle (complètement, de A à Z) dans presque tous les échanges sans le moindre mouvement de monnaie manuelle.

    Cette prétendue faiblesse n’en est donc pas une, la réalité quotidienne le montre.

    Finalement, pour montrer à tout prix que vous ne vous êtes pas trompé pour montrer à tout prix que vous ne vous êtes pas trompé en affirmant il y a onze mois que « les banques commerciales ne créent pas d’argent », « si elle peut vous prêter, c’est soit qu’elle utilise l’argent de quelqu’un d’autre, (…) soit qu’elle emprunte elle–même cet argent », vous allez être conduit à nier toutes sortes d’évidences, au risque, peut-être, de dégrader votre crédibilité.

    C’est dommage, parce qu’il n’est nullement infamant de se tromper.

    Mais bon, je reste prêt à accepter que c’est moi qui me trompe, évidemment, mais pas sans une vraie démonstration.

    Je reste surtout sur cette forte impression de MALENTENDU, car j’ai souvent l’impression que vous nous dites que cette monnaie de banque, monnaie-crédit, monnaie-dette, n’est carrément PAS DE LA MONNAIE, tant elle est mal fondée, fragile, illusoire, fictive, alors que je dis, moi, que la monnaie scripturale est largement (pour la part de monnaie-crédit) DE LA FAUSSE MONNAIE parce que ses créateurs ont usurpé une légitimité (et un revenu sans travail) qui ne peut être que publique.

    C’est incroyable qu’on n’arrive pas à rapprocher ces deux points de vue.

    Amicalement.

    Étienne.

    ________________

    PS : dans votre billet, vous citez le JK Galbraith qui dit : « Dans les entretiens télévisés, l’hôte, réputé pour ses questions incisives, a l’habitude de faire débuter l’entretien avec l’économiste invité en lui posant celle-ci : « Dites-moi, après tout, la monnaie, c’est quoi ? » Les réponses sont immanquablement incohérentes. »

    Vous parlez ensuite d’aplatissement du savoir à des fins pédagogiques, et d’anesthésie de la pensée par les citations courtes comme substitut à un raisonnement… Tout cela n’est pas très gentil. Mais on vous a vu vous-même citer de grands auteurs en cas de besoin, et on vous a vu aussi simplifier votre pensée pour être plus… pédagogique… et personne ne songera à vous le reprocher, naturellement.

    Vous dites ensuite que la question de la monnaie est complexe…

    Il me semble que vous avez oublié de signaler d’autres passages du même Galbraith, dans le même livre (merveilleux d’intelligence, d’érudition et d’humour) « L’argent » :

    [C’est moi qui souligne. ÉC]

    « La plupart des discussions sur la monnaie s’enferment dans une épaisse gangue d’incantation et de prêchi-prêcha. Souvent de propos délibéré. Ceux qui parlent d’argent ou en font le sujet de leur enseignement et donc leur gagne-pain tirent prestige, estime et avantages pécuniaires, comme les médecins ou les sorciers, de la croyance soigneusement cultivée qu’ils entretiennent une association privilégiée avec l’occulte – qu’ils ont des perspectives sur un domaine totalement inaccessible aux gens ordinaires. Source de satisfaction professionnelle et, à l’occasion, de profit personnel, cette attitude n’en constitue pas moins elle aussi une escroquerie bien connue. Il n’est rien, s’agissant de l’argent, qu’une personne dotée d’une curiosité, d’un zèle et d’une intelligence raisonnable ne puisse comprendre. Et quelles que soient les erreurs d’interprétation ou de fait que la présente histoire puisse contenir, il n’en est aucune, le lecteur peut s’en persuader, qui procède d’une simplification outrancière. L’étude de la monnaie est, par excellence, le domaine de l’économie dans lequel la complexité est utilisée pour déguiser la vérité et non pour la révéler. La plupart des choses de la vie – automobiles, maîtresses, cancer – comptent surtout pour ceux qui les ont. L’argent au contraire est aussi important pour ceux qui en ont que pour ceux qui n’en ont pas. C’est pourquoi les uns comme les autres ont intérêt à le comprendre. Et les uns comme les autres devraient savoir que cette compréhension est parfaitement à leur portée.

    À cet égard, on ne manquera pas de demander si un ouvrage consacré à l’histoire de l’argent ne devrait pas commencer par une quelconque définition de ce qu’est en réalité l’argent. Cette bande de papier de valeur intrinsèque nulle, qu’est-ce donc qui la rend utile à l’échange tout en laissant telle autre bande de dimension et de couleur semblables parfaitement sans valeur ? Les précédents de ce genre de tentative ne sont guère encourageants. A la télévision, les journalistes réputés pour leur sagacité ouvrent immanquablement les interviews d’économistes par cette question : « Bon, eh bien, dites-moi – c’est quoi au juste, l’argent ? » Immanquablement, les réponses sont incohérentes. Quant aux professeurs chargés d’enseigner les premiers rudiments d’Économie, qu’il s’agisse de la monnaie ou de la banque, ils commencent par donner des définitions d’une remarquable subtilité. Lesquelles sont soigneusement transcrites, apprises à grand-peine et heureusement oubliées.

    Le lecteur devrait s’attaquer aux pages qui vont suivre en sachant bien que l’argent n’est rien de plus ou de moins que ce qu’il a toujours cru – ce que l’on offre ou reçoit pour l’achat ou la vente de biens, services et autres. Les différentes formes de monnaie, comme ce qui détermine ce qu’elles achètent, voilà qui est encore autre chose. Mais c’est précisément ce que les pages suivantes se proposent de révéler. (…) »

    Source : « L’argent », John Kenneth Galbraith, Folio Histoire, p18 et s.

    .

    « Les banques de Venise (1) et de Gênes furent les précurseurs reconnus des banques commerciales de notre vie quotidienne moderne. Celles de la plaine du Pô étaient à peine moins avancées et lorsque le prêt d’argent s’institutionnalisa à Londres, il s’installa tout naturellement dans Lombard Street.

    Le processus par lequel les banques créent de l’argent est si simple que l’esprit en demeure confondu. Quand il s’agit de choses aussi importantes, on est en droit de s’attendre à un mystère plus profond. Les dépôts de la Banque d’Amsterdam dont on vient de parler pouvaient, sur instruction de leur propriétaire, être transférés à d’autres pour régler des comptes. (Un service qui avait longtemps été rendu par les précurseurs privés de la banque.)

    Les pièces déposées ne servaient pas moins d’argent par le simple fait d’être enfermées dans une banque et susceptibles de transfert sous le seul effet d’un trait de plume.
    Il était inévitable que l’on découvre – comme le firent les échevins conservateurs d’Amsterdam en se penchant avec un intérêt coupable sur leurs propres besoins en tant que directeurs de la Compagnie des Indes orientales – qu’un autre trait de plume permettrait à un débiteur de la banque, et non plus à un créditeur du titulaire du dépôt, de recevoir un prêt sur ce dépôt inemployé. Et bien sûr, c’était la banque qui percevrait des intérêts sur le prêt ainsi consenti ! On pouvait prévenir les auteurs de dépôts que ces derniers étaient susceptibles d’une telle utilisation – peut-être même les payer pour cela. Le dépôt original restait au crédit de son auteur. Mais il existait désormais un nouveau dépôt constitué par le prêt. Les deux dépôts pouvaient être utilisés pour effectuer des paiements, comme de l’argent. De l’argent avait donc bien été créé. La découverte de cette capacité des banques à ainsi créer de l’argent se produisit très tôt dans l’histoire de la banque. C’est qu’il existait cet intérêt à gagner sur les prêts. Avec ce genre de stimulant, les hommes ont un naturel instinct de novateur.

    Il existait une autre possibilité faisant appel à des billets de banque et qui serait un jour merveilleusement exploitée par la future république américaine. L’emprunteur recevait non plus un dépôt, mais un billet rachetable dans les espèces qui avaient été placées à la banque comme capital ou comme dépôt sédentaire. Avec ce billet, l’emprunteur pouvait effectuer ses paiements ; le bénéficiaire d’un tel paiement, plutôt que de changer son billet pour de l’argent liquide, pouvait fort bien l’utiliser pour ses propres paiements, et ainsi de suite à l’infini. Entre-temps, la banque continuait de recevoir des intérêts sur le prêt original. Un jour, peut-être, le billet reviendrait à la banque pour être échangé contre du liquide. Mais alors l’emprunteur aurait déjà remboursé son emprunt, en liquide lui aussi. Tout serait pour le mieux, et l’on aurait gagné un intérêt. Il y avait aussi une chance pour que le billet continue de passer de main en main sans jamais être reconverti. Le prêt qui avait conduit à son émission produirait des intérêts puis serait remboursé. Le billet continuerait sa ronde. Personne ne viendrait jamais réclamer les liquidités originales qui avaient permis le prêt original. Dans les années 1960, M. George Bail, diplomate, politicien et avocat, chéri du succès, quitta le service public pour s’associer aux Lehman Brothers, la grande firme de Wall Street. « Pourquoi diable, l’entendit-on demander un peu plus tard, est-ce que personne ne m’avait parlé plus tôt de la banque? »

    Écrivant au milieu du siècle dernier, John Stuart Mill réglait en quelques phrases la question des facteurs déterminant la valeur de la monnaie – ce qu’elle achète :

    La valeur ou puissance d’acquisition de la monnaie dépend, en premier lieu, de l’offre et de la demande… L’offre de la monnaie, en un mot, est la totalité de la monnaie en circulation au moment dont on parle… La demande de monnaie se compose, au contraire, de toutes les marchandises mises en vente (2).

    L’explication était parfaite pour l’époque. Et elle dit aussi ce que les banques peuvent faire à la monnaie. Sur un dépôt original en liquide, on pouvait consentir des prêts. Il en résultait de nouveaux dépôts ou de nouveaux billets utilisables comme de l’argent. L’offre de biens restant inchangée, les prix augmenteraient et la monnaie perdrait de sa valeur. Pour peu que les banques se montrent âpres au gain, se livrent une concurrence acharnée, voire les deux, et pour peu que les emprunteurs se montrent suffisamment euphoriques, l’expansion des prêts producteurs d’intérêts serait importante, dépôts ou billets se multiplieraient. Il en résulterait une augmentation des prix ou une diminution de la valeur ou pouvoir d’achat de la monnaie.

    La hausse des prix était un inconvénient pour le public ou, en tout cas, pour ceux qui payaient au lieu de recevoir. Et pour les banques aussi, il y avait un hic. C’était la possibilité que l’ensemble des auteurs de dépôts et des détenteurs de billets se présentent plus ou moins simultanément pour retirer leur argent. L’auteur original du dépôt pouvait rentrer dans ses fonds, puisque le dépôt était toujours à la banque. Sinon, on pouvait le remettre à celui qui l’avait emprunté. Mais aux deux à la fois, rien à faire. Cette merveilleuse capacité des banques – le miracle de la multiplication des dépôts – était suspendue à un fil. Il fallait que les auteurs de dépôts ou les détenteurs de billets ne viennent qu’en petit nombre réclamer les liquidités que la banque s’engageait à payer. S’ils venaient tous ensemble, la banque ne pouvait pas payer. Et dès que l’idée que la banque ne pouvait pas payer se répandait, tous venaient, précisément, et souvent à la hâte. Quand cela se produisait, les dépôts ou les billets qui avaient jusqu’alors servi d’argent cessaient de servir. Dépôts et billets des premiers venus seraient transformés en argent liquide mais pour les retardataires, il ne resterait rien. Il ne leur restait plus que les bouts de papier sans valeur d’une banque désormais faillie. Cela avait cessé d’être de l’argent. Au miracle primitif de la création d’argent répondait alors le désespoir de son aussi soudaine disparition.

    Comme il y avait désormais moins d’argent pour acheter, les prix baissaient. Leur baisse pouvait être rapide et ruineuse tant pour ceux qui avaient des marchandises à vendre que pour ceux qui avaient des dettes à rembourser. C’était la dépression, la panique, la contrepartie naturelle de l’euphorie antérieure. Et là encore, c’était une chose assez simple.

    Avec le développement de la banque, à compter du XVIIe siècle, et l’aide d’un certain nombre d’autres circonstances, ces cycles d’euphorie et de panique se multiplièrent. Leur amplitude en vint à correspondre à peu près avec le temps qu’il fallait aux gens pour oublier le désastre précédent – le temps que les génies financiers d’une génération mourussent dans la honte et fussent remplacés par de nouveaux hommes de l’art que gogos et gobe-mouches pouvaient croire aussi doués, mais vraiment, cette fois, que Midas.

    Ces cycles d’euphorie et de panique se sont étalés sur deux cent soixante-dix ans, de John Law jusqu’aux prestidigitateurs des caisses d’épargne américaines. Puisque John Law a montré, peut-être mieux que personne après lui, ce qu’une banque peut faire avec la monnaie et à la monnaie, il mérite que l’on s’arrête un peu sur son cas. (…) »

    __________
    Notes :

    1. Charles Dunbar a fait œuvre de pionnier avec une étude excessivement intéressante des opérations originales : « The Bank of Venice », The Quartely Journal of Economies, vol. VI, n° 3 (avril 1892). Aux XIIIe, XIVe et XVe siècles, plus d’une centaine de banques de dépôt virent le jour à Venise. Une proportion importante connut des faillites plus ou moins fracassantes. Le Sénat déploya de grands efforts pour tenter de régler leurs opérations, allant jusqu’à décider de leurs heures d’ouverture et à contraindre les caissiers à compter les espèces sous les yeux des clients. Les résultats furent bien décevants. Au XVIe siècle, un certain Tommaso Contarini, membre du Sénat, adressa à ses pairs un discours dans lequel il résumait les difficultés rencontrées. Dans la paraphrase qu’en a donnée Dunbar, il faisait remarquer qu’un banquier avait toujours « la possibilité de rendre service à ses amis en l’absence de tout paiement par la simple rédaction d’un petit bout de papier faisant état d’un dépôt. S’il convoite de beaux meubles ou des joyaux fins, il peut satisfaire ses propres désirs d’un simple trait de plume dans son livre de crédit, tout comme il peut acheter des biens immeubles et richement doter ses enfants sans bourse délier » (p. 316). Voir aussi Frédéric Lane, « Venetian Bankers, 1496-1533 : A Study in the Early Stages of Deposit Banking », The Journal of Political Economy, vol. XLV, n° 2 (avril 1937), p. 187 sq.

    2. John Stuart Mill, Principes d’Économie politique, liv. III, chap. vin, § 2, Paris, 1861, t. II, p. 10-11.

    Source : « L’argent », John Kenneth Galbraith, Folio Histoire, p38 et s.

    Si Galbraith n’existait pas, il faudrait l’inventer. Tous ses livres sont passionnants.

    Et je gage que le citer ne nous dispensera pas de raisonner 😉

  7. Avatar de Paul Jorion

    @ Etienne Chouard

    Extrait du texte Comprendre la Banque (Association Belge des Banques), mentionné par Gérard P. dans un commentaire. Il n’y a rien de plus : pas de mystère, pas de miracle. « Scriptural » décrit le support : une écriture, plutôt qu’un billet de banque, qu’une pièce en or ou en argent. Mais ce support est entièrement indifférent : il est purement anecdotique, sans influence aucune sur le mécanisme.

    C’est ma dernière intervention sur ce sujet, ma crédibilité va bien, merci, et je passe à autre chose.

    4.1. Comment se fait la création de monnaie par les banques ?

    Par l’octroi de crédit et la récolte de dépôts à vue, les banques participent au processus de création de monnaie : elles créent la monnaie scripturale. C’est en faisant du crédit que les banques créent de la monnaie. La banque centrale prête aux banques commerciales, en fonction notamment de la demande de billets, et celles-ci prêtent à leur clientèle. Cette clientèle redépose en banques une partie de l’argent emprunté, dépôts qui peuvent être utilisés pour de nouveaux crédits. Cet effet multiplicateur est à la base de la création de monnaie par les banques. Le rapport entre la masse monétaire finale et la masse monétaire initiale est appelé multiplicateur monétaire .

    Lorsque les banques reçoivent des dépôts de leurs clients, elles doivent cependant être en mesure de faire face à leurs demandes de retraits. La loi des grands nombres leur permet de constater qu’une partie importante des dépôts reçus reste inutilisée. De ce fait, elles peuvent accorder des crédits, tout en conservant de quoi faire face aux retraits de leur clientèle. Ce qu’elles gardent à cette fin est appelé « coefficient de réserve ».

  8. Avatar de barbe-toute-bleue
    barbe-toute-bleue

    Ça chauffe, non ?

    Je ne me permettrais pas d’écrire une ligne dans ce débat de spécialistes, tant il y a de références en littérature économique à apporter, pour pouvoir répondre aux uns ou aux autres.

    Par contre, on peut se permettre une digression, histoire de reprendre à la base ce besoin d’avoir recours à la monnaie.

    Si j’comprends pas trop en travers :

    -La monnaie est un consentement « universel », limites que vous voudrez pour cet univers, utilisé pour faciliter les échanges de valeurs… que vous voudrez. Je ne vais pas pinailler sur le terme « valeur » avec vous, comme je le fais avec ma femme chaque fois qu’elle me dit : « quand est-ce que tu m’achètes un diamant ? »

    -L’émission centralisée de monnaie est la meilleur façon de contrôler les tentations de fraude au système. Parle t-on de faux monnayage ?

    -Un organisme centrale ayant la responsabilité du contrôle de l’émission de monnaie, se trouve dans une situation de tentation extrême : tentation d’abuser de ce pouvoir ??

    -Tout organisme central a la tentation de renforcer et d’abuser de son pouvoir. Tout pouvoir?!! Je souligne le point, car, au pays des fées, j’ai entendu qu’on aimait bien évoquer « un gouvernement mondial » futur. Houps !

    -La limite que je comprends à tout pouvoir, est l’existence de contre-pouvoirs impossible à contrôler : diversifiés, et renouvelés.

    Grâce à vous tous, c’est ce que j’ai compris. Pour les détails, je me contente de me prendre la tête dans les mains et de pleurer.

    Venons-en à la masse monétaire.
    Elle doit représenter l’ensemble des richesses exploitables et exploitées, qui tournent dans notre monde. Et j’en reviens à la notion de richesse, en vous évitant les débats que je pourrais encore avoir avec mon épouse à ce sujet.

    J’ai cru comprendre que la monnaie devait être adossée à quelque chose ??? Si c’est la richesse, avant de parler de monnaie, il faut définir la richesse. Pardon, je n’ai pas pris la peines de lire les quelques tonnes de livres cités sur ce blog avant de m’exprimer, mais il y a bien un économiste qui a dû se donner la peine de le faire… à moins que la spécialisation scolaire l’ai plutôt envoyé regarder ailleurs.

    La « richesse » est simplement la quantité d’énergie dont on peut disposer, individuellement, ou en commun. Y-a jamais personne qui percute quand j’avance ceci. Pourtant c’est pas pour faire le malin, c’est parce qu’il me semble qu’il s’agit de la base de la base. Mais je suis un être un peu benêt, ceci doit expliquer cela.

    Comme je dois arriver de la planète Mars, pour tomber sur cet endroit où on a l’habitude de traiter économie entre gens sérieux, je développe :
    Energie accumulée, énergie instantanée, énergie potentielle, qu’ai-je oublié ?

    -Energie accumulée, dont la valeur décroit dés que ce qu’elle a aidé à produire est produit, sans être entretenu. Vous pouvez réparer, alors que l’érosion est dégradante. Ce sont deux sources d’énergies qui vont se compenser. S’annihiler.
    Comme nous sommes en pleines digression, j’en rajoute une couche constituée d’exemples, Marx me pardonnera ma simplicité d’esprit. Tout ce qui a été construit de la main de l’homme en fait partie. Tous les hydrocarbures, puisqu’il s’agit de chaines carbonées accumulées dans le temps par photosynthèse. Actuellement le temps pour casser ces chaines carbonées et profiter de l’énergie libérée, et beaucoup plus court que celui qu’il a fallu pour les constituer… ce qui pose un problème qu’on évoque à droite et à gauche, par les temps qui courent.
    Energie accumulée, c’est aussi toutes structures atomiques un peu complexe à synthétiser par l’homme, c’est à dire toute la table de Mendeleiev, au dessus de l’hydrogène, l’hydrogène ayant été facile à mettre en place si on se contente d’être spectateur. En réalité, la monnaie et un jeu d’enfant à côté, mais on va pas aller en discuter avec Dieu lui-même.
    On devrait se contenter de considérer la valeur d’un élément qu’à compter du moment où on l’a extirpé du trou de la mine, sinon, sans ce compte là, la terre entière est une richesse ( ah tiens ?! ), et si on devait facturer au contribuable l’énergie dont on a besoin pour faire fonctionner le bouclier magnétique ayant permis à presque toutes les vies de se développer sur terre, vous faites péter la banque mondiale avant qu’elle entre en action.
    Donc, on est obligé de considérer, dans une économie, qu’il y a des choses gratuites … ou devrait-on dire des richesses en commun ? Y compris avec d’autres espèces, êtres monocellulaires compris ?

    -Energie instantanée, qui fait que les hommes puissants disposent de l’énergie instantanée physique et intellectuelle de beaucoup. La spéculation sous toutes ses formes doit aussi faire partie de cette énergie, à la puissance pouvant être aussi soudaine, rapide que concentrée.
    Faut-il que j’illustre ce qu’est plus précisément l’énergie instantanée. Elle est sûrement la plus incontrôlable, quoiqu’on puisse la canaliser parfois… si il ne s’agit pas de la prochaine grosse météorite qui va venir nous estramasser (dialecte estranger ). Dommage !! Ce aurait fait de celui qui va se la ramasser sur la trogne, un homme particulièrement riche sinon.
    Et puis je vous laisse trouver vous-même tous les autres types d’énergies instantanées, si vous en trouvez une bien sympa, faites en profiter les autres, dans la mesure où il ne s’agit pas d’une autre paires de beignes, mais ils s’en distribue peu sur ce blog civilisé, ouf.

    -L’énergie potentielle, enfin, de loin la plus importante, puisqu’elle va permettre de disposer de tout ce que la physique va offrir d’aller chercher et d’organiser. Il y a aussi votre maison future, qui sera moins grosse que celle que vous imaginiez avant la crise.
    Pour aller chercher tout ça, vous avez l’investissement, dont une part de crédit, mais ce n’est pas l’argent le fondamentale. Il y a peu, j’entendais souvent : on ne peut créer de la croissance qu’avec du crédit. Ouais, pragmatiquement, c’est un ingrédient non négligeable, mais il n’a rien d’absolu. Il donne du pouvoir à ceux pouvant centraliser le moyen de le distribuer. Je crois que j’avais commencé ces lignes en parlant de danger des concentrations justement.

    Et maintenant, après les élucubrations théoriques, la cerise sur le gâteau, et je vous jure que ce n’est pas exprès pour emmerder les monétaristes :

    Si la richesse pouvait être évaluée par rapport à son niveau d’énergie totale à un instant donné, son unité de mesure deviendrait le Joules, et je veux savoir comment les financiers vont faire pour en assurer la redistribution dans la société. Houps encore, je m’étrangle. Mais ça doit être possible !

  9. Avatar de Sophie
    Sophie

    L’extrait donné par M. Jorion voit dans son titre même l’affirmation de la création de monnaie par les banques ( « 4.1. Comment se fait la création de monnaie par les banques ? « )

  10. Avatar de Fab
    Fab

    Bon, personne n’a rendu de copie (http://www.pauljorion.com/blog/?p=1440#comment-13792) ! C’est pas bien ! Le seul qui se rapproche un peu du sujet c’est barbe-toute-bleue. Tous les autres sont ou hors-sujet ou vraiment en retard dans leur réflexion ou alors ils font exprès de ne pas avancer pour que la bête puisse se relever…
    Certains ont parlé de l’école, de la façon dont le savoir est partagé, etc. Ils oublient de préciser que c’est la perception du sens de la vie de chacun qui est modelée à l’école…y compris la leur. A tel point qu’ils deviennent des « êtres spécialisés indispensables au bon fonctionnement de la société ».
    Mais c’est ainsi : chacun est persuadé (moi y compris…) que c’est lui qui vit dans la vraie vie ! Quelle que soit la « drogue » ! A chacun sa petite pilule du bonheur ! A chacun son os à ronger ! Bref chacun a sa religion, et rien ne pourra le faire changer d’avis…sauf peut-être une météorite sur la tête, ou une pomme !

    Et pendant ce temps-là…exemple du jour, il y en a qui continuent à s’envoyer des obus sur la tête alors qu’il est communément admis que nous descendons tous du même arbre…Comme quoi c’est pas toujours une pilule du bonheur que de s’accrocher à sa religion sans tenir compte de celle des autres.

  11. Avatar de Bru
    Bru

    @Paul Jorion

    Même dans votre dernier extrait, les auteurs appellent un chat ce que vous vous acharnez a vouloir appeler une souris.

    Que vous vous sentiez crédible tout seul je veux bien le croire, en revanche, je reste persuadé que votre crédibilité pour vos lecteurs a été endommagée, c’est le cas en ce qui me concerne.

  12. Avatar de Archimondain
    Archimondain

    @Étienne Chouard
    Quand je dis que les clients doivent pouvoir retirer l’argent de leurs DAV, je veux dire par tranfert bancaire ou retrait en espèce.
    Si aucun de deux ne peut être effectué, l’argent n’est pas utilisable.

    – En espèce : Il ne semble pas pouvoir l’être
    – Par virement vers une autre banque : certain dirons que c’est possible car l’autre banque vire aussi de l’argent dans l’autre sens, et les flux s’annulent. Je ne suis pas d’accord. La banque échange cet argent contre un autre. Elle ne le fait pas sortir de la banque contre ‘autre chose’. (ici je part du principe que l’achat d’argent instantanné est équivalent à aucun achat du tout : Un billet de 100 contre un billet de 100 ne change rien à rien. Il ne s’est rien passé. Point).
    – Par virement entre deux compte de la même banque : Effectivement, dans ce cas il me semble qu’une personne A utilise une somme ‘bloquée’ pour moyen de paiment à une personne B, que la banque tranfert cette somme du compte A vers le compte B sans que cela ne change rien pour elle. De l’argent ‘bloqué’ à bien pu être utilisé pour payer quelque chose sans aucune autre contrepartie. Là, je suis d’accord pour dire qu’il y a création. En effet, si la banque a 100, elle peut prêter 90 qui peuvent sortir de la banque, et tout de même utiliser les 100 qui ne sont ni retirable en espèce, ni tranferable vers une autre banque, en tant que monnaie interne entre ses client.

    Je serais curieux de connaître le point de vue d’autres anti ex-nihilo sur la question 🙂
    Je serais curieux aussi de savoir si je trouve finalement un terran d’entente avec les pro-ex-nihilo. Etes-vous d’accord avec ces trois points ?

  13. Avatar de Archimondain
    Archimondain

    @Sophie et Bru :
    Voyons voyons…
    Si je vous désigne un chien en disant ceci est un chat. Que croirez-vous ?

    Si je vous dis :
    ‘Ceci n’est pas une phrase ?’
    Qu’en déduisez-vous ?

    Je n’essaye pas de faire preuve de mauvaise foi. Je fuis les incohérences comme la peste. Simplement.
    Levez les incohérence et je deviens très crédule 🙂

  14. Avatar de Bru
    Bru

    J’en croirais et déduirais que vous avez l’esprit tordu.

  15. Avatar de Bru
    Bru

    Pour revenir a la question d’Archimondain et en complément de ce que dit Etienne :

    vous dites « Si vous pouvez en plus affirmer que tous les clients peuvent retirer l’argent de leurs DAV, je serai convaincu. »

    Effectivement les épargnant pourraient retirer leur argent de leur compte, car en cas de « bank run », c’est de cela que nous parlons, les banque centrale émettraient assez de monnaie fiduciaire pour servir tout le monde en échange d’actif des banques commerciale (en l’occurrence des créances). Une fois la panique passée, les médicaments pris, les épargnant re-déposeraient immanquablement leur argent dans des banques qui le rendraient au BC en échange des créances laissaient en garantie.

    Voila comment cela se passerait, et comment cela s’est passé lors de la panique Northern Rock en UK.

    Bien a toi.

  16. Avatar de madar michael

    Bonjour à tous
    L’avantage d’être sans a priori sur un tel sujet permet d’essayer de comprendre les points de vue de chacun.
    Comme je l’ai déja dit, l’explication de la création monétaire ex-nihilo par les banques commerciales qui proposent des crédits et que s’applique à détailler Etienne, je la partage à partir du moment ou sont confondus dans un même mouvement, monnaie fiduciaire(billets bc), monnaie scripturale(dav) et crédit(dette) qui toutes permettent l’acte d’achat.
    Que je trouve 100 euros par terre, que je les gagne par mon travail ou bien que la banque me les prête, dans tous les cas mon pouvoir d’achat existe à hauteur de 100euros.
    La différence, essentielle, que chacun comprend bien, réside dans mon devoir, à terme, de rembourser le prêt que la banque m’a accordé.(plus les intérêts)
    Alors peut on parler de » création monétaire ex nihilo temporaire « par les banques commerciales, avec destruction monétaire lors du remboursement?
    L’illusion de similitude entre l’argent à crédit et l’argent gagné à la sueur de son front explique t elle les divergences de vue entre Paul et Etienne?
    N’abandonnez pas svp cette controverse qui reste, pour bien des visiteurs de ce blog, un formidable moyen de questionner (se réapproprier? )un élément majeur de nos sociétés (la question monétairel) trop longtemps laissée entre les mains( pas toujours propres )des banquiers, des économistes et des hommes politiques.
    mikl

  17. Avatar de Bertrand
    Bertrand

    @Fab à propos de votre remarque dans le fil précédent :

    « 1. Si je travaille j’ai un salaire. Je peux acheter ce dont j’ai besoin. Pourquoi aurais-je besoin d’un banquier [créé ex-nihilo]? Pourquoi suis-je dépendant de ce banquier [parasite] ? Qui est-il pour intervenir dans ma vie ? D’où sort-il ? Comment en sommes-nous arrivés à nous imposer cette contrainte ? »

    Le banquier créé « ex-nihilo » a la fonction suivante :

    Si vous êtes salarié et que vous gagnez 10 euros, vous pourrez l’échanger contre un bien de valeur équivalente. Si par contre vous décidez d’investir ces 10 euros plutôt que de manger un sandwich, vous ne disposerez plus de votre monnaie en poche, mais d’un DROIT d’appropriation sur la capacité de créer une valeur supérieure à 10 euros. Alors arrive le banquier :

    Les 10 euros que vous verserez à un salarié créeront donc une valeur plus élevée, enrichie par le travail d’autrui. Pour réussir cet exploit le banquier consent à vous donner du temps, c’est le DROIT consenti par le capitaliste (l’investisseur) au patron que vous êtes devenu.

    L’intérêt de votre remarque tient alors à la législation produite par/pour le producteur de monnaie : Si vous consentez à investir, vous passez par la banque qui vous en donne le DROIT. Je remarque que dans la vraie vie, un candide qui chercherait un patron de Banque ou d’Institution financière qui ne serait pas lié aux législateurs de près ou de loin (peu importe la couleur en social-démocratie) restera un naïf, mais un idiot utile pour rendre le système pérenne !

  18. Avatar de Julien Alexandre
    Julien Alexandre

    @ux commentateurs « crédibles », je répondrais ceci : les triangles ne sont pas carrés, et les banquiers ne sont pas des imbéciles.

    2 propositions. Pensez-vous que le monde bancaire ait intérêt à planter son drapeau en disant :

    – 1ère proposition : « nous banquiers jouons le simple rôle d’intermédiaire, nous ne créons pas vraiment d’argent, nous prêtons simplement celui des autres en évaluant le risque lié au remboursement et nous nous rémunérons grâce aux intérêts. Non seulement, nous courons un risque systémique d’insolvabilité puisque nos réserves ne peuvent couvrir nos engagements, mais qui plus est, comme tout intermédiaire, nous ne sommes pas vraiment indispensables. N’importe quel organisme pourrait gérer l’allocation des prêts en évaluant les risques, car c’est la seule chose que nous faisons réellement »

    – 2ème proposition : « nous banquiers créons l’argent, la monnaie. Le mécanisme de la création monétaire que nous voulons bien tenter de vous expliquer est très complexe, mais regardez en réalité c’est très simple quand un banquier vous l’explique : vous déposez votre argent, je le multiplie dans certaines limites, et l’économie se porte bien. Et en tant que créateur de monnaie, notre rôle et notre poids économique sont essentiels : si nous disparaissons, il ne se créé plus de monnaie. C’est la fin des haricots. ».

    A votre avis, laquelle de ces propositions est susceptible de doter les banques d’une considérable influence sur la société et les pouvoirs publics? Laquelle permet de contraindre les Banques Centrales indépendantes à « injecter des liquidités » pour que ne s’écroule la tour de verre.

    Dans un autre post sur un sujet précédent, j’ai fait état d’une rencontre avec haut responsable de banque à Bruxelles : il ne dit rien d’autre. J’avais promis à Paul d’en faire un billet structuré et sourcé, malheureusement ma source ne souhaite pas se voir attribuer publiquement (ce qui se comprend) ces propos.

    Je reviens aussi brièvement sur la longue apologie de la comptabilité d’Etienne Chouard.

    Désolé, je vais être expéditif : tant que vous n’accepterez pas le fait établi que les banques prêtent les dépôts, vos interventions sont vaines. Je vous cite :

    En montant en épingle la possibilité toute théorique (parce que sans mobile) d’une demande générale de conversion de la monnaie scripturale en monnaie manuelle, vous inventez une faiblesse qui n’existe pas puisque les deux types de monnaie sont strictement équivalents et convertibles sans délai, ni coût, ni risque.

    Comment comprenez vous dès lors la phrase « l’Etat garantit les dépôts »? En cas de faillite, c’est ça? Mais si la banque a tant de dépôts, comment pourrait-elle faire faillite?

    L’avantage, dans mon cas, quand on a aucune « crédibilité », c’est qu’on ne risque pas de la dégrader 🙂
    Amicalement

  19. Avatar de nadine
    nadine

    @Bru

    Vous dites:
    « Et ces dépréciation les mettent a la limite de leur taux de réserve factionnaire, car la monnaie créé existe toujours mais les dettes qui une fois rembourser devait annuler cette monnaie le sont de moins en moins, remboursées.

    Et aujourd’hui ces dettes pourris sont reprise par les banques centrale en échange de base monaitaire (”vrai argent”) par une opération de “monétisation de la dette” qui ne manquera par de nous amener a minima une phase d’inflation bien salée a terme. »

    On progresse.
    Vous utilisez la theorie de la création monetaire pour expliquer la crise. C’est bien, je crois que c’est ce qu’il faut faire si vous voulez nous convaincre.
    Le probleme c’est que votre explication est completement fausse ! Je m’inquiete pour votre crédibilité…
    Je vous demontre ça plus tard.

  20. Avatar de Sophie
    Sophie

    @Julien Alexandre
     » Mais si la banque a tant de dépôts, comment pourrait-elle faire faillite?  »

    … les dépôts des clients dans une banque sont au passif … c’est une dette pour elle!!!

  21. Avatar de Pierre-Yves D.
    Pierre-Yves D.

    @ Julien Alexandre

    C’est vrai les banquiers en activité s’expriment rarement sur la place publique autrement que par un discours convenu ou carrément incantatoire
    sans doute parce que le discours qu’ils tiennent sur leur profession est un exercice obligé de cette profession étant donnée la nature concurentielle du système — capitaliste — dans lequel ils s’insèrent.

    Votre commentaire est intéressant car il dit avec force qu’il est possible de faire une critique sévère du système bancaire actuel sans passer par une remise en cause de sa technique de base.

    Ne pouvez-vous pas tout de même faire ce billet dont vous parlez, mais en ne citant pas la personne en question ?
    Ce qui est intéressant c’est le raisonnement, le propos qu’a pu vous tenir cette personne et non pas son nom.
    Cette personne ne vous a pas révélé des secrets d’Etat, seulement le fond de sa pensée, je suppose.
    Evidemment une citation en bonne et dûe forme aurait donné encore plus de poids à votre propos. Mais peut-être avez vous pensé ce billet d’abord comme un document, une pièce à apporter au dossier du discours idéologique des banques, de leur sociologie.
    En tous cas, je regrette que vous ayez renoncé à sa publication, j’espère que votre décision n’est pas irrévocable !!

  22. Avatar de Julien Alexandre
    Julien Alexandre

    @ Sophie : démonstration par l’absurde… Note personnelle : rangez le 2d degré, car quand on interprète au 1er degré, le niveau est proche de zéro. Appelons ça la suite arithmétique de l’absurdité.

    Oui, les dépôts sont au passif (avec une exigibilité courte), les prêts à l’actif (avec une exigibilité longue). La banque compense cette 1ère asymétrie par une 2ème asymétrie : les dépôts sont rémunérés (sauf compte courant = ressources gratuites) à un taux d’intérêt inférieur à celui des prêts. Mettons dépôts à 3 % et prêts à 4 % : la marge d’intermédiation de la banque est de 1 %.

    Ces derniers jours, la moyenne des prêts immobiliers est plutôt à 5 %. Le taux directeur ECB est à 2,5% (et baissera jeudi prochain). Le Canard annonçait la semaine dernière l’explosion de la marge d’intermédiation des banques : +400% en 2008 par rapport à 2007.

    Sophie, les banques prêtent-elles les dépôts?

  23. Avatar de 2Casa
    2Casa

    @ Tous

    J’avais posté il y a quelque temps de cela un article de chez Telos (passé d’ailleurs complètement inaperçu) faisant la différence entre crise de liquidités et crise de solvabilité de Cédric Tille.

    A lire.

    Il fait partie des éléments qui m’ont amenés, bien malgré moi et mon intuition initiale (je suis ici à cause de Grignon dont je comprends bien le raisonnement. Trop bien, justement. Et… Habitué à être manipulé par internet j’ai du mal à le gober comme ça. Ce qui me pousse à creuser et essayer modestement de comprendre) à tenter de me représenter l’autre version.

    Telle que je la perçois, au plus simple maintenant, sur les ratios de réserve c’est que certains considèrent les 10, 8, 2% – peu importe – comme ceux « du bas de la pile » (ex-nihilo), les autres comme les 10, 8, 2% – pareil ! – du « haut de la pile » (anti ex-nihilo) ceux que l’on ne peut pas prêter sur la masse de crédit que les actifs de la banque l’autorise à prêter. Ce qui retranche 10, 8, 2% aux 100% autorisés par ces actifs.

    Je ne vois pas comment autrement la dépréciation des actifs à laquelle nous assistons gênerait les banques. Il pourrait ne leur en rester que 10, 8, 2% et basta. Ou on pourrait imprimer (crise de liquidité) autant qu’on veut moyennant le délai pour le faire. (j’espère que vous ne pensez pas sérieusement que M. Jorion est suffisamment stupide pour confondre avec je ne sais quel agrégat représentant billets et pièces !) Mais les banques se retrouvent bien en face d’un autre problème : c’est que la valeur de leurs actifs ne couvre plus l’encours de crédit. D’où la vente de titres non pourris, puisque personne ne veut plus des autres (pas de prix) leur dépréciation et la réaction en chaîne.

    Voilà où j’en suis, pour un non spécialiste qui en est venu par Grignon – je le rappelle et l’indignation causée alors chez moi et la diffusion que j’en ai assurée et… je n’aime pas diffuser quelque chose dont je doute – à s’interroger là-dessus. Je tiens à préciser encore une fois que je n’ai pas la prétention de trancher. Il y a, comme on dit, des experts pour cela. je ne fais que donner mon opinion, l’état de ma réflexion à l’heure actuelle.

    @ Etienne Chouard

    Enchanté, moi aussi. (Comme Maurice Allais, d’ailleurs !)

    Mais vous manquez mon propos et ce, de deux manières :

    1/ En me considérant comme un zélateur servile et révérencieux. Je ne m’étendrais pas là-dessus mais vous renvoie à Schoppenhauer dans « l’art d’avoir toujours raison » (très bo, po cher, 10 balles dans la collection des livres à dix balles, vu que vous aimez les références) où il est clairement montré la puissance de l’argument ad hominem, la dérision et le discrédit servent aussi bien les fins de ceux qui les emploient que la raison dans un débat d’idées.

    2/ Sur l’objectif de ma précédente intervention, ce qui est pour moi bien plus grave intellectuellement. Ah oui ! Pour ce qui est de la « construction intellectuelle sophistiquée » ce n’est – hélas ! – pas mon fait mais celui de T.S. Khun dans « la structure des révolutions scientifiques » ou d’A. Koyré dans « du monde clos à l’univers infini » (je crois, mais ça remonte à 10 ou 15 ans…)

    Et mon propos n’était pas ni de défendre, ni de démontrer quoi que ce soit. Seulement d’interroger les processus à l’oeuvre dans une rupture entre deux modèles théoriques. Libre à vous de le percevoir autrement, mais vous passez à côté de ce que j’ai voulu dire. C’est ballot quand même.

    @ Tous

    Et dire que nous ne discutons que du concept de « monnaie » ! Pas étonnant que les financiers s’entretuent…

    En guise de conclusion, effectivement à mesure que je parcours ce blog, mon respect et mon admiration pour M. Jorion vont croissants. Je parle de l’homme et des valeurs qui l’animent. Je serais bien en peine de juger d’un point de vue théorique au vu de mes lacunes. Mais je m’y emploie. Modestement et sans présumer ni de la justesse de son propos ni de mes capacités de compréhension.

    Sur ce, un peu dépité, je retourne à mes chats, m’évertuer à leur faire comprendre que si, quand même, l’humanité a parfois du bon.

  24. Avatar de Fab
    Fab

    @ Bertrand,

    Bonjour et merci pour votre réponse : il est toujours bon de rappeler les mécanismes de base. Je ne suis malheureusement pas sûr d’avoir bien compris votre raisonnement et vous serais reconnaissant si vous pouviez le présenter autrement.
    Cela dit, pourquoi devrais-je investir mes 10 euros ?
    Et pourquoi devrais-je accepter que ma vie soit basée sur la consommation (sans parler des dégâts pour la planète, du non-respect des autres espèces animales et des autres hommes et donc du non-respect de ma propre personne) sachant que cette consommation a pour but de rendre pérenne le système engendré par mon investissement initial ajouté à quelques autres ? Je conçois que mon travail ait de la valeur. J’ai beaucoup plus de mal à accepter comme une fatalité que le bon d’achat qui m’est donné en échange de cette valeur puisse en soi représenter une valeur qui va être utilisée par d’autres ; et que ces autres, pour conserver leur nouvelle valeur et la multiplier, n’ont d’autre choix que de me pousser à consommer…à outrance nécessairement au bout de quelques « rotations », m’obligeant donc à fournir un nouveau travail etc. Il me semble évident, au moins par constat, que j’aurai toujours un « temps de retard » (une fois que j’ai mis le doigt dans l’engrenage, que j’ai croqué la pomme). Aussi, j’en reviens à mes questions initiales sur le banquier (que je considère comme un égal ne vous alarmez pas !) et/ou sur les législateurs. Comment en sommes-nous arrivés là ? Pourquoi un tel asservissement (http://www.pauljorion.com/blog/?p=1432#comment-13783) ?

    Je ne sais pas si j’ai été clair, et encore moins si j’ai pu vous convaincre de la sincérité de mes questions, mais c’est la vision que j’ai de la crise actuelle : une crise de conscience. Je pense que l’homme a besoin de se trouver de nouveaux objectifs, de se trouver une nouvelle « religion », une nouvelle « carotte »…Peut-être d’ailleurs est-ce l’idée de M. Jorion, et qu’il pense qu’il soit nécessaire (je n’en doute pas) et suffisant pour y parvenir d’assainir le système économique actuel..?

  25. Avatar de Alain
    Alain

    Il y a quelques lustres déjà, ayant demandé à un client, de la banque dans laquelle je travaillais, de venir « faire un point », (en fait mon intention était de le sommer de recréditer son compte devenu débiteur), j’essayais de le raisonner et de lui expliquer qu’il n’avait plus un solde suffisant pour émettre d’autres chèques. Celui-ci restait hors d’atteinte de mon raisonnement, et la notion de solde créditeur suffisant devait lui paraitre un lanqage de notaire, tout aussi élégant qu’incompréhensible. Finalement, dans un éclair de lucidité, il retoqua tous mes arguments et m’asséna un magnifique :
    -« j’ai encore de l’argent puisque j’ai encore des chèques dans le carnet! ».
    Pour revenir à la création monétaire, les banques en octroyant des crédits participent à la création d’une monnaire en devenir. Si, tous les clients des banques veulent « disposer » d’une autre monnaie que la monnaie scripturale, soit de la monnaire fiduciaire, voire divisionnaire, il y aura plus qu’un petit problème. L’Etat ne frappant ou n’imprimant pas assez de cette monnaie la.
    Peut-on en conclure que la monnaie en devenir (contrepartie de l’activité de crédit d’une banque), ne devient monnaie qu’à partir du moment ou l’on en souhaite la matérialisation sous une autre forme? Je ne crois pas que cela soit suffisant. La monnaie fiduciaire n’étant qu’une autre forme de convention, qui elle aussi représente une dette, (ou sa contrapartie).
    Pour palier, entre autre, les risques de rupture de stocks de billets et de pièces, en France, il existe certaines contraintes sous forme d’obligations:
    – Interdiction de payer les salaires en espèces,
    – limitation du pouvoir libératoire de la monnaire divisionnaire,
    – interdiction de payer en espèce au delà d’un certain montant, ou de recevoir un paiement en espèce au delà d’une certaine somme
    -…,etc.
    Si la monnaie était encore référencée sur la base des réserves d’or, il est évident que l’accroissement, (création), de la monnaie en circulation aurait pour corollaire l’accroissement des réserves d’or détenues par la banque centrale.
    Ou comme certains, rois l’ont fait jadis, une diminution du poids d’or dans la monnaie couramment utilisée.
    Si lors d’un dépôt en or de 100 kg, la banque pouvait, ex nihilo porter, 90 kg au crédit du compte de son emprunteur, et ainsi de suite, il faudrait requalifier les banquier de mineurs, (ouvriers des mines bien entendu).
    Pour s’affranchir de cette contrainte, (relique barbare), la monnaie ne fait plus référence à son poids en or. Il est donc loisible aux détenteurs du pouvoir de presque création monétaire que sont les banquiers de faire à peu prés ce qu’ils veulent. Quant à la disparition de milliards de dollars et d’Euros, à la suite de la crise financière actuelle, il s’agit, en fait, de la baisse d’une des contreparties comptables de la monnaie. L’autre contrepartie (débit = crédit) reste intacte, la différence étant « à la charge » des banques.
    La maison qui a été vendu 100 et qui ne vaut plus aujourd’hui que 50, a bien fait l’objet d’une transaction de 100. Le vendeur a bien encaissé 100, s’il n’a pas investi ses 100, ni dans l’immobilier ni dans la bourse, il a toujours ses 100! Par contre le malheureux acheteur lui n’a plus qu’une maison valant 50 et doit souvent rembourser un crédit de 100. Si la banque acceptait de lui laisser du temps pour faire face, il se pourrait qu’il puisse un jour rembourser sa dette. Mais en France, par exemple au delà de trois échéances impayées, la banque est obligée, (la malheureuse), de prononcer la déchéance du terme. Le solde de l’emprunt devient immédiatement exigible, majoré des pénalités et de la totalité des intérêts non encore échus. Ainsi les 100 de l’exemple peuvent devenir 150, avec pour seule contrepartie la valeur actuelle de la maison prise en garantie, au mieux 50. La différence est donc de 100, et c’est bien la banque qui la porte dans son bilan même si c’est le malheureux emprunteur qui l’a subie, (et la subira lontemps). Quant à notre vendeur initial, il doit être tout heureux de se dire qu’il a bien fait de vendre et de garder son argent à l’abri. Alors, ne lui gâchons pas son plaisir, en lui expliquant qu’il pourrait avoir de désagréables surprises si tous les clients de sa banques avaient l’idée, (saugre
    nue) de vouloir retirer leur argent en même temps…

  26. Avatar de Sophie
    Sophie

    @Julien Alexandre
     » Sophie, les banques prêtent-elles les dépôts? »
    Ma réponse est NON si on parle des dépôts à vue… comment pourraient-elles d’ailleurs prêter ce qui est déjà une dette pour elle?
    Dans le cas d’un dépôt sur livret, c’est très différent; l’épargnant confie ses sous à la banque pour les faire fructifier et la banque s’engage à lui reverser des intérêts.
    Une banque a deux « casquettes » : d’une part le droit (exclusif) de création de monnaie scripturale, d’autre part un rôle d’intermédiaire entre épargnants et emprunteurs. Si la banque n’avait pas des limites (légales et comptables) à la création de monnaie-dette, elle n’aurait même pas besoin de cette catégorie (les épargnants)

  27. Avatar de Bru
    Bru

    @Nadine,

    Je vous lirais avec plaisir.
    N’étant pas l’objet d’une quelconque notoriété ma crédibilité n’est le soucis de personne je pense… J’essaie juste de manipuler des définitions et des suites logiques de manière peut-être maladroite voir fausse, je serais prêt a le reconnaître si les défenseurs de la non création monétaire par les banques essayaient des exposés sur un mode proche de celui de Etienne. Ce qui n’est pas le cas.

    J’en resterai sur ce qui me semble indubitablement simple est vrai : les banque créent via l’attribution de prêt un objet qui peut être utilisé en guise de paiement. Cet objet est créé par les banque (par écriture). Cet objet est une monnaie (par définition, car utilisé dans la vie de tout les jour en guise de paiement d’un achat).

    Je pense que cet instant tout le monde est plus ou moins d’accord sur l’essentiel, sauf, et c’était l’objet d’un de mes premiers commentaires, les définitions, et plus particulièrement la définition de la monnaie. Vous considérez que seule la monnaie centrale (pièces, billets et réserve des banques commerciales aux BC sont de la monnaie, cad le passif des BC) alors que je considère (comme beaucoup je pense) que les dépôts bancaires sont également de la monnaie. Pour la simple raison qu’il sont acceptés en guise de paiement, ce qui renvoie a la définition même de la monnaie. Les achats courants étant effectués avec cette monnaie scripturale, considérez peut-être qu’il s’agit de troc ? Je ne le pense pas, ces transaction supposent donc un intermédiaire, en l’occurrence la monnaie scripturale, qui est effectivement une dette, mais qui reste une monnaie. Comme l’or est un métal et a été une monnaie.

  28. Avatar de Julien Alexandre
    Julien Alexandre

    @ Sophie : ma banque rémunère mon compte à vue à 3 % (brut). Si je vous suis, et que donc ma banque ne prête ou place pas les dépôts à vue, ce qui ne lui permet donc pas de dégager de marge sur ce produit cela signifie que c’est par générosité que mon banquier grève ces bénéfices pour les redistribuer non pas à ces employés mais à ces clients, en rémunérant un compte qu’il n’a pas besoin de rémunérer? Parce qu’acquérir des parts de marché à ce tarif là coûte cher…

    Jusqu’en 2005, les comptes à vue rémunérés étaient interdits en France. C’est l’application du droit communautaire européen (arrêt de la cour de justice européenne du 5 octobre 2004) qui a ouvert la voie à cette pratique. Les banquiers sont-ils des socialistes en puissance?

    Un petit résumé pas trop « aplati » :

    – les dépôts rapportent à la banque la différence entre le taux de rendement des placements qu’ils permettent et le taux auquel ils sont rémunérés. Le placement en question peut-être extérieur à la banque ou interne, sous forme de crédit. Ceci concerne TOUS les dépôts bancaires : à vue, d’épargne ou à terme.

    – dans le cas des placements des dépôts, il est important pour le banquier de retenir un taux de rendement réaliste, afin de « lisser » la marge entre taux de rémunération et taux de placement. Pour éviter une asymétrie de plus (voir post plus haut), le placement doit présenter un profil en termes de durée et de risques identiques ou proches de celui du dépôt.

    – vous retenez en particulier le problème des dépôts à vue, dont la stabilité temporelle (possibilité de retrait au jour le jour, possibilité de paiement au jour le jour) exclut a priori tout placement en actifs financiers (placement à termes, spéculation, etc.) ou recyclage sous forme de crédit (terme plus ou moins long également). Les banquiers résolvent le problème : ils placent les dépôts à vue au jour le jour sur le marché monétaire, dont le taux de rendement est l’EONIA, le petit frère (en durée) de l’EURIBOR. Et de vous à moi, un secret de polichinelle : la stabilité a posteriori des dépôts à vue est assez grande pour envisager des placements à échéance plus longue. Libre aux banquiers de faire des arbitrages de risques en retenant un taux de rendement plus élevé…

    Qu’en dites-vous?

    @ Pierre-Yves D. : merci de vos encouragements. Honnêtement, mes commentaires traduisent pour l’essentiel les enseignements que j’ai tirés de cet entretien, et à part apposer une signature « prestigieuse » et reconnue sur des mots, un billet spécifique n’a pas de sens, surtout lorsque l’on souhaite exclure les arguments d’autorité du débat.

    @ 2casa : merci pour votre post rafraichissant.

  29. Avatar de 2Casa
    2Casa

    Une dernière chose !

    Quant à Galilée je me demande si les changements opérés par le fait de mettre l’homme au centre du bordel à la place de la thune n’impliqueraient pas des changements plus conséquents encore que de l’avoir fait pour le soleil. C’est toute la portée de mon analogie et c’est tout l’intérêt d’un changement de paradigme.

  30. Avatar de Fab
    Fab

    @ 2Casa,

    Bravo.

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