LA RÉALITÉ : UN MOT POUR DEUX CHOSES DIFFÉRENTES, par Jérôme Grynpas

Billet invité

Dans « La révolte sans la solution », j’ai tenté de montrer qu’il n’y a pas de société sans  idéologie et que, dans l’incapacité d’en trouver  une – ouvrant des voies nouvelles – nos indignations, nos révoltes sont sans solution. D’où, dans un second papier : « décroissance de la démocratie », ce constat : un sentiment généralisé d’impuissance, jusqu’aux niveaux les plus élevés de décision, qui humilie l’institution démocratique. Aujourd’hui, je me propose d’inventorier la nature intellectuelle de cette impuissance. A mon sens, elle tient à une confusion sur le concept de réalité.

Faire preuve de réalisme, voilà une vertu chaudement recommandée depuis l’origine des temps. Ceux qui participent au pouvoir, à toutes les formes de pouvoir, n’ont que ce mot à la bouche. Ils estiment  posséder l’argument irréfutable : c’est la réalité… vous ne pouvez que vous soumettre ! Or le terme est ambigu, car il recouvre deux domaines différents.

Il y a, d’une part, les faits de nature (tant physique que biologique). Notre rapport à ces phénomènes consiste à toujours mieux appréhender/approfondir leurs lois (science) pour nous en servir (technique). Là, un fait est un fait même si, parfois, il semble ne pas correspondre aux critères habituels de perception de la réalité (voir la physique quantique). D’autre part, il y a les artefacts humains : des silex taillés aux satellites, du totémisme aux grandes religions ou aux systèmes philosophiques, de la métrique poétique à la théorie des ensembles, du troc à la financiarisation de l’économie, des coutumes tribales aux constitutions démocratiques, etc. Ici, tout est activité, plus ou moins consciente, des humains en société. Ces artefacts sont mouvants, non permanents. Ils connaissent des hauts et des bas. L’explication de leur accélération ou de leur apparente immobilité, de leur avancée ou de leur déclin tient à l’idée que nous nus faisons de la nature de la réalité des artefacts qui nous entourent. Soit, tout se passe comme si notre acceptation de l’évidence naturelle déteignait sur l’idée que nous nous faisons des « réalités » tant sociétales qu’individuelles. Alors, nos actions nous apparaissent comme des gesticulations sans prise véritable sur le « réel ». Soit, nous avons la conviction que nous  pouvons maîtriser le présent en fonction d’un avenir souhaité … même si nous peinons à définir les grandes lignes de cet avenir.

Que de portes ouvertes n’enfoncez-vous pas, dira-t-on. Certes ! Il n’en reste pas moins, par exemple, que pour beaucoup parler de la mondialisation, c’est parler d’un fait au même titre que s’il s’agissait de la succession du jour et de la nuit. Autrement dit, ce phénomène (ainsi que d’autres artefacts), est vu/pensé en surplomb de toutes nos velléités d’action. Accablés par l’idée de réalité et ses conséquences, nous ne croyons pas à notre capacité d’en changer. Au mieux, nous tâchons de nous en prémunir de la même façon qu’on se prémunit contre un tremblement de terre.

Le pouvoir, sous toutes ses formes, conserve une bonne part de son autorité parce qu’il fait accepter comme semblables aux réalités physiques/biologiques, les idéologies et les institutions qu’il produit … depuis la nuit des temps et qu’il a intérêt à conserver en état. De son côté, paralysé par une sorte de réalisme primaire, l’individu reste spectateur lors même qu’il manifeste son indignation, lors même qu’il tente de rectifier tel ou tel aspect de la société. Il a conscience que ce qu’il fait est tout de surface. Il soulage sa conscience sans pouvoir changer la société… d’où scepticisme et mal-être, d’où le succès des bonnes œuvres et le hargne envers les idéologies.

Il ne s’agit pas, pour autant, de nier l’évidence concrète de ces artefacts. Il faut l’étudier pour en comprendre le cheminement, pour en jauger ce qui nous paraît acceptable et ce qui ne l’est pas. Et comment et dans quel sens en changer puisqu’il ne possède pas l’immutabilité de la réalité physique. Soyons historiens, sociologues pour être des politiques, sinon c’est retourner l’effort intellectuel contre ses finalités propres.

Bref, tant que nous confondrons sous un même vocable la réalité naturelle et le moment actuel du devenir humain, nous seront impuissants… rationnellement.

Les grandes mutations ont toujours été précédées par un intense travail idéologique et non par une levée rageuse de « petits poings impuissants » comme le disait François Mauriac. Qu’il s’agisse de la sortie d’Egypte, de la naissance du confucianisme et de Bouddha, de l’apparition du christianisme à l’irruption de l’islam, de la Réforme à la révolution française et au marxisme, etc.

Les idéologies ne sont pas  mortes, mais une – le capitalisme – est largement dominant. Il ne s’agit pas d’une réalité naturelle mais d’un artefact. Il faut en changer, si on pense qu’il n’est pas la solution. Il est déliquescent, mais tant qu’on n’a rien à mettre à la place de façon politiquement acceptable pour une masse significative de citoyens, on ne pourra pas le conduire au cimetière.

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164 réponses à “LA RÉALITÉ : UN MOT POUR DEUX CHOSES DIFFÉRENTES, par Jérôme Grynpas”

  1. Avatar de soi
    soi

    Je propose l’Humaniarcat! 😀

  2. Avatar de RIOU René
    RIOU René

    nos révoltes sont sans solution.

    Les J.P. Morgan, Rockfeller, Mellon, ainsi que leurs successeurs et affiliés ont développé leur sphère d’influence à l’abri des regards. C’est moins simple pour eux aujourd’hui …. grâce à internet et aux blogs dissidents comme celui-ci. Relisez Noam Chomsky !

    un sentiment généralisé d’impuissance, jusqu’aux niveaux les plus élevés de décision,

    Nos politiques, comme nos médias, sont impuissants car la main qui donne est au-dessus de celle qui reçoit. comme le disait si bien Napoléon.

    c’est la réalité… vous ne pouvez que vous soumettre !… le terme est ambigu,

    Le terme est ambigu mais également péremptoire. Par ailleurs, le philosophe Emile Chartier mieux connu sous le pseudonyme « Alain » propose trois remèdes contre la tyrannie. Ne pas craindre. Ne rien croire. Rester sobre.

    1. Avatar de Taneleo
      Taneleo

      Il y a aujourd’hui une très grande synthèse qui est à l’œuvre. Une synthèse générale, sur tout. Internet en est une cause et un outil, et c’est précisément ce qu’il convient d’appeler le Révolution Internet.

      La «révolution» est ainsi en marche; car au bout de chaque synthèse se trouve une révolution (plus ou moins importante). Il s’agit ici d’une révolution par «changement important, radical et irréversible» de la marche du monde. Bientôt, nous allons changer d’ère, d’époque, et de civilisation.

      Les États, politiques, multinationales, sont mis en face de leurs propres lois, idéologies, morales, (im)postures, justice, propagandes, etc… pour se retrouver au pied du mur. Il leur reste la tyrannie ou la capitulation. Ils capituleront par obligation (ce qui veut dire que le poison sera toujours présent).

      Pressée par les temps «écologique» et énergétique, l’humanité ne peut que se demander si ce changement arrivera à temps.

      1. Avatar de Marlowe
        Marlowe

        Et si Internet n’était qu’un bruit de fond ?

      2. Avatar de Maisi
        Maisi

        Et si Internet n’était qu’un bruit de fond ?
        -Marlowe-

        Entre le vice bruyant du bazar et la vertu musicale du désespoir [ surmonté ] ?
        Et si une note, dans le bruit, n’était qu’un bruit de plus, sans le silence qui va autour ? Pour quoi, ou pour qui, faudrait-il absolument la jouer ? Il n’y aurait qu’à renoncer et laisser les bruyants s’assourdir ! Mais l’isolation semble plus difficile à surmonter que le désespoir.

        Et si Internet était la fin de l’isolation ?… pour ceux à qui on ne demandait rien d’autre que de consommer et de produire sur ordre, par exemple ?

        Ce n’est pas seulement en écoutant les notes qu’on apprend à en faire, c’est aussi en jouant…

    2. Avatar de pierre brunaud
      pierre brunaud

      Aujourd’hui j’adhère à ces principes: Ne pas se laisser instrumentaliser par la peur, en acceptant le risque comme tel, être en capacité de se forger une opinion qui privilégie le groupe au détriment de l’individu:( Bernard Stiegler évoque, la néguentropie de l’économie du soin contre l’entropie de l’économie capitaliste), l’application de la sobriété dans le cadre d’une décroissance qui passe par le stade de la transition pour aboutir à l’application de la permaculture globale. Mais, dans la pratique, il sera très difficile d’amener une masse critique significative de personnes à concevoir leur propre modèle de « développement durable », la tentation de se laisser diriger par un régime autoritaire ou à se laisser mener à l’abattoir (guerre de 14/18), serait bien trop grande. Ils fallait du pain et du jeu pour les romains d’hier, il faut du crédit facile et des programmes télévisés pour les occidentaux d’aujourd’hui, on peut supposer que les hommes de demain accepteront le soma (de Huxley)
      http://www.dailymotion.com/video/x9hxkr_le-meilleur-des-mondes-1-5_
      et le caroussel (l’age de cristal)
      http://www.youtube.com/watch?v=kwBOBrF4ukg
      comme une fatalité.
      L’avenir (proche) nous le dira.

      1. Avatar de timiota
        timiota

        @ Pierre brunaud

        En effet, Bernard Stiegler me semble une référence pertinente pour les techniques et leur rôle de « pharmakon » (poison/remède). Il n’est guère connu sur ce blog, et il faut dire que comme philosophe jargonnant, il lui arrive de se poser là.
        Mais les perles sont là aussi chez Stiegler, ma préférée étant la définition de la « prolétarisation » comme privation de savoir-faire / savoir-vivre, et ensuite la contraposition « adoption »/ »adaptation », dans les « systèmes associés », la seconde étant le stade pénible, et la première le stade où l’on a rétabli de la réciprocité et « progressé ».

        Avec Richard Sennett, Stiegler fait partie des gens que je recommande de lire aux courageux (entre deux Jorion, of course).
        Bien sûr, rien n’empêche de lire aussi Jeremy Rifkin ou Naomi Klein pour voir de grandes fresques qui à leur façon évoquent l’homme prométhéen en action, ou en folie, mais la façon « symphonique » de R. Sennett ou plus « stridulente » de Stiegler d’englober cette question des techniques me parait sympathique …

      2. Avatar de soi
        soi

        Merci pour les vidéos. Ceci dit pour « Le meilleur des mondes », j’ai été déçue de voir de l’idéologie sur la dénonciation d’une idéologie: ce scénario propose apparemment un retour à la structure qui a amené ce « meilleur des mondes ».

        Du coup, j’ai regardé une vidéo proposée autour, « La ferme des animaux », j’ai bien aimé. http://www.dailymotion.com/video/xcv56t_la-ferme-des-animaux-1-4-george-orw_news

  3. Avatar de jérôme
    jérôme

    «  »
    Du « greenwashing » durable
    http://www.youtube.com/watch?v=nZJGz2OeSnA&feature=player_embedded

    Critique et limites du Développement Durable.

    Attention, il ne s’agit pas d’une critique de l’écologie ni des initiatives pour l’environnement. Il s’agit d’une critique du Développement Durable en tant que concept économique basé sur la croissance.

    Je vous laisse deviner pourquoi il y a deux fois la même citation… » »

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Posidonios

  4. Avatar de renou
    renou

    On a rien sans rien… C’est pas faux.
    Le réel et son double. Clément Rosset.
    Faut le dire en quelle langue?…

    Merci pour Mauriac, il nous manquait…

    1. Avatar de roma
      roma

       » On peut concevoir une structure non métaphysique de la duplication, qui aboutit au contraire à enrichir le présent de toutes les potentialités, tant futures que passées. C’est le thème, à la fois stoïcien et nietzschéen, du retour éternel, qui vient paradoxalement combler le présent de tous les biens dont le prive la duplication métaphysique. « (Le réel et son double p.81)

      « Ce que nous rencontrons tout d’abord, ce n’est pas le proche, mais toujours l’habituel. L’habituel possède en propre cet effrayant pouvoir de nous déshabituer d’habiter dans l’essentiel – et souvent de façon si décisive qu’il ne nous laisse plus jamais parvenir à y habiter”. (MH, Qu’appelle-t-on penser ? Quadrige-PUF, 1959).

      « Notre relation à ce qui nous est proche est depuis toujours émoussée et sans vigueur. Car le chemin des choses proches, pour nous autres hommes, est de tout temps le plus long et pour cette raison, le plus difficile » (MH, Le principe de raison Gallimard-Tel, 1999).

      Balthasar Gracian :
      chapitre VI : livre Le Héros
      « le héros est ce chevalier sans peur et sans reproche qui prête à l’apparence un crédit illimité »

  5. Avatar de André
    André

    «

    Les grandes mutations ont toujours été précédées par un intense travail idéologique (…). Qu’il s’agisse de la sortie d’Egypte, de la naissance du confucianisme et de Bouddha, de l’apparition du christianisme à l’irruption de l’islam, de la Réforme à la révolution française et au marxisme, etc.

    ».

    Autre exemple : le passage du paléolithique au néolithique. Les thèses habituelles consistent à dire, soit que le réchauffement climatique, détruisant la faune et le gibier et entraînant une pénurie alimentaire, aurait poussé les hommes à adopter l’agriculture et à se sédentariser. Soit que l’expansion démographique aurait créé un déséquilibre biologique.

    Or, suivant Jacques Cauvin (« Naissance des divinités, naissance de l’agriculture »), c’est l’inverse qui s’est produit : les hommes se sont d’abord sédentarisés et puis ont inventé l’agriculture. Que s’est-il passé ? Un « Révolution des symboles », une mutation des cadres de pensée que l’on peut suivre dans l’évolution des représentations « artistiques » : on passe, progressivement, des représentations d’animaux à des représentations de divinités, notamment de figurines de femmes accouchant d’un taureau (qui, à l’époque, n’est pas chassé comme gibier) symbolisant l’homme. Le fait d’être créés par les divinités autorise les hommes à être, à leur tour, créateurs, alors qu’auparavant, il n’étaient que spectateurs de la nature : « Cette béance nouvelle qui se crée entre le dieu et l’homme a dû modifier entièrement la représentation que l’esprit humain se faisait (de son milieu), et susciter des initiatives nouvelles en débloquant en quelque sorte l’énergie nécessaire pour les mener à bien, comme l’effet compensatoire d’un malaise existentiel jamais ressenti ».

    1. Avatar de arkao
      arkao

      Les hypothèses de Jacques Cauvin sont loin de faire l’unanimité. Pour ma part, j’ai plus confiance dans les travaux de J.P.Demoule:
      http://www.scienceshumaines.com/entretien-avec-jean-paul-demoule-le-neolithique-est-un-phenomene-mondial-propos-recueillis-par-laurent-testot_fr_27640.html

      1. Avatar de soi
        soi

        Ha! je suis bien contente que la mondialisation apparaisse là aussi! Personnellement, je ne connais aucune « évolution » humaine qui ne soit pas mondiale.

    2. Avatar de arkao
      arkao

      Article en lien, payant (je suis allé trop vite).
      Il y a mieux, le site officiel de JPD.
      http://jeanpauldemoule.com/siteofficiel/accueil.html

      1. Avatar de timiota
        timiota

        Intéressant
        Comment cela s’inscrit-il par rapport à Leroi-Gourhan (« Le geste et la parole ») ?

  6. Avatar de Thomas

    Autre possibilité que telle ou telle période dominée par telle ou telle idéologie :

    Après que le capitalisme aura rejoint seul, le cimetière, un temps de confusion.

  7. Avatar de Tigue
    Tigue

    Très intéressant.
    Mais la réalité physique elle même est une conception humaine dans l’ espace et dans le temps. Elle dépend de l’ observateur : celui ci observe avec ses sens les manifestations de « ce qui existe autour de lui » et qui sera à jamais inconnu. Il est généré une entité conceptuelle intelligible pour lui, car « située » dans l’ espace et dans le temps , puis s’ établit un consensus intersubjectif entre les observateurs qui « regardent » cette entité, de leur point de vue. Ce consensus est  » le réel ».

    http://www.editions-bayol.com/PMF/ch1s5_1.php
    http://www.mugur-schachter.net/pdf/inframecanique.pdf
    http://www.mugur-schachter.net/pdf/tissage.pdf

    Si on observe a l oeil nu la côte de Bretagne d’ un avion, l’ approximation de sa longueur sera très différente de celle que l on pourrait faire en marchant a pied et en comptant ses pas.
    Elle serait encore très différente a un échelle plus petite (le millimètre …).
    Mais parler de « côte de Bretagne  » n’ a plus de sens à cette échelle, la côte n’ étant plus définie.
    « La côte de Bretagne » est une conception humaine, sous tendue par un certain But : atteindre la rive a partir d un navire.

    1. Avatar de JG
      JG

      Merci pour ce cartésianisme désuet, cent fois réfuté en raison…

    2. Avatar de soi
      soi

      Certes, et les faits sont ceux de leur « échelle »: le grain de pollen n’a pas la même « vie » que le fruit. Dans cette exposition des différentes échelles reste le « lien » qu’est la gravité, ce qui à mon sens, fait dire qu’il s’agit bien du même monde quelque soit l’échelle. Mme Mugur-Schater va très loin , cependant, je crains qu’il ne soit possible de « saisir » le vivant car, selon moi, alors il n’est plus vivant. Ainsi, il me semble que nous pouvons développer des technologies très proches du fonctionnement du vivant, mais qui restent des illusions de vivant, qui ne sauraient être vivantes
      .

    3. Avatar de bernard laget
      bernard laget

      Tigue, vous dites :
      « Mais la réalité physique elle même est une conception humaine dans l’ espace et dans le temps. »

      Bien sur, cela nous renvoie à Jorion et à son livre sur le sujet, mais il faut des clés communes pour la partager, (cela nous renvoie au « mystere » de la chambre jaune, emprunté à wittgenstein sauf érreur) . Il faut donc au visiteur de la dite chambre pour décrypter ce qui s’y passe d’apparemment incompréhensible:

      – En posséder une sémantique claire et une grammaire/ sous ces conditions on peut envisager de parler d’une réalité physique, laquelle sera à minima une intersubjectivité fondée en physique sur la mesure. L’obstination de la réponse du réel perçu a une méme question signifie t’il (au sens d’Hegel ou de Kant) qu’il puisse y avoir un » programme » a ce réel? Les réponses dépendent des auteurs, de choix philosophiques, soit un empirisme fondateur d’une incompréhensible mécanique quantique aux objections d’Einstein que l’on a traité un peu vite (à la légere) de réaliste.
      Certes la cote Bretonne dépend du regard, n’existe que conditionnée par l’échelle du regard donc de l’outillage expérimental utilisé, comme le soutien l’école de Copenhague, alors qu’Einstein prétend que c’est la « theorie » qui dicte ce que nous devons regarder (cité in Heisenberg) . On peut alors, sur un térrain philosophique, percevoir comment Bohr s’exclurait de la « chambre jaune », renonçant par principe à pouvoir parler raisonnablement de la cote Bretonne, alors qu’Einstein y reste sous conditions platonniciennes que génere le modéle théorique, conditionnant le regard de ce qu’il faut regarder.

      Conception humaine, P.Jorion s’engage, il parle d’invention

      ref: W.Heisenberg « La partie et le tout »;

  8. Avatar de et alors
    et alors

    « tant qu’on n’a rien à mettre à la place de façon politiquement acceptable pour une masse significative de citoyens, on ne pourra pas le conduire au cimetière »
    – d’abord il y a des « nous » plutôt que des « on », qui mettent en place avec leurs bras…
    en anticipant collectivement ( politique) à leur échelle de transformation, sans attendre qu’une masse…., comme vous dites.
    La masse, c’est physique, corporel et je proposerai que nous inventorions aussi,complémentairement, à la « nature intellectuelle de cette impuissance »,
    la culture (l’a-culture) (biologique et biopolitique) corporelle de ces inhibitions .

  9. Avatar de eric
    eric

    « mais tant qu’on a rien…………………on ne pourra le conduire au cimetiere »
    Si je vous suit c’est le descente longue , progressive et jusqu’a quand?

  10. Avatar de idle
    idle

    Changer de façon de penser c’est bien là tout le problème…Le formatage actuel de la pensée humaine est un désastre, exemple un homme ou une femme d’origine occidentale aura toujours à l’esprit « SON FORMAT » avant même d’intervenir dans son choix. Le libre arbitre se cultive par un esprit auto-induit et auto- déterminé vers un objectif. Reste à définir ensemble l’objectif.

    1. Avatar de eric
      eric

      Et puis plus le temps passe,plus l’extreme droite a le temps de faire sa com nauseabonde,j’ai cru comprendre que les soutients a la grece flechissent un peu dans l’opinion

  11. Avatar de zerodeconduite
    zerodeconduite

    Excellent cette petite mise au point linguistique et conceptuelle. Il fallait bien que tout ceci soit un jour écrit noir sur blanc.

  12. Avatar de lechanu
    lechanu

    bonjour

    Il me semble que le travail se fait petit à petit . Les libéraux (dans le sens qu’on lui donne ici ) ont de plus en plus de mal à justifier leur système aujourd’hui , alors qu’il y a encore quelques années , leur idéologie écrasait le discours économique . La crise de 2008 a eu au moins l’avantage de commencer à nous déciller . Des gens comme P Jorion , F Lordon sont devenus audibles , Bernard Stiegler commence à être connu . Une petite flamme d’espoir apparaît à l’horizon , on ne sait pas si elle allumera le grand incendie , car l’histoire n’est pas écrite , mais il faut continuer de l’alimenter .

    1. Avatar de timiota
      timiota

      En effet, j’ai plaisir à voir que sur ce fil, des gens réagissent en citant Stiegler, on ne peut plus approprié.

      Par ailleurs, dans mes lectures favorites du moment (entre deux Jorion), je conseille le sociologue américain Richard Sennett (« Ce que sait la main ») . Voir aussi le billet sur la désexcellence récemment paru sur ce blog (où l’on cite Sennette et M. B. Crawford « Éloge du carburateur, Ed. La Decouverte)…

      1. Avatar de lou
        lou

        La boucle est bouclée: Stiegler fait référence à Jorion dans une conférence sur La tâche de l’université au XXIè siècle

      2. Avatar de timiota
        timiota

        @ lou

        Merci pour le lien. J’y vais m’y repaitre
        Et erratum ci-dessus, Sennett c’est sans le troisième « e », of course…

      3. Avatar de timiota
        timiota

        Pour les amateurs, c’est à la minute 35:30 que Stiegler cite Jorion.
        Il dit que l’économie est devenue irrationelle et que Greenspan lui-même est « prolétarisé », son savoir-faire ne lui permet pas de comprendre ce qui se passe
        (je suppose qu’il s’agit de sa déposition à la commission sur le krach de 2008)
        puis il dit que Jorion est en train d’expliquer en France

        « pourquoi le système financier produit de la prolétarisation, c’est à dire de la bêtise systémique ».

        Yeah

      4. Avatar de Pierre-Yves D.
        Pierre-Yves D.

        Décidément ce Stiegler il me plait bien, lui et Paul Jorion sont bien de la même trempe, même si l’angle à partir duquel chacun analyse et fait la critique du système est quelque peu différent.
        J’ai regardé cette excellente vidéo dans sa totalité, Stiegler commence sur un ton presque monotone, puis les minutes passant on voit son visage s’animer finissant son exposé par de grands gestes à la mesure d’une grande mise en perspective de l’histoire de la civilisation sous ses aspects conjointement politique, institutionnels et techniques, les supports mémoriels jouant un rôle fondamental dans les processus d’ajustement et de désajustement de l’individuel au collectif au travers de l’évolution des systèmes techniques.

        Stiegler voit à l’oeuvre dans la société actuelle un mouvement accéléré de rationalisation conduit en amont par la logique financière. Cette rationalisation est bien entendu à ne pas confondre avec la rationalité qu’il estime, elle, plus nécessaire que jamais. La rationalisation, pour faire court, c’est l’intériorisation par les individus des logiques mises en oeuvre par et pour le système, si bien que les individus réduits à l’état simples rouages transmetteurs (c’est moi qui traduis) des logiques matérialisées du système, perdent toute distance critique par rapport à son fonctionnement. C’est ce que Bernard Stiegler appelle le court-circuit des processus longs d’apprentissage et de transmission.

        L’abord de sa pensée demande une attention soutenue et surtout d’avoir assimilé les quelques concepts fondamentaux qu’il utilise. Mais je pense que cet effort est finalement récompensé, car son analyse, et c’est son point fort, permet véritablement de mieux comprendre ce qui nous arrive, individuellement et collectivement. Il n’y a pas tant de philosophes et de penseurs capables aujourd’hui de jeter ainsi sur les réalités que nous connaissons des filets qui non seulement nous permettent de mieux comprendre ce qui se passe mais aussi nous aident à prendre position, agir là où il y a de véritables enjeux. Bref, Stiegler et Jorion, même combat !

      5. Avatar de timiota
        timiota

        Bon, Pierre-Yves-D, dans les 48h que nous réserve chaque jour, vous en trouvez pour aller en plus noyauter Ars Industrialis en y parlant d’interdiction des paris sur les fluctuations etc ?

      6. Avatar de Pierre-Yves D.
        Pierre-Yves D.

        Timiotia,
        C’est vrai, un contact a été établi entre les vaisseaux Stiegler et Jorion mais la jonction n’a pas encore eu lieu. Encore deux trois ou tours de la Terre en orbite et ça devrait marcher 😉

  13. Avatar de chouard
    chouard

    Dans l’ancien Pérou, quand le peuple s’inquiétait d’un tremblement de terre, d’une éruption volcanique ou d’une sécheresse, l’Inca ordonnait un sacrifice humain. Cela mettait fin ou non au problème, mais au moins le peuple était content car le chef avait pris en charge le problème.

    Le progrès de la civilisation, c’est que maintenant nos gouvernants font une téléconférence ou une réunion à Wroclaw. Mais est-ce vraiment plus efficace et la fonction principale de leur agitation n’est-elle pas de mettre en scène un rite social masquant leur impuissance face aux marchés?

    1. Avatar de Gahel
      Gahel

      Une téléconférence ou un sommet de gouvernants peut avoir du poids sur « le marché » à condition qu’il s’y décide quelque chose. Hors il ne se passe rien. Pourquoi? Simplement parce que nos gouvernants ne sont d’accord que sur une chose: gagner du temps pour que ça ne pète pas pendant leur mandat. (comme le notait J. Attali sur iTélé).
      Sauf coup de théâtre, l’agonie va être longue…

  14. Avatar de pseudo cyclique
    pseudo cyclique

    vouloir décrire complèrement la réalité voilà le mal dont souffre l’humanité .

    une partie du tout ne peut prétendre percevoir le tout dans son entiereté .

    toute idéologie s’effrondre à partir d’un certain temps car elle n’est pas suffisante/assez complète pour décrire tous les événements possibles y compris « les black swann » .

    1. Avatar de Thomas

      Un bon moyen de vivre en paix, c’est d’avoir un rapport sensationnel au monde.

      Laisser ses sensations en l’état, regarder émerger des choix, un peu comme Adamsberg….

      Cela permet d’éviter d’avoir des raisonnement rigides qui se heurtent aux mouvements permanents….

      1. Avatar de arkao
        arkao

        L’Adamsberg des romans de F.Vargas ?

  15. Avatar de Pierre Sarton du Jonchay

    Merci Jérôme Grynpas,

    Tant que nous confondrons sous un même vocable la réalité naturelle et le moment actuel du devenir humain, nous seront impuissants… rationnellement.

    Il me semble effectivement que c’est le nœud. Nous sommes véritablement dans une nuit de la rationalité comme si l’humanité n’avait pas encore eu d’histoire ; comme si elle n’avait jamais été qu’une excroissance passagère de la réalité naturelle. Êtes-vous de ceux qui croient que l’impuissance est la nature de la rationalité humaine ? Ou bien que la rationalité est la puissance de la nature humaine hors des déterminations de la réalité naturelle ? Est-il raisonnable de ne rien imaginer derrière derrière le mur sur lequel nous nous précipitons ? Ou bien, y a-t-il des raisons de croire à quelque chose derrière le mur ? Si oui, qu’est-ce qui nous empêcherait d’évoquer ce que nous verrions derrière le mur ; d’évoquer ce que nous pourrions vouloir devenir qui ne soit pas seulement des rêveries utiles à masquer la réalité ?

    1. Avatar de Les pieds dans le plat
      Les pieds dans le plat

      Il y a des réalités non naturelles.
      Le contraire de la réalité est l’irréalité.
      Ce contre quoi bute toujours l’irréel, c’est le réel manifesté et matérialisé.

      Et surtout, si nous assistons à l’émergence de quelque chose d’absolument nouveau, notre incompréhension peut nous amener aussi à en critiquer la réalité, puisque nous ne savons pas l’appréhender.

      (Par exemple, si le système, à force d’être mondialisé, grossi de toujours plus d’acteurs, acteurs toujours plus autonomes, arrivait à une complexité telle qu’il ne peut plus être prévu, ni géré, et à peine administré, comme Internet ? voir un commentaire précédent sur l’intelligence distribuée pour ceux que ça intéresse. Le regret, qu’exprime souvent PSDJ de sa lisibilité et de son ordonnacement serait alors une nostalgie, un outil inadapté; et cette inadaptation ferait crier à l’irréel)

  16. Avatar de Le Yéti

    Faire preuve de réalisme, ce n’est pas forcément se soumettre à la réalité. C’est aussi agir sur la réalité telle quelle est, et non telle qu’on la fantasme.
    Exemples de réalités fantasmées :
    – celle des spéculateurs ;
    – celle des G8/20 pensant sauver le monde avec les recettes d’avant ;
    – celle des ministres de l’UE pensant sauver la Grèce avec des plans dont ils n’ont plus les moyens ;
    – celle du ministre Baroin déclarant : « Nous ne sommes pas inquiets » (18/08/2011 sur Europe 1).

    1. Avatar de RIOU René
      RIOU René

      Baroin est impressionnant par son calme, son charisme et sa capacité à soutenir des contre-vérités avec aplomb.

      C’est un animal politique efficace et donc dangereux

      1. Avatar de Pierre-Yves D.
        Pierre-Yves D.

        Quand on ne peut plus travestir la réalité il ne reste plus qu’à mentir comme un arracheur de dents. Il me fait penser au ministre de la communication irakien qui devant l’évidence niait toute avancée de la coalition alors que les troupes étaient déjà dans Bagdad.

      2. Avatar de d0d01
        d0d01

        … il ne lui manque que la parole

      3. Avatar de Marlowe
        Marlowe

        Plus un mensonge est gros, plus il a de chance d’être cru, comme le savait le chef de la propagande nazie.

      4. Avatar de Le Yéti

        C’est un animal politique efficace et donc dangereux

        Mouais, enfin, un ministre capable de clamer sa confiance indéfectible en les banques et en une solution de la dette grecque, alors que tout part manifestement à vau-l’eau, moi, je le prends surtout pour un benêt un peu crétin sur les bords 😉

  17. Avatar de Kercoz
    Kercoz

    Bon article . A rapprocher du  » Qu’est ce qui nous meut ?  » de B. de Jouvenel ds « DU POUVOIR » .
    Le réalisme ou pragmatisme (ds son sens commun déviant) , c’est améliorer sa planche et ses technique de surf alors que la marée descend et qu’ on sera bientot a sec …La « réalité  » mise en avant n’est qu’une des réalités , au mieux la réalité immédiate dans un endroit donné… S’y référer pour décider ou agir , c’est donc satisfaire l’interet immédiat de l’individu …..pourtant chacun de nos actes devrait satisfaire plusieurs interets , plusieurs maitres aux interets parfois divergeants et quelquefois contradictoires :
    -L’interet du groupe
    -Linteret du groupe dans le temps (civilisation)
    -L’interet de l’espece
    Et pour ces interets , la raison ne suffit pas , elle privilégie le premier client ! Il faut donc des outils plus puissants que la raison , plus subtils et plus sournois ..qui agissent a l’ in-su de notre plein gré .
    (Belle démo réactionnaire hein !)

    1. Avatar de vigneron
      vigneron

      @Kercoz

      L’économie est fondamentalement « démocratique » en ce sens qu’elle reçoit du public l’appréciation de la valeur des choses. Alors que le philosophe dit aux hommes ce qu’ils doivent désirer, l’économiste se contente d’indiquer comment il faut agir étant donné les désirs déjà exprimés.

      Bertrand de Jouvenel, « Arcadie, essais sur le mieux-vivre » 1968…

      1. Avatar de Kercoz
        Kercoz

        Un peu coimme toi , il a dit beaucoup de choses , donc dans le tas , pas mal de bétises …Mais là , il a raison , ds le sens ou il ne pense pas « démocratie » en terme positif …Il a raison deux fois parce que la démocratie est endogamique . Si on prend ma petite liste ci dessus , la « démocratie » est un outil qui répond a l’interet de l’individu , voire du groupe « immédiat » ….elle va privilégier des désirs immédiats plutot sordides , et meme comme actuellement réclamer des satisfactions non « essentiels » en les présentant comme tels …au détriment du futur , de ses descendants immédiats , sans parler de l’espece dont elle se contrefout ..
        J’ irai meme plus loin que luids la phrase que tu mets en lien : La démocratie ne sert pas l’individu ds ses désirs , fussent ils sordides , elle les provoque et en crée de nouveaux , ses interets ayant divergé des notres ( et dix verges c’est beaucoup !).
        Le texte majeur de B.de J. c’est « POUVOIR » . Il faut le lire : il y démontre l’engrenage inéluctable , la dynamique de la croissance du pouvoir , qq soit l’idéologie , l’emprise du système (qui n’est as l’ état) aliéne un peu plus l’individu a chaque mouvement du système .
        Je suis persuadé que cette dynamique est propre a toute civilisation (que l’on peut , en tant que tel , considérer comme une déviance perverse d’un système naturel) , mais que la notre , par la quasi gratuité de l’énergie a poussé a son extrémité et la fera imploser plus vite que les autres .

      2. Avatar de sylla
        sylla

        « l’économiste se contente d’indiquer comment il faut agir étant donné les désirs déjà exprimés. »
        Comme si le chemin ne conditionnait pas le but… comme si la consommation ne nécessitait production…comme si le désir était l’alpha et l’oméga…
        « se contente »…ben tiens… »désir » »valeur »…ben tiens…

        Détail amusant et folklorique, c’était ce type de distinction qui était opérée en sage et philosophe (Un tyran se méfiant des prétendus sages demanda à Pythagore ce qu’il prétendait être. Ce à quoi ce dernier répondit : « philosophe » mais pas « sophe ».). L’un dans son autocratie larvée, l’autre dans la discussion ouverte et sociale.

        Mais la roue tourne : un jour, ce seront les économistes qui seront vus comme délirants tyrans. à juste raison…

        P.S. : çà par contre, çà relève du grand art : « Bertrand de Jouvenel, « Arcadie, essais sur le mieux-vivre » 1968… »

    2. Avatar de timiota
      timiota

      Ces outils sont dans l’armoire « Liens qui libèrent », non ?

      1. Avatar de Kercoz
        Kercoz

        @Timiota:
        ///// 19 septembre 2011 à 15:06

        Ces outils sont dans l’armoire « Liens qui libèrent », non ?
        /////
        Je dirais « non ». Ne pouvant vivre seuls , nous ne pouvons que changer d’ aliénation . La « démocratie » est un outil qui sert surtout les interets du groupe dénaturé parcequ’ hypertrophié .
        Et cette servitude ne peut se faire qu’ au détriment de l’individu , puisqu’elle remplace un mode de régulation (outil) naturel et complexe , par un outil simplifié linéarisé .

  18. Avatar de Paul Stieglitz

    Toujours penser que la représentation que nous avons du monde et des liens entre les choses et entre les évènements n’est probablement pas la réalité « naturelle » – en admettant qu’il y en ait une pour un observateur extérieur dont l’existence resterait à démontrer par un raisonnement valide – lequel ne serait peut-être qu’une présomption, etc., etc. ….

    1. Avatar de bertrand
      bertrand

      Réel, réalité, imaginaire et symbolisme…
      Impossible de ne pas évoquer Lacan :
      http://www.psychanalyse-paris.com/Reel-imaginaire-et-symbolique.html

      « Le réel c’est quand on se cogne » J. Lacan

      1. Avatar de Piotr
        Piotr

        « Les coups… oui ça fait mal » Johnny Hallyday
        http://www.youtube.com/watch?v=LFyD6PhC9wI

  19. Avatar de lisztfr
    lisztfr

    http://www.youtube.com/watch?v=y5Lj_AAVSaQ

    Entendu ce matin chez Pascale Clark.

    Emmanuel Todd est invité vers 10 H sur Fr Inter !

  20. Avatar de Pol
    Pol

    Le problème est la passivité des intellectuels depuis la chute du communisme. Beaucoup ont évacué le marxisme avec l’eau du bain. Cependant, comme à chaque chose malheur est bon, la crise annonce un retour de l’humanisme. Le néolibéralisme anglo-saxon, porté par la puissance militaro-économique US en déclin semble avoir montré ses limites.
    Il faut dire que les dérives du communisme et surtout le drame du nazisme dans le pays de Kant ont débousollé bon nombre d’intellectuels convaincus de la suprématie du rationalisme continental envers le pragmatisme anglo-saxon.
    Mais le conflit entre les sens et la raison comme source du vrai n’est pas nouveau. Déjà Héraclite l’empiriste s’opposait à Parménide le rationaliste, puis Aristote et Platon, Locke et Descartes… Bien sûr, aujourd’hui, le métissage des idées a fait son oeuvre, mais les fondements culturels demeurent.

  21. Avatar de Marlowe
    Marlowe

    à Jérôme Grynpas.

    Certes, le capitalisme est une idéologie, mais c’est une idéologie qui s’est matérialisée et a façonné la nature à son image, transformant celle-ci.
    Les religions avaient déjà partiellement transformé le monde à leur image comme on peut le voir en comptant les lieux du culte catholique en France, toujours existants, alors qu’ils sont quelque peu désaffectés au profit des lieux du culte de la marchandise, plus modernes, et qui ont dessiné le territoire selon les ordres de la marchandise et tout particulièrement de la circulation pseudo-cyclique des automobiles.
    L’idéologie matérialisée s’est intégrée à la réalité en la transformant : l’idéologie est devenue réalité et ne peut plus être critiquée en tant qu’idéologie, c’est à dire en tant que système d’idées et interprétation du monde.
    Le moment historique où l’idéologie est devenu réalité, outre qu’il est le moment de la fin des idéologies, est le moment où il n’existe plus d’idéologie de remplacement.
    La critique de l’idéologie devenue réalité n’est plus possible avec un levier idéologique.
    La seule critique possible est la négation, non seulement de l’idéologie mais de la réalité qu’elle a façonnée.
    Tout est donc à démolir et à reconstruire sur d’autres bases. C’est le moment historique où la théorie, l’intelligence des affrontements, doit prendre le pas sur l’idéologie.

    L’idéologie, que toute sa logique interne menait vers « l’idéologie totale » au sens de Mannheim, despotisme du fragment qui s’impose comme pseudo-savoir d’un tout figé, vision totalitaire, est maintenant accomplie dans le spectacle immobilisé de la non-histoire. Son accomplissement est aussi sa dissolution dans l’ensemble de la société. Avec la dissolution pratique de cette société doit disparaître l’idéologie, la dernière déraison qui bloque l’accès à la vie historique.

    Guy Debord. La Société du Spectacle. Thèse 214.

    1. Avatar de Leboutte

      @Marlowe

      « « despotisme du fragment qui s’impose comme pseudo-savoir d’un tout figé »… »
      Ah, Debord… Quelle langue merveilleuse !

      Mais lui aussi fait de l’idéoloqie… Malgré des aperçus pointus comme des lames, qui ne prennent pas une ride, il y a son adoration linguistique et sémantique du retournement, érigé en oracle, vérité et croyance ! Des prédictions dont tarde la réalisation.

      1. Avatar de Jean-Luce Morlie
        Jean-Luce Morlie

        In girum imus nocte et consumimur igni, édition critique (1990) montre un bilan mélancolique des années situationnistes. La dernière phrase du texte

        « A reprendre depuis le début »

        fait écho aux remarques de Debord sur les deux sens

        « de travailler en vain »

        par lesquelles il terminait les commentaires sur la société du spectacle (1988)

        « A reprendre depuis le début » est associé à une note de bas de page (55), la voici :

        (55 ) « S’opposant aux traditionnelles marques de conclusion, “Fin” ou “A suivre”, la phrase doit être comprise à tous les sens du verbe “reprendre”. Elle veut dire d’abord que le film, dont le titre était un palindrome, eût gagné à être revu à l’instant, pour atteindre plus pleinement son effet désespérant : c’est quand on a connu la fin qu’on peut savoir comment il fallait comprendre le début. Elle veut dire aussi qu’il faudra recommencer, tant l’action évoquée que les commentaires à ce propos. Elle veut dire enfin qu’il faudra tout reconsidérer depuis le début, corriger, blâmer peut-être, pour arriver un jour à des résultats plus dignes d’admiration. »

        Debord nous invitait à lui tordre de cou.

      2. Avatar de Marlowe
        Marlowe

        Des prédictions ?
        Ne confondez vous pas Debord et madame Irma ?

      3. Avatar de Marlowe
        Marlowe

        à Jean-Luce Morlie,

        A lui tordre le cou

        C’est votre interprétation.
        Je pense qu’il nous dit qu’il faudra poursuivre la lutte jusqu’à obtenir des résultats plus satisfaisants.

    2. Avatar de RIOU René
      RIOU René

      @Marlowe

      J.K. Galbraith est aussi de notre côté.

      sur la base des pressions financières et politiques et des modes du moment, la théorie et les systèmes économiques et politiques en général cultivent leur propre version de la vérité. Une version qui n’entretient aucune relation nécessaire avec le réel. » « (sans) aucun sentiment de culpabilité ni de responsabilité ».

      « La mainmise du secteur privé sur l’action et l’autorité publiques est un triste spectacle en matière d’environnement et un grand danger en politique militaire et étrangère. » « Les problèmes économiques et sociaux peuvent être réglés par la réflexion et l’action. Ils l’ont déjà été. La guerre reste l’échec humain décisif.

      Surtout lorsqu’on se prend des déculottées en orient (extrême ou moyen). Si vous voyez ce que je veux dire…

  22. Avatar de Hervey

    Sur quoi repose le principe de réalité? Illustration de l’artefact par Gainsbourg et BB.
    J’écoutais hier l’invité de C’politique, Alain Minc, et il était bien calé dans sa Harley Davidson, basculé en arrière comme dans un fauteuil et les cheveux au vent.

    1. Avatar de Hervey

      Désolé, dysfonctionnement sur le lien, voici la chanson de Gainsbourg par BB et pour parler rapidement de la réalité de la route, cette signalisation qui a semble avoir échappée au conducteur et conseilleur des banques.

  23. Avatar de François Leclerc
    François Leclerc

    A la réalité correspond le réalisme, auquel il est beaucoup fait appel. Premier prix au championnat du conservatisme, puisqu’en son nom est rejeté tout ce qui n’est pas possible et hors de portée, non sans arrières-pensées. Bouchon destiné à contenir les aspirations et les désirs, dont certains peuvent contrevenir à une norme sociale et d’autres à contribuer à mettre en cause une organisation de la société.

    Il lui est souvent opposée l’utopie, qui serait une réalité idéale, une société sans défaut et inatteignable. Les utopistes seraient au mieux de doux farfelus et au pire de dangereux agitateurs.

    Est depuis venu se nicher, non sans provocation, l’idée d’une utopie réaliste, accolant deux mots qui à priori sont contradictoires. Correspondant à un double phénomène : ceux qui se prévalaient du réalisme ont perdu l’équilibre, tandis que d’autres expliquent qu’ils sont réalistes en préconisant de très grands changements.

    Sur quoi ces derniers s’appuient-ils  ? Sur la réalité de la crise en cours. C’est ce que l’on appelle un retournement de situation.

    1. Avatar de Marlowe
      Marlowe

      L’utopie réaliste existe depuis la Première Internationale.
      La « crise en cours », même si je dois admettre qu’elle a des aspects modernes, n’est pas une nouveauté et ce n’est pas parce que l’idéologie dominante matérialisée (le Spectacle) nie cette utopie qui est non seulement réaliste, mais nécessaire, que celle-ci n’existait plus.
      Elle était refoulée.

      1. Avatar de Jean-Luce Morlie
        Jean-Luce Morlie

        Marlowe, la lutte oui ! je vous répond ici plutôt que . Debord considérait les théories comme de simples armes, à lancer « imparfaites, en l’état » dans les batailles. L’ennui actuel vient, non pas du manque d’utopies (voyez les « décroissants » qui font l’impasse sur l’analyse des rapports de forces entre groupes sociaux) mais du vide d’imagination sociologique au sens de Wright Mills. Pour la changer la société, nous devons partir de la société telle qu’elle est, et nous ne la comprenons guère, la droite casse ses jouets, l’ultragauche attends la prolétarisation des classes moyennes pour en revenir à son plan de bataille en forme d’opposition frontale bourgeoisie prolétariat , Mélanchon aboie, la gauche se régale de la corruption « des gros », masque son clientélisme local par lequel, pour moindre passe-droit et petit avantage, elle corrompt les plus petits, tandis qu’elle se tortille entre ‘cul et chemise’ avec la droite, pour renforcer sa propre nomenclature.

        Ne regardons-nous regardons pas l’avenir des batailles avec des cartes pour un champ entièrement disparu? Pour imaginer concrètement l’avenir, il nous faudra nous regarder nos erreurs passées, et pour cela littéralement nous « tordre le cou ». Si l’avenir est la réalisation de ce qui a été pensé en 1848, il nous faudrait, par exemple, une analyse des rapports entre groupes sociaux en Grèce ce qui, je crois, n’est pas simple. Lorsque l’OCL titre « Pas de vacances pour la guerre de classe », je ne crois pas que l’OCL fasse le décompte entre le groupe des petits fonctionnaires qui ne paient plus le métro et le même groupe lorsqu’il arrondi ses fins de mois de « fakelakia » (petite enveloppe) et ainsi de suite pour toutes les situations particulières à chaque groupe, si vous avez une idée de la façon de nous emparer de l’appareil d’état, (« par la violence  » …allez bon..s’il le faut ..) et de là, avoir quelque assurance construire quelque chose de moins atroce ensuite… dite le !

        « Glasnost et Perestroïka » conduit à Poutine et faire la manche à coup de sacs Vuiton.

        Comment va Godard ? Le fisc lui a-t-il saisi son instrument de travail, (sa maison de production)? aux dernières nouvelles, après Socialisme – aujourd’hui les salauds sont sincères –, il disait pouvoir tenir un peu plus d’un an …

    2. Avatar de et alors
      et alors

      plutôt une transition de phase, une bifurcation…
      La poursuite d’un « chemin faisant » par certains pour qui la crise en cours ne date même pas d’hier.
      Patience… »l’an 01″… »la gueule ouverte »… ont déblayé le terrain…
      alors ? « un pas de côté » à la Gébé …ou Pierre Fournier…

    3. Avatar de Kerjean
      Kerjean

      Le plus consternant, c’est que ces trente dernières années, le « pragmatisme » a consisté en dérèglementation systématique et au recul de l’état.
      A postériori, nul ne peut contester que ce « réalisme » était on ne peut plus doctrinaire.

  24. Avatar de juan nessy
    juan nessy

    J’attends le commentaire de Paul Jorion et de Jducac avant de me prononcer !

  25. Avatar de MerlinII
    MerlinII

    pour beaucoup parler de la mondialisation, c’est parler d’un fait au même titre que s’il s’agissait de la succession du jour et de la nuit.

    J’ai toujours été frappé par le fait que les phénomènes économiques (la mondialisation, la croissance, les décisions de Bruxelles…) sont vus et pensés comme des phénomènes météo contre lesquels on ne peut que craindre ou espérer.
    D’un autre coté, notre sentiment d’impuissance face au politique et à l’économie n’est pas totalement dénué de fondement quand on voit ce que deviennent les décisions souveraines, ou ce qu’il en reste, comme par exemple le NON au projet de constitution de 2005.
    Une autre difficulté, et pas des moindres, est que les alternatives au capitalisme restent en grande partie à construire, si l’on met de coté l’expérience socialiste soviétique qui sert d’anti-modèle absolu.
    Avec en prime des difficultés supplémentaires; 7 milliards d’individus aujourd’hui (un doublement en 40 ans), une raréfaction déjà constatée des ressources, et une nécessité de produire et de vivre ensemble différemment. Bref, quelque chose qui ressemble à un saut dans l’inconnu, dans un contexte de guerre des riches contre les pauvres.
    D’un autre coté, il est frappant de voir que de plus en plus de voix s’élèvent (dont la votre) pour constater que nous n’aurons pas d’autres voies que d’abandonner ce vieux système.
    Les plus frileux (ou les prudents) tentent un ultime aménagement du capitalisme en tentant de museler sa composante délétère, à savoir, séparation (ou disparition) de la spéculation bancaire de l’activité de gestion de l’épargne et de l’investissement. C’est le programme du parti socialiste.
    On peut voir aussi ce programme, s’il réussit, comme un sas, ou un pas en avant, ou un test, avant un plus saut plus grand. Ce n’est pas nécessairement négatif car il est peu probable qu’un n-ième programme « révolutionnaire » ne surgisse et n’emporte l’adhésion de peuples entiers, même en Grèce.
    L’apprentissage de la marche se fait en marchant.
    Comme le disait ce bon vieux Aristote: Les choses que l’on devrait avoir apprises pour les faire, c’est en les faisant que nous les apprenons.
    Ceci pour tenter aussi de répondre à « idle » qui pense que nos pensées sont formatées (voie formolées) et qu’en changer n’est pas à la portée de nos esprits embrumées de consumérisme.
    J’ai toujours pensé (peut-être à tord) que ceux qui espèrent qu’un changement politique ou économique, ne peut passer préalablement que par un changement des mentalités, se trompent.
    Ce sont les conditions de nos vies qui changent qui nous changent. Le mimétisme ambiant fait qu’à un moment, une certaine masse critique oppose toute son inertie ou au contraire emporte tout sur son passage et fait basculer l’opinion.
    Par exemple; que des riches commencent à dire; taxez-nous d’avantage ?!
    Et si l’on disait chiche!

    1. Avatar de Max Berthy
      Max Berthy

      N’est-ce pas en tombant que l’on apprend à marcher ?…

  26. Avatar de carlo
    carlo

    De « c’est la réalité », on infère en effet souvent à tort « il faut vous soumettre ».
    Mais je ne crois pas que ce paralogisme s’explique par la différence entre les faits naturels et les artefacts humains. Les faits naturels n’ont pas toujours la permanence qu’on leur prête (le climat, par exemple, et la terre elle-même d’ailleurs, a une histoire). Inversement, les artefacts ne dépendent pas totalement de nous : les centrales nucléaires sont construites par les hommes mais en cas d’accident, ils n’en ont malheureusement pas toujours le contrôle.
    Il me semble que ce paralogisme (« c’est la réalité » donc « il faut vous soumettre ») résulte plutôt d’une confusion entre le réel et le possible. Tout ce qui est réel est, par définition, possible. Mais il ne s’ensuit ni que ce qui n’est pas réel est impossible ni, ce qui est d’ailleurs la même chose, que tout ce qui est possible est réel. Le possible n’est pas coextensif au réel.

  27. Avatar de Leboutte

    @Jérôme Grynpas:

    Je trouve que, malgré vos précautions et votre critique de la réalité telle qu’elle est, disons, imposée par les hauts-parleurs, votre appel de la raison contre l’émotion exprime les illusions de l’intellectuel ou la protection de sa caste. Implicitement, « se révolter sans avoir la solution » est connoté négativement sous votre clavier. Votre phrase « Les grandes mutations ont toujours été précédées par un intense travail idéologique et non par une levée rageuse de « petits poings impuissants » comme le disait François Mauriac » , outre qu’elle fait d’un catholique conservateur une espèce d’expert en la matière, ne me convainc pas, mais pas du tout.

    À cela, je réponds en vrac:

    Un intense travail de déligitimation idéologique est tout à fait nécessaire et il a lieu forcément avant toute grande mutation. « Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux » , disait La Boétie, et cela doit sûrement s’entendre au figuré autant qu’à la lettre. Je me réjouis donc de l’intense production éditoriale critique actuelle. Il y a cependant, tout aussi inévitablement, un renforcement réciproque de la révolte et du mouvement intellectuel, qui s’alimentent et se légitiment l’un l’autre.

    Le mouvement historique n’a sans doute pas encore, loin s’en faut, trouvé sa théorie plus ou moins complète et indiscutable. Il me paraît cependant plus que probable qu’à côté du « développement des forces productives » de Marx, à quoi on ne peut réduire sa pensée, à côté de l’action idéologique où les intellectuels sont importants, mais pas les seuls, car une certaine vox populi aussi délégitimise les mots du pouvoir, il y a la fureur, le dégoût, le ras-le-bol, la combativité, toutes sortes de choses bien charnelles et bien émotionnelles, comme producteurs de mouvement historique, ou produits par le mouvement historique, allez savoir, car ici aussi la causalité ne paraît ni simple ni tranchée. Et il y a encore le rêve et même l’inconscience!

    À n’en pas douter, tout discours humain est marqué d’inconscience, le mien, le vôtre, celui de Paul Jorion, tous! L’humanité et le progrès de la conscience ne sont pas pensables sans reconnaître cette part universelle d’inconscience.

    Pour terminer provisoirement, les discours savants, humanistes, éclairés, militants, … qui critiquent la « révolte sans solution », celle des indignés par exemple, ou celle des villes britanniques, ou …, ou… , …je les ai dans le nez ! Elles me paraissent pharisiennes et manquer de fraternité et d’humilité, d’intelligence du coeur et d’intelligence de l’esprit.

    Nous sommes sans doute, tous, ici, heureux de la révolution française et du tournant qu’elle a marqué dans l’histoire, qui a rendu nos vies plus dignes et plus riches. Et pourtant, quelle part d’inconscience dans cet événement, et quel nombre d’inconscients y ont jeté toutes leurs forces!

    Revendiquons le droit de nous révolter, même sans solution. Revendiquons le droit d’agiter les questions auxquelles nous n’avons pas les réponses.
    Ceux qui disent autre chose ont les réponses avant de poser les questions! Quel est le mot, encore, qui désigne cette (dangereuse) posture ?

    Dans le glacis néo-libéral qui craque mais domine encore si largement les consciences, tout mouvement émotionnel d’indignation ou de révolte est un premier pas salutaire qu’il faut …saluer. Qu’en tout cas je salue.

    Fraternellement!

    1. Avatar de taratata
      taratata

      @ Leboutte : « Ceux qui disent autre chose ont les réponses avant de poser les questions! Quel est le mot, encore, qui désigne cette (dangereuse) posture ?  »
      Faites excuses , j’trouve pas ………

      1. Avatar de Leboutte

        Hi hi…

        Une vieille histoire figure dans le Talmud (ou autre texte hébraïque, je cite de mémoire). Un jeune rabbin très doué parcourait les rues en criant: « Des questions! Posez-moi des questions! J’ai les réponses! » La légende dit qu’il devint rapidement fou.

  28. Avatar de Merl Mokeur
    Merl Mokeur

    Il y a trois réalités: la physique ou « naturelle  » pour laquelle on fait confiance aux sciences « dures »: il y a débat scientifique avec des déviances idéologico-financières: Mediator, réchauffement climatique…
    -la réalité socio-économique vécue par 95% de la population mondiale, ceux qui vivent de leur travail;
    – la fable « réaliste  » de l’oligarchie financière qui contrôle 95% des media et qui est bien décryptée sur ce blog.

  29. Avatar de Michel Martin

    Le massacre des utopies.

    Jean Zin est un utopiste qui entend procéder au massacre des utopies. J’adhère à sa démarche que je m’applique à moi-même. Il s’agit d’aller aussi loin que possible par l’approche intellectuelle et expérimentale dans le (stress)-test de la cohérence entre une bonne intention et sa mise en pratique. Est-il besoin de se rappeler où nous a mené l’utopie communiste pour se convaincre du bien fondé de la démarche de Jean Zin? Si le ciel est garni des étoiles de nos aspirations les plus nobles, l’enfer est pavé de nos meilleures intentions.

    Nos représentations font partie du réel et c’est en fonction de ces représentations que nous prenons nos décisions qui à leur tour interagirons avec le réel.

    Dans les débats politiques se joue aussi la quête de la place, du pouvoir. Il y a donc un jeu de valorisation/dévalorisation de chacun des prétendants. Utopique ou utopiste fait partie du vocabulaire de dévalorisation usuel dans cette course au pouvoir pour discréditer l’autre.

  30. Avatar de Delphin
    Delphin

    Bonjour,

    J’ai donc lu – ainsi que me le conseillait Charles A – « les fondements d’une statégie écosocialiste », de Daniel Tanuro.

    Je ne peux qu’en conseiller la lecture à qui chercherait à savoir si la « perception de caractère productiviste » de la réalité par les socialistes peut évoluer.

    Il aura donc fallu en arriver à cet effondrement écologique généralisé (jusqu’à la perturbation climatique !) pour que la vision productiviste socialiste ( aveuglement idéologique) esquisse, par ses marges, un virage à 180°.

    Il me semble qu’il existe encore quelques scories idéologiques :

    (citation) : » tout propriétaire de capitaux cherche en permanence à remplacer du travail vivant par du travail mort, autrement dit des travailleurs par des machines plus productives, car celles-ci lui procurent un surprofit en plus du profit moyen. »

    L’auteur a-t-il entendu parler de « la variation tendancielle du taux de profit », qui explique pourquoi, finalement, le capitaliste (sauf marché de niche particulière type Coca cola), n’a d’autre choix que cette fuite en avant, puisque son profit baisse drastiquement, au fur et à mesure que les concurrents investissent la niche lucrative initiale (écrans plats par ex.).

    Le capitaliste moyen se retrouve donc en situation du champignon macrophage, qui voit l’arbre dont il se nourrit, péricliter sous les appétits de ses concurrents champignons (« Un champignon, ça va. C’est quand ils sont beaucoup… »)

    Citation : « La seule question digne d’intérêt consiste à se demander dans quelle mesure l’aveuglement écologique du mode de production marchand pourrait être compensé par des mesures politiques, exogènes à la sphère économique proprement dite. »

    Comment se fait-il que cet aveuglement ait été également et soit encore le fait général du monde socialiste ? (cf Le parti communiste et la CGT qui sont encore pronucléares).

    Votre réponse ,  » Les ancêtres socialistes ne l’avaient pas compris. », me semble bien courte.

    Amicalement,

    Delphin

    1. Avatar de lisztfr
      lisztfr

      http://www.imdb.com/character/ch0005249/quotes

      Monica: David, this is your new toy.
      Teddy: I am *not* a toy!

      Monica: Cirrus, Socrates, particle, decibel, hurricane, dolphin, tulip.

    2. Avatar de Charles A.
      Charles A.

      @ Delphin
      Evidemment, Tanuro, ingénieur, et militant révolutionnaire (LCR de belgique) connait parfaitement non pas la « variation » mais la » baisse tendancielle du taux de profit », liée à l’augmentation de la compositon organique du capital, dans les termes de Marx, disons aujourd’hui au caractère de plus en plus capitalistique de la production. Baisse tendancielle, car des contre tendances, à commencer par le taux d’exploitation, permettent de compenser cette baisse. Ce que l’on a observé sur les 25 dernières années dans les pays de l’OCDE.

      Sur le deuxième point ,vous avez raison:
      PC, PS, ou CGT et bien d’autres organisations de la gauche restent productivistes.
      Et elles ont entrainé les écologistes caviar type EELV a avaler les pire couleuvres.

      Mais ce n’est plus le cas dans toute la gauche réformiste
      (voir PG, reste à voir quand ils auront un ministère dans un gouvernement productiviste).

      Quand au NPA et plus généralement la gauche révolutionnaire,
      à part LO et quelques dynosaures, elle partage les convictions éco-socialistes.
      Elle est même beaucoup plus en avance que EELV.

      1. Avatar de Delphin
        Delphin

        Merci Charles A pour votre réponse.

        Un petit dialogue en place d’un austère monologue n’est souvent pas déplaisant pour un lecteur en goguette ( lecteur troisième larron).

        Citation : « Baisse tendancielle, car des contre tendances, à commencer par le taux d’exploitation, permettent de compenser cette baisse. Ce que l’on a observé sur les 25 dernières années dans les pays de l’OCDE. »

        Est-ce que cette phrase signifie que le dirigeant confronté à l’effritement de son taux de profit réagit par une pression productiviste plus forte sur son personnel ?
        Ce mécanisme est d’ailleurs célébré par les théoriciens du genre puisque, selon eux, il profiterait à toute la société par la baisse des prix, ce qui est là encore une théorie trompeuse (cf les poulets si peu chers, mais pas vraiment poulets)

        Pour moi, si on quitte l’analyse économique, si complexe que chacun peut y trouver son veau, pour s’intéresser à la réalité, cette « baisse tendancielle du taux de profit » s’exprime tous les jours par le rachat des entreprises par plus grosses qu’elles.

        C’est la démonstration de l’absurdité monstrueuse du système (qui n’en est pas un), puisque ça conduit à l’émergence d’une olligarchie forcément la plus inhumaine, puisque c’est le plus sans scrupule qui a pu a manger tous les autres.

        Citation : « Et elles ont entrainé les écologistes caviar type EELV a avaler les pire couleuvres. »
        Ce sont surtout les roués lobbies qui ont noyauté et « acheté » le monde écologiste médiatisé quand ils ont compris qu’ils ne pouvaient plus s’opposer à la lame de fond (Hulot, YABertrand, J. Bové, Noualat à Libération, le WWF, France Nature Environnement etc.)

        Amicalement,

        Delphin

    3. Avatar de lisztfr
      lisztfr

      Très rapidement, l’idée de baisse tendancielle du taux de profit n’est pas très utile, et elle est même nuisible parce qu’elle ajoute de la complexité là où on n’en a pas besoin. Elle cache l’équation de Say pour tout dire, elle fait parti de l’opium marxiste.

      Elle est un piège didactique, pourquoi ?

      – Elle éclipse le problème de la demande globale, bien plus important parce que si l’on prend les choses par là, l’impossibilité du capitalisme saute aux yeux.

      – Elle éclipse la loi des débouchés de Say par la même occasion, bref, le problème évident et bien plus clair de l’insuffisance de la demande dans le capitalisme, comme l’a dit Keynes :

      http://www.citations-ses.net/index.php/?q=keynes

      « Dans l’Économie Ricardienne, qui est à la base de tout ce qui a été enseigné depuis plus d’un siècle, l’idée qu’on a le droit de négliger la fonction de la demande globale est fondamentale. A vrai dire, la thèse de Ricardo que la demande effective ne peut être insuffisante avait été vivement combattue par Malthus, mais sans succès. Car, faute d’expliquer (si ce n’est par les faits d’observation courante) comment et pourquoi la demande effective pouvait être insuffisante, Malthus n’est pas parvenu à fournir une thèse capable de remplacer celle qu’il attaquait ; et Ricardo conquit l’Angleterre aussi complètement que la Sainte Inquisition avait conquis l’Espagne. Non seulement sa théorie fut acceptée par la Cité, les hommes d’État et l’Université, mais toute controverse s’arrêta ; l’autre conception tomba dans l’oubli le plus complet et cessa même d’être discutée. La grande énigme de la demande effective, à laquelle Malthus s’était attaqué, disparut de la littérature économique. On ne la trouve même pas mentionnée une seule fois dans toute l’œuvre de Marshall, d’Edgeworth et du Professeur Pigou, qui ont donné à la théorie classique sa forme la plus accomplie. Elle n’a pu survivre qu’à la dérobée, sous le manteau et dans la pénombre de Karl Marx, de Silvio Gesell et du Major Douglas. »

      => La dernière phrase notamment, elle n’ a pu survivre que dans la pénombre de Marx. Voilà ce que je déplore chez Marx, d’avoir autant obscurci qu’éclairé.

      La baisse tendancielle du taux de profit prédit la mort du capitalisme siné die, et elle est si difficile à comprendre qu’elle ne fait peur à personne, elle ne concerne véritablement personne. Tandis que la Loi des débouchés démontre mathématiquement et logiquement pourquoi ici et maintenant ça ne fonctionne pas ! Notamment qu’il n’y a jamais assez d’argent qui est mis sur le marché par comparaison avec la valeur produite. Probablement je déteste Marx.

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