L’allocution d’Emmanuel Macron, Président de la République française, le 12 mars 2020 – Retranscription

Retranscription de L’allocution d’Emmanuel Macron, Président de la République française, le 12 mars 2020.

Bonjour, nous sommes le 12 mars 2020 et je réagis à l’allocution de M. Emmanuel Macron, Président de la République française – que je viens de regarder.

On attendait son allocution. On imaginait qu’il allait parler du passage à la phase 3. Il a donc réalisé là un exercice très périlleux, il faut le complimenter qu’il l’ait fait, je dirais, de manière présidentielle. On est obligé hélas, ces jours-ci, de féliciter un président pour être « présidentiel » essentiellement parce que les malheureux Américains ont un président qui n’est pas à la hauteur du tout, c’est le moins qu’on puisse dire, de ce point de vue-là.

M. Macron est présidentiel. Il prend les choses avec calme, avec autorité. Il en parle avec beaucoup d’assurance. Il est rassurant. Donc, il faut le complimenter là-dessus.

À titre personnel, je le complimenterai aussi sur le fait qu’il a fait l’éloge de l’Etat-providence et qu’il a implicitement émis une critique de l’ultralibéralisme en disant qu’il fallait revenir à des grands principes comme ceux de la solidarité et de la protection de l’Etat-providence.

On verra ce que ça donne parce que « chat échaudé craint l’eau froide » : on a déjà entendu le discours de Toulon de M. Sarkozy – c’était en 2008 – nous disant qu’« on avait tiré les leçons, qu’on savait qu’il fallait changer la finance, qu’on allait changer entièrement notre système, etc. parce qu’il avait fait faillite ». Et ce qu’on peut reprocher à M. Sarkozy, ce n’est pas d’avoir dit que le système avait fait faillite : ça, c’était évident, mais qu’après, il ne se soit absolument rien passé. Donc, on va voir ce que ça donne cet éloge de l’Etat-providence et cette critique implicite de l’ultralibéralisme.

M. Macron a annoncé une fermeture des établissements d’enseignement, ce qui est une bonne idée : il faut limiter les contacts et les déplacements.

Par ailleurs – et là, on tombe dans le hautement critiquable – il a maintenu les élections municipales, en tout cas, le premier tour. Il a dit aux vieux de plus de 70 ans de rester à la maison, de ne surtout pas bouger, sauf peut-être pour des choses essentielles comme… d’aller voter.

Là, on est dans le n’importe quoi. La prudence élémentaire était qu’on n’aille pas faire d’exceptions à des grands principes de confinement, d’empêcher les contacts sociaux. C’est bien de ne pas s’embrasser, c’est bien de se saluer avec le coude, etc., mais pour aller faire la queue quand même dans les bureaux électoraux ? Ça, c’est de l’ordre du très dangereux ! Tout contact est dangereux. Il n’y a pas l’option de mettre entre parenthèses le fait d’aller voter par rapport à l’interdiction des rassemblements : c’est un rassemblement. C’est un rassemblement donc c’est dangereux.

Par ailleurs, ce qui a été dit sur l’économie, qu’« on allait réagir, on allait faire ce qu’il fallait, qu’on a vu que la Bourse est en train de s’effondrer et qu’on allait réagir au niveau européen », mais comment voulez-vous réagir à ce qui est maintenant – j’ai fait le calcul tout à l’heure – une perte pour le CAC 40 de 33%.

La Bourse, c’est une évaluation de l’économie d’un pays. Ce n’est pas un reflet exact : il y a une dimension spéculative, il y a de l’offre et de la demande là-dedans mais c’est quand même un cliché au sens de la photographie : une vue instantanés de la situation d’un pays et ce qu’on a vu ce soir, c’est donc une perte d’un tiers de la valeur depuis quelques semaines seulement, même pas un mois.

Donc, tout ça est sympathique. Tout ça, c’est encore de la démocratie mais ça apparaît quand même comme des demi-mesures et surtout, comme du contradictoire : ça va un peu dans le bons sens, ça va un peu dans le très mauvais sens.

Qu’est-ce que ça va donner ? D’une certaine manière, on a compris, M. Macron veut empêcher que la population ne panique et, d’une certaine manière, il nous dit : « Voilà, je vous dis le plus gros et le ministre de la Santé et d’autres ministres vous diront demain le complément ». Donc, le test, il aura lieu demain. Si M. le Ministre de la Santé dit toutes les choses impopulaires que M. Macron n’a pas voulu dire ce soir, si d’autres ministres nous disent aussi demain qu’il ne faut pas faire un certain nombre de choses parce que
c’est trop dangereux, ça c’est bien. Espérons que ce sera ça !

Espérons qu’on ne restera pas dans le sentiment comme ce soir de quelqu’un qui domine la situation mais laisse des choses essentielles entre parenthèses et laisse flotter un doute profond sur ce que les mesures seront véritablement. Il faudra voir demain.

Il faudra voir demain, comme je le disais : félicitons un président d’être présidentiel puisque c’est devenu une denrée rare mais voyons demain ce que ça donnera.

Bonsoir.

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