La violence nue, par Dominique Temple

Billet invité. P. J. : Je me permets d’attirer votre attention sur ce qui me paraît une réflexion essentielle ici sur le meurtre-suicide. Ouvert aux commentaires.

Toutes les sociétés, nous rappelle Marcel Mauss, sont fondées à l’origine sur le principe de réciprocité. Mais d’où vient que depuis l’origine des temps les sociétés se livrent des guerres inexpiables ? Serait-ce que chaque système de réciprocité produirait un sentiment de l’humain, exclusif et irréductible ? Hors de la réciprocité, autrui serait-il abandonné aux forces de la nature ?

La violence et la réciprocité.

Rappelons comment la violence est maîtrisée dans le domaine politique où la réciprocité est généralisée, et dans le domaine religieux où la réciprocité est centralisée (réciprocité centralisée).

Dans la réciprocité centralisée, l’intermédiaire commun est seul responsable de la justice. Toute la communauté lui est redevable sans que cette allégeance paraisse une aliénation. Dès lors qu’un membre de la communauté se révolte, la totalité de la communauté doit être restaurée, la “brebis perdue” retrouvée ; la communauté paie sa réinsertion par le sacrifice expiatoire souvent interprété comme purification après une souillure [1]. À qui ne trouve pas sa place dans la totalité, la société oppose une contrainte pour le soumettre à la Loi [2]. Qui refuse d’être réintégré dans la totalité est banni de l’humanité. Cependant, lorsque l’imaginaire l’emporte sur le symbolique, la parole (religieuse) n’exprime plus que le pouvoir de cet imaginaire.

Si deux paroles religieuses se trouvent face à face, chacune frappe l’autre d’ostracisme, comme les catholiques, les cathares ou les protestants, ou les sunnites les chiites, et les chiites les sunnites… Elles s’affrontent dans des luttes sans pitié comme celles qui déciment aujourd’hui les populations sous le joug des diverses confessions islamiques.

Dans la réciprocité généralisée, la réciprocité positive est opposée à la réciprocité négative. Si l’imaginaire de la réciprocité négative l’emporte, la vengeance semble justifier la violence parce qu’elle produit le sentiment d’être humain dans l’imaginaire de l’honneur. Selon le grec ancien, la notion de réciprocité (antipeponthos) tire son origine de cette relation de réciprocité négative (antipaskein = souffrir à son tour). La tradition hébraïque ordonne la vengeance de celui qui a subi la violence, le talion [3], à une finalité éthique.

Dans les sociétés où domine la réciprocité négative, le meurtre de vengeance n’est pas dirigé contre l’auteur du premier meurtre mais à défaut contre n’importe qui peut lui être substitué comme victime. Ce qui importe n’est pas la haine ni une vindicte subjective mais le respect de la structure de réciprocité négative parce qu’elle est la matrice du sentiment de l’honneur. La réciprocité négative paraît erratique ou aveugle, mais elle est en réalité systémique. Elle fait apparaître mieux que la réciprocité positive que le symbolique ou plus précisément le surnaturel se paie du sacrifice. Cependant, nombreux sont les peuples qui ont dominé la violence en remplaçant la réciprocité négative par la réciprocité positive [4]. Et lorsque à l’intérieur du domaine social structuré par la réciprocité positive un membre de la communauté fait intervenir une modalité de la réciprocité négative, le rétablissement de la réciprocité positive exige la dénonciation de cette modalité négative comme le mal [5]. La violence devient sanction [6].

Sans doute la parole religieuse s’accorde plus aisément avec la réciprocité centralisée en conjoignant les diverses activités de la cité sous un seul commandement, tandis que la parole politique s’accorde plus aisément avec la réciprocité généralisée, mais pouvoir religieux et pouvoir politique n’en sont pas moins concurrents, et leur rivalité est une des causes les plus importantes des turbulences de la société. La violence resurgit en effet de l’antinomie du pouvoir religieux et du pouvoir politique, comme on peut l’observer dans le monde arabe et musulman où la compétition pour le pouvoir politique et le pouvoir religieux est demeurée jusqu’ici sans solution.

Mais laissons à présent cette violence instituée par l’imaginaire sous les catégories du bien et du mal, c’est-à-dire la violence utilisée comme purification ou sanction, et la violence qui oppose des systèmes concurrents pour réfléchir sur la violence absolue, la violence du pouvoir souverain, à la limite donc des systèmes de réciprocité. Que se passe-t-il aux limites de la réciprocité lorsque commence le non-humain, et la possibilité de la guerre totale. N’y a-t-il pas d’autre avenir que la guerre ?

La violence et le libre-échange

Face à l’absolu de tout sentiment, éthique compris, la conscience se rebelle. Elle cherche à s’affranchir de la sujétion à l’absolu de la conscience affective. C’est au nom de la raison que chacun entend dès lors s’adresser à autrui. Comme le libre-échange bannit toute interférence éthique, la raison propose de remplacer aux confins de l’idéal de chacun la guerre par le libre-échange. Dès lors la violence n’apparaît plus que sous l’aspect modéré de la concurrence (le doux commerce).

La société libérale se fonde sur les principes de liberté et de justice. Le bien revendiqué en fonction de l’intérêt propre implique que tout individu puisse actualiser ses compétences en fonction de ses préférences et de son idéal. Cette égalité de droit implique que sa liberté n’entrave pas la liberté des autres. L’éthique libérale a donc pour postulat le respect de la liberté individuelle. Le libre-échange et la propriété privée sont alors présentés comme les conditions préalables à la souveraineté de l’individu sur sa propre vie dont il peut se déclarer responsable.

Toutefois quelque chose obscurcit cette argumentation. Responsabilité, justice, liberté sont des sentiments attribués à l’individu. Lorsqu’ils s’expriment, ces sentiments sont la manifestation du pouvoir de l’individu, et l’expression d’un pouvoir souverain. Ce pouvoir se trouve nécessairement confronté à celui d’autrui. Et voici le paradoxe : le libre-échange, par sa neutralité, se propose comme alternative de la guerre, mais soumettant la raison à l’intérêt de l’individu, il aliène la liberté dans le pouvoir de chacun. La liberté cesse donc d’être commune. C’est au pouvoir de domination des uns sur les autres que la raison utilitariste enchaîne la liberté, et à la force qu’elle réduit la valeur.

La raison dans l’échange s’inquiète des choses et de leur prix, chacune répondant de son utilité. Elle évalue le risque et le coût de l’affrontement nécessaire à leur acquisition. Au lieu de prendre conscience de la genèse de la valeur, elle sert le pouvoir d’une liberté arbitraire. L’objectivité des rapports de force dans le cadre du libre-échange est indifférente à toute référence éthique due aux relations de réciprocité qui sont aussitôt interprétées comme des obstacles à la libre circulation des richesses [7]. La condition du libre-échange est la propriété privée. Aussitôt que la réciprocité est remplacée par le rapport de force instauré par la privatisation de la propriété, la société est privée de la matrice qui lui assurait une éthique commune.

Lorsque les prolétaires se rebellent, ils remplacent l’arbitraire de la liberté individuelle par l’égalité. Le collectivisme s’oppose donc à l’individualisme mais aussi à la relation de réciprocité : il l’annihile au bénéfice de l’identité collective. La privatisation de la propriété se présente alors comme le bouclier de la liberté individuelle face au collectivisme, comme on l’observe dans l’Europe de l’Est depuis l’effondrement de l’Union soviétique, mais elle n’en demeure pas moins le puits sans fonds de l’accumulation capitaliste. Individualisme, libéralisme, capitalisme s’enchaînent.

Le collectivisme ayant été récusé (Gorbatchev), le libéralisme est seul aujourd’hui à défier la liberté commune au nom de la liberté arbitraire. Lorsque le capitalisme rencontre un marché de réciprocité ou de redistribution traditionnel, il le détruit comme en Amérique, en Chine, en Australie, au Japon… Il s’offre même le luxe de récupérer l’imaginaire des sociétés vaincues pour défendre ses intérêts [8]. Et il suffit que les individus s’unissent en fonction de leur intérêt pour que naisse le fascisme. En cas de dépression économique, la dérive du libéralisme en fascisme est systématique.

L’antinomie entre la force et la valeur se manifeste non seulement par une violence aveugle mais erratique : aucune référence qu’elle soit de nature affective ou rationnelle ne peut ancrer cette violence sur autre chose que le pouvoir pour le pouvoir qui se prétend la liberté absolue.

L’impuissance de la raison à créer l’éthique commune dans le domaine économique est une conséquence de l’interprétation des rapports économiques comme rapports de force.

Aux frontières du libre-échange, la violence militaire relaie la force monétaire. Si l’échange est l’alternative de la guerre, où cesse l’échange la guerre devient totale. Il devient ainsi possible de détruire ceux qui refusent de se soumettre au système capitaliste par des meurtres de masse, bombardements aveugles, ou des assassinats ciblés sans éprouver le moindre sentiment de culpabilité [9]. Il y a une relation entre l’aliénation de la raison dans le pouvoir pour le pouvoir, le pouvoir nu, et la violence nue que les critiques de cette aliénation dénoncent à juste titre comme la manifestation du Satan.

C’est donc à la frontière non pas de la raison mais de son instrumentalisation par la force que naît l’aliénation de l’échange. La raison n’est pas en cause ! [10]. Mais l’aveuglement de la raison par la force efface de la conscience les valeurs symboliques qui devraient en constituer la puissance éthique [11]. L’absolu de la conscience affective et des valeurs éthiques n’est donc pas la seule origine de la violence nue. L’aliénation de la raison dans la force l’est tout autant.

D’où vient donc que d’un côté la raison condamne le meurtre, et que de l’autre côté la société qui se prévaut de la raison assume le crime inavoué, la torture, la guerre, et qu’elle s’enrichisse de la vente d’armes aux peuples qu’elle pille, détruit et conduit au chaos ?

Cette contradiction a sa source dans le primat de l’individu qui s’autorise à définir la liberté en fonction de son intérêt, au prix de la liberté commune engendrée par la réciprocité.

Il appartient donc à la raison de se libérer du pouvoir capitaliste qui l’utilise de manière irrationnelle, et de reconnaître que le pouvoir nu associé à la violence nue n’est pas la bonne réponse à la violence du symbolique.

Le suicide des victimes peut apparaître comme un ultime recours pour dénoncer l’hypocrisie de ceux qui substituent à l’éthique commune leur liberté arbitraire en niant la réciprocité. Le suicide somatise la mort annoncée et renvoie au meurtrier l’évidence de son crime (Jan Palach). Le criminel démasqué est cependant privé du sentiment commun d’humanité que pourrait lui valoir la réciprocité de vengeance parce qu’il lui faudrait subir une agression pour prendre conscience de son acte, et qu’il ne peut la subir puisque sa victime refuse de se venger [12]. Il est certes exclu de l’Humanité. Mais une telle excommunication est sans effet sur qui ne peut se reconnaître dans le sentiment d’humanité auquel en appelle la victime faute d’appartenir à un système de réciprocité. Le suicide de Bobby Sands et de ses camarades est inefficace sur Mme Thatcher.

Le suicide peut alors s’accompagner d’un meurtre, le meurtre-suicide, qui peut s’interpréter comme un défi pour engager la dialectique de la vengeance. Le terroriste force en effet son adversaire à entrer dans la dialectique de la vengeance. En se suicidant, néanmoins, il dérobe à sa victime la vengeance à laquelle elle a droit. Il crée une chimère de réciprocité de vengeance pour s’approprier le sentiment de l’honneur. Il s’approprie la clef de la conscience éthique. Lorsqu’il se réfère à une parole religieuse, il fait de la clef, la clef du paradis, de la valeur son Dieu, et de celui qui se sacrifie dans le meurtre-suicide un martyr. Le meurtre-suicide est une vengeance sans pardon.

L’hypocrite pourrait changer la donne, refuser une telle provocation en se reconnaissant le premier agresseur. Mais il préfère nier et nommer son ennemi terroriste. “Terroristes” les communistes du Vietnam, du Laos, les moudjahidine algériens, les taliban d’Afghanistan, les frères musulmans égyptiens, les feddayin palestiniens, les résistants kurdes, les islamistes… La rhétorique du terrorisme voile qui est le premier agresseur.

En somme les capitalistes ne négocient pas leur système de référence. La coalition des capitalistes en nations, puis en ligues internationales, puis transnationales affronte aujourd’hui les autres puissances du monde, les autres civilisations, en particulier celles qui se réfèrent à une “Loi divine” de façon aveugle. La confrontation du capitalisme et de l’Islam en est une illustration. Le 11 Septembre une image extraordinaire. Le terrorisme islamique dénonce l’hypocrisie capitaliste avec des symboles massifs : la tour de contrôle de l’économie capitaliste, le world trade center ; son centre militaire, le Pentagone ; et son centre politique, la Maison-Blanche. Il frappe par le meurtre-suicide. Peut-on être plus clair ?

Maîtriser la violence

Nous avons reconnu la violence qui apparaît à la limite de la conscience où toute relation se confond avec une relation de force comme la violence nue. La violence nue commence vis-à-vis d’autrui dès lors que la parole de l’individu particulier, ou de la totalité de la communauté, se prétend le pouvoir d’une liberté souveraine. Cette souveraineté est liée à l’absolu des sentiments éthiques nés de la réciprocité, auquel s’ajoute le fait que la parole, qu’elle soit politique ou religieuse (en vertu des deux modalités de la fonction symbolique : le principe d’opposition et le principe d’union), est polarisée par la logique de non-contradiction qui exclut son contraire. La parole politique affronte alors la parole religieuse !

Toutes les valeurs nées de la réciprocité créent une sujétion, insurmontable tant qu’elles sont exprimées dans un imaginaire donné (honneur ou prestige). La réciprocité généralisée (la réciprocité de marché) est la matrice de l’individuation du sujet et de la responsabilité personnelle de tout un chacun vis-à-vis de la société entière. La réciprocité “symétrique” permet aux valeurs de se libérer des imaginaires de la réciprocité positive et de la réciprocité négative comme valeurs éthiques universelles. L’échange qui s’inscrit dans la réciprocité la démultiplie. La raison prétend alors à juste titre mettre fin à la violence nue qui paraissait naturelle hors de la réciprocité. Mais aussitôt le libre-échange soumet la raison à la logique de la force. La liberté individuelle devient arbitraire, et s’aliène par la privatisation de la propriété dans le pouvoir, plus précisément dans le pouvoir du capital qui aujourd’hui ne peut se construire indéfiniment sans détruire autrui, et de surcroît la nature. La société occidentale exerce son pouvoir de domination au nom de la liberté individuelle au prix de la liberté commune, d’où le nom d’hypocrite que lui attribuent ses critiques. Réduite au rapport de force généralisé, la violence devient gratuite.

La conscience éthique se rebelle mais avec des objectifs contradictoires. Au nom de la liberté, elle dénonce la sujétion à la Loi (en particulier lorsque la Loi est dite par la parole religieuse). Mais elle dénonce aussi l’aliénation de la liberté dans le pouvoir, et l’inféodation de la raison à la force.

Comment sortir de l’impasse ? La raison doit maîtriser les structures de production des valeurs humaines ; définir la territorialité nécessaire à la production de chacune d’elles, et relativiser l’absolu des sentiments au bénéfice du respect de la liberté commune qui est le fruit de la réciprocité symétrique, de sorte que chacun ait le choix de participer à la structure de réciprocité dont il appréciera la valeur en connaissance de cause, et reconnaisse le droit d’autrui de participer à des structures de production d’autres valeurs que les siennes. Pour cela, elle doit mettre fin à l’exploitation de l’homme par l’homme et au système capitaliste, déclarer la propriété inaliénable au lieu de la privatiser, libérer les échanges de l’accumulation du profit, et cesser d’inféoder la liberté au rapport de force entre les uns et les autres. Alors la contradiction qui unit l’assassin hypocrite et l’assassin terroriste sera dénouée. L’exclusion et le terrorisme cesseront. La non-violence l’emportera sur la violence, la paix universelle sur l’implosion planétaire.

==================================
[1] La communauté s’identifie au meurtrier “mort spirituellement”. Mais elle rachète son “âme” en acceptant une “mort réelle”, une mortification, en se sacrifiant “réellement”. Lorsque l’on dit que si la communauté ne prenait les devants par une auto-meurtrissure elle encourrait le châtiment des Dieux, on signifie qu’elle serait dans un état de mort spirituelle. Le Dieu vengeur est la représentation de cette mort spirituelle. Voir D. Temple : “La Vengeance. Le principe d’union et le principe d’opposition dans la réciprocité de vengeance” (2003).

[2] Lors de la controverse de Valladolid, par exemple, la question de savoir si les indigènes du nouveau monde avaient une âme opposa deux thèses : s’ils n’ont pas d’âme ils peuvent être traités comme les animaux ; s’ils en ont une ils doivent être christianisés. L’Islam, lui, déclare la guerre à ceux qui s’excluent de la totalité des croyants (les athées).

[3] On trouvera une somme des recherches anthropologiques sur la vengeance interprétée comme échange dans : La vengeance, Paris, Editions Cujas (1981 – 1986) Volume I : A. Adler. M. Bekombo, Cl. Breteau, J. Bureau, J. Chelhod, I. de Garine, Ph. Laburthe-Tolra, T. Schotte, R. Verdier, N. Zagnoli. Textes présentés par Raymond Verdier. Volume II : G. Charachidze, R. Hamayon, A. Iteanu, G. Nicolas. M. Panoff, M. Perrin, S. Tcherkezoff. Textes présentés par Raymond Verdier. Volume III : A. Lemaire, C. Mallamoud, J.P. Poly, J. Svenbro, Y. Thomas. Textes présentés par Raymond Verdier et Jean Pierre Poly. Volume IV : J. Clavreul, G. Courtois, M.M. Davy, J. Ph. Guinle, A. Kremer-Marietti, P.F. Moreau, S.Said, R. Seve, J.L. Vullierme. Textes présentés par Gérard Courtois. Et notre critique où la vengeance est interprétée comme “réciprocité négative” dans : La réciprocité de vengeance. Commentaire critique de quelques théories de la vengeance (2003).

Voir aussi : D. Temple et M. Chabal, “La réciprocité négative chez les Jivaro”, dans La réciprocité et la naissance des valeurs humaines. Paris, L’Harmattan, 1995.

Bartomeu Melià et Dominique Temple, El don, la venganza y otras formas de economía guaraní. Centro de Estudios Paraguayos “Antonio Guasch”, Ediciones y Arte, Asuncíon , Paraguay, 2004. En français : “La réciprocité négative chez les tupinamba”(2004).

[4] Le prestige et l’honneur témoignent de la valeur dans l’imaginaire de la réciprocité positive et de la réciprocité négative, mais ne sont pas la valeur. La valeur est produite par la réciprocité seule, de sorte que ces deux matrices (réciprocité positive et réciprocité négative) peuvent se remplacer l’une l’autre pourvu qu’elles soient égales. Lorsqu’elles se relativisent l’une l’autre, elles donnent naissance à la réciprocité symétrique où la valeur est libérée de tout imaginaire.

[5] Et réciproquement la valeur produite par la réciprocité positive dans un système de réciprocité négative n’est pas appréciée comme amitié mais comme lâcheté, à nouveau le mal. L’affrontement des deux imaginaires antithétiques est cependant relatif car les sociétés préfèrent tirer partie des deux formes de réciprocité. En général, la réciprocité négative s’adresse à l’étranger et la réciprocité positive à la parenté, quoique ce puisse être l’inverse comme chez les Jivaros. La confrontation de ces deux formes de réciprocité dans la mythologie grecque est illustrée par la rivalité d’Achille et Agamemnon, le chef de guerre et le régisseur des récoltes. Cependant, Agamemnon prétend être le plus prestigieux pas seulement par la générosité de ses dons mais par le succès de ses armes. Achille lui refuse cette gloire parce qu’il honore les valeurs nées de la réciprocité négative, et lui conteste à son tour sa générosité car il prétend le surpasser par la redistribution du butin qu’il pille par la guerre. La rivalité des deux héros tournera à l’avantage du régisseur comme si les hommes étaient plus enclins à la paix qu’à la guerre. Voir : Dominique Temple et Mireille Chabal, “La réciprocité symétrique dans la Grèce antique, 1. De la réciprocité positive à la réciprocité symétrique dans l’Iliade et l’Odyssée”, dans La réciprocité et la naissance des valeurs humaines. Paris, L’Harmattan, 1995, pp. 167-186.

[6] Si la réciprocité positive l’emporte, l’imaginaire du prestige projette l’idéal de chacun comme but de la surenchère dans la générosité, le potlatch. L’équipollence des victimes met en évidence l’indépendance du surnaturel vis-à-vis de l’imaginaire, indépendance qui n’apparaît pas aisément dans la réciprocité positive : le partage associe en effet le plaisir que l’on éprouve de l’objet offert à la joie engendrée par la relation de réciprocité : la confusion est aisée au bénéfice de l’objet désiré, et c’est l’occasion d’un basculement de l’amitié vraie dans ce que Aristote appelle l’amitié utile.

[7] Depuis que le libre-échange et l’accumulation capitaliste sont devenus les bases économiques de la société occidentale, la valeur est remplacée par le prix.

[8] Les valeurs issues de la redistribution qui persistent dans l’imaginaire populaire sont alors inféodées au pouvoir capitaliste : la corruption remplace la redistribution.

[9] Le pilote qui voit apparaître sur l’écran de son viseur un point lumineux détectant une vie organique sur la terre d’Afghanistan, fût-elle celle d’un ours, d’un lièvre ou d’une brebis, vise, tire et se réjouit lorsqu’il le voit exploser. L’attention qui mobilise la conscience sur un objet déterminé est exclusive mais son responsable n’en est pas moins un criminel.

[10] La société occidentale ne conçoit plus la guerre comme dans le temps où donner la mort impliquait de mettre en jeu la sienne. Ce mépris de la vie tenait au prix que l’on accordait à l’honneur. Le duel persista en France jusqu’à ces dernières années parmi les hommes politiques (Jean Jaurès au pistolet, Gaston Deferre au sabre !) Il faut mettre au crédit de la raison la condamnation de cette dévotion à l’absolu du sentiment de l’éthique. On a compris, au moins dans les pays où la peine de mort est interdite, que la nature, la vie et le corps, ne doivent plus être sacrifiés à l’absolu de l’éthique mais au contraire protégés parce que participant à la genèse de la conscience. Ce n’est plus pour son salut qu’il est interdit de mépriser le corps, c’est pour le corps lui-même, le corps de qui que ce soit, puisque c’est de lui que chacun tire les moyens de construire sa conscience. L’abolition de la peine de mort en est le signe.

[11] Aujourd’hui personne ne met plus sa vie en jeu dans le meurtre d’autrui. Le premier agresseur se fait même gloire de tuer sans risque. Plus de huit cents raids de l’aviation de l’OTAN ont été nécessaires pour réduire la résistance libyenne et assassiner son despote, mais l’OTAN a pu se vanter de n’avoir pas connu une seule perte humaine. L’objectif de la guerre est seulement de détruire l’autre, comme l’a déclaré le Président des Français lorsqu’on lui demanda ce qu’il ferait de ses ennemis dans le Nord du Sahara. Les pilotes tuent en Afghanistan, Libye, en Syrie ou au Mali sans savoir sur qui ils tirent ni pourquoi. Le peuple n’est pas consulté mais il ne s’en indigne pas, du moins tant qu’il ne court aucun risque.

[12] Chez les Shuar du Pérou, si la communauté de la victime ne se venge pas, la famille du meurtrier insulte celle-ci jusqu’à ce qu’elle procède à la vengeance, par crainte d’être privée d’âme de vengeance. Voir : Temple & Chabal, La réciprocité et la naissance des valeurs humaines. Paris, L’Harmattan, 1995.

Partager :

228 réponses à “La violence nue, par Dominique Temple”

  1. Avatar de Renaud Bouchard
    Renaud Bouchard

    Billet particulièrement intéressant.
    Vous écrivez (je vous cite): »Le terroriste force en effet son adversaire à entrer dans la dialectique de la vengeance. En se suicidant, néanmoins, il dérobe à sa victime la vengeance à laquelle elle a droit. Il crée une chimère de réciprocité de vengeance pour s’approprier le sentiment de l’honneur.  »
    La vengeance peut être considérée comme un droit.
    Comme tout droit, il est loisible à son titulaire de ne pas l’exercer ou de l’exercer (surtout en cette matière) de la manière qui lui conviendra : représailles physiques ou recours à un appareil juridictionnel.
    En se tuant (volontairement ou par erreur), le terroriste ne dérobe rien à sa victime.
    La mort du terroriste le confirme pleinement dans ce qui constitue son essence: une inanité absolue.
    Il confirme de par la conception de son attentat comme par la réalisation de celui-ci ce qu’il a toujours été depuis le début: un « perdant radical », comme l’écrit fort justement Hans Magnus Enzensberger dans son essai intitulé Le Perdant radical, essai sur les hommes de la terreur. Gallimard, 2006.

    « Le raté, écrit Enzensberger, peut se résigner à son sort, la victime peut demander compensation, le vaincu peut toujours se préparer au prochain round. Le perdant radical, en revanche, prend un chemin distinct, il devient invisible, cultive ses obsessions, accumule ses énergies et attend son heure. »

  2. Avatar de Cyril
    Cyril

    En prolongement à ce billet très intéressant, on peut sans aucun doute dire que le contexte ultralibéral favorise l’exploitation de l’homme par l’homme, et n’offre aujourd’hui aucune vision d’avenir aux jeunes « perdus », préférant se tourner vers le terrorisme y remédier.

    Il est vrai que la réciprocité fait partie d’une facette de l’être humain. De plus, peut-être aussi que l’on doit prendre en compte la « singularité » d’une personne humaine pour comprendre comment peut naître le sentiment de jalousie, de colère, l’acte violent. Par exemple, chaque personne est unique physiologiquement et dans sa façon d’être, ce qui peut créer une jalousie d’autrui dans le cas d’une alliance, rendant inaccessible cette personne à d’autres « partenaires »: « Cette personne était à moi, elle était unique ! »

    Par ailleurs, l’être humain comme à l’instar de certains de ses cousins les primates, possède une facette agressive. Et le plus dérangeant dans cela, c’est que nous pouvons même avoir du plaisir dans l’utilisation de la violence symbolique ou physique. Pourquoi ? Sans doute qu’une partie de la réponse (théorie) se trouve dans le fait que l’être humain tente toujours de résoudre les problèmes: soit par son cerveau, soit par la violence de ses coups pour avoir un effet sur la matière et sur la psychologie des autres; nous cherchons de la prévisibilité dans un monde d’aléas. Et lorsque nous nous sentons à l’étroit (géographiquement, socialement, psychologiquement), et les politiciens français actuels le sont, nous tombons dans la solution de la violence pour rendre l’avenir plus prévisible et plus ordonné…

    Le piège, bien évidemment, c’est de tomber, comme G. Orwell le fait remarquer dans ses œuvres (la fermes des animaux, 1984) : on utilise la violence comme solution provisoire afin d’obtenir un avenir plus radieux que le précédent, et qui finalement n’arrive pas. Ainsi on éduque les futures générations dans un contexte de violence, de guerre. C’est là, tout le problème des discours révolutionnaires et bellicistes.

  3. Avatar de devillebichot guy
    devillebichot guy

    Le texte consistant de D.Temple m’apparaît plutôt
    difficile.Y verrait-on plus clair si l’on faisait appel,d’une
    part au mécanisme du « mimétisme » et,d’autre part,au
    phénomène de « bouc(s) émissaire(s) »,dont nous parle
    René Girard ?(le pluriel de « bouc émissaire » faisant
    lui-même question).Les « anthropologues » peuvent-ils
    se permettre de dégager des sortes de lois plus ou moins
    invariantes,d’opposer comme ça le « centralisé »,le
    « généralisé »,le « positif »,le « négatif » et ainsi de suite…
    Cela dit,je ne demande qu’à comprendre et rien d’autre.

  4. Avatar de Sapristi
    Sapristi

    « Le meurtre suicide est une vengeance sans pardon », l’avantage de votre analyse est qu’elle explique aussi bien la matrice psychologique des « tueurs fous » dans les universités américaine et celles des djihadistes. Tout deux se suicident en tuant leurs ennemis fantasmés.

  5. Avatar de Philippe Soubeyrand

    Merci Dominique pour cette démonstration étonnante !

    « où cesse l’échange la guerre devient totale »

    http://www.bloomberg.com/quote/BDIY:IND

    Quant aux forces de la nature ?

    Elles sont d’ores et déjà à l’oeuvre de tout côté et hors de toute réciprocité connue justement, telle aura été la plus grave erreur de l’Humanité !

  6. Avatar de Dominique Gagnot
    Dominique Gagnot

    « Pour cela, elle doit mettre fin à l’exploitation de l’homme par l’homme et au système capitaliste, déclarer la propriété inaliénable au lieu de la privatiser, libérer les échanges de l’accumulation du profit, et cesser d’inféoder la liberté au rapport de force entre les uns et les autres.  »
    —————————-
    Que veut dire « déclarer la propriété inaliénable au lieu de la privatiser » ?
    Sans doute faut il lire « propriété des Ressources primaires », au lieu de propriété tout court??
    ———————–
    Je n’imaginais pas qu’il faille autant de laïus pour convaincre de cette conclusion.

    Sinon, en clair, peut on, donc, dire qu’il faut que la collectivité reprenne la gestion, et donc la propriété, des Ressources primaires ?

  7. Avatar de Denis Monod-Broca
    Denis Monod-Broca

    Pourquoi dire de façon si alambiquée ce que René Girard dit si clairement (sinon du fait de l’hostilité du maître de maison à la «pensée Girard ») ?
    L’homme tuant ses propres congénères, les sociétés humaines ont dû, pour survivre, développer un « système immunitaire ». Ce système immunitaire consiste en la polarisation de la violence de tous contre une victime expiatoire, une victime émissaire, sacrifiée au salut du groupe. C’est comme cela que les sociétés, toutes sans exception, se sont développées.
    C’est ce qu’essaie de faire Hollande : rameuter tous les pays du monde, et aussi tous les Français, contre un ennemi commun, unique, barbare absolu, portant tous les péchés du monde, Daech. Et ainsi faire l’unité, et ainsi faire revenir la paix.
    Le drame est que ça ne marche plus. L’initiative de Hollande a d’ailleurs déjà fait long feu, on l’a vu tout de suite. Car ce système immunitaire, sur lequel s’est construite la culture humaine, est détraqué. Ça ne marche plus. Ça ne marche plus parce que désormais nous savons, plus ou moins certes mais nous savons, faire la différence entre le vrai et le faux, entre le juste et l’injuste. Nous savons que sacrifier une victime unique pour effacer les fautes de tous, c’est injuste. Aussi brutal, cruel et sanguinaire que soit Daech, nous ne pouvons guère passer nous-mêmes pour des parangons de douceur et de bonté (est-il utile ici de rappeler nos crimes ?…), et il est inepte de penser que son élimination pourrait être une solution au chaos que nous avons installé dans cette région du monde.
    Et comme ça ne marche plus, la violence a libre cours.
    Ou presque libre cours : elle est encore, sous nos latitudes, contenue par nos principes et par nos lois. Et ailleurs dans le monde elle encore est contenue, à quel prix !, par les armes US.
    On sent bien à quel point tout ceci est fragile.
    Ceux de Daech l’ont très bien compris et ils ont aussi très bien compris que nous n’avions pas le courage de voir la réalité en face. Le propre des « barbares », que les « civilisés » ne comprennent pas, est qu’ils comprennent, eux, très bien les civilisés.
    En se sacrifiant eux-mêmes, ils rendent manifestement absurde notre volonté de les sacrifier. Ils montrent à la face du monde que le sacrifice n’a plus d’effet. Ils montrent à la face du monde que nous sommes très forts pour énoncer de beaux principes (la justice, le respect de la vie humaine, la fraternité…) mais beaucoup moins pour les mettre en application…

    1. Avatar de Guy Leboutte
      Guy Leboutte

      Denis, le statut scientifique de la production de René Girard est plus que douteux. Il reconnaît lui-même avoir fait oeuvre d’ « apologétique chrétienne ».
      Il fait un long et sinueux parcours dans son gros bouquin Des choses cachées depuis la fondation du monde, pour conclure en une pirouette que la perfection de la réponse au problème anthropologique de notre espèce, c’est l’Évangile!
      Sa séduction réside dans l’étendue de son érudition littéraire et ses innombrables citations.
      Que vous fassiez ou pas cette première lecture, lisez son discours de réception à l’académie française, et vous verrez comme ce qu’il dit de la jeunesse est proprement consternant!

      1. Avatar de vigneron
        vigneron

        Te fatigue pas Leboutte, pour en finir vite et bien avec le bouc Girard il fallait un libéral grand teint et chrétien bon teint au pistolet d’abattage et au couteau à désosser. Manent a fait tout ça très bien y’a plus de trente ans.

      2. Avatar de Basicrabbit
        Basicrabbit

        Pour Thom l’assertion « le prédateur affamé est sa propre proie » est à la base de l’embryologie animale.
        Et peut-être Girard acceptait-il l’idée (je n’ai rien lu de lui) que « le sacrificateur est sa propre victime » est fondatrice des sociétés humaines?

        Les deux assertions, dont l’analogie saute aux yeux, sont à caractère « translogique », c’est-à-dire que leur signification ne peut être examinée dans le cadre de la pensée verbale ordinaire.

        Le programme de Thom est de proposer de nouveaux critères -géométriques- d’intelligibilité pour rendre logiques, intelligibles, de telles assertions (il associe aux deux précitées la catastrophe* « fronce »):
        fonder la Logique dans la Géométrie, tel est le grand tournant morphologique que Thom nous invite à prendre.

        Grand tournant que PJ prend à sa façon dans « Principes des
        systèmes intelligents » lorsqu’il remplace la méthode « des règles » par la méthode du « coup par coup » (cf. Chap. IV)…

        * la théorie des catastrophes est une théorie de l’analogie.

    2. Avatar de Gudule
      Gudule

      « En se sacrifiant eux-mêmes, ils rendent manifestement absurde notre volonté de les sacrifier. Ils montrent à la face du monde que le sacrifice n’a plus d’effet. Ils montrent à la face du monde que nous sommes très forts pour énoncer de beaux principes (la justice, le respect de la vie humaine, la fraternité…) mais beaucoup moins pour les mettre en application… »

      La voilà la « gueule » du « sacrifice »…. : le « diable » est dans les « détails »…

      Deux tonnes de captagon ont été saisies par la police turque dans le sud du pays, près de la frontière syrienne. Cette drogue permettrait aux combattants de Daesh de commettre des atrocités. Un neurobiologiste nous explique son action sur le cerveau.

      « Les forces de l’ordre antidrogue turques ont mis la main sur près de 10,9 millions de comprimés au cours de deux descentes distinctes dans la province de Hatay, frontalière de la Syrie (voir carte ci-dessous), annonce l’AFP. Les policiers ont saisi un premier lot de 7,3 millions de comprimés dissimulés dans 1.300 filtres à huile de moteur. Le second lot a été découvert dans un dépôt. Produits en Syrie, ils étaient destinés aux pays du Golfe. Le second lot a été découvert le lendemain dans un dépôt. Deux Turcs et un Syrien soupçonnés d’être des trafiquants ont été placés en garde à vue. En octobre 2015, les autorités libanaises ont arrêté à l’aéroport de Beyrouth un prince saoudien qui tentait d’embarquer pour Ryad dans un avion privé près de deux tonnes de pilules de Captagon rangées dans quarante valises. »

      http://www.sciencesetavenir.fr/sante/cerveau-et-psy/20151116.OBS9569/qu-est-ce-que-le-captagon-la-drogue-des-djihadistes.html

      1. Avatar de Pierre
        Pierre

        Il faudra bien qu’ on reparle un jour de l’ usage des drogues, légales ou illégales dans nos sociétés.
        J’ en ai testé (euphémisme) beaucoup ; leurs dégâts sur le psychisme sont effrayants, même longtemps après leur usage.
        Elles transforment de fond en comble la personnalité et font faire n’ importe quoi à son utilisateur.
        Provenance ; Afghanistan, Turquie, Chine, Maroc, …
        Pour les légales, il est plus facile de s’ adresser à son médecin et à son pharmacien.
        Le sujet est tombé complètement en désuétude. Vu sa complexité, ce n’ est parfois pas plus mal.

      2. Avatar de zorglub
        zorglub

        « Madame Courage » : la drogue au cœur de la crise sociale en Algérie ?
        http://www.algeria-watch.org/fr/article/tribune/madame_courage.htm

        « … Or, dans son livre La Sale Guerre que j’avais publié à La Découverte en 2001, l’ex-sous-lieutenant des forces spéciales Habib Souaïdia avait raconté comment ses collègues militaires, dans les années 1990, recouraient habituellement à la consommation de « Madame Courage » pour perpétrer les pires crimes contre les populations civiles : « La drogue la plus demandée par les soldats était surnommée par eux “Madame courage”. Au sein des forces spéciales, ce produit a presque la même valeur que la Kalachnikov. Comme son nom l’indique, il donne du courage aux soldats quand ils doivent affronter la mort. Et ils en prennent aussi quand c’est eux qui doivent la donner… De nombreuses fois, j’ai vu des sous-officiers de mon régiment sous l’emprise de cette “Mère courage” : leurs yeux étaient brillants et injectés de sang, ils parlaient plus lentement que d’habitude et ils avaient l’air d’être “ailleurs”. Et le lendemain, souvent, ils ne se souvenaient de rien de ce qu’ils avaient dit ou fait : quand ils étaient dans cet état, ils pouvaient tuer n’importe qui sans même se rendre compte de ce qu’ils faisaient. Le nom de cette drogue était l’Artane. »

        … Plusieurs indices semblent aussi attester que les membres des groupes armés se réclamant de l’islam (les GIA), alors largement contrôlés par les services secrets de l’armée (DRS), étaient sous l’emprise d’une drogue de ce genre quand ils ont perpétrés les pires massacres des années 1996-1998. Nesroulah Yous, l’un des rescapés du massacre de Bentalha, près d’Alger, qui fit plus de quatre cents morts dans la nuit du 23 septembre 1997, rapportait par exemple dans son livre Qui a tué à Bentalha ? (La Découverte, 2000) : « Nous avons trouvé des seringues et des sachets avec de la poudre blanche. […] Un des assaillants tués, un géant, portait une ceinture avec des seringues et de la drogue. » L’enquête sur ce point, particulièrement difficile à mener, reste à faire. Mais il me semble hautement probable que l’usage de la drogue a joué un rôle majeur dans la sauvagerie dont ont fait preuve les auteurs des grands massacres de la fin des années 1990 en Algérie.

        … Habib Souaïdia avait d’ailleurs appris que l’Artane, médicament produit par les laboratoires suisses Sandoz, était commandé en grandes quantités par le ministère de la Défense algérienne pendant les pires années de la « sale guerre ». Et depuis, on a su que cette drogue, dont l’usage régulier à haute dose finit par provoquer une accoutumance presque toujours mortelle, était toujours consommée par d’anciens membres des forces de sécurité algériennes devenus SDF à Paris, comme l’a révélé en 2005 un article assez terrifiant de la journaliste Linda Bendali.
        http://www.algeria-watch.org/fr/article/mil/sale_guerre/paradis_articficiels.htm

        « … Dans son dossier médical, un psychiatre français conclut : « La drogue permet à Walid d’effacer provisoirement la peur de la mort et tous les événements traumatisants qu’il a subis. » « Il est très difficile de sortir de l’Artane, explique Aline Lupuyau, médecin et directrice d’un centre d’accueil pour toxicomanes à Paris. Tout simplement parce qu’il n’existe aucun produit de substitution. La seule solution : une prise en charge psychiatrique lourde. »
        Combien sont-ils, à l’instar de Walid, ces anciens militaires algériens tombés dans la drogue pour survivre aux meurtrissures de la guerre ? Ex-officier des troupes spéciales et auteur de La sale guerre, Habib Souaïdia affirme avoir rencontré plusieurs ex-soldats toxicomanes depuis cinq ans qu’il est réfugié en France. Et garde le souvenir de garnisons entières « sous l’emprise de produits ». « Les trois quarts se droguaient quotidiennement », affirme-t-il.
        Les responsables : « Des sous-officiers qui, pour se faire de l’argent, organisaient le trafic au sein même des casernes et sous l’œil de certains hauts gradés. » Rohypnol, Lexomil, Valium, cannabis, opiacés et surtout l’Artane, à l’en croire on trouvait de tout au sein des régiments. À l’époque. Souaïdia a alerté ses supérieurs. Lesquels lui rétorquaient de « laisser faire ». Avant d’ajouter : « Tant qu’ils ne deviennent pas islamistes, ils nous fichent la paix. »… »

        Pendant la guerre 14/18 les poilus distillaient la gnôle (de pomme de terre) dans les tranchées afin de pouvoir supporter leur triste quotidien…

    3. Avatar de MerlinII
      MerlinII

      Intéressante la question du sacrifice.
      Que n’a-t-on dit par exemple sur les soldats de la guerre 14-18 « sacrifiés » dans les grandes offensives (craonne…)
      Les « daeshiens » n’utilisent-ils pas la même stratégie (si stratégie il y a) en faisant primer le collectif sur l’individu ?
      Et nos sociétés confortables ou l’individu est roi (capitalisme oblige) ne sont elles pas démunies face à cette attaque ?

      Paul Valéry disait;
      « Aujourd’hui, la patrie est devenue l’Hexagone. On ne meurt pas pour une figure géométrique. »

  8. Avatar de Juannessy
    Juannessy

    J’aimerais avoir le point de vue de Patrick Pelloux sur ce billet .

    Le suicide est tellement « à prendre avec des pincettes », que je pense que ce billet ,prématuré , en écrit trop ou pas assez .

    Et que la raison gagne à attendre un peu pour émerger des larmes et des regards bornés d’œillères .

    Sinon c’est elle qui , à défaut de se suicider , se tirera une balle dans le pied .

  9. Avatar de Arnaud
    Arnaud

    « L’impuissance de la raison à créer l’éthique commune dans le domaine économique est une conséquence de l’interprétation des rapports économiques comme rapports de force. »

    Mais les rapports économiques ne sont ils pas des rapports de force authentiques, plutot qu’interpretés, ?

    UN peu comme Juan Nessy le dit, n’y a t’il pas meprise sur la ‘nature’ du suicide de ces personnes. Il me semble que ce sont des marionnettes ultra conditionnées selon un processus d’endoctrinement documente. Et qu’ils sont utilises comme arme de destruction et ‘outil de propagande’. Des lors peut on comparer ces processus comme vous le faites?

    Mais j’ai peut être manqué ou pas compris l’essentiel de votre raisonnement.

    1. Avatar de Juannessy
      Juannessy

      Ça n’est pas strictement ce que j’ai voulu suggéré . Par cet extrait je voulais signifier qu’en construisant ,dans l’instant ,autour du terme « suicide » ( alors qu’il y a des suicides) , une réflexion d’une portée aussi lourde que les réflexions d’un Montesquieu , on courait le risque d’interprétations, de fausses pistes , ou de citations courtes « hypocrites » , qui auront tôt fait d’enfouir une lumière nécessaire et forte .

      Mais peut être est ce ma réaction propre ,parce que trop d’expériences personnelles m’ont appris qu’à vouloir exploiter sans précautions , sans balises et sans alliés , une fulgurance essentielle , on la tuait pour longtemps .

      Pour revenir à Montesquieu , il n’était pas loin quand je répondais à Zébu , il y a peu , que la démocratie , pour être possible , nécessitait la Vertu première : l’aptitude à se mettre à la place de l’autre , et l’aptitude de l’autre à en faire autant .

      Temple appelle ça la réciprocité . Paul Jorion la compassion .

      Mais est ce que la réciprocité , compassion , vertu démocratique , existent , depuis le temps qu’on essaie de leur donner « corps » ?

      C’était d’ailleurs le sens d’une question que j’adressais à Paul Jorion : la compassion préexiste_t-elle à la « vérité que l’on cherche entre hommes » et/ou à la « vérité imposée » ?

      1. Avatar de Agnès
        Agnès

        Si l’on observe les tout-petits enfants, compassion et réciprocité ne semblent pas innées. Ils ne les pratiquent pas spontanément, elles doivent leur être inculquées par l’éducation (« ne frappe pas les autres », « partage tes jouets », ne chipe pas de ceux des autres »,…). Et ils doivent avoir atteint un certains stade de leur développement mental, où ils sont capables de reconnaître l’autre non plus comme objet mais comme sujet, et eux-même comme élément du monde et non plus comme centre du monde.

        Plus tard, des différences individuelles apparaissent, qui peuvent être liées à l’éducation intra-familiale ou à la composition de la fratrie, mais pas nécessairement : les uns plus sensibles, plus sociables, plus « partageux », d’autres plus agressifs, plus égocentrés, plus solitaires.

        Par contre, les études de Goodall et Fossey ont révélé des comportements « compassionnels » et d’entraide chez les grands singes (adoption d’orphelins, processus de deuil, attitudes « consolatrices », aide à un congénère en difficulté, etc.) Et l’étude des restes osseux néandertaliens a mis en évidence l’existence de plusieurs infirmes ayant survécu assez longtemps pour impliquer une prise en charge par leurs proches, compassionnelle donc.

        Votre question, Juannessy, reste donc ouverte.

      2. Avatar de Raymond Lutz
        Raymond Lutz

        ah le débat entre l’inné et l’acquis. C’est une fausse question selon moi (nous sommes un méta-organisme) mais Monbiot tente d’y répondre. Indice: la compassion (entraide, altruisme, comportements prosociaux, etc..) semble innée

        http://www.monbiot.com/2015/10/14/human-kind/

      3. Avatar de Juannessy
        Juannessy

        @Agnès : C’est effectivement parce qu’elle reste ouverte , que je reçois les analogies de Dominique Temple ,que Paul Jorion fait siennes, avec sympathie ,parce qu’elles participent de la mise en place des engrenages que nous avons à connaître en nous, mais avec critique quand ils affirment tenir là La racine du bien et du mal .

        Pour moi l’empathie , la compassion sont effectivement des aptitudes « innées » …dont nous ne disposons pas tous à même doses . De presque zéro à presque 100%. Le dosage originel est très vite conforté ou altéré par « l’environnement » .

        En disposer , même peu , nous permet de repérer si l’autre en dispose , et d’être capable de communiquer avec lui dans cette « couleur » . Les amoureux le savent bien !

        Cependant , selon mes codes , le corps social capable de survivre et vivre , nécessite trois autres aptitudes, soumises aux mêmes dosages de l’inné et de l’acquis :
        la créativité ,
        la « connaissance » et l’organisation,
        le courage du pari sur le futur .

        Et ça n’est que lorsqu’il reconnait et utilise ces quatre aptitudes simultanément , qu’il a un chance de perdurer .

        Le bon « système  » social ( sinon les bons leaders) est celui qui respecte au mieux ces quatre « appétences » .

        C’est comme « Liberté , Égalité , Fraternité étendue au vivant ».

        Enlevez ou trahissez un seul élément et tout « s’écroule » .

      4. Avatar de Agnès
        Agnès

        @ Raymond Lutz

        Très intéressant, et plutôt encourageant. Merci pour ce lien.

        Il se peut que nous ayons été conditionnés à la violence par quelques millénaires d’histoire, depuis l’apparition de sociétés étatiques et hiérarchisées. Il se peut aussi que les deux tendances aient cohabité en nous en parallèle, comme stratégies de survie. La progéniture humaine mettant plusieurs années à devenir autonome, la cohésion du groupe pour protéger et éduquer les enfants est la condition de notre survie en tant qu’espèce. Il a donc fallu développer à la fois l’empathie et la collaboration – pour le maintien du groupe et la réalisation d’entreprises collectives – et l’agressivité – pour faire face aux menaces extérieures. Les philosophies venant après coup théoriser ces données neurologiques.

        Le problème est l’identification de ces menaces extérieures : de grands prédateurs au paléolithique, à autres groupes humains dès l’apparition des appropriations de territoires. Lorsque les découvertes en paléoenvironnement sont couplées à celles de l’archéologie et de l’histoire, on voit systématiquement les conflits apparaître et les civilisations disparaître lorsque les ressources s’amenuisent (épisode climatique catastrophique, généralement), alors que la population a augmenté. Et c’est ce que nous vivons actuellement.

        Qui l’emportera, de notre empathie naturelle envers nos semblables, ou de notre agressivité défensive envers tout ce qui est perçu comme menace?

      5. Avatar de Juannessy
        Juannessy

        Dans ma représentation mentale à quatre pistons , la « raison » , au sens de « ratio » et conscientisation de l’agir et du parler , et de leurs effets , n’est présente que dans les deux derniers ( organisation , anticipation courageuse de l’avenir proche) .

        L’empathie ( la compassion ) et la créativité n’en sont pas nourries ou confortées .

        Le suicide comme arme contre un corps social , capitaliste , libéral , collectiviste , religieux , athée , ..ce qu’on veut , est une arme vaine . Le corps social le rejettera in fine , comme un corps bien portant vient à bout d’une agression par une bactérie pathogène ou un virus .

        Il ne peut vaincre que les corps sociaux qui ont déjà la tentation de se suicider .

        Et ceux qui ne savent pas changer , s’adapter et évoluer .

      6. Avatar de Agnès
        Agnès

        @Juannessy
        « Il ne peut vaincre que les corps sociaux qui ont déjà la tentation de se suicider .
        Et ceux qui ne savent pas changer , s’adapter et évoluer . »

        Et je crains, hélàs! que – pour le moment – ce ne soit le cas du nôtre. Les voix qui appellent au calme et à la réflexion peinent à se faire entendre. La réaction (apparemment) majoritaire du corps social, ici, c’est la peur, l’agressivité et le repli. Il réserve sa compassion aux siens seuls : 130 morts à Paris lui sont insupportables, 2000 morts en Afrique lui sont indifférents. Et la réaction du pouvoir, par crainte de perdre tout contrôle, c’est de renforcer encore le poids de la chape de plomb sur le corps social, et tenter dans le même mouvement de le rassembler autour de « l’ennemi commun ».

        Rien de constructif, rien de créatif, rien d’innovant. Et toute raison s’efface derrière l’instinct de la fuite ou de l’agression. Sans compter le déni absolu.

      7. Avatar de Juannessy
        Juannessy

        @Agnès :

        La réaction brutale à une agression brutale est « dans l’ordre des choses » , et je ne l’ai de mon côté pas exclue dès mon premier commentaire . En disant « il faudra » et  » nécessaire » .

        J’y évoquais aussi le « deuxième temps » , qui est forcément plus circonstancié , de remise en place de ce qui cloche .

        De la même façon que la cervelle se rééquilibre la nuit en dormant .Car elle ne s’interdit rien .

        Le seul accident mortel qui puisse nous arriver , c’est que qui ou quoi que ce soit nous empêche de penser , dire , écrire, proposer , modifier , ou de nous unir .

      8. Avatar de Armelle
        Armelle

        La compassion et l’empathie passe par le chemin de l’altérité, de ce qu’est autre. L’exercice n’est pas aisé lorsque tout tend vers l’uniformisation, le clonage, qui, probablement, est une fuite devant la question du « traitement » de la différence. Surtout lorsqu’on constate que des familles n’abordent pas ces notions, même pas avec des mots plus simples, qui s’en approcheraient.
        Dire à un enfant « n’embête pas ton voisin » ne suffit pas évidemment, restant dans le domaine d’une règle à appliquer. L’altérité et la diversité sont au programme de terminale : quel dommage !

      9. Avatar de Armelle
        Armelle

        Juannessy
        « Pour moi l’empathie , la compassion sont effectivement des aptitudes « innées » …dont nous ne disposons pas tous à même doses . De presque zéro à presque 100%. Le dosage originel est très vite conforté ou altéré par « l’environnement » . »

        Faut-il encore démontrer l’effet de l’environnement ? Certainement oui, tant on protège son image.
        La déconstruction de la cellule familiale ne se voit pas tout de suite, elle-même soumise à des pressions. C’est comme un régime minceur, il y a des kilos perdus qui ne se voient pas, puis, celui qui se voit d’évidence. Pourquoi autant de familles aujourd’hui clame le recours à un éducateur (qui n’arrive jamais), d’une pension (qui n’existe pas), et même d’un foyer pour leur enfant dont le comportement les dépasse ? Actuellement, là où je suis, tous les jours !!??!! Ça n’est pourtant pas la mission principale du lieu… mais le devient…. peu à peu.

      10. Avatar de Juannessy
        Juannessy

        @Armelle :

        Ce que vous dites de la place de la famille dans « l’environnement » , est bien sur juste .

        Je me demande parfois avec une bonne dose d’angoisse , quelle familles ces abandonnés de l’empathie pourront construire , d’autant que si je regarde les cas de l’espèce que j’ai rencontrés et rencontre encore autour de moi ,je compte une grosse majorité de transmission du malheur , et parfois quelques miracles que je ne sais pas expliquer .

        … sauf autrement que par une résilience de la volonté de vivre vraiment , souvent aidée par une bonne rencontre , au bon moment , avec des gens assez forts sinon compassionnels .
        J’aime imaginer que vous faîtes partie de cette catégorie accueillante , mais pas que .

      11. Avatar de Juannessy
        Juannessy

        @Armelle :

        Stéphane-Samuel Portalès vous a entendu .

  10. Avatar de Germanicus
    Germanicus

    Le suicide programmé par un assassin islamique, ne serait-il pas dû à un sentiment de non-existence? J’imagine que les jeunes qui se font recrutés peuvent avoir le sentiment d’exister que d’une manière anémique, de vivoter comme corps étranger dans une société étrangère.
    De plus ce qui prédomine c’est le groupe. L’individu en tant qu’individualité ne compte pas, c’est le collectif qui est tout et qui représente tout. Les société totalitaires comme le nazisme ou le stalinisme ont fonctionné de cette manière.

  11. Avatar de Steve
    Steve

    Bonsoir à tous
    Billet intéressant, à lire et relire , je n’irais cependant pas jusqu’à dire: à traduire en français pour bien comprendre pour les non- professionnels de la profession universitaire.
    On y trouve bien sur le sur-investissement très français dans la raison pour espérer résoudre problèmes et contradictions; surinvestissement descendant en droite ligne des processions en toges grecques avec palmes agitées à bout de bras célébrant l’Être Suprême et la déesse Raison pour l’abolissement de la religion de l’Infâme ! Processionnaires de la Raison qui satisfaits de leur culte s’en retournaient ensuite inventer raisonnablement la Terreur et la politique terroriste gouvernementale afin d’éliminer en premier lieu les Chouans ensuite le reste des incrédules réfractaires d’Europe et de l’Univers tout entier bientôt si possible sinon un peu plus tard pour le plus grand bonheur de tous….Etaient -ils si différents, ces raisonneurs fiers de leur déesse Raison, d’un Simon de Montfort décidant de tuer tous les Cathares car il faisait confiance , raisonnablement bien sur, à Dieu pour reconnaître les siens! La Révolution Soviétique étant la fille de la révolution française, on ne devrait pas non plus s’étonner de l’invention des chambres à gaz mobiles par les anticapitalistes communistes logiques et raisonnables pour aller exterminer les moujiks refusant l’expropriation de ces parcelles qui en faisaient non pas des capitalistes avides mais des tout juste survivants.

    Le gouvernement révolutionnaire français de la Terreur a parfaitement résolu la contradiction entre le tueur hypocrite et le tueur terroriste: il est devenu l’un et l’autre! Pour enfin aboutir le phénomène en son intérieur même avec conséquemment la fin de Robespierre et de Danton.
    Pourquoi aller s’embêter à chercher des justifications de théories chez les Ashuar dont le classement des êtres vivants obéit à une logique, à une raison, assez différentes des nôtres plutôt que d’utiliser les merveilleux exemples dont notre propre histoire est si riche?
    Pour faire comprendre mieux le mélange, la superposition des différentes strates émotionnelles et raisonnables aboutissant à ce sanglant salmigondis qu’est l’histoire des sociétés humaines, plutôt que de raisonner à partir d’ – ou bien – exclusifs plutôt que de et – appliqués à des sociétés qui sont inconnues de la plupart d’entre nous, ne vaudrait il pas mieux expliciter simplement l’extraordinaire raccourci qu’en donna Stanley Kubrick dans la première partie de Full Metal Jacket, pendant et suite logique éminemment Girardienne de la première partie de 2001 L’Odyssée de l’Espace. qui traitait, elle, de l’individu?
    Nos semblables ignorants des sociétés Ashuar* ou des communistes Viet Namiens auraient des références à notre propre univers mental historique et culturel** pour mieux apprécier la beauté des démonstrations qui précèdent.
    Cependant, je préfère nettement prendre la peine d’ entendre ce que vous essayez de nous dire plutôt que d’opiner bêtement du chef
    aux appels à l’ouverture des soutes à bombes.
    Cordialement.
    * je ne sais pas si les Ashuars, à l’instar d’autres peuples du bassin amazonien placent logiquement et raisonnablement l’avenir derrière eux puisqu’ils ne le voient pas et le passé devant , à notre rebours, puisqu’ils le voient. Mais je sais , grâce à Augustin Berque se référant à P. Descola que le jaguar et l’anaconda se situent chez eux aux frontières des mondes religieux dont la fréquentation est réservée aux seuls chamanes tandis que le manioc est plus élevé que le chien dans leur échelle sociale alors que le singe hurleur est plus bas que le singe laineux…. Ce qui nous facilite la compréhension des distinctions entre tueurs capitalistes et non capitalistes, hypocrites ou terroristes!

    ** je ne sais pas non plus si les Ashuars, à l’instar de certains peuples africains commencent par mettre des réverbères avant toute chose lors de l’aménagement, de la civilisation au sens propre du terme, d’un lieu puisque la première chose à faire logiquement est de mettre de la lumière 24 h/24 afin de chasser les mauvais esprits pour pouvoir bâtir tranquillement sans conflits insolubles.
    Nous, allez savoir pourquoi, on fait d’abord des routes et on s’étonne ensuite que le chantier prenne du retard et qu’il y ait des conflits durs à l’intérieur de l’équipe!

    1. Avatar de Gudule
      Gudule

      Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les Indiens Jivaros
      sans jamais oser le demander

      « Les Indiens anciens réducteurs de têtes, plus connus dans le monde sous le nom de Jivaros*, se répartissent en cinq sous-groupes : les Shuar, les Achuar, les Shiwiar, les Aguaruna et les Huambisa. En Haute-Amazonie, à cheval entre l’Equateur et le Pérou, sur un territoire grand comme la Suisse et l’Autriche réunies, ils forment aujourd’hui l’ethnie la plus importante d’Amazonie avec près de 130.000 Indiens, soit 10 % de la population autochtone du bassin amazonien. »

      « En langue Shuar,  » Arutam  » veut dire  » la force du Grand Tout  » ou encore  » le Grand Esprit « . Notre association, en reprenant ce nom, souhaite s’inspirer de la sagesse amérindienne qui, à chaque instant, place l’homme en harmonie au sein de notre mère la Nature. »

      http://arutam.free.fr/Savoir.html

      Étude de la théorie du désordre et des déterminants thérapeutiques
      dans le chamanisme shuar

      Emmanuelle Decker; Extraits de son Mémoire de Maîtrise en Ethnopsychiatrie Université Paris 8 – Septembre 2003

      « D’autres rites, permettant de rencontrer Arutam, peuvent se dérouler dans un endroit isolé de la forêt, ou au bord d’un grand fleuve. Mais chacun se termine par l’incorporation de la force et de l’âme Arutam ; or cette âme donne le désir ardent de tuer et c’est tout naturellement que le nouveau possesseur rejoindra rapidement une expédition vers les territoires de familles ennemies. Avant le meurtre, chacun des participants nomme, devant le groupe, l’esprit rencontré lors de la transe ; et le fait de dévoiler sa vision fait partir cette âme Arutam mais pas sa puissance. Après l’expédition, les participants devront donc se mettre en quête d’une nouvelle âme Arutam pour conserver la puissance de la précédente et obtenir une nouvelle protection contre la vendetta qui ne manquera pas de se préparer dans le camp attaqué. Il est ainsi possible de cumuler la force des âmes incorporées successivement ; chaque retour d’expédition meurtrière impliquant une nouvelle recherche d’Arutam, puisqu’il est impossible de vivre longtemps sans le support de ces esprits. Comme l’ennemi fraîchement tué produit également une âme vengeresse, il faut absolument maintenir cette dernière prisonnière dans le crâne de son propriétaire, grâce à un rituel effectué très rapidement. C’est pourquoi les Indiens Jivaros sont connus comme les fameux réducteurs de tête. »

      http://arutam.free.fr/Uwishin.html

  12. Avatar de Dominique Gagnot
    Dominique Gagnot

    On doit pouvoir résumer tout ça par « l’ennemi est con, car il croit que c’est nous l’ennemi » (Desproges)

    1. Avatar de François Corre
      François Corre

      … »alors que c’est lui ».
      Ou encore : « A la guerre, il est très important de savoir reconnaître l’ennemi. Car, sans ennemi, la guerre est ridicule. »
      « Ce qui nous faudrait pour arrêter la mort en temps de paix, c’est une bonne guerre… »
      https://youtu.be/3W83zowEotM?t=360

  13. Avatar de Pierre-Yves Dambrine

    Texte très intéressant, parce qu’il axe la réflexion autour du thème de la réciprocité, effectivement au fondement de ce qui fait humanité.

    IL part donc d’une excellente prémisse. Une prémisse existentielle, celle qui procède de notre lien social qui nous est donné à la naissance.
    Par contre à partir de la phrase suivante, j’ai du mal (sous réserves bien entendu que je fasse un ou des contre sens) :

    « L’hypocrite pourrait changer la donne, refuser une telle provocation en se reconnaissant le premier agresseur. »

    Puis :

    « En somme les capitalistes ne négocient pas leur système de référence. La coalition des capitalistes en nations, puis en ligues internationales, puis transnationales affronte aujourd’hui les autres puissances du monde, les autres civilisations, en particulier celles qui se réfèrent à une “Loi divine” de façon aveugle. »

    Je n’ai pas d’objection à l’analyse de logique capitaliste comme rapport de forces. Mais de là à faire des capitalistes les superman du rapport de force, et d’en inférer un capitaliste premier agresseur, face aux autres puissances du monde, aux autres civilisations, cela me semble pas correspondre à ce que nous enseignent l’histoire du monde et l’anthropologie, où l’agression est consubstantielle au fait humain, comme pôle opposé à sa raison ou sagesse.

    D’autre part, ce n’est pas parce que les dites autres puissances ou civilisations sont moins puissantes que n’exercent pas en leur sein des rapports de force qui n’ont rien à envier à ceux qui s’exercent pas la médiation du système capitaliste. Les rapports de domination hommes-femmes, claniques, etc … Un certain mode de domination a beau être sous l’emprise d’un autre, il n’en reste pas moins un mode de domination, critiquable comme tel. Autrement dit la violence ne peut être compris dans un système exclusivement causal, car alors on suppose son éradication possible. Or il s’est avéré à de nombreuses reprises dans l’histoire qu’au nom du bien on fit le mal.

    Par ailleurs, la méthode me semble souffrir d’un systématisme conceptuel qui écrase le factuel historique. Nous sommes en présence d’idéal types, avec le capitaliste, la multinationale, la civilisation autre, etc… alors que dans le donné empirique il n’y a que des agents, lesquels peuvent appartenir à des structures diverses, opposant parfois des logiques contradictoires. Si l’on se reporte justement à l’attentat du 11 septembre, loin d’avoir d’un coté le capitalisme et de l’autre la conscience religieuse atteinte dans sa transcendance jalouse, on a un Ben Laden formé aux joies du capitalisme, qui en hérite et s’en sert pour mener son projet terroriste, désolé mais je n’ai pas trouvé d’autre mot que terroriste dans son cas.
    Le fait est que le capitalisme étend son emprise sur la totalité de la planète, Corée du nord exceptée et quelques peuplades reculées d’Amazonie peut-être. Je ne vois donc pas ce qu’il y aurait à négocier avec des gens qui eux-mêmes, pour une bonne part acceptent les valeurs capitalistes ou tout au moins les utilisent si cela sert leur projet. Qui peut dire laquelle de la conscience religieuse ou de la réification capitaliste est le moteur de l’action de Ben Laden ? Il me semble que son moteur est l’impossibilité pour lui de résoudre la contradiction qui résulte de sa double appartenance.

    Par contre, oui, il faut expliquer, et le mieux que nous puissions faire c’est de procéder à des analyse multi causales, les seules justement qui permettent une prise en compte du donné empirique.

    Concernant nos pays, et en particulier la France, bien entendu, nous avons une responsabilité dans ce qui arrive. Elle est même très grande. Parce que au sein du système capitaliste nous occupons une place de choix.
    Mais cette responsabilité n’est pas imputable seulement au système capitaliste, car on peut l’imputer aussi bien à la démocratie, qui a failli, ou plutôt en raison même de son caractère perfectible, ce à quoi il s’agirait justement de remédier, comme nous y invitait Paul Jorion lorsqu’il proposait une constitution pour l’économie. Ou alors autant dire que l’existence du système capitaliste n’a rien à voir avec l’action, les sentiments, et la raison des citoyens.

    Il faudrait donc négocier nos systèmes de références, mais alors une négociation qui met tout sur la table, une négociation qui appelle un chat un chat, qui nomme les hommes qui répandent la terreur, des terroristes, un pays qui commerce avec un autre pays qui finance ou soutient le terrorisme, un allié objectif du terrorisme. Il n’y a pas de premier agresseur, absolu, car tout le monde est agressif ou personne ne l’est. Si premier agresseur il y a il se trouve dans nos systèmes de représentation quand ceux-ci viennent chambouler un système de représentation qui préexistait pour s’y substituer ou le transformer le rendant plus violent qu’il n’était.

    Il s’agirait donc de trouver ensemble les termes permettant de faire grandir la paix pour diminuer la violence. En changeant certains éléments de quelques dispositifs clés dans nos institutions voire en en inventant de nouvelles. Et pour cela il y a des pratiques à abandonner, des idées à faire circuler. Cela suppose bien entendu de considérer que les hommes ne sont pas qu’agressivité. Que la vie est le principe auquel en définitive ils se rattachent, et en cela je rejoins Dominique Temple.

    1. Avatar de Pierre-Yves Dambrine

      Suite à la bienvenue explication de texte de Paul dans Le temps qu’il fait, je voudrais ajouter deux choses, pour clarifier mon propos.

      1. Quand je dis qu’il faut appeler un terroriste un terroriste il ne s’agit pas de lui ôter son statut d’être humain. C’est même d’une certaine façon l’inverse. C’est bien un être humain qui commet un acte terroriste. Ne pas qualifier l’acte de terroriste, c’est alors renvoyer à l’animal. Pour pardonner il faut quelque chose à pardonner. On ne pardonne pas à un animal. Ceci dit, c’est vrai, il existe une instrumentalisation politique qui consiste à qualifier ses ennemis de terroristes pour éluder sa propre responsabilité dans ce qui arrive. C’est la guerre perpétuelle contre le terrorisme. Je ne me place pas dans cette perspective.

      2. ce qui me gênait dans la phrase « les capitalistes ne négocient pas leur système de référence … » c’est que nous puissions, nous citoyens, être assimilés à cet attribut « capitaliste » qui caractérise nos sociétés. Dominique Temple a raison de dire que les capitalistes ne négocient rien, mais comme je le disais l’hypocrisie n’est alors pas tant celle des capitalistes que celle de nous tous, co-responsables d’une situation où tout le monde a sa part. Hollande qui décide la guerre, ce n’est pas seulement la voix du capitaliste qui parle, c’est le représentant d’un pays, c’est en tant que représentant qu’il peut être hypocrite. Bref, l’attribut capitaliste ne suffit pas à nous déterminer à et nous définir.

      Sur la nécessité de faire un premier pas, un geste pour restaurer l’humanité qui a été niée, je suis en plein accord. Briser le cercle « infernal » de la violence suppose un don. Mais ce n’est pas la coalition des capitalistes en nations qui puisse le faire face à ce qui est qualifié d’ autres puissances du monde, d’autres civilisations. Ce sont des êtres humains face à d’autres êtres humains, qui vont devoir se rencontrer. Alors ils ne seront plus français, syriens, israéliens, palestiniens, russes, étasuniens, capitalistes, chrétiens, musulmans, etc … mais seulement des êtres humains qui se seront reconnus mutuellement un destin commun comme être humains, partageant une même planète.

  14. Avatar de Dominique Gagnot
    Dominique Gagnot

    Le capitalisme est fondamentalement violent, puisque plutôt que de répartir les Ressources équitablement, il ne fait que les concentrer, en dépossédant ainsi les plus pauvres.

    La démocratie n’y change rien, sauf à soumettre le capitalisme, à d’autres pouvoirs, (celui de lois sociales) mais alors ce n’est plus tout à fait du capitalisme.

  15. Avatar de Yves Vermont
    Yves Vermont

    En lisant ce texte difficile que j’ai du relire 3 fois sans arriver à entrer pleinement dans la pensée de son auteur, il m’est venu l’idée de faire un parallèle avec les Farc (Colombie).
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Conflit_arm%C3%A9_colombien

    « Alors la contradiction qui unit l’assassin hypocrite et l’assassin terroriste sera dénouée. L’exclusion et le terrorisme cesseront. La non-violence l’emportera sur la violence, la paix universelle sur l’implosion planétaire ».

    Qui est l’assassin hypocrite, qui est l’assassin terroriste ? Si au départ du mouvement des Farc, on peut y arriver moyennant quelques simplifications, le pouvoir central c’est l’assassin hypocrite, les marxiste l’assassin terroriste.
    Très vite le problème du financement de la rébellion devient central car une rébellion qui s’étend ne peut le faire qu’avec des moyens financiers importants.

    Pour réduire la rébellions face à un Etat qui a du mal à agir, des milices armées se mettent en place sans être capable de mater la rébellion. Ils deviendront elles-mêmes une rébellion !

    Ce n’est qu’en intensifiant la présence militaire sur un terrain difficile, en frappant la source de financement de la rébellion et in fine, point le plus stratégique, en tuant ces principaux dirigeants que la rébellion a fini par reculer.
    Pour pacifier la pays, le gouvernement indemnise les victimes, les ecclésiastiques prêchent le pardon.
    Durant cette période tragique, les morts se comptent par centaines de milliers, les exactions humaines sont nombreuses : des zones importantes de la Colombie étaient devenues des zones de non droit, comme certaines de nos banlieux.

    Avez-vous regardé une émission forte intéressante sur Daesch qui est passée cette semaine à la télévision ? A vous de juger !

    J’ai du mal à positionner la notion de réciprocité centralisée et généralisée dans l’histoire de la Colombie et à entrevoir comment cette approche peut nous aider à améliorer notre compréhension du phénomène et trouver des solutions.

  16. Avatar de adoque
    adoque

    Texte particulièrement bien documenté avec de nombreuses et sérieuses références !

    Imaginons un instant, une jeune individu (dans le sens inexpérimenté), placé dans un contexte où tout change très (trop) vite,
    comment peut-il organiser ses pensées pour devenir un humain adulte ?
    Cela pour dire qu’il reste possible, sans se cultiver par la lecture et l’étude, de faire quelques simples constats puis quelques choix, essentiels.
    Que la violence fasse partie de notre héritage « animal », soit… Et il est alors normal, qu’au fil du temps, cette esprit de compétition ait engendré la domination, la violence étant le premier outil accessible, même s’il n’est pas le seul, ni le meilleur.
    Au fil de ce même temps, l’humain s’est découvert un autre outil lui permettant de mieux « vivre ensemble », un outil moins bestial, fondé sur la conscience, l’empathie,…
    Dès lors, chacun a pu placer le curseur entre les options, en étant, selon le contexte, « instruit » par toutes sorte d’expériences et de guides spirituels, moraux.
    Aujourd’hui, la connaissance, l’instruction, nous placent individuellement et collectivement face aux résultats de nos choix:
    avons-nous placé le curseur au bon endroit ?

    Il est peut-être temps, le bilan étant, de corriger le tir, d’abandonner les principes de compétition-domination générant invariablement la violence, violence qui est anti-humanité,
    et de décider (choisir) la voie harmonieuse en réveillant nos consciences, cet attribut qui est sensé nous caractériser.

    Pour en revenir au « jeune inexpérimenté »: ce processus ne lui est-il pas accessible ?
    … sans avoir à réinventer la roue ou à en étudier toute la théorie ?

  17. Avatar de Michel Martin

    Olivier Roy met le doigt sur le problème quand il dit que ce n’est pas l’islam qui s’est radicalisé, mais que c’est la radicalisation qui s’est islamisée (c’est à dire que la radicalisation instrumentalise l’islam). Plusieurs raisons objectives peuvent expliquer que nous soyons dans une période de faiblesse éducative propice au débondage de nos pulsions et à leur emploi dans des visées radicales. Nous sommes passés depuis très peu de temps de l’autorité paternelle à l’autorité parentale (vers 1970). Je ne propose pas de revenir en arrière parce que la loi n’a sans doute fait qu’entériner une situation de fait. Mais cette situation nouvelle nous a fait perdre beaucoup de repères éducatifs. Nous devons réapprendre à castrer convenablement et nettement nos enfants si nous ne voulons pas que leurs pulsions de mort les hantent le reste de leur vie ou ne trouvent à s’employer comme en ce moment dans des capteurs comme Daech ou, en moins grave(?), dans le FN. Les solutions sont chez Naouri (traité à tort de réactionnaire) et Dolto (traitée à tort de laxiste, voir chez elle son avis très net sur le besoin de castration), chez Freud (avec Malaise dans la civilisation, par exemple). Chez Hugues Lagrange aussi (avec le « Déni de culture »). Les familles qui arrivent en France avec une culture encore très solide d’autorité paternelle voient leurs enfants leur « échapper », baignant dans une culture de l’autorité parentale pas encore bien maîtrisée. Sur quels repères peuvent-ils accepter de renoncer à leurs pulsions? Il faut des familles très solides pour résister à cette situation si difficile. Nous ne sommes non plus pas aussi assurés de nos valeurs de liberté et de progrès sur lesquelles l’autorité des adultes repose. Nos valeurs sont en souffrance devant les dégâts écologiques, la délinquance en col blanc, le désordre néolibéral. Or, aucune autorité ne peut s’exercer dans le vide.

  18. Avatar de JPC
    JPC

    D’accord que ce billet est difficile.

    Il renomme et redit doctement à sa façon pas mal de banalités de la vie.

    Il me semble discerner plus de clarté immédiate et surtout plus de possibilités d’actions concrètes dans les réflexions sur le convivialisme.

    Conceptuellement, ce qui condamne notre monde moderne, c’est la concomitance entre notre sacralisation de la « nature humaine », entre notre ardente ingéniosité à développer des techniques de pouvoir et de massacre, entre des valeurs sociales héritées des premiers âges.

    Relisez Thucydide, on n’a pas fait mieux pour décrire la fatalité mécanique des trois termes. Hélas.

    Comme contribution aux très puissantes réflexions intellectuelles, je propose de catégoriser en « pensée lemming » tous les écrits qui nous font perdre notre temps. C’est un concept très large et très accueillant…

  19. Avatar de adoque
    adoque

    Dans le temps qu’il fait… « satan » même non-religieux…

    Les paroles de Jorion sont très précises et peuvent toucher le fond de l’âme humaine.
    Le temps se fait court… il y a plusieurs siècles qu’était annoncée une accélération de cette situation catastrophique:
     » car le diable est descendu vers vous, animé d’une grande colère, sachant qu’il a peu de temps « 
    Métaphorique ou pas, effectivement, nous avons tous une part…
    et une capacité de choix.

    1. Avatar de Gudule
      Gudule

      » car le diable est descendu vers vous, animé d’une grande colère, sachant qu’il a peu de temps «
      Métaphorique ou pas, effectivement, nous avons tous une part…
      et une capacité de choix. »

      cool, il va se scratcher direct sur les pompes à Gicquel….

      « Bon, alors. Heu, qu’est-ce qu’il y a encore ?
      Ah ! Y en a deux, formidables, qui passent après le journal télévisé, quand on mange.
      C’est après le Docteur Gicquel… Docteur Gicquel il arrive. Toute la misère du monde !
      Il a dû être mazouté avis les autres oiseaux là-haut hein ? Dans les dégazages.
      Quand y a un avion qui s’écrase dans le monde, c’est sur les pompes à Roger Gicquel !
      C’est toujours des informations épouvantables : « Un chien a mordu une vieille dame… »
      Vous vous rendez compte de la vie de ces pauvres bêtes :
      Être obligées de manger des vieux ! Tout ça… Une horreur ! »

      Coluche

      1. Avatar de adoque
        adoque

         » cool, il va se scratcher direct … « 

        Comme quoi, Gudule, il n’est pas nécessaire d’être expert(e) en collapsologie, pour faire des prévisions… à l’avance 🙂

        « … manger des vieux ! » « Soleil Vert » n’est plus de la science-fiction !

  20. Avatar de André
    André

    La lecture de ce billet m’a remis en mémoire (sans que je puisse, pour l’instant, dire pourquoi) la fameuse maxime du libéralisme « ma liberté S’ARRETE là où commence celle d’autrui » et cette autre maxime que plusieurs philosophes appellent à lui substituer : « ma liberté COMMENCE là où commence celle d’autrui ».

    Voici deux extraits de textes allant dans ce sens :

    1) Jean-Louis Prat dans http://agorainternational.org/pprat.pdf

    « Dernier échantillon: il s’agit d’un cours sur « la liberté », où je me suis servi de références classiques, comme Rousseau et Kant, mais où j’ai introduit une formule de Castoriadis qui m’est chère, « Ma liberté commence là où commence la liberté de l’autre », et que j’ai retrouvée, il
    n’y a pas très longtemps, sous la plume d’un excellent philosophe catalan, Josep-Maria Terricabras.
    Voici ce qu’il écrit, dans un livre récent (« Raons i topics »
    = « Raisons et lieux communs » , Barcelona, pp. 137-138), où il critique la conception libérale de la liberté, en partant de la trop fameuse (et fallacieuse) formule « La liberté de chacun s’arrête où commence la liberté de l’autre ». Il remarque à juste titre que « ce slogan ne s’applique bien que dans quelques exemples peu significatifs, comme quand je reconnais que je ne peux pas jouer du piano à minuit parce que mon voisin a le droit de dormir. Mais les problèmes surgissent quand les libertés des individus sont des libertés simultanées: parce que, où commencera la liberté de quelqu’un si la légitime
    liberté de l’autre ne s’arrête pas? Comment peut-on arbitrer la compatibilité de deux libertés quand elles sont toutes légitimes mais opposées? Le slogan libéral semble présupposer un monde idyllique – où il n’y a pas de
    confrontation – ou un monde sur mesure – où il ne peut pas y avoir de confrontation, parce que la liberté du plus fort finit par s’imposer. Bien entendu, le véritable problème n’est pas de savoir où s’arrête la liberté de quelques-uns mais où commence la liberté de tous (ce qu’on pourrait mettre en relief si on remplaçait le slogan libéral par cet autre: Ma liberté commence où commence celle de l’autre). Et c’est pour cela qu’il est impossible d’en venir à travailler pour une communauté d’égaux si on admet
    qu’il faut commencer tout d’abord par l’individu isolé… » (IL FAUT LIRE LA SUITE : long extrait d’un texte de Cornelius Castoriadis).

    2)Bernard Defrance dans http://www.lvn.asso.fr/spip.php?article761

    « Cette maxime (la liberté de l’un s’arrête là où commence celle d’autrui) constitue l’une de ces bêtises très ordinaires que nous infligeons aux enfants dès que la manifestation de leurs énergies nous dérange. Cette prétendue maxime entérine, d’une part, la confusion entre l’exercice de la liberté structuré par la loi et le déploiement de la pulsion dans son immédiateté, et, d’autre part, la résignation à l’état de rapports de forces et de violences entre les individus.
    Si ma liberté devait s’arrêter au lieu où commencerait celle de l’autre, il y aurait inévitablement frictions aux frontières et nous serions dans la guerre des territoires, et comme un enfant ne peut grandir qu’à accroître ses prises sur le monde, son autonomie, c’est-à-dire ses libertés, lui infliger cette pseudo-maxime revient à le persuader qu’il ne peut en effet accroître sa liberté qu’au détriment de celle d’autrui, surtout si, par un surcroît de bêtise accablante de la part de gens supposés instruits, on prétend lui faire apprendre la maxime par cœur ! Ne nous étonnons pas des résultats de cette bêtise meurtrière tels qu’on peut les constater dans les cours de récréation, dans les classes elles-mêmes, sur les plateaux de télévision, dans la guerre des bandes de quartier et celle des cabinets financiers à l’échelle de la planète.
Envisager l’exercice de la liberté comme on envisage la conquête de parts de marché revient à promouvoir la pulsion de mort comme mode de rapports entre les hommes, puisque la concurrence veut d’abord la mort de l’autre. Et la vocation de l’école n’est pas de former des tueurs. 
En réalité, la mission de l’école est (devrait être) de faire découvrir aux enfants, par la mise en pratique de la loi, que cette loi permet (devrait permettre) l’articulation de nos libertés, que à deux, à plusieurs, on acquiert plus de pouvoirs et de capacités d’action que tout seul, que les plaisirs solitaires n’ont en effet qu’un temps, et que donc nos libertés peuvent s’accroître les unes des autres, s’allier dans la transmission de la vie, dans l’appropriation et la création culturelle, dans la recherche ensemble des solutions aux immenses problèmes à résoudre que nécessite de plus en plus l’état de la planète ».

  21. Avatar de André
    André

    Merci de remplacer dans mon commentaire « (IL FAUT LIRE LA SUITE : long extrait d’un texte de Cornelius Castoriadis) » par  » (..) long extrait d’un cours de J.-L. Prat »)

  22. Avatar de Dominique Gagnot
    Dominique Gagnot

    Le choix que nous avons à faire est :

    – soit accepter de vivre dans la terreur que répandent les meurtres suicides, y compris maintenant chez nous, et en attendant des catastrophes naturelles de toujours plus grande ampleur du fait du réchauffement climatique.

    – soit comprendre ce que signifie Dominique Temple, et en tirer les conclusions (qu’il rappelle dans son dernier paragraphe…)

    L’enjeu est la survie de notre espèce, et ce n’est pas une métaphore. Jamais l’humanité n’y avait été confrontée de manière aussi certaine, et imminente.

  23. Avatar de Agnès
    Agnès

    Intéressant article De Marylène Pathou-Mathis sur l’origine de la violence dans les sociétés humaines, d’après les traces archéologiques. Bon résumé des dernières décennies de recherches en ce domaine : http://www.monde-diplomatique.fr/2015/07/PATOU_MATHIS/53204

  24. Avatar de vigneron
    vigneron

    En cas de dépression économique, la dérive du libéralisme en fascisme est systématique.

    Où un héritier de Lupasco, et donc de la logique non aristotélicienne, rejoint les plus radicaux des membres du Cato ou du Mises Institute dans l’identification du New Deal avec le fascisme. Sans parler, par exemple, du gouvernement d’alliance MacDonald au RU ou du Front Pop en France…

  25. Avatar de Rosebud1871
    Rosebud1871

    Je peux pas écouter l’explication de texte de PJ pour cause de débit éthiopien. Réciprocité, pire compassion, trouvent limites dans les apories de l’identification imaginaire et symbolique à l’autre. Ça marche pas toujours ! Et qu’on tente pas de m’imposer ça, ça produirait l’effet inverse ! Mais bravo à zébu et Temple de filer des bouées balises.
    La suite s’adresse à Schizosophie et Leboutte auxquels je réponds pour un commentaire fermé trop tôt pour bibi.
    Schizosophie,
    J’étais 4 semaines en Iran en 96. Sûr, les pasdarans contrôlaient les sorties de villes et aléatoirement partout barrages au hasard. Prix de leur sécurité comme de leur répression. Je constate qq chose de proche ici en Éthiopie. Les bidas se sont multipliés à Paname depuis un bail aussi et les contrôles sur la RN1 (ma référence) aussi. Depuis 96 je peste contre le main stream anti Iran. J’y ai vu des mômes aller à l’école, appris que les universitaires sont majoritairement femelles, vu des HLM dignes des 3000 de la Courneuve, et des inégalités semblant supportables. Bref mieux que mon sentiment de passage en 1972 où le portrait du Shah trônait partout depuis remplacé par celui de Khomeiny. Alors que silence sur la Saoudie, plus fermée que la Corée du nord où le visa de tourisme a contrario existe. Ton rapprochement mollard/mollah m’invite à te rapporter une historiette. À Qom ambiance lourde genre Lourdes, je craque pour l’achat d’un fouet dont les martyrs de Hussein se servent pour l’autoflagellation. Un modèle luxe, belles chaînes manche nacré des versets dessus. Le marchand du temple m’en demande une fortune, mais avec l’attroupement je crains l’incident… Un mollah fend la foule, et s’adresse à moi en anglais, me proposant de dealer raisonnablement. Le prix est divisé par 10 pendant que je cherchais un mobile présentable à mon achat. No question !  Comment lui dire que l’objet était de plus belle facture que ceux vendus à Pigalle pour les jeux SM ! On peut boire un coup partout en Iran comme acheter du hash en  Europe !
    Je fais pas plus la promotion de l’Iran que de Cuba mais vaut mieux y aller pour tempérer nos ouailles à grand messe mean-stream. Côté ciné j’en ai vu beaucoup censurés en Iran… Mais suis en Éthiopie avec les coupures de courant et l’internet, rare pour mon niveau  d’hôtel… Ton lien attendra.
    Pour la pétition, j’ai été pour la dictature du prolétariat… Rome savait suspendre la République… Bon les socialistes exagèrent mais le peuple a peur de mourir. J’avais déjà dit ici pour Charlie que l’Occident avait un problème avec la mort, la notre. L’Éthiopie est une démocratie, il y a des élections ! Le type qui passe sa journée avec une fronde ou un lance pierre a chasser les piafs qui bouffent le champ de sorgo est donc un homme libre…Qu’on prenne des moyens coercitifs pour limiter d’autres drames tant mieux, que ça soit chiant tant pis. Une parisienne septuagenaire croisée ici dans un resto  me disait son inquiétude de voir les terroristes « se rapprocher de chez nous ». Elle habite rue de La Pompe, son « chez nous » c’est son village du 16eme. La mondialisation cohabite avec des villages ou quartier, du chez soi, dont on sort peu. Son « réseau » professionnel, culturel, social, amical, familial, fait frontière de notre village, internetisé. Impayable la lutte des classes au 21eme siècle ! A chacun selon son village ? Avant hier j’étais chez les Mursi, Paris : connaissent pas ! Pas de réciprocité quand les tensions inégalitaires de toutes sortes font obstacle.

    Guy Leboute. Dans mon souvenir les occidentaux, le golfe et les saoudiens, ont financé Saddam pour limiter l’expansion de la révolution iranienne. Quand il a fallu rembourser, il avait pas de ronds, après avoir demandé la permission d’envahir le Koweït plein aux as, à l’ambassadrice US, il a cru au feu vert. (Sans doute un malentendu entre interprètes). Les frontières de la peninsule arabique ont été faites par les majors pétroliers, non ? La ligne Picot par les anglo français non ? Éternel tout ça  ?

    1. Avatar de schizosophie
      schizosophie

      Je sais bien que partout là-bas on se dit « Quand ça arrive chez eux ils font chier tout le monde, et quand c’est chez nous ils s’en tapent ». Mais ça ne me console pas de l’universelle dégueulasserie.
      Content pour toi si tu as pu boire du « fauté » en terrasse à Téhéran. Tant mieux si tu a pu dealer des chats à neuf queues. À Qom, c’est le pompon, ça m’a fait marrer.
      Prolonge tes vacances. Ici on ressort les drapeaux. Sinon y a le fils indigne de Devereux qui dit des trucs :
      http://www.franceculture.fr/player/reecouter?play=5114953
      http://www.franceculture.fr/player/reecouter?play=5115401
      http://www.franceculture.fr/player/reecouter?play=5115643
      http://www.franceculture.fr/player/reecouter?play=5115653
      http://www.franceculture.fr/player/reecouter?play=5115677

    2. Avatar de Guy Leboutte
      Guy Leboutte

      Rosebud, ce que tu m’adresses n’est pas inintéressant, mais je ne vois pas à quoi de quand tu réponds… L’électricité éthiopienne crée-t-elle des décalages plus qu’horaires?
      🙂

  26. Avatar de Dominique Gagnot
    Dominique Gagnot

    Nous n’avons d’autre choix que de mettre l’intelligence au dessus de tout le reste.

  27. Avatar de vigneron
    vigneron

    On est ben obligé de penser au mot du poète allemand Theodor Däubler :

    l’ennemi est la figure de notre propre question.

    et donc Carl Scmitt qui reprend ce mot en goinfre éhonté.

    1. Avatar de Gudule
      Gudule

      « l’ennemi est la figure de notre propre question . »

      L’ennemi est la figure de notre propre ombre.

  28. Avatar de James Bernard
    James Bernard

    Quelques réflexions complémentaires autour de la vidéo du jour de Paul J de ce vendredi 27 : vision d’anthropologue martien et pas martien, satan, ce qui nous divise, ce qui empêche les humains d’être humains (les obstacles…)
    Je lirai ce week end La violence nue, par Dominique Temple.
    ……….
    L’adversaire c’est ce qui barre la voie, ce qui fait obstacle. C’est bien le sens précis du mot hébreu chatan dont dérive notre Satan. Ce qui divise et sépare (c’est le sens du grec dia-bolon) l’homme de son vrai destin.
    Le danger est de rester bloqué parce que le mur en travers du chemin est trop haut et qu’on n’a pas le courage de l’escalader ou de le contourner.
    Il faut en arriver à comprendre que l’adversaire est en soi, est soi et personne ni quoi que ce soit d’autre.
    ……….
    Remonter aux origines de chaque valeur, voir pourquoi et comment elle est née, scruter les intérêts qu’elle sert, décrypter les causes de sa survie et de sa prolifération et répondre à la question : pourquoi telle valeur a-t-elle réussi et telle autre pas ?
    Nietzche vit au temps de Darwin, il est darwinien. Toute sa pensée en est imprégnée : lutte des espèces pour la vie, survie du plus apte, du plus habile, du plus intelligent, du plus fort, adaptation au milieu dans le seul but de proliférer et conquérir l’espace dans le temps, transmission des caractères les meilleurs etc.
    Mais Nietzsche va plus loin que Darwin et applique les concepts du Darwinisme aux idées autant qu’aux espèces.

    « Et s’il y avait chez l’homme bon aussi un symptôme de régression qui permettrait au présent de vivre en quelque sorte aux dépens de l’avenir ? »
    Comprendre : « l’homme bon soulage le présent avec des ressources qui sont pourtant nécessaires à construire l’avenir. A quoi sert d’alourdir la tare du futur à grands coups d’égalitarisme, de solidarisme… »
    « Bien sûr il y a derrière le raisonnement de Nietzsche de bonnes doses d’eugénisme et de malthusianisme. Mais ces questions, qu’on le veuille ou pas, qu’on les aime ou non, sont au coeur de la problématique de notre époque à nous.

    Tous les calculs convergent : notre Terre ne peut durablement porter qu’entre un milliard et un milliards et demi, difficilement deux milliards d’êtres humains. Nous sommes déjà sept milliards, pour atteindre neuf à dix milliards vers 2050 (c’est à dire demain).
    Nous ne pouvons survivre qu’en épuisant à grande vitesse tous les réservoirs des ressources de la terre en moins de 150 ans.
    Encore une fois, Nietzsche avait vu juste et ses embarrassantes questions sont plus que pertinentes.
    Extrait de : Eloge des esprits libres. De Lao-Tseu à Nietzsche. Marc Halévy.
    http://www.neadigital.com/noosphere/#halevy

    Raréfaction des ressources naturelles…
    « Celui qui croit qu’une croissance exponentielle peut continuer indéfiniment dans un monde fini est soit un fou soit un économiste ». Kenneth Boulding.
    Mais alors que faire ?
    construire un Monde vivable et viable pour les générations futures…Mais les hommes ne comprennent la crise que dans la douleur….Ce saut de conscience est pourtant vital…
    La prolifération de cette indispensable prise de conscience ne peut passer que comme cela :
    CHACUN PEUT ET DOIT DEVENIR UN CENTRE DE CONSCIENCE ! L’humanité pourra alors durer mille siècles…
    Synthèse ici :
    http://www.noocafe.com/c-noo/crise.htm#thermodynamique

    1. Avatar de Dominique Gagnot
      Dominique Gagnot

      James, vous considérez le Système actuel, basé sur la propriété privée des Ressources, comme indépassable.

      Alors qu’il serait facile (mais long et fastidieux) de démontrer que l’on pourrait gagner de l’ordre d’un facteur 10 sur notre empreinte écologique, en gérant les Ressources primaires de manière collective et intelligente.

      A chaque fois que je dis ça, vous répondez « ah ben non, c’est pÔ possible, car nos hommes politiques sont irresponsables »

      Oui, certes dans ce contexte c’est pas possible. pffftt…

      Le problème est donc d’imaginer un système de gestion démocratique, compétent, et incorruptible, des Ressources primaires! Au moins à l’échelle des pays qui le souhaitent dans un premier temps, pas besoin d’attendre…

      Et ça, personne n’y a encore JAMAIS réfléchi, (ce n’est évidement pas dans l’intérêt de la minorité qui a toujours eu le pouvoir, de lancer une étude là dessus !) alors qu’il suffit de se pencher sur la question pour entrevoir des solutions…

      Avec une telle gestion des Ressources, la Terre pourrait allègrement supporter 10 milliards d’individus.
      Le rayonnement solaire arrive partout!

      1. Avatar de adoque
        adoque

         » Le rayonnement solaire arrive partout! »

        Oui, mais…
        il y a des crânes trop brillants qui réfléchissent de trop…
        et aucun rayonnement ne pénètre, aucune photosynthèse à espérer.

    2. Avatar de Dominique Gagnot
      Dominique Gagnot

      Ceci dit, les calculs que vous proposez partent tous d’une hypothèse biaisée, à savoir que l’anarchie économique du capitalisme, est indépassable. C’est idiot.

  29. Avatar de vigneron
    vigneron

    L’exclusion et le terrorisme cesseront. La non-violence l’emportera sur la violence, la paix universelle sur l’implosion planétaire.

    Un monde a-religieux et a-politique, un monde de robots. Youpi.

  30. Avatar de schizosophie
    schizosophie

    Rocard « misère du monde »
    « Mais depuis bientôt quinze années, les mesures prises pour arrêter les flux migratoires ont profondément modifié cette situation.

    Aujourd’hui je le dis clairement la France n’est plus, ne peut plus être, une terre d’immigration. Je l’ai déjà dit et je le réaffirme :  » nous ne pouvons accueillir toute la misère du monde « .

    Le temps de l’accueil de main-d’oeuvre étrangère relevant de solutions plus ou moins temporaires est donc désormais révolu. »
    http://discours.vie-publique.fr/notices/903116300.html

    Cresson « charter »
    http://www.ina.fr/video/I09082515

    1. Avatar de Pierre-Yves Dambrine

      à lire aussi ou relire les analyses de Jacques Rancière, notamment Aux bords du politique, où il déconstruit la rhétorique des politiques stigmatisant l’immigré pratiquée aussi bien par la droite que par la gauche. C’est d’une logique implacable.
      Giscard, Rocard, Chirac, les plus hautes éminences de la République l’ont pratiquée, puis d’autres ont suivi …

      1. Avatar de schizosophie
        schizosophie

        Ouais, soyons clair : merci les bronzés pour la plus-value, maintenant rentrez chez vous. Rhô lala ! En plus ils ont fait des mômes. Pfff !
        Puis, tout de même, c’est vrai qu’ils ne coûtent pas si cher, si on en prenait d’autres ? Ok, mais pas pour les usines, on les a vendu en Chine.
        Et peu à peu il s’avéra qu’un monde où seules les marchandises et les usines circuleraient et où les humains resteraient chez eux, même là où des guerres s’entretiennent juste autour des minerais, c’est pas possible. Merde alors, ça vit l’humanité ! Ça veut vivre ! On n’avait pas prévu ça. Oups, boulette, pas lol.

        « de mauvaise foi » qu’il disait, Jorion, pour cette phrase qui marquera Rocard dans l’histoire à juste titre. De gros malins au PSU, de vrais amis du prolétariat.

        Pas besoin de Rancière ou de déconstruction pour piger ça. Ça a même de la mémoire, l’humanité.

      2. Avatar de Pierre-Yves Dambrine

        schizosophie

        « pas besoin de Rancière ou de décontruction pour piger ça »

        Oui mais tout le monde n’est pas schizosophie 😉

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Contact

Contactez Paul Jorion

Commentaires récents

Articles récents

Catégories

Archives

Tags

Allemagne Aristote bancor BCE Bourse Brexit capitalisme centrale nucléaire de Fukushima ChatGPT Chine Confinement Coronavirus Covid-19 dette dette publique Donald Trump Emmanuel Macron Espagne Etats-Unis Europe extinction du genre humain FMI France Grèce intelligence artificielle interdiction des paris sur les fluctuations de prix Italie Japon John Maynard Keynes Karl Marx pandémie Portugal psychanalyse robotisation Royaume-Uni Russie réchauffement climatique Réfugiés spéculation Thomas Piketty Ukraine ultralibéralisme Vladimir Poutine zone euro « Le dernier qui s'en va éteint la lumière »

Meta